Traité du Ciel/Livre I

La bibliothèque libre.
Traduction par Jules Barthélemy-Saint-Hilaire.
A. Durand, 1866 (Tome cinquième, pp. 1-113).
◄   Préface Livre premier Livre II   ►



TRAITÉ DU CIEL[1].

Séparateur

LIVRE I.


CHAPITRE PREMIER.

Objet de la science de la nature ; définition de ce qu’on doit entendre par un corps ; les trois dimensions ; importance du nombre Trois, selon les Pythagoriciens ; rôle que ce nombre joue dans la composition du monde. Idée qu’on doit se faire des grandeurs ; la ligne, la surface et le solide ; idée qu’on doit se faire de l’univers et de l’ensemble des choses.

§ 1. La science de la nature consiste à peu près entièrement dans l’étude des corps et des grandeurs[2], avec leurs modifications et leurs mouvements. Elle s’occupe en outre de l’étude des principes qui constituent cette substance particulière ; car, parmi les composés et les êtres qui sont dans la nature, les uns sont des corps et des grandeurs ; les autres ont un corps et une grandeur ; et les autres enfin sont les principes de ceux qui ont cette grandeur et ce corps.

§ 2. On entend par continu[3] tout ce qui peut se diviser en parties toujours divisibles ; et le corps est ce qui est divisible en tous sens. C’est que, parmi les grandeurs[4], l’une n’est divisible qu’en un sens unique, c’est la ligne ; l’autre, l’est en deux, c’est la surface ; l’autre, l’est en trois, c’est le corps. Il n’y a pas de grandeurs[5] autres que celles-là, parce que trois est tout et que trois renferme toutes les dimensions possibles. En effet, ainsi que le disent les Pythagoriciens[6], l’univers entier et toutes les choses dont il est composé sont déterminées par ce nombre Trois[7]. À les entendre, la fin, le milieu et le commencement forment le nombre de l’univers[8], et ces trois termes représentent le nombre de la triade. Dès lors, recevant de la nature elle-même ce nombre, qui résulte en quelque sorte de ses lois, nous l’employons[9] aussi à régler les sacrifices solennels[10] que nous offrons aux Dieux. C’est encore de cette même manière[11] que nous exprimons les dénominations et les dénombrements des êtres ; car lorsqu’il n’y a que deux êtres nous les désignons en disant : Les deux ; et alors Les deux signifie l’un et l’autre ; mais dans ce cas, nous ne disons pas Tous, et nous ne commençons seulement à appliquer cette dénomination de Tous, que quand il y a trois êtres au moins. Nous ne suivons du reste cette marche, ainsi qu’on vient de le dire, que parce que c’est la nature même qui nous conduit dans ce chemin. § 3. Si donc ces trois termes[12] : Toutes les choses, l’Univers et le Parfait ne représentent pas une idée[13] différente, et s’ils se distinguent seulement entr’eux par la matière[14] et par les êtres auxquels ils s’appliquent, il s’ensuit que le corps est la seule des grandeurs[15] qui soit parfaite ; car il est le seul à être déterminé par trois[16], et c’est bien là ce qu’on entend par le Tout. Du moment que le corps peut se diviser de trois façons, il est complètement divisible, tandis que, pour le reste des grandeurs, c’est par un ou par deux seulement qu’elles se divisent. C’est en tant qu’elles participent du nombre[17] qu’elles sont susceptibles aussi de division et de continuité[18] ; et en effet, l’une n’est continue qu’en un sens ; l’autre l’est en deux[19] ; et enfin l’autre[20] l’est de toute espèce de façon. § 4. Celles des grandeurs[21] qui sont divisibles sont par cela même continues. Quant à savoir[22] si toutes les grandeurs qui sont continues sont divisibles aussi, c’est ce qu’on ne voit pas encore résulter clairement de ce que nous venons de dire ici ; mais ce qui doit être évident dès à présent, c’est qu’il n’y a pas pour le corps de passage possible[23] à un autre genre différent, comme, par exemple, on passe de la longueur à la surface, ou de la surface au corps. Le corps, s’il était dans cette condition, ne serait plus une grandeur complète ; car cette transition à un autre genre[24] ne peut nécessairement avoir lieu que par suite d’un certain défaut ; or il n’est pas possible que ce qui est complet soit défectueux, puisqu’il est tout ce qu’il doit être.

§ 5. Ainsi donc les corps qui se présentent à nous sous forme de simple partie[25] d’un tout, doivent être chacun faits ainsi selon leur définition même que nous venons d’indiquer[26] ; c’est-à-dire qu’ils ont toutes les dimensions possibles. Mais ils se limitent et se déterminent[27] par les corps voisins qu’ils touchent. Aussi voilà pourquoi, sous un certain point de vue, chaque corps est multiple[28]. Mais il faut bien que le tout, dont ces corps ne sont que de simples parties, soit complet nécessairement ; et ainsi que le mot même de Tout[29] l’exprime assez, il n’est pas possible que le tout soit de telle façon[30], et qu’en telle autre façon il ne soit pas.

CHAPITRE II.

Étude spéciale des corps qui ne sont que des parties isolées du Tout et de l’univers. Réalité évidente du mouvement ; mouvement en ligne droite ; mouvement circulaire ; mouvement en bas et en haut ; mouvement centrifuge et centripète. — Corps simples ; corps mixtes ; mouvement des corps simples ; mouvements contraires. Supériorité du mouvement circulaire sur tous les autres ; singularité de ce mouvement qui est le seul parfait, continu et éternel. Nécessité d’un corps spécial et divin auquel ce mouvement s’applique particulièrement, et conformément aux lois de la nature ; c’est le cinquième et le plus parfait des éléments.

§ 1. Nous aurons à examiner plus tard[31] la nature de l’univers et à rechercher s’il est infini en grandeur, ou s’il est fini dans toute son étendue et sa masse[32]. § 2. Mais parlons d’abord des parties essentielles et spéciales[33] qui le composent, en partant des principes suivants[34]. Tous les corps de la nature et toutes les grandeurs qu’elle comprend sont en soi susceptibles de se mouvoir dans l’espace ; et nous disons que la nature est précisément[35] pour ces grandeurs et ces corps le principe du mouvement. Tout mouvement dans l’espace, que nous appelons de translation[36], est ou en ligne droite ou circulaire, ou bien un mélange[37] de ces deux-là. Mais il n’y a que les deux premiers mouvements qui soient simples. Cela tient à ce que, parmi les grandeurs, il n’y a que celles-là seules aussi qui soient simples, la droite et la circulaire. Le mouvement circulaire[38] est celui qui a lieu autour d’un centre. Le mouvement en ligne droite est celui qui va en haut et en bas ; et j’entends par En haut celui qui s’éloigne du centre, et par En bas celui qui, au contraire, va vers le centre. § 3. Ainsi donc nécessairement, toute translation simple[39] doit ou s’éloigner du centre ou tendre vers le centre, ou avoir lieu autour du centre. J’ajoute que ceci semble la suite toute rationnelle de ce qu’on vient de dire en débutant[40] ; car de même que le corps est achevé et complet[41] en trois dimensions, de même encore il en est ainsi de son mouvement[42].

§ 4. Parmi les corps, les uns sont simples[43] ; et les autres sont composés de ceux-là[44]. J’appelle corps simples ceux qui ont naturellement en eux le principe du mouvement, comme le feu et la terre, avec leurs diverses espèces, et les corps analogues[45]. Il faut également que les mouvements soient les uns simples et les autres mixtes, de quelque façon que ce soit. Les mouvements des corps simples sont simples ; ceux des composés sont mixtes[46] ; et ces derniers corps[47] se meuvent suivant l’élément qui prédomine en eux[48].

§ 5. Puis donc qu’il y a un mouvement simple, et que c’est le mouvement circulaire ; puis donc que le mouvement d’un corps simple doit être simple aussi, et que le mouvement simple doit être celui d’un corps simple, car le mouvement d’un corps composé[49] dépend de l’élément prédominant qu’il contient, il s’ensuit, de toute nécessité, qu’il existe un corps simple[50] qui, par sa propre nature, doit être doué du mouvement circulaire.

§ 6. Il est bien possible[51] que le mouvement qui appartient à un autre corps, devienne aussi par force le mouvement d’un corps différent[52] ; mais selon l’ordre de la nature c’est impossible, puisque le mouvement naturel de chacun des corps simples est unique[53].

