Page:Zola - Vérité.djvu/297

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aux petits de ce monde. Cela lui créait un devoir, celui de donner l’exemple, de ne pas permettre à son foyer ce qu’il condamnait au foyer des autres. Ne lui reprocherait-on pas, à lui l’instituteur laïque, si nettement hostile à toute ingérence du prêtre dans l’instruction de l’enfant, de laisser sa femme se rendre assidûment chaque dimanche à la messe et y conduire leur petite Louise, dont les sept ans précoces bégayaient déjà de longues prières ? Et, cependant, il continuait à ne pas se trouver le droit d’empêcher ces choses, tellement il avait en lui ce respect inné de la liberté de conscience, dont il réclamait la pleine jouissance pour lui-même. S’il sentait donc l’impérieuse nécessité de défendre son bonheur, il ne voyait d’autres armes possibles, surtout à son foyer domestique, que la discussion, la persuasion, la leçon quotidienne de la vie, dans ce qu’elle a de sain et de logique. Et ce qu’il aurait dû faire, dès le premier jour, afin de conquérir sa Geneviève, il voulut désormais le tenter, et non seulement pour la ramener à la saine humaine, mais encore pour empêcher leur chère Louise de la suivre dans la mortelle erreur catholique.

Toutefois, le cas de Louise était moins grave. Marc se trouvait forcé d’attendre, malgré la conviction où il était que, chez l’enfant, les impressions premières sont les plus vives et les plus tenaces. Il avait dû laisser entrer sa fillette à l’école voisine, chez Mlle Rouzaire, où, déjà, celle-ci la gorgeait d’histoire sainte. Il y avait aussi la prière avant et après la classe, les offices du dimanche, les bénédictions et les processions. L’institutrice S’était bien inclinée, avec un mince sourire, lorsqu’il avait exigé d’elle la promesse que sa fille ne serait astreinte à suivre aucun exercice religieux. Mais l’enfant était si jeune encore, il semblait ridicule de la préserver ainsi, et il n’était point toujours là pour s’assurer si elle disait ou