Page:Wolf - Les Hypothèses cosmogoniques, suivies de la Théorie du ciel de Kant, 1886.djvu/160

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que l’on puisse apercevoir dans le ciel. L’auteur de l’Astrothéologie[1] se figurait que c’étaient des trous dans le firmament, à travers lesquels il croyait voir le ciel de feu ou l’Empyrée. Un philosophe dont les vues sont plus éclairées, M. de Maupertuis, les tient, en raison de leur figure et de leur diamètre apparent sensible, pour des corps célestes d’une grandeur énorme, fortement aplatis par suite d’une rotation rapide et qui, vus obliquement, offrent la forme ovale.

On reconnaîtra aisément que cette dernière explication ne peut être acceptée. Puisque ces nébuleuses sont certainement au moins aussi éloignées de nous que les étoiles fixes, il ne suffirait pas de leur supposer une grandeur prodigieuse, qui surpasserait des milliers de fois celle des plus grosses étoiles : il faudrait ensuite expliquer par quel paradoxe ces corps, qui sont des soleils lumineux par eux-mêmes, nous paraissent, malgré leurs étonnantes dimensions, comme les plus faibles et les plus pâles de tous les astres.

Il est bien plus naturel et raisonnable de supposer qu’une nébuleuse n’est pas un unique et énorme soleil, mais un système de nombreux soleils, rassemblés en raison de leur distance dans un espace si étroit, que leur lumière, qui serait imperceptible pour chacun d’eux isolément, parvient, grâce à leur innombrable quantité, à produire une blancheur pâle et uniforme. L’analogie avec le système d’étoiles dont nous faisons partie, leur forme qui est exactement celle qu’ils doivent avoir dans notre théorie, la faiblesse de leur lumière qui dénote un éloignement infini, tout concorde admirablement pour nous faire prendre ces taches elliptiques pour des mondes ordonnés comme le nôtre, en un mot, pour des Voies lactées semblables à celle dont nous avons expliqué la constitution. Et si des hypothèses, où l’analogie et l’observation concourent merveilleusement à se prêter un mutuel appui, ont exactement la même valeur que des démonstrations formelles, on devra tenir pour démontrée l’existence de pareils systèmes.

L’attention des observateurs du ciel a donc maintenant de sérieux motifs pour s’occuper de ce sujet. Les étoiles fixes, nous

  1. Astro-Theologie or a Demonstration of the being and attributes of God from a survey of the Heavens, by W. Derham ; Londres, 1714.