§ 7. De plus[54], si le mouvement contre nature est le contraire du mouvement naturel, et si chaque chose ne peut jamais agir qu’en sens contraire, il faut nécessairement que, si le mouvement circulaire simple[55] n’est pas conforme à la nature du corps qui est mu, il soit contre la nature de ce corps. Si, par exemple, c’est le feu ou tel autre corps pareil[56] qui est circulairement, son mouvement naturel[57] sera contraire au mouvement en cercle. Mais une chose ne peut être contraire qu’à une seule autre chose ; or déjà[58] le mouvement en haut et le mouvement en bas sont contraires l’un à l’autre. § 8. Mais s’il existe quelqu’autre corps[59] qui soit animé d’un mouvement circulaire contrairement à sa nature, il faut que ce corps ait aussi quelque mouvement différent[60] qui soit conforme à sa nature propre. Or c’est ce qui est impossible ; car si c’est le mouvement en haut, ce corps sera du feu ou de l’air ; et si c’est le mouvement en bas, il sera de l’eau ou de la terre.

§ 9. Mais il faut nécessairement que cette espèce particulière de mouvement[61] soit aussi le premier des mouvements[62]. Le parfait[63] est toujours par nature antérieur à l’imparfait[64] ; or le cercle est quelque chose de parfait[65]. Au contraire, une ligne droite n’est jamais parfaite[66]. Ainsi ce n’est ni la ligne droite infinie, puisque pour être parfaite[67] elle devrait avoir une fin et une limite. Ce n’est pas non plus aucune des lignes droites finies, qui peut être parfaite[68] ; car il y a toujours quelque chose en dehors d’elle[69], et l’on peut toujours accroître une ligne droite, quelle qu’elle soit. Si donc le premier mouvement appartient au corps qui est aussi le premier[70] dans la nature, et que le mouvement circulaire soit supérieur au mouvement en ligne droite ; si donc encore le mouvement en ligne droite est celui des corps simples, car c’est en ligne droite que le feu est porté en haut et que les corps terrestres le sont également en bas vers le centre ; il s’ensuit nécessairement que le mouvement circulaire appartient à quelqu’un des corps simples, puisque nous avons vu[71] que le mouvement des corps mixtes a lieu selon la force qui prédomine dans le mélange formé par les corps simples.

§ 10. Ainsi, d’après ces considérations, il doit être évident que, outre les composés d’ici-bas, il y a quelqu’autre substance de corps plus divine[72] et antérieure à toutes celles-là.

§ 11. Que l’on réfléchisse en outre[73] que tout mouvement est ou selon la nature[74] ou contre nature, et que tel mouvement qui est contre nature pour un certain corps, est un mouvement naturel pour un certain autre corps. C’est là le contraste que présentent le mouvement en haut et le mouvement en bas ; car l’un est pour le feu, tandis que l’autre est pour la terre, contre nature et selon la nature. Par conséquent, il y a nécessité que le mouvement circulaire, qui est contre nature pour ces corps là, soit le mouvement naturel de quelque corps différent.

§ 12. Ajoutez de plus[75] que, si le mouvement circulaire est pour un certain corps une direction toute naturelle[76], il est clair qu’il doit y avoir, parmi les corps simples et primitifs[77], un corps spécial[78] dont la nature propre sera d’avoir le mouvement circulaire, tout de même que la nature du feu c’est d’aller en haut, et celle de la terre d’aller en bas. Mais si les corps qui possèdent le mouvement circulaire sont ainsi portés dans la circonférence qu’ils décrivent[79] par un mouvement qui est contre leur nature, il est fort étonnant et même complètement incompréhensible[80] que ce mouvement qui est le seul mouvement continu et éternel[81], soit contre nature ; car partout ailleurs les choses qui sont opposées aux lois de la nature paraissent bien rapidement détruites. Si donc le corps qui a ce mouvement extraordinaire est du feu, comme on le prétend[82], ce mouvement est pour le feu tout aussi peu naturel que pourrait l’être pour lui le mouvement en bas ; car nous pouvons observer que le mouvement du feu part du centre[83] pour s’en éloigner en ligne droite.

§ 13. La conclusion assurée qu’il faut tirer de tout ceci, c’est que, outre les corps qui sont ici-bas et autour de nous, il y en a un autre[84] tout à fait isolé, et dont la nature est d’autant plus relevée qu’il s’éloigne davantage de tous ceux d’ici bas.

CHAPITRE III.

Explication de ce qu’il faut entendre par pesanteur et légèreté ; le corps dont le mouvement est circulaire ne peut avoir ni l’une ni l’autre ; il est incréé, impérissable et absolument immuable. Accord unanime des opinions et des traditions humaines sur ce sujet ; on a toujours placé la divinité dans le lieu le plus élevé de l’univers ; l’étymologie seule du mot d’Éther atteste cette croyance universelle. Erreur d’Anaxagore.

§ 1. Dans ce que nous venons de dire, il y a certaines assertions qui ne sont que des hypothèses[85], et certaines autres qui sont démontrées. Ainsi, il est évident[86] que tout corps sans exception[87] n’a pas légèreté et n’a pas pesanteur. Mais il faut expliquer ce qu’on doit entendre par pesant et par léger, nous y arrêtant maintenant dans la mesure qui convient pour le besoin de la discussion présente, et nous réservant d’y revenir ultérieurement[88] avec plus de précision, lorsque nous étudierons[89] l’essence de l’un et de l’autre[90]. Comprenons donc par pesant[91] tout ce qui est porté naturellement vers le centre ou le milieu[92], et par léger tout ce qui s’éloigne du centre. Le corps le plus lourd[93] sera celui qui se place au-dessous de tous les corps portés en bas, et le plus léger[94] sera celui qui reste à la surface de tous les corps portés en haut. Il faut nécessairement que tout corps porté soit en haut soit en bas[95], ait ou légèreté ou pesanteur. Il peut avoir aussi les deux à la fois[96] ; mais ce n’est jamais relativement à la même chose. En effet, c’est par la comparaison des uns avec les autres que certains corps sont lourds[97] ou légers ; et ainsi l’air est léger relativement à l’eau, et l’eau est légère relativement à la terre.

§ 2. Donc il est évidemment impossible[98] que le corps qui est animé du mouvement circulaire ait ou pesanteur ou légèreté[99] ; car il n’est pas possible qu’il ait un mouvement ni naturel ni contre nature, soit vers le centre[100], soit loin du centre[101]. En effet, le mouvement en ligne droite, que nous avons reconnu[102] pour le seul mouvement de chacun des corps simples, n’est pas suivant sa nature ; car alors le corps doté d’un mouvement circulaire[103] se confondrait avec un des corps qui sont doués du mouvement rectiligne. Mais ce corps étant ainsi porté[104] contre nature, si c’est le mouvement en bas qui est contre sa nature propre, ce sera le mouvement en haut qui lui sera naturel ; et réciproquement, si c’est le mouvement en haut qui est contre nature pour lui, ce sera le mouvement en bas qui sera selon sa nature. En effet, nous avons établi[105] que, pour les contraires, si l’un des mouvements est contre nature, l’autre mouvement doit être naturel. § 3. Mais comme un tout[106] et la partie de ce tout sont portés naturellement dans le même sens, et que, par exemple, toute la terre en masse et la moindre motte de terre sont portées dans le même sens identiquement, il en résulte d’abord que le corps qui se meut circulairement ne doit avoir ni légèreté ni pesanteur ; car alors il pourrait être porté vers le centre selon sa nature, ou s’éloigner naturellement du centre. En second lieu, il en résulte qu’il est impossible qu’une partie de ce corps ait un mouvement quelconque dans l’espace, attirée qu’elle serait soit en haut soit en bas. Ce corps ne peut recevoir aucun autre mouvement que le mouvement circulaire, soit selon sa nature soit contre sa nature, ni pour lui-même ni pour aucune de ses parties ; car le raisonnement qui est applicable pour le tout l’est aussi pour une des parties de ce tout.

