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CHAPITRE II.

En 1848, M. Puiseux, parti du même point, fit l’ascension du Pelvoux, mais son guide de la Vallouise s’arrêta à peu de distance du sommet et laissa l’illustre astronome achever seul sa courageuse entreprise[1].

Au milieu du mois d’août 1860, MM. Bonney, Hawkshaw et Mathews, avec le guide Michel Croz, de Chamonix, tentèrent l’ascension du Pelvoux, en suivant aussi la même direction. Ils passèrent plusieurs jours et plusieurs nuits sur la montagne ; mais le temps se gâta et ils ne purent atteindre qu’une altitude de 3178 mètres.

M. Jean Reynaud, dont j’ai parlé dans le chapitre précédent, accompagnait M. Mathews et ses compagnons. Dans son opinion, cette tentative avait été faite à une époque trop avancée de la saison. « Le temps, me dit-il, n’étant d’ordinaire favorable pour l’ascension des hautes montagnes que pendant les derniers jours de juillet et les premiers jours d’août[2], il vaut mieux remettre notre tentative à cette époque de l’année prochaine. » Sa proposition me convenait assez, et ses manières cordiales et modestes la rendaient irrésistible, bien qu’il ne dût y avoir qu’une faible chance de réussir dans une expédition où M. Mathews et ses amis avaient échoué.

Au commencement de juillet 1861, j’envoyai du Havre à Reynaud des couvertures (taxées comme étant d’une fabrication prohibée), une corde et d’autres objets utiles à notre ascension, puis je quittai l’Angleterre pour aller faire mon tour de France ; mais quatre semaines plus tard, à Nîmes, je me trouvai si complétement anéanti par la chaleur (le thermo-

  1. M. Puiseux prit pour guide un homme nommé Pierre Bornéoud, de Claux dans la Vallouise, qui avait accompagné le capitaine Durand en 1828. En 1861, l’expédition de M. Puiseux était tout à fait oubliée dans la Vallouise. C’est à M. Puiseux que je suis redevable de la plupart des détails que je puis donner ici et ailleurs sur le Pelvoux.
  2. C’est une opinion généralement répandue dans le Dauphiné. Il y a ordinairement moins de neige sur les montagnes à cette époque de l’année que dans aucune autre saison. Or les Dauphinois, ayant une crainte presque enfantine de la neige ou des glaciers, sont disposés à croire qu’elle est plus favorable aux excursions.