Page:Wilde - Poèmes, trad. Savine, 1907.djvu/204

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les arbres, joue fort bien le Palestrina. On dirait

 que les doigts du puissant maestro sont posés sur
 les touches de l'orgue de Maria, et qu'ils y jouent,
 quand, aux premières heures d'un matin tout bleu
 de Pâques, le Pape, porté sur un brancard tout rouge
 comme le sang ou le crime, va
 de sa sombre demeure sur le balcon, au-dessus
 des portes de bronze, et, dominant la foule serrée
 sur la place, ou les fontaines elles-mêmes semblent
 dans leur extase jeter en l'air leurs lances d'argent,
 étend ses faibles mains vers l'Orient, vers l'Occident,
 envoie une vaine paix aux pays qui ne connaissent
 nulle paix, le repos aux nations qui ne
 connaissent pas le repos.
 Et ce rayonnement orangé qui s'attarde et semble
 vouloir taquiner la lune, n'est-il pas plus beau que
 les pompes les plus brillantes de Rome! Chose
 étrange! il y a un an, je me mis à genoux devant
 je ne sais quel cardinal en robe rouge, qui portait
 l'hostie à travers l'Esquilin!... et maintenant, ces
 vulgaires pavots parmi le blé me semblent deux
 fois aussi beaux.
 Ces champs de pois, d'un vert bleu, que voici là-bas,
 frissonnants de la dernière averse, émettent en
 cette fraîche soirée des parfums plus doux que ceux
 des encensoirs ornés de gemmes flamboyantes que
 balancent les jeunes diacres, lorsque le vieux prêtre