§ 4. Il n’est pas moins conforme à la raison[107] de supposer que le corps doué du mouvement circulaire est incréé, qu’il est impérissable, et qu’il n’est point susceptible d’accroissement ni de changement, parce que tout ce qui naît vient d’un contraire[108] et d’un sujet préalable, et que tout ce qui se détruit se détruit également dans un sujet qui existe préalablement, et par un contraire qui passe au contraire opposé, ainsi que cela a été établi dans nos premières études[109]. Or les tendances et les mouvements[110] des contraires sont contraires. Si donc il ne peut rien y avoir de contraire à ce corps doué d’un mouvement circulaire[111], parce qu’il n’y a pas non plus de mouvement contraire au mouvement circulaire[112], la nature a eu raison, à ce qu’il semble, de ne pas mettre dans la série des contraires[113] un corps qui doit être incréé et impérissable, puisque la génération et la destruction font partie des contraires. § 5. Mais toute chose qui croît, s’accroît, et toute chose qui périt, périt, par l’addition de quelque chose qui lui est homogène[114] et par sa dissolution dans la matière[115] ; or le corps qui se meut circulairement[116] n’a pas de principe[117] d’où il soit venu. Si donc il y a un corps qui ne soit pas susceptible d’accroissement[118] ni de destruction, la conséquence à tirer de cette même remarque, c’est que ce corps n’est pas davantage susceptible d’altération[119] ; car l’altération est un mouvement dans la qualité. Or, les habitudes, les dispositions[120] de la qualité ne peuvent pas se produire sans des changements dans les modifications[121] qu’elle subit ; et je cite par exemple la santé et la maladie. Mais, nous voyons que les corps naturels qui changent en subissant des modifications, éprouvent tous soit accroissement, soit dépérissement ; et tels sont, par exemple, les corps des animaux[122] et les parties qui les composent, celles des plantes et celles mêmes des éléments[123].

§ 6. Si donc le corps qui a le mouvement circulaire[124] ne peut ni recevoir d’accroissement ni subir de dépérissement, il est tout simple de penser qu’il ne peut pas non plus éprouver d’altération quelconque. Par suite, on voit pour peu que l’on ait quelque confiance aux principes que nous venons de poser, qu’il doit évidemment résulter de ce que nous avons dit que ce premier de tous les corps est éternel[125], sans accroissement ni dépérissement, à l’abri de la vieillesse, de l’altération, et de toute modification quelle qu’elle soit[126].

Il semble, du reste, que le raisonnement vient ici à l’appui des faits[127], et que les faits ne viennent pas moins à l’appui du raisonnement. En effet, tous les hommes, sans exception[128], ont une notion des Dieux[129], et tous ils attribuent à la Divinité le lieu le plus haut, grecs comme barbares, pourvu qu’ils croient à l’existence des Dieux ; en d’autres termes, ils entremêlent et réunissent[130] ainsi l’immortel à l’immortel[131], parce qu’il serait impossible[132] qu’il en fût autrement. Si donc il existe quelque chose de divin, comme en effet ce quelque chose existe, il en résulte que ce qu’on vient de dire ici sur la première essence des corps[133] est bien profondément vrai. Mais il suffit de l’observation de nos sens[134] pour nous en attester la parfaite exactitude, à ne parler ici que dans la mesure de la croyance due aux témoignages humains[135]. En effet, dans toute la série des temps écoulés, selon la tradition transmise d’âges en âges, il ne paraît pas qu’il y ait jamais eu le moindre changement ni dans l’ensemble du ciel[136] observé jusqu’à ses contraires limites[137], ni dans aucune des parties qui lui sont propres[138]. Il semble même que le nom s’est transmis depuis les anciens jusqu’à nos jours[139], les hommes des temps les plus reculés ayant toujours eu la même opinion que nous exprimons en ce moment. C’est qu’il ne faudrait pas croire que les mêmes opinions soient arrivées jusqu’à nous une ou deux fois seulement ; ce sont des infinités de fois[140]. Voilà pourquoi supposant qu’il y a quelque premier corps différent de la terre et du feu, de l’air et de l’eau, les anciens ont désigné du nom d’éther le lieu le plus élevé, tirant cette appellation de la course perpétuelle[141] de ce corps et voulant lui imposer pour son nom même l’éternité du temps. Anaxagore[142] a, du reste, mal employé ce mot ; et il l’applique faussement, puisqu’il confond l’éther avec le feu.

§ 7. Il est évident d’après ce qui vient d’être dit, qu’il ne peut y avoir plus de corps simples[143] que ceux qu’on a nommés ; car il faut nécessairement que le mouvement d’un corps simple soit simple comme lui. Or, pour nous, les seuls mouvements simples sont le mouvement circulaire et le mouvement en ligne droite[144] ; et ce dernier se divise en deux parties, le mouvement qui part du centre[145], et le mouvement qui va vers le centre[146] ou le milieu.

CHAPITRE IV.

Le mouvement circulaire ne peut avoir de contraire ; arguments qui le prouvent : le mouvement en ligne droite n’est pas contraire au mouvement circulaire ; le mouvement semi-circulaire ne l’est pas non plus, soit qu’il ait lieu sur un seul hémicycle, soit qu’il ait lieu sur les deux ; le mouvement circulaire en un sens n’est pas davantage contraire au mouvement circulaire en un autre sens. C’est toujours un mouvement partant d’un même point pour aller vers un même point. — Dieu et la nature ne font jamais rien en vain.

§ 1. On peut se convaincre par une foule d’arguments qu’il ne peut pas y avoir un autre mouvement qui soit contraire au mouvement circulaire[147]. § 2. D’abord, nous constatons que c’est surtout la ligne droite[148] qui pourrait être opposée à la circonférence[149] ; car la ligne convexe et la ligne concave[150] paraissent non-seulement opposées entre elles, mais aussi à la ligne droite, quand elles sont jointes ensemble[151] et qu’elles se combinent. Si donc il y a quelque mouvement contraire[152] au mouvement circulaire, il faut nécessairement que le mouvement en ligne droite soit le plus contraire au mouvement en cercle. § 3. Les mouvements qui se passent en ligne droite sont opposés les uns aux autres par les lieux[153] ; car le haut et le bas[154] sont une différence et une contrariété du lieu[155].

§ 4. Secondement[156], on pourrait croire que le raisonnement qui s’applique au mouvement en ligne droite[157] s’applique également bien au mouvement circulaire. Ainsi l’on peut dire que le mouvement de A en B[158] sur la ligne droite est contraire au mouvement de B en A. Mais cette ligne est déterminée et finie[159], tandis que des lignes circulaires[160] pourraient en nombre infini passer par les mêmes points.

§ 5. On pourrait croire qu’il en est de même encore[161] pour le mouvement qui s’accomplirait sur un seul demi-cercle[162] ; par exemple le mouvement de C en D et celui de D en C. En effet c’est le même mouvement que celui qui aurait lieu sur le diamètre[163], puisque nous supposons que chacun de ces points[164] est toujours distant de l’autre de toute la ligne droite[165]. On pourrait encore[166] en traçant le cercle entier[167] supposer que le mouvement sur un des hémicycles est contraire au mouvement sur l’autre hémicycle, et qu’ainsi dans le cercle entier le mouvement qui va de E en F, sur l’hémicycle G, est contraire au mouvement qui va de F en E, sur l’hémicycle H. Mais quand bien même on admettrait que ces mouvements sont contraires l’un à l’autre, il ne s’ensuit pas pour cela que les mouvements sur le cercle tout entier[168] le soient également entr’eux.

§ 6. On ne peut donc pas dire non plus que le mouvement circulaire de A en B, soit contraire à celui de A en D[169] ; car des deux parts[170] le mouvement a lieu d’un même point vers un même point[171], tandis que l’on a défini[172] le mouvement contraire celui qui vient du contraire et va vers le contraire[173].

§ 7. Mais si le mouvement circulaire était contraire au mouvement circulaire, il y aurait dès lors un de ces deux mouvements bien inutile[174] ; car ils se dirigeraient tous deux[175] vers le même point, puisqu’il y a nécessité que le corps qui se meut circulairement se porte, de quelque point d’ailleurs qu’il soit d’abord parti, vers tous les lieux contraires également[176]. Or les oppositions de lieu par contraires[177] sont le haut et le bas, le devant et le derrière, à droite et à gauche ; et les oppositions du mouvement suivent les oppositions mêmes des lieux. § 8. Si ces oppositions étaient égales[178], il n’y aurait plus dans ce cas de mouvement pour les deux corps ; et si l’un des mouvements était le plus fort et l’emportait[179], l’autre mouvement ne pourrait plus se produire[180]. Par conséquent, si ces deux mouvements existaient à la fois[181], l’un des deux corps serait bien inutile, puisqu’il n’aurait pas le mouvement qui devrait lui appartenir. C’est ainsi que nous disons d’une chaussure[182] qu’elle est inutile quand on ne peut pas s’en chausser. Mais Dieu[183] et la nature ne font jamais rien d’inutile ni de vain.

