Page:Zola - Vérité.djvu/88

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mensonge, mon enfant, il n’y a rien de si vilain au monde.

Sébastien, sans répondre, enfonça davantage sa face dans les jupes de sa mère, et éclata en gros sanglots. C’était évident, Mme  Édouard avait imposé sa volonté de bonne commerçante, qui craignait de perdre l’une ou l’autre de ses deux clientèles, si elle prenait parti. Elle devenait de roc, on n’en tirerait plus rien. Pourtant, elle daigna donner discrètement ses raisons.

— Mon Dieu ! monsieur Froment, nous ne sommes contre personne, nous autres, qui avons besoin de tout le monde, à cause de notre commerce… Seulement, il faut le dire, toutes les apparences accusent M. Simon. Ainsi ce train, qu’il doit avoir manqué, ce billet de retour qu’il aurait jeté dans la gare, cette rentrée à pied, ce voyage de six kilomètres, sans que personne l’ait vu. Puis, vous savez, Mlle  Rouzaire a parfaitement entendu du bruit, vers onze heures moins vingt lorsque lui prétend n’être rentré qu’une heure plus tard. Expliquez-moi encore comment il se fait que M. Mignot ait dû l’aller réveiller, à près de huit heures, lui qui d’habitude se lève de si grand matin… Enfin, il se justifiera peut-être, espérons-le pour lui.

Marc l’arrêta d’un geste. Elle récitait là ce qu’il venait de lire dans Le Petit Beaumontais, il en était épouvanté. D’un regard, il enveloppa les deux femmes, l’une d’une inconscience têtue, l’autre toute tremblante, pris lui-même d’un frisson, devant leur brusque mensonge, dont les conséquences pouvaient être si graves. Et il les quitta, il courut chez Simon.

Une voiture fermée stationnait à la porte, que gardaient deux agents. La consigne était sévère, pourtant Marc finit par entrer. Pendant que deux autres agents surveillaient Simon, dans la salle même de l’école, le commissaire