Page:Zola - Vérité.djvu/447

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les volontés d’avenir, tous les esprits de raison et de liberté, venus des quatre points de l’horizon, réunis au nom de la vérité et de la justice ; et il devait suffire d’un effort de ceux-ci pour anéantir ceux-là, sous les débris du vieil échafaudage vermoulu, craquant de partout. L’affaire s’élargissait, n’était plus seulement le cas d’un pauvre diable d’innocent, condamné à tort. Elle avait fini par incarner en lui le martyre même de l’humanité, qu’il fallait tirer de sa geôle séculaire. Et Simon délivré, c’était le peuple de France affranchi davantage, en marche pour plus de dignité et de bonheur.

Brusquement, Marc se tut, en voyant Achille et Philippe, qui le regardaient ahuris, de leurs faibles yeux clignotants, dans leur face blême.

— Oh ! monsieur Froment, que nous racontez-vous là ? Si vous mettez tant de choses dans l’affaire nous n’allons pas vous suivre, c’est bien sûr. Nous ne savons pas, nous ne pouvons pas.

Ricanant, s’agitant, Savin avait écouté, sans vouloir interrompre. Il finit par éclater ; et, se tournant vers l’instituteur :

— Tout ça, c’est des bêtises, permettez-moi de le dire monsieur Froment. L’innocence de Simon, en voilà encore une chose dont je doute ! Moi, je ne m’en cache pas, j’en suis resté à mon idée d’autrefois, et je ne veux rien lire, on me tuerait plutôt que de me faire avaler une ligne du fatras qui se publie. Et, Dieu merci ! je ne parle pas de la sorte par amour pour les curés ! Ah ! les sales bêtes, la peste peut bien les étouffer tous !

Seulement, quand il y a une religion, il y a une religion. C’est comme pour l’armée, elle est le sang de la France. Je suis républicain, je suis franc-maçon, j’ose même dire que je suis socialiste, dans le bon sens du mot ; mais avant tout, je suis français, je ne veux pas qu’on touche à ce qui est la grandeur de ma mairie. Alors, Simon est