CHAPITRE V.

Il est impossible qu’il y ait un corps infini ; importance considérable de ce principe ; discussion pour l’établir. Considérations générales sur les corps simples et composés ; le mouvement circulaire ne peut pas être infini ; et par conséquent, le monde n’est pas infini non plus ; citation du Traité sur le mouvement. Démonstrations géométriques. Six arguments pour prouver que le corps doué du mouvement circulaire ne peut pas être infini.

§ 1. Ces idées étant suffisamment éclaircies, nous passerons aux autres questions qu’il nous faut étudier. La première, c’est de savoir s’il est possible qu’il y ait un corps infini[184], comme l’ont cru la plupart des anciens philosophes[185], ou bien si c’est là une véritable impossibilité. Or, qu’il en soit ainsi ou qu’il en soit autrement, ce n’est pas de petite importance ; c’est au contraire de toute importance, dans la recherche et l’acquisition[186] de la vérité. C’est de là en effet que sont venus et que viendront presque tous les dissentiments de ceux qui ont essayé et qui essaieront quelques études sur la nature ; car quoiqu’au début ce soit d’une très-petite distance qu’on s’écarte du vrai, cette divergence, à mesure qu’on s’éloigne, devient mille fois plus grande. Par exemple, on croit ne rien faire[187] de grave en admettant une quantité qui soit la plus petite possible[188] ; mais avec cet infiniment petit qu’on introduit, il y a de quoi bouleverser de fond en comble les principes les plus essentiels des mathématiques[189]. La cause de ceci, c’est que le principe est beaucoup plus fort qu’il n’est grand ; et voilà comment une chose qui est très-petite dans le principe devient à la fin démesurément grande. Or l’infini a la puissance d’un principe[190], et il est la plus grande puissance possible de la quantité.

§ 2. Par suite, il n’y a rien d’absurde ni d’irrationnel à signaler la prodigieuse importance de cette hypothèse[191] qui soutient qu’il existe un corps infini. C’est là ce qui nous fait un devoir d’en parler en reprenant la question le plus haut que nous pourrons.

Il est d’abord bien clair qu’il faut nécessairement que tout corps soit simple ou composé. Par conséquent, l’infini lui-même devra être ou simple ou composé. Mais il n’est pas moins évident que les corps simples étant finis[192], il faut nécessairement que le composé résultant de corps simples[193] soit fini également ; car le composé qui est formé de parties limitées en nombre et en grandeur, doit être lui-même limité en nombre et en grandeur ; et sa grandeur devra être proportionnelle au nombre des parties qu’il contiendra. § 3. La question revient ainsi à savoir[194] si quelque corps simple peut être infini[195] en grandeur, ou si cela est impossible. Après avoir traité[196] du premier des corps[197], nous verrons ce qu’il en est pour le reste des corps autres que celui-là. Ce qui nous prouvera tout d’abord que le corps qui a le mouvement circulaire doit être absolument fini, c’est qu’en effet, si le corps mû circulairement était infini, les lignes abaissées du centre[198] seraient infinies[199] ; et la distance entre ces lignes infinies serait infinie comme elles. Quand je dis la distance de ces lignes, j’entends la distance en dehors de laquelle[200] il ne serait plus possible de trouver une grandeur qui touchât encore ces lignes. Il faut donc nécessairement que cette distance soit infinie[201] ; car, pour des lignes finies[202], la distance serait toujours finie. De plus, on pourra toujours[203] en supposer une plus grande que toute distance qui serait précisément donnée[204]. Par suite, de même que nous disons d’un nombre qu’il est infini, quand il n’y a pas de nombre possible plus grand que lui, de même aussi cette définition s’applique à la distance des lignes que nous considérons. Si donc il n’est pas possible de parcourir l’infini[205], et s’il est nécessaire que, le corps étant infini, la distance des lignes soit elle-même infinie, il ne serait plus possible qu’il y eût de mouvement circulaire. Or, nous voyons néanmoins[206] que le ciel accomplit un mouvement de ce genre, et le raisonnement nous a prouvé[207] que le mouvement circulaire appartient positivement[208] à un certain corps.

§ 4. Autre argument[209]. Si d’un temps fini[210], on retranche une quantité finie de temps, il faut nécessairement encore que le temps qui reste soit également fini, et qu’il ait un commencement. Or, si le temps qui s’écoule durant la marche du corps à mouvement circulaire[211] a un commencement, il doit y avoir aussi un commencement pour ce mouvement même[212] ; et par conséquent encore, il y a un commencement à la grandeur qui a été en marche. Ceci peut d’ailleurs également s’appliquer à tout autre mouvement que le mouvement du ciel[213]. Soit donc une ligne infinie ACE[214], et qui soit infinie dans un des deux sens en E[215], tandis que la ligne représentée par BB est infinie dans les deux sens. Si la ligne ACE décrit un cercle, en partant du centre C, qu’elle traverse[216], la ligne ACE[217] sera dans un temps fini et limité[218], portée par sa course circulaire sur BB[219] ; car le temps tout entier que met le ciel à accomplir son cercle, quelqu’immense que soit ce cercle, est toujours fini[220] ; et ainsi il faut retrancher le temps[221] que la sécante a mis à faire son mouvement. Il y aurait donc quelque principe de temps où la ligne ACE commencerait à couper la ligne BB. Or cela est impossible[222]. Donc il n’est pas possible que l’infini se meuve circulairement[223] ; et par conséquent, le monde ne pourrait pas davantage se mouvoir de cette façon, s’il était infini[224].

§ 5. Voici encore une autre preuve[225] qui démontrera clairement que l’infini ne peut se mouvoir[226]. Soit la ligne A, mue parallèlement[227] à l’opposé de B, l’une et l’autre étant finies[228]. Il y a nécessité qu’en même temps que A se sépare[229] de B, B se sépare également de A. Autant l’une dépassera l’autre, autant l’autre aussi dépassera la première. Si toutes les deux se mouvaient en sens contraire[230], elles se sépareraient encore beaucoup plus vite. Si l’une était mue en sens opposé de l’autre, qui resterait en place, la séparation serait plus lente, en supposant que celle qui se meut devant l’autre eût toujours une même vitesse. § 6. Or, il est bien évident qu’on ne saurait parcourir la ligne infinie dans un temps fini. C’est donc dans un temps infini qu’elle sera parcourue ; et c’est ce qu’on a démontré antérieurement dans les Théories sur le mouvement[231]. Du reste, il n’importe pas[232] que la ligne finie se meuve à l’opposé de la ligne infinie, ou réciproquement que ce soit celle-ci par rapport à celle-là ; car lorsque la première est parallèle à la seconde, la seconde l’est également à la première, soit qu’elle soit en mouvement, soit qu’elle soit immobile ; seulement si toutes les deux se meuvent, elles se sépareront d’autant plus vite. Cependant, rien n’empêche[233] que parfois la ligne qui est mue, ne dépasse la ligne qui est en repos, plus vite que la ligne qui serait mue d’un mouvement contraire ; il suffit de supposer que les deux lignes, qui se meuvent en sens contraire, n’ont qu’un mouvement fort lent, et que celle qui se meut à la rencontre de la ligne en repos, a un mouvement beaucoup plus rapide qu’elle. Ce n’est pas une objection à ce raisonnement que de dire que le mouvement est parallèle à une ligne en repos, puisque la ligne A, qui est mue, peut être animée d’un mouvement plus lent comparativement à B, qui est aussi en mouvement. Si donc le temps, que met à se dégager[234] une ligne finie qui est en mouvement[235], est un temps infini, il est nécessaire aussi que le temps où la ligne infinie s’est mue suivant la ligne finie soit infini également. Donc, il est impossible[236] que l’infini se meuve du tout ; car pour peu qu’il se mût, il faudrait que le temps où il se meut[237] fût infini. Or, le ciel accomplit sa marche tout entière et sa révolution circulaire dans un temps fini[238], de telle sorte qu’il parcourt toute la ligne qui est en dedans du cercle, telle que serait la ligne finie AB[239]. Donc il est impossible que le corps qui a le mouvement circulaire[240] soit jamais infini.

