Page:Zola - Vérité.djvu/346

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raisons qu’on va opposer et dont on s’efforcera d’embrouiller l’affaire.

Marc le regarda avec étonnement.

— Comment, retrouver ce coin ? Ce serait un bien grand hasard. Nous avions même admis qu’il avait pu être arraché par les dents de la victime.

— Oh ! cela n’est pas croyable, répondit Delbos. Et puis, on aurait ramassé le fragment par terre. Si l’on n’a rien ramassé, c’est que le coin a été déchiré volontairement. D’ailleurs, ici encore, le père Philibin intervient, puisque votre adjoint Mignot se rappelle que le modèle lui avait d’abord paru intact et qu’il a eu une sensation de surprise, en le revoyant incomplet aux mains du père, après l’avoir perdu de vue un instant. Il n’y a aucun doute, c’est le père Philibin qui l’a fait disparaître. Lui, toujours lui, aux moments décisifs, lorsqu’il s’agit de sauver le coupable !… Et voilà pourquoi je voudrais ravoir la preuve totale, le petit fragment qu’il a emporté.

À son tour, David se récria de surprise.

— Vous croyez qu’il l’a gardé ?

— Mais certainement, je le crois. En tout cas, il a pu le garder. Ce Philibin est un silencieux, un homme d’une adresse profonde sous son apparente lourdeur. Il a dû garder le coin comme une arme de défense personnelle, un moyen de tenir en respect ses complices. Je finis par le soupçonner d’avoir été le grand artisan de l’iniquité, dans un but qui reste obscur, peut-être fidélité à son chef, le père Crabot, peut-être cadavre commun, cette affaire si louche de la donation de Valmarie, peut-être même simple foi militante travaillant au salut de l’Église. Enfin, c’est un terrible homme, l’homme qui veut et qui agit, à côté de ce frère Fulgence, vide et bruyant, la vanité imbécile !

Marc était tombé dans une rêverie.

— Le père Philibin, le père Philibin… Oui, je me suis