Page:Wilde - Le Crime de Lord Arthur Savile, trad. Savine, 1905.djvu/45

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— Assassin ! Assassin ! répéta-t-il comme si la réitération de l’accusation pouvait obscurcir le sens du mot.

Le son de sa propre voix le fit frissonner et, pourtant, il souhaitait presque que l’écho l’entendît et réveillât de ses rêves la cité endormie. Il sentait un désir d’arrêter le passant de hasard et de tout lui dire.

Puis, il erra autour d’Oxford-street dans des ruelles étroites et honteuses.

Deux femmes aux faces peintes le raillèrent, comme il passait.

D’une cour sombre arriva à lui un bruit de jurons et de gifles, suivi de cris perçants et, pressés pêle-mêle sous une porte humide et glaciale, il vit les dos voûtés et les corps usés de la pauvreté et de la vieillesse.

Une étrange pitié s’empara de lui.

Ces enfants du péché et de la misère étaient-ils prédestinés à leur sort, comme lui au sien ? N’étaient-ils comme lui que les marionnettes d’un guignol monstrueux ?

Et, pourtant, ce ne fut pas le mystère, mais la comédie de la souffrance qui le frappa, son