§ 7. De plus[241], de même qu’il est impossible qu’une ligne qui a une limite soit infinie[242], si ce n’est dans le sens de sa longueur, de même il est impossible que la surface, qui a également une limite, soit non plus infinie. Lors donc qu’une grandeur est déterminée[243], elle ne peut plus dès lors être infinie d’aucune façon ; par exemple, un quadrangle, un cercle[244], ou une sphère, pas plus que la grandeur qui a un pied de dimension, ne saurait être davantage infinie. Si donc le quadrangle et la sphère[245] ne sont pas infinis, le cercle ne l’est pas davantage. Or si le cercle n’existait pas, le mouvement circulaire ne pourrait pas exister non plus ; et de même, si le cercle n’est pas infini, il n’y a pas non plus de mouvement circulaire infini. Mais si le cercle n’est pas infini, il n’est pas possible davantage qu’il y ait un corps infini qui se meuve circulairement[246].

§ 8. Soit encore C le centre[247], la ligne AB infinie, et que E soit infinie en tant que droite. CD, qui est la ligne en mouvement, ne se séparera jamais de la ligne E ; mais elle sera toujours comme la ligne CE[248] ; car elle la coupe en F. Ainsi donc, la ligne infinie ne peut être circulaire.

§ 9. En outre, si le ciel est infini et qu’il se meuve circulairement, il aura, dans un temps fini, parcouru l’infini[249]. Soit en effet le Ciel immobile[250] et infini ; ce qui se meut en lui sera de dimension égale[251]. Par conséquent, si le ciel, étant infini, a fourni sa marche circulaire, l’infini qui lui est égal s’est mû aussi dans un temps fini ; or, il a été démontré[252] que c’est là une chose impossible.

§ 10. On peut dire encore, en renversant le raisonnement[253], que, si le temps où le ciel a accompli son mouvement de circonférence est limité, il faut nécessairement aussi que la grandeur qu’il a parcourue dans ce temps soit limitée ; car il a parcouru, un espace égal à lui-même[254] ; et par conséquent, il est lui-même limité.

§ 11. On voit donc évidemment[255] que le corps qui se meut circulairement[256] n’est pas sans bornes et n’est pas infini, mais qu’il doit au contraire nécessairement avoir une fin.

CHAPITRE VI.

Un corps quelconque ne peut jamais être infini, non plus que sa pesanteur ou sa légèreté ; démonstration de cette théorie. — Citation de l’ouvrage sur les Principes ; hypothèse du monde considéré comme infini ; pluralité des cieux, sans que les cieux puissent être en nombre infini.

§ 1. Mais on peut dire, en outre[257], que ni le corps qui tend vers le milieu[258], ni le corps qui s’en éloigne, ne sont pas plus infinis que le corps à mouvement circulaire[259]. En effet, les directions[260] en haut et en bas sont contraires l’une à l’autre ; mais les directions contraires vont vers des lieux contraires ; et si l’un des contraires est déterminé, l’autre le sera nécessairement aussi. Or, le milieu est déterminé ; car de quelque côté que le corps soit porté en bas, le corps qui descend ne peut jamais aller plus loin que le milieu et le dépasser[261]. Ainsi donc, le milieu étant déterminé et fini, il faut nécessairement que le lieu supérieur le soit aussi[262]. Or, si les lieux sont limités et finis, il faut également que les corps qui les occupent soient finis comme eux. § 2. De plus, si le haut et le bas sont déterminés, il faut nécessairement que l’espace intermédiaire[263] le soit également ; car si cet intervalle n’était pas limité, le mouvement serait infini[264]. Or, on vient de démontrer[265] antérieurement que cela est impossible. Donc le milieu est déterminé[266] ; par suite, le corps qui est dans ce milieu ou qui peut y venir, est fini également. Mais tout corps qui est porté naturellement soit en haut soit en bas, peut y venir dans l’espace intermédiaire[267] ; car tout corps est ou porté vers le milieu par son mouvement naturel, ou il s’en éloigne de même. Il est donc évident, d’après ces considérations, qu’il n’y a pas de corps qui puisse être infini[268].

§ 3. J’ajoute de plus[269] que, si la pesanteur n’est pas infinie, il s’ensuit qu’aucun des corps graves[270] ne saurait être infini non plus ; car il faudrait que la pesanteur d’un corps infini fût également infinie. Même raisonnement pour la légèreté ; car, si la pesanteur est infinie, la légèreté le sera comme elle[271] ; et l’on n’a qu’à supposer que ce qui flotte à la surface[272] est infini. § 4. En voici la preuve évidente[273]. Supposons que cette pesanteur soit finie[274] et que le corps infini soit représenté par A B ; sa pesanteur[275] le sera par C. Que l’on détache de l’infini une grandeur finie, représentée par B D, et que la pesanteur de cette grandeur soit représentée par E. Ainsi, E est plus petit que C ; car le poids est moindre quand le corps est moindre aussi. Que la plus petite pesanteur[276] mesure la plus grande[277] un certain nombre de fois, et que le rapport de la pesanteur plus petite à la pesanteur plus grande soit aussi le rapport BD à BF[278] ; car, de l’infini, on peut toujours retrancher une quantité quelconque[279]. Si donc les grandeurs sont proportionnelles aux poids, la plus petite pesanteur sera à la plus petite grandeur, dans le même rapport que la plus forte pesanteur sera à la plus forte grandeur. Ainsi la pesanteur du fini sera égale à celle de l’infini[280]. § 5. De plus[281], si la pesanteur d’un corps plus grand est plus grande, la pesanteur de HB[282] sera plus grande que celle de BF. Il en résulterait donc que la pesanteur du fini serait plus grande que celle de l’infini, et que la pesanteur de grandeurs inégales[283] serait la même ; car l’infini est inégal au fini.

Peu importe du reste[284] que les poids[285] soient commensurables ou incommensurables entr’eux ; car le raisonnement sera le même pour le cas où ils seraient incommensurables ; par exemple, si le poids E pris trois fois comme mesure surpasse le poids C ; c’est-à-dire qu’en prenant les trois grandeurs BD toutes entières, leur poids sera plus grand que le poids CD. Ici donc la même impossibilité[286] se représente. On peut encore, si l’on veut, supposer les poids commensurables entr’eux[287] ; car peu importe de commencer par la pesanteur ou par la grandeur[288] ; et par exemple, on peut supposer que le poids E est commensurable à C, et retrancher de l’infini la partie qui a le poids représenté par E, c’est-à-dire BD. Par suite, ce que le poids est proportionnellement au poids, la grandeur BD le devient proportionnellement à une autre grandeur telle que BF ; car du moment qu’une grandeur est infinie, on peut toujours lui enlever une quantité quelque grande qu’elle soit. À cette condition, les grandeurs seront commensurables entr’elles, et les poids le seront entr’eux.

§ 6. Il est du reste sans importance pour la démonstration que la grandeur soit d’une densité homogène[289], ou d’une densité dissemblable ; car il sera toujours possible de prendre des corps égaux en poids, en enlevant à l’infini une quantité quelconque, ou en ajoutant ce qu’il faut aux corps comparés[290].

§ 7. Il a donc été démontré[291], d’après ce qui précède, que la pesanteur d’un corps infini ne peut pas être finie[292] ; donc elle est infinie[293]. Mais si cette hypothèse est également impossible[294], il sera impossible aussi qu’il y ait un corps infini. § 8. Voici donc ce qui va prouver que la pesanteur d’un corps ne peut pas davantage être jamais infinie. Si, dans un temps donné[295] un certain point parcourt un certain espace, tel autre poids pourra parcourir cet espace dans moins de temps ; et les temps seront en proportion inverse des poids[296]. Par exemple, si un poids moitié moindre parcourt tel espace dans un certain temps, le double de ce poids parcourra le même espace dans la moitié de ce temps. § 9. De plus, un poids fini parcourt toujours une ligne finie dans un certain temps fini. Si donc il y a une pesanteur qui puisse être infinie, il en résultera nécessairement[297] que le corps infini devra d’abord se mouvoir[298] en tant qu’il est aussi considérable que le corps fini ; mais il ne pourra plus se mouvoir davantage dans la proportion où il le devrait conformément à la supériorité du poids, et à cette loi qui fait[299] qu’au contraire un poids plus fort doit se mouvoir dans un temps plus court. C’est qu’en effet il n’y a aucun rapport de l’infini au fini, comme il y en a un du temps fini, qui est plus court, au temps également fini, qui est plus long. Mais c’est toujours dans un temps de plus en plus petit que le corps infini ferait son mouvement[300], sans qu’on pût d’ailleurs jamais atteindre un temps qui serait le plus petit possible[301]. § 10. Il ne servirait même de rien que cela fût ainsi[302] ; car on prendrait alors quelqu’autre corps fini[303], dans le même rapport de temps[304] où l’infini est relativement à cet autre corps plus grand[305]. Il en résulterait que, dans un temps égal, l’infini aurait le même mouvement que le fini[306] ; or c’est là une chose impossible. Mais, puisque l’infini se meut dans un certain temps, quel qu’il soit, et d’ailleurs toujours fini, il est nécessaire que cet autre poids fini se meuve aussi dans ce même temps, suivant une ligne finie et limitée[307].

