Page:Zola - Vérité.djvu/291

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menait campagne. Puisque l’Église, en agissant auprès de ses chefs, n’avait du pu le ruiner et l’abattre, elle devait songer maintenant à l’atteindre dans son bonheur domestique, à le frapper au cœur. C’était là une besogne essentiellement jésuitique, l’éternelle manœuvre du moine confesseur, directeur de consciences, qui reprend sournoisement l’œuvre de la domination catholique, en bon psychologue mondain, rompu aux passions, leur faisant leur part immense, les utilisant pour le triomphe du Christ sur la bête humaine, caressée et gorgée, étranglée dans son assouvissement. Se glisser au sein d’un ménage, se mettre entre les deux époux, et reprendre la femme par son éducation, ses traditions pieuses, et désespérer, détruire ainsi l’homme dont on veut se débarrasser : il n’est pas de tactique plus indiquée, plus commode, d’usage plus courant dans le monde noir et chuchotant des confessionnaux. Tout de suite, derrière la soutane de l’abbé Quandieu, derrière les robes du père Théodose et du frère Fulgence, Marc avait vu passer le profil aimable et fuyant du père Crabot.

Depuis le premier jour, l’Église a pris et a gardé la femme, comme l’aide la plus puissante de son œuvre de propagande et d’asservissement. Mais, dès l’abord, un obstacle se dressait. La femme n’était-elle pas la honte et la perdition, une créature de dégoût, de péché et de terreur, devant laquelle tremblent les saints ? En elle, l’immonde nature a mis son piège, elle est la source charnelle de la vie, elle est la vie elle-même, dont le catholicisme enseigne le mépris. Aussi l’Église a-t-elle un instant refusé une âme à la bête de fornication, que les hommes purs fuyaient au désert, dans la certitude de succomber, si le vent du soir leur apportait la seule odeur de sa chevelure. Toute beauté et toute volupté étant mises hors de ce monde, elle n’était plus, sur la terre, que la beauté et la volupté condamnées, tenues