Page:Wolf - Les Hypothèses cosmogoniques, suivies de la Théorie du ciel de Kant, 1886.djvu/127

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PRÉFACE.


J’ai choisi un sujet qui peut paraître, à première vue, de nature à rebuter bon nombre de lecteurs par ses difficultés propres, et aussi parce qu’il semble froisser leurs sentiments religieux. Découvrir les lois systématiques qui relient les mondes créés dans l’étendue de l’espace infini, et déduire de l’état primitif de la nature, par les seules lois de la Mécanique, la formation des corps célestes et l’origine de leurs mouvements : une telle entreprise semble dépasser de beaucoup les forces de la raison humaine.

D’autre part, la Religion menace de ses foudres l’audacieux qui oserait attribuer à l’action de la nature seule une œuvre où elle voit avec raison l’intervention immédiate de l’Être suprême, et elle craint de rencontrer dans la curiosité indiscrète d’une pareille tentative une apologie de l’athéisme.

Je vois clairement la force de ces objections et pourtant je ne me laisse pas décourager. Je sens toute la puissance des obstacles qui se dressent devant moi, et je ne me laisse pas abattre. Sur la foi d’une simple conjecture, j’ai entrepris un dangereux voyage, et déjà j’aperçois les avancées de terres nouvelles ! Ceux qui auront le courage de poursuivre cette entreprise les atteindront et auront la gloire d’y attacher leur nom.

Ce n’est qu’après avoir mis ma conscience en sûreté au point de vue religieux que j’ai dressé le plan de mon entreprise. Mon zèle a redoublé, quand j’ai vu, à chaque pas en avant, les nuages, qui semblaient cacher des monstruosités derrière leurs ténèbres, se dissiper et laisser apparaître la majesté de l’Être suprême, brillante d’une plus vive lumière. À présent que je sais que mon but n’a rien de répréhensible, je vais exposer en toute sincérité les objections que des esprits bien intentionnés, mais faibles, peuvent faire à mon