§ 11. Il est donc impossible qu’il y ait une pesanteur infinie[308], et il n’est pas plus possible que la légèreté soit infinie non plus[309]. Donc il est également impossible qu’il y ait des corps ayant un poids infini ou une infinie légèreté. En résumé, on doit voir qu’il n’y a pas de corps qui puisse être infini[310], si l’on veut s’en convaincre en étudiant les choses en détail[311], comme nous venons de le faire, et si, au lieu de s’en tenir aux généralités que nous avons exposées dans nos théories sur les Principes[312], où nous avons antérieurement expliqué, d’une manière toute générale, ce qu’est et ce que n’est pas l’infini, on veut considérer les choses sous l’autre point de vue que nous venons de présenter maintenant.

§ 12. Après tout ceci, il faut examiner si l’univers, sans être d’ailleurs un corps infini, ne peut pas cependant être assez grand pour contenir plusieurs cieux[313] ; car on pourrait fort bien se demander si, de même que notre monde a sa constitution propre, il ne peut pas s’en être formé d’autres encore, outre le seul que nous connaissons, sans que pour cela néanmoins le nombre en soit infini[314]. § 13. Mais d’abord présentons quelques idées générales sur l’infini[315].

CHAPITRE VII.

Considérations générales sur la nature et le mouvement des corps ; aucun corps ne peut être infini. L’infini ne peut avoir de mouvement ; démonstration graphique des rapports du fini et de l’infini. Il n’y a pas de corps en dehors du ciel ; citation du Traité du Mouvement ; réfutation de Démocrite et Leucippe, soutenant l’existence des atomes et du vide. Le corps de l’univers doit être continu, et il ne peut être infini.

§ 1. Il faut nécessairement que tout corps soit ou infini ou fini[316]. S’il est infini, il faut qu’il soit composé tout entier de parties homogènes ou de parties hétérogènes. S’il est composé de parties hétérogènes, les espèces de ces parties doivent être ou limitées en nombre ou infinies[317]. § 2. Or, il est évident, et l’on doit admettre que ces espèces ne peuvent pas être en nombre infini[318], du moment que l’on nous accorde l’exactitude de nos premières hypothèses[319] ; car les mouvements primitifs étant limités[320], il faut nécessairement que les espèces des corps simples[321] soient limitées également. Le mouvement d’un corps simple est simple aussi, et les mouvements simples sont limités ; or, il faut que tout corps créé par la nature ait toujours du mouvement. Mais si l’infini est composé d’un nombre fini d’espèces, il est, dès lors, nécessaire que chacune de ces parties qui le composent soient infinies ; et, par exemple, si ces parties sont de l’eau ou du feu. Or, cela est impossible ; car il a été démontré[322] que ni la pesanteur ni la légèreté ne peuvent être infinies.

§ 3. Il faudrait en outre[323] que les lieux qui contiendraient ces parties[324] infinies fussent aussi d’une infinie grandeur, et, par suite, que les mouvements de tous les corps[325] fussent également infinis. Mais ce sont là des impossibilités manifestes, si nos premières hypothèses[326] sont vraies. Ni le corps qui tombe et descend en bas[327] ne peut se mouvoir à l’infini[328], ni le corps qui s’élève en haut[329] ne peut, par la même raison, avoir un mouvement infini. C’est qu’il n’est pas possible que ce qui n’a pas pu être dans le passé[330] puisse jamais être davantage dans le présent[331] ; et ceci s’applique tout aussi bien, et à la qualité, et à la quantité, et au lieu[332]. Par exemple, s’il a été impossible qu’un corps soit devenu blanc[333], ou qu’il soit devenu grand d’une coudée[334], ou qu’il se trouvât en Égypte[335], il est également impossible, dans le temps actuel, qu’il en soit ainsi. Il est donc impossible aussi qu’un corps soit porté dans un lieu où il n’est pas possible[336] qu’aucun corps parvienne jamais par un mouvement quelconque. § 4. De plus, en supposant même[337] que les parties de l’infini soient séparées et isolées, le feu total, par exemple, qui serait formé de toutes les parcelles de feu, n’en serait pas moins infini. § 5. Mais nous avons établi[338] que le corps est ce qui a une dimension en tous sens ; dès lors, comment serait-il possible que les éléments de l’infini fussent au nombre de plusieurs, dissemblables entr’eux, et que chacun d’eux, à part, fût cependant infini ? Car il faut que chacun d’eux soit infini dans tous les sens.

§ 6. Pourtant, il n’est pas possible davantage[339] que l’infini soit composé tout entier de parties homogènes. D’abord, comme il n’y a pas de mouvements autres que ceux que nous avons indiqués[340], il faudra que l’infini ait un de ces mouvements[341] ; et si cela est, il y aura nécessairement une pesanteur infinie ou une légèreté infinie. D’autre part, il ne se peut pas que le corps qui se meut circulairement soit infini ; car il est impossible que l’infini ait un mouvement circulaire[342]. Or, soutenir ceci reviendrait absolument à dire que le ciel est infini, et l’on a démontré[343] que c’est là une chose impossible. § 7. Mais en outre, il est tout aussi clair que l’infini ne peut absolument avoir aucune espèce de mouvement[344]. Le mouvement qu’il aurait en effet serait, ou naturel, ou forcé ; et s’il a un mouvement forcé, il faudra bien qu’il ait de plus un certain mouvement naturel[345]. Par conséquent, il aura aussi un lieu différent[346], et qui lui sera propre[347]. Mais c’est encore là une impossibilité absolue[348].

§ 8. Voici comment on prouverait qu’il est impossible, d’un côté, que l’infini subisse quelque modification de la part du fini, et d’autre côté[349], que l’infini puisse agir, en quoi que ce soit, sur le fini. L’infini est représenté par A ; le fini, par B ; et le temps dans lequel le fini a donné le mouvement et où l’infini l’a reçu[350] d’une façon quelconque, représenté par C. A est, par exemple[351], échauffé par B, ou poussé par lui, s’il en reçoit telle autre modification, ou d’une manière générale, s’il est mu de quelque façon que ce soit, dans le temps C. Supposons un corps D[352], plus petit que B ; le plus petit corps produira un mouvement moindre[353] dans un temps égal. Que E soit altéré[354] d’une façon quelconque par D, ce que D est à B, E le sera par rapport à quelqu’autre terme fini[355]. § 9. D’abord, le corps égal[356] modifiera un autre corps d’une manière égale dans un temps égal ; puis, le plus petit corps, dans le temps égal, modifiera moins ; enfin, le plus grand[357] modifiera davantage ; et ces effets auront lieu précisément dans le rapport proportionnel où le plus grand est au plus petit. Il sera donc impossible[358] que l’infini puisse, dans aucun temps quelconque, recevoir le mouvement d’aucun corps fini, puisqu’en effet un plus petit corps recevra, dans un temps égal, moins de mouvement d’un plus petit corps ; et cela, dans la proportion où il sera au fini[359]. Mais l’infini n’est avec le fini dans aucun rapport possible[360]. § 10. D’autre part[361], l’infini ne pourra pas davantage, dans aucun temps quelconque[362], mouvoir le fini. Soit, en effet, l’infini A[363], le fini B ; et le temps dans lequel le mouvement s’opère, C. D donnera certainement moins de mouvement[364] que B, dans le temps C. Soit par exemple F, le corps mu Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/175 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/176 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/177 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/178 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/179 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/180 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/181 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/182 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/183 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/184 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/185 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/186 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/187 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/188 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/189 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/190 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/191 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/192 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/193 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/194 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/195 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/196 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/197 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/198 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/199 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/200 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/201 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/202 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/203 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/204 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/205 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/206 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/207 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/208 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/209 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/210 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/211 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/212 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/213 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/214 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/215 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/216 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/217 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/218 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/219 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/220 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/221 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/222 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/223 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/224 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/225 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/226 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/227 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/228 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/229 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/230 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/231 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/232 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/233 Page:Aristote - Traité du ciel, trad Saint-Hilaire, 1866.djvu/234

§ 23. Même à ne regarder ceci qu’au point de vue physique[365], et non plus d’une manière générale, il est également impossible[366], ni que ce qui était éternel puisse jamais périr, ni que ce qui n’était pas auparavant puisse jamais ensuite devenir éternel ; car, toutes les choses qui sont périssables et créées sont toutes altérables et modifiables[367]. Or, les choses naturelles sont altérées et modifiées[368] par leurs contraires, et par les éléments mêmes qui les composent ; et elles sont détruites aussi par les mêmes causes.

