Page:Zola - Les Trois Villes - Paris, 1898.djvu/53

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c’est d’aller voir tout de suite monsieur Fonsègue, notre administrateur. Dans un cas pressant, il peut seul agir, car il sait que ces dames ont en lui une confiance sans bornes et qu’elles approuvent tout ce qu’il fait.

— Vous trouverez Fonsègue à la Chambre, ajouta Dutheil en souriant ; seulement, la séance va être chaude, je doute que vous puissiez l’entretenir à l’aise.

Pierre, dont le cœur s’était serré davantage, n’insista pas, tout de suite résolu à voir Fonsègue, à obtenir quand même avant le soir l’admission du misérable, dont l’atroce image le hantait. Et il resta là quelques minutes encore, retenu par Gérard, qui, obligeamment, lui indiquait le moyen de convaincre le député, en alléguant le mauvais effet d’une pareille histoire, si elle s’ébruitait dans les journaux révolutionnaires. D’ailleurs, les convives commençaient à partir. Le général, avant de se retirer, vint demander à son neveu s’il le verrait l’après-midi, chez sa mère, madame de Quinsac, dont c’était le jour : question à laquelle le jeune homme se contenta de répondre d’un geste évasif, lorsqu’il s’aperçut qu’Ève et Camille le regardaient. Puis, ce fut le tour d’Amadieu, qui se sauva, en disant qu’une grave affaire le réclamait au Palais. Et bientôt Dutheil le suivit, pour se rendre à la Chambre.

— De quatre à cinq chez Silviane, n’est-ce pas ? lui dit le baron en le reconduisant. Venez m’y raconter ce qui se sera passé à la Chambre, à la suite de cet article odieux de Sanier. Il faut pourtant que je sache… Moi, j’irai aux Beaux-Arts, pour arranger l’affaire de la Comédie ; et puis, j’ai des courses, des entrepreneurs à voir, une grosse affaire de publicité à régler.

— Entendu, de quatre à cinq, chez Silviane, comme d’habitude, dit le député, qui partit, repris d’un vague malaise, inquiet de la façon dont tournerait cette vilaine histoire des Chemins de fer africains.

Et tous déjà avaient oublié Laveuve, le misérable qui