Page:Zola - Vérité.djvu/200

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— Eh bien ! puisque nous avons près d’une heure et demie encore à attendre notre train, nous devrions, je crois, retourner immédiatement chez grand-mère, afin de lui faire connaître ta décision… Je désire que tu te conduises franchement vis-à-vis d’elle, sans avoir l’air de te cacher.

Elle le regardait toujours, il ne lut en elle, à cette minute, que beaucoup de loyauté, mêlée à un peu de tristesse.

— Tu as raison, ma chérie, allons tout de suite chez grand-mère.

Et ils se remirent doucement en marche, vers la place des Capucins. Louise, que sa mère tenait par la main, les attardait, de ses petites jambes. Mais cette fin d’une belle journée d’avril était délicieuse, et ils firent le court trajet, sans dire un mot, dans une sorte de rêverie grave. La place venait de retomber à sa solitude, la maison de ces dames y semblait dormir de son habituel sommeil. Ils trouvèrent Mme Duparque assise dans l’étroit salon du rez-de-chaussée, la jambe allongée sur une chaise, tricotant des bas pour une œuvre religieuse ; tandis que Mme Berthereau, près de la fenêtre, travaillait, elle aussi, à un ouvrage de broderie.

Très étonnée de ce retour de Geneviève, et surtout de la présence de Marc, la grand-mère avait lâché son tricot, attendant, sans même les faire asseoir. Et, lorsque Marc l’eut mise au courant, l’offre qui lui était faite, sa résolution bien arrêtée d’accepter le poste d’instituteur à Maillebois, enfin son désir de la prévenir, par déférence, elle eut un sursaut, elle haussa d’abord les épaules.

— Mais, mon garçon, c’est fou ! Vous ne garderez pas la place un mois.

— Pourquoi donc ?

— Pourquoi ? mais parce que vous n’êtes pas l’instituteur qu’il nous faut. Vous connaissez bien le bon esprit