  1. Le sujet de ce traité n’est pas très-net et les commentateurs grecs se sont divisés sur la question de savoir quel il est véritablement. Alexandre d’Aphrodisée et Jamblique, après lui, ont cru qu’Aristote avait voulu, dans cet ouvrage, non-seulement étudier le ciel, mais encore l’univers entier. Syrien et Simplicius ont soutenu qu’il ne s’agissait que du ciel, et selon eux de cette partie de l’univers qui s’étend de la sphère de la lune jusques et y compris notre terre. La question n’a pas grande importance, et l’on peut interpréter de différentes manières le but qu’Aristote s’est proposé. Mais l’opinion de Simplicius paraît plus conforme aux matières mêmes que ce traité discute. Il est résulté de ces controverses et de cette incertitude que les Scholastiques, pour ne pas trancher la question, ont donné à cet ouvrage un double titre : De cœlo et mundo, comme on peut le voir par Albert-le-Grand et saint Thomas d’Aquin, et par tous ceux qui les ont suivis. Je crois que le titre seul : Du Ciel doit être conservé à ce traité, le titre : Du Monde devant être réservé au petit traité apocryphe qui porte cette dénomination spéciale, et qu’on trouvera après la Météorologie. De reste, tous les commentateurs s’accordent pour placer le Traité du ciel à la suite de la Physique, dont il est en quelque sorte le complément.
  2. On ne comprend pas bien la distinction qui est faite ici entre les corps et les grandeurs. Il semble, d’après ce qui va suivre, que les corps et les grandeurs devraient se confondre, ou que si on les distingue, ce n’est plus au physicien d’étudier les grandeurs, mais au mathématicien. Voir la Physique, livre III, chap. 4, § 1, t. II, p. 87 de ma traduction. — Avec leurs modifications, soit actives, soit passives — Et leurs mouvements, c’est là le sujet général de la Physique, en ce qui concerne les corps inorganiques. — Cette substance particulière, celle des corps. — Sont des corps et des grandeurs, comme l’eau, la terre, les pierres, le bois, etc. — Les autres ont un corps, comme les animaux. — Les autres sont les principes, c’est la forme et la matière ; c’est le temps et l’espace, etc., etc.
  3. Ceci se rapporte à la définition du corps, dont il vient d’être question au § précédent ; mais l’auteur n’a pas montré assez précisément quel est le lien de ses pensées. Pour la définition du corps qui est donnée ici, voir la Physique, livre V, chap. 5, §§ 6 et 11.
  4. Et non plus parmi les corps.
  5. Ce serait plutôt : De dimensions.
  6. Aristote a souvent cité les Pythagoriciens ; mais nulle part il n’a paru approuver leurs opinions autant qu’il le fait ici. Saint Thomas en fait avec raison la remarque.
  7. Voir un passage analogue de la Météorologie, livre III, ch. 4, § 24, à propos des trois couleurs de l’arc-en-ciel ; mais dans la Météorologie, Aristote ne nomme pas les Pythagoriciens.
  8. Idée très-vague, et qui n’apprend rien.
  9. C’est la tournure même du texte.
  10. Saint Thomas comprend qu’il s’agit des trois prières qu’on doit faire dans la journée, le matin, à midi et le soir. Peut-être, saint Thomas, s’est-il un peu trop souvenu des usages chrétiens. La pensée du texte n’est pas aussi précise ; et elle reste obscure, en ce qu’elle ne dit pas assez clairement à quelle partie du culte s’applique le nombre Trois.
  11. Il est probable que cette même pensée appartient également au Pythagorisme.
  12. Le texte n’est pas tout à fait aussi précis.
  13. Sur l’emploi assez singulier de ce mot, voir la Météorologie, livre IV, ch. 3, § 2, n..
  14. Les commentateurs grecs n’expliquent pas cette expression, qui reste assez obscure.
  15. À l’exclusion de la ligne et de la surface, qui n’ont qu’une seule dimension, ou tout au plus deux dimensions.
  16. En longueur, largeur et profondeur.
  17. Subtilité pythagoricienne sans doute.
  18. La ligne est divisible ; mais elle n’est continue qu’en un seul sens, celui de la longueur.
  19. La surface est divisible en longueur et en largeur ; et elle est continue dans les deux sens.
  20. C’est le corps qui est divisible et continu dans les trois sens.
  21. Il semble qu’il ne devrait pas y avoir ici de restriction. Toutes les grandeurs dont s’occupe la science de la nature semblent devoir être divisibles et continues. Les grandeurs qu’étudient les mathématiques peuvent n’être pas continues.
  22. Il serait difficile d’indiquer dans quel ouvrage Aristote a traité cette question.
  23. J’ai conservé le plus que j’ai pu l’expression grecque. Aristote veut dire qu’on ne peut point passer du corps à trois dimensions à un autre corps qui en aurait quatre, par exemple, comme on passe du point à la ligne et de la ligne à la surface, pour arriver de la surface au corps. Mais une fois là, il est interdit d’aller plus loin.
  24. Le texte n’est pas tout à fait aussi précis, et j’ai dû paraphraser un peu tout ce passage.
  25. Ce sont tous les corps qui sont accessibles à nos sens et à notre observation.
  26. C’est-à-dire que tout corps, par cela seul qu’il est corps, a nécessairement les trois dimensions.
  27. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte.
  28. La pensée est obscure et demandait à être plus développée.
  29. J’ai ajouté ces deux derniers mots.
  30. Le tout est nécessairement immuable et éternel.
  31. Voir plus loin dans ce même livre, ch. 5.
  32. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte. Ce paragraphe prouve que, dans la pensée d’Aristote, le traité du Ciel ne devait pas se borner à l’étude du ciel exclusivement. Voir plus haut la note sur le titre de ce traité.
  33. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte. Ces parties essentielles de l’univers sont les quatre éléments, la terre, l’eau, l’air et le feu ; plus un cinquième, dont Aristote reconnaît la nécessité.
  34. Qui ont été exposés tout au long dans la Physique.
  35. Voir la Physique, livre II, ch. 1, § 3, t. II, p. 2 de ma traduction.
  36. Il y a trois mouvements différents : le mouvement d’altération, par lequel un être passe d’une qualité à une autre, sans changer de quantité, ni de lieu ; le mouvement de quantité, par lequel un être s’accroît ou diminue ; enfin le mouvement de lieu, par lequel un être passe d’un lieu à un autre lieu.
  37. Voir la Physique, donnant ces mêmes théories, livre VIII, ch. 12, § 2, page 530 de ma traduction.
  38. J’ai répété le mot de mouvement, qui est sous-entendu grammaticalement dans le texte grec ; celui de grandeur, qui semble amené par ce qui précède, ne pourrait être substitué, à cause d’un changement de genre dans l’original.
  39. C’est-à-dire qui n’est pas composée de lignes droites et de lignes circulaires.
  40. Voir plus haut, ch. I, § 2.
  41. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte.
  42. C’est-à-dire que le mouvement a trois directions, de même que le corps ne peut avoir que trois dimensions. Voir plus haut, ch. 1, § 4.
  43. Ce sont les quatre éléments, la terre, l’eau, l’air, le feu, et peut-être aussi l’éther.
  44. Nous ne dirions pas autrement aujourd’hui ; seulement, les corps simples ne sont pas les mêmes, et l’analyse en a poussé le nombre bien au-delà de ceux que supposaient les Anciens.
  45. Par corps analogues, on ne peut entendre ici que les deux autres éléments, l’air et l’eau. Il n’y a aucun inconvénient à réduire tous les corps à ces quatre là, quand on se rappelle l’extension que les Anciens donnaient à ces idées ; par exemple, les minéraux de toute espèce, les métaux, les bois, les plantes étaient compris sous la nom générique de Terre : et de même pour tout le reste. Voir la Météorologie, passim et notamment livre IV, ch. 6, § 2.
