Page:Zola - Vérité.djvu/241

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Et cet enfant, ce petit Sébastien qu’elle adorait, à qui elle aurait tout sacrifié, dut s’évoquer, lui rendre un peu de sa force.

— Oh ! monsieur Froment, vous êtes cruel, vous me rendez bien malheureuse… Mais, que voulez-vous ? puisque c’est fait, je ne puis pas le retrouver parmi les cendres, ce papier.

— Alors, madame Alexandre, vous l’avez brûlé, vous en êtes sûre ?

— Certainement, puisque je vous l’ai dit… Je l’ai brûlé, dans la crainte que mon petit homme ne fût compromis, et qu’il n’en souffrît ensuite toute son existence.

Elle avait prononcé cette dernière phrase d’une voix ardente, avec une sorte de résolution farouche. Il fut convaincu, il eut un geste de désespoir, c’était le triomphe de la vérité qui reculait, qui croulait une fois encore. Sans une parole, il accompagne jusqu’à la porte Mme Alexandre, de nouveau très gênée pour sortir, ne sachant comment prendre congé des deux dames présentes. Elle balbutia des excuses, elle s’en alla en saluant. Et, quand elle fut partie, un grand silence régna dans la pièce.

Ni Geneviève, ni Mme Duparque n’étaient intervenues, l’une et l’autre immobiles, l’air glacé. Et elles ne disaient toujours rien, pendant que Marc marchait lentement, la tête basse, tout à son chagrin. Enfin, Mme Duparque se leva, pour s’en aller à son tour. Puis, sur le seuil :

— C’est une folle, cette femme… Vous savez, son histoire de papier détruit, ça m’a l’air d’un conte à dormir debout, à laquelle personne ne croirait. Et vous auriez tort de la raconter, ça n’arrangerait pas vos affaires… Bonsoir, soyez sage.

Marc ne répondit même pas. Il continuait de marcher longuement, d’un pas appesanti.