Page:Wilde - Le Portrait de monsieur W. H., trad. Savine, 1906.djvu/331

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y mettaient presque autant de passion, ou plutôt, autant de passion que les bons Papes en montraient dans leur haine de la Pensée. L’humanité doit beaucoup à la scélératesse de la Papauté ; la bonté de la Papauté doit un compte terrible à l’humanité.

Néanmoins, bien que la Papauté ait gardé sa rhétorique tonitruante et perdu la baguette conductrice de sa foudre, il vaut mieux que l’artiste ne vive point avec les Papes.

C’est un pape qui dit de Cellini en plein conclave de cardinaux que les lois faites pour tout le monde, l’autorité faite pour tout le monde, n’étaient point faites pour des hommes tels que lui. Mais ce fut un pape qui jeta Cellini en prison, l’y tint jusqu’à ce qu’il devînt malade de rage, si bien qu’il finit par se créer à lui-même des visions imaginaires, qu’il vit le soleil entrer tout doré dans sa chambre, et en devint si amoureux, qu’il voulut s’échapper, qu’il rampa de tour en tour, que l’air de l’aube lui donna le vertige, qu’il tomba, s’estropia, fut couvert de feuilles de vigne par un vigneron, et trans-