Page:Zola - Vérité.djvu/560

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la secouaient toute. Lorsque la grand-mère montait, s’entêtant à rester là des heures, la sermonnant, lui démontrant la nécessité d’apaiser la colère de Dieu, des crises plus violentes se déclaraient, des convulsions et des cris. Et Louise, désireuse d’éviter à sa mère cette aggravation de tourment, dans le débat suprême dont elle était déchirée, finit par fermer la porte et par se tenir là, en sentinelle, afin d’interdire l’entrée de la chambre à tout le monde.

Le quatrième jour, le dénouement se produisit. Seule, Pélagie réussissait à forcer la porte, pour certains besoins du service. Âgée de soixante ans, elle s’était amaigrie, comme desséchée, avec sa face maussade, au grand nez et aux lèvres minces. Devenue insupportable, toujours à mâchonner des paroles aigres, elle tyrannisait sa terrible maîtresse elle-même, elle jetait dehors les ouvrières que celle-ci se permettait de prendre pour l’aider. D’ailleurs, Mme  Duparque la gardait comme un vieil instrument à elle, l’ayant toujours eue sous la main, ne s’imaginant pas pouvoir vivre, si elle n’avait plus cette créature, cette serve qu’elle utilisait ainsi qu’un prolongement de sa domination sur tout ce qui l’entourait. Elle en faisait son espionne, l’exécutrice de ses basses volontés, et elle devait en retour supporter de lui appartenir aussi, de tolérer ses méchantes humeurs, le surcroît d’ennuis et de tristesses dont elle emplissait la maison.

Le matin du quatrième jour, après le premier déjeuner, Pélagie, qui était montée desservir, accourut tout effarée dire à sa maîtresse :

— Madame sait ce qui se passe là-haut ?… Elles font leurs malles.

— La mère et la fille ?

— Oui, madame. Oh ! elles ne se cachent pas, la fille sort, va dans sa chambre, rapporte des brassées de linge… Si madame veut monter, la porte est grande ouverte.