Page:Wilde - Le Crime de Lord Arthur Savile, trad. Savine, 1905.djvu/160

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mettons dans la vieille mare aux canards près de la maison du fermier et, sitôt que la lune paraît, nous commençons. Le concert est si ravissant que tout le monde vient nous écouter. Pas plus tard qu’hier j’ai entendu la femme du fermier dire à sa mère qu’elle n’avait pu dormir une seconde de la nuit à cause de nous. Il est bien doux de se voir si populaire.

— Hum ! Hum ! fit la fusée.

Elle était très ennuyée de ne pouvoir souffler mot.

— Une voix délicieuse certes ! continua la grenouille. J’espère que vous viendrez à la mare aux canards. Il faut que je donne un coup d’œil à mes filles. J’ai six filles superbes et je suis si inquiète que le brochet ne les rencontre. C’est un vrai monstre, et il n’aurait pas le moindre scrupule à en faire son déjeuner. Donc adieu ! Je goûte beaucoup votre conversation, je vous assure.

— Vous appelez cela une conversation, fit la fusée. Vous avez jasé tout le temps. Ce n’est pas une conversation.