Page:Zola - Vérité.djvu/201

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du pays, ou la religion remporte de si beaux triomphes. Et vous auriez une situation impossible, avec vos idées révolutionnaires, vous seriez bientôt en guerre avec toute la population.

Eh bien ! je serais en guerre. Il faut malheureusement se battre pour être victorieux un jour.

Alors, elle commença à se fâcher.

— Ne dites donc pas de sottises ! Toujours, votre orgueil, votre révolte contre Dieu ! Vous n’êtes qu’un grain de sable, mon pauvre garçon, vous me faites pitié, quand vous vous croyez assez fort pour vaincre, dans une lutte où les hommes et le ciel vous écraseront.

— Ce n’est pas moi qui suis fort, c’est la raison, et c’est la vérité.

— Oui, je sais… Et puis, peu importe. Vous m’entendez, je ne veux pas que vous veniez ici comme instituteur, parce que je tiens à ma tranquillité, à mon honorabilité, parce que ce serait pour moi trop de douleur et trop de honte, de voir, à ma porte, notre Geneviève, la femme d’un homme sans Dieu et sans patrie, qui ferait le scandale de toutes les âmes pieuses… Je vous dis que c’est fou. Vous allez refuser.

Désespérée de cette brusque querelle, Mme  Berthereau baissait le nez sur sa broderie, pour ne pas avoir à intervenir. Toute droite, Geneviève était très pâle, tenant par la main la petite Louise, qui, prise de peur, se cachait le visage dans sa jupe. Et, bien résolu à rester calme, Marc répondait avec douceur, sans élever la voix.

— Non, dit-il, je ne puis refuser. Ma décision est prise, et j’ai tenu à vous la communiquer, simplement.

Du coup, Mme  Duparque perdit toute mesure, dans l’immobilité où son accès de goutte la maintenait. Personne ne lui résistait, elle s’exaspérait de se briser à cette volonté tranquille. Et ce qu’elle n’aurait pas voulu dire,