  46. Ceci aurait demandé à être éclairci par des exemples ; car il est difficile de comprendre comment les composés pourraient avoir plusieurs mouvements, puisqu’ils sont toujours entraînés par l’élément qui y prédomine.
  47. Le texte n’est pas aussi précis.
  48. Voir la Météorologie, loc. cit.
  49. Répétition d’une partie du § précédent.
  50. Ce corps simple est le cinquième, et il doit se joindre aux quatre autres ; ce serait le ciel, selon quelques commentateurs ; il vaut mieux comprendre qu’il s’agit de l’éther. Voir le chapitre suivant, et aussi la Météorologie, livre I, ch. 3, §§ 3 et 4.
  51. L’expression de ce § est trop concise ; en voici la pensée un peu plus développée : « Le cinquième élément doit avoir le mouvement circulaire pour mouvement naturel ; car le mouvement circulaire ne pourrait être qu’un mouvement forcé pour les autres éléments, puisqu’ils n’ont naturellement qu’un seul mouvement, et que cet unique mouvement naturel est toujours en ligne droite : en haut, pour l’air et le feu ; en bas, pour la terre et pour l’eau. »
  52. Par exemple, le feu peut être par force poussé en bas, bien que sa tendance naturelle soit toujours de se diriger en haut.
  53. La terre et l’eau vont toujours en bas ; l’air et le feu vont toujours en haut. Ceci est un premier argument pour démontrer qu’il doit nécessairement exister un élément spécial, qui soit naturellement animé du mouvement circulaire, lequel serait un mouvement forcé pour tous les autres éléments.
  54. Second argument en faveur de l’existence nécessaire d’un cinquième élément. Un mouvement n’est jamais contraire qu’à un seul autre mouvement ; et le mouvement circulaire ne peut être le contraire du mouvement des quatre éléments connus ; car ils ont soit le mouvement en bas, soit le mouvement en haut ; et ces deux mouvements sont déjà contraires l’un à l’autre.
  55. C’est-à-dire non entremêlé de lignes droites ou de courbes irrégulières.
  56. Par exemple, l’air qui se rapproche du feu.
  57. Qui est toujours en ligne droite, comme l’observation peut nous en convaincre.
  58. J’ai ajouté ce mot pour préciser davantage la pensée.
  59. Troisième argument pour démontrer que le cinquième élément ne peut avoir qu’un mouvement circulaire. Si le mouvement circulaire est contraire à la nature d’un corps, il faudra que ce corps ait naturellement un mouvement opposé au mouvement circulaire. Or, le nouveau mouvement ne pourrait être qu’en ligne droite ; et dès lors, si ce cinquième élément montait en haut, ce serait du feu ou de l’air ; ou s’il descendait en bas, ce serait de la terre ou de l’eau. De l’une ou l’autre façon, ce ne serait plus un cinquième élément différent des autres.
  60. Un mouvement autre que le mouvement circulaire, et il n’y a que le mouvement en ligne droite, soit en haut, soit en bas. Voir plus haut dans ce chapitre, § 2.
  61. C’est-à-dire le mouvement circulaire, appliqué au cinquième élément.
  62. Le premier soit en importance, soit en temps.
  63. Ou le complet.
  64. Axiôme purement rationnel, et tout puissant. C’est celui dont Descartes s’est servi dans le Discours de la méthode, pour démontrer l’existence de Dieu, page 159 de l’édition de M.  V. Cousin.
  65. Voir, dans la Physique, la théorie de la translation circulaire, livre VIII, ch. 12, §§ 42 et suiv. et ch. 13 et 14, tome 11, pages 548 et suiv. de ma traduction.
  66. Voir la Physique, livre VIII, ch. 14, § 1, pour la comparaison de la ligne droite et du cercle.
  67. Le texte n’est pas tout à fait aussi précis ; j’ai dû le paraphraser en partie pour le rendre tout à fait clair.
  68. Même remarque.
  69. Voir plus loin livre II, ch. 4, § 2 ; voir aussi la définition de l’infini dans la Physique, livre III, ch. 4 et surtout ch. 9, § 2, tome II, page 125 de ma traduction.
  70. C’est-à-dire supérieur au feu, à l’air, à l’eau et à la terre.
  71. Voir plus haut § 5.
  72. L’expression est assez remarquable ; mais par la manière dont elle est employée ici, elle est assez obscure. Cette substance supérieure à toutes les autres est-elle Dieu elle-même ? Ou bien reçoit-elle plus directement l’action de Dieu ? Ce dernier sens ne peut guère être celui d’Aristote, qui a séparé complètement Dieu de la nature. La pensée de ce § se trouvera répétée un peu plus bas, à la fin du chapitre. Simplicius a pleinement adopté cette théorie d’Aristote, et il la défend vivement contre les critiques dont elle paraît avoir été l’objet, depuis Alexandre d’Aphrodisée jusqu’à Plotin et Proclus.
  73. Autre série d’arguments, pour démontrer l’existence nécessaire d’un cinquième élément, qui soit animé du mouvement circulaire, tandis que les quatre autres éléments n’ont que le mouvement en ligne droite, soit de bas en haut, soit de haut en bas.
  74. Voir une théorie analogue dans la Physique, livre IV, ch. 11, § 7, tome II, page 202 de ma traduction.
  75. C’est en partie l’argument qui précède, présenté sous une autre forme.
  76. Voir la Physique, livre VIII, ch. 14. Peut-être pourrait-on traduire Translation au lieu de Direction.
  77. En d’autres termes : Les éléments.
  78. Le Ciel ou l’Éther.
  79. Le texte n’est pas tout à fait aussi formel.
  80. Ou plutôt contraire aux lois de la raison.
  81. Voir la démonstration de cette théorie dans la Physique, livre VIII, ch. 14, tome II, page 553 de ma traduction.
  82. C’est Anaxagore, qui identifiait le ciel ou l’éther avec le feu. Voir la Météorologie, livre I, ch. 3, § 4, page 9 de ma traduction.
  83. Voir la Physique, livre II, ch. 1, § 9 et livre V, ch. 9, § 16, tome II, pages 4 et 336 de ma traduction.
  84. Voir la Météorologie, livre I, ch. 2 et 3, pages 4 et suiv. de ma traduction. Cet autre élément est celui qui enveloppe le monde sublunaire où nous sommes, c’est-à-dire le ciel ou l’éther. Voir sur toutes ces diverses théories la Physique, livre IV, ch. 7, § 10, tome II, page 180 de ma traduction.
  85. Il aurait fallu préciser ces hypothèses en indiquant les assertions auxquelles on ne donne qu’une valeur incomplète ; il aurait fallu aussi préciser davantage les assertions qu’on regarde comme démontrées.
  86. Cette évidence est fort contestable ; et comme le cinquième élément échappe à l’observation, il est difficile de démontrer d’une manière absolue ce qu’il peut être.
  87. J’ai ajouté ces mots pour rendre plus nettement la pensée. Il n’y a que le cinquième élément qui n’ait ni pesanteur ni légèreté.
  88. Voir plus loin le livre IV.
  89. Id., ibid.
  90. De la pesanteur et de la légèreté. Mais en attendant, les définitions qui vont être données ici seront très-suffisantes pour les faire bien comprendre l’une et l’autre.
  91. Voir la même définition dans la Physique, livre IV, ch. 1, § 1, tome II, page 175 de ma traduction.
  92. Le texte grec n’a que ce dernier mot.
  93. C’est la terre, qui remplit cette condition.
  94. C’est le feu, qui se place au-dessus de l’air.
  95. Il faut remarquer cette restriction qui ne s’applique pas au cinquième élément, puisqu’il a un mouvement circulaire, et qu’il n’est par conséquent porté ni en haut ni en bas.
  96. Ainsi l’eau est légère par rapport à la terre, elle est lourde relativement à l’air ; et réciproquement, comme il est dit un peu plus bas.
  97. Par les corps il faut entendre ici d’abord les éléments, et ensuite les corps proprement dits, qui en sont composés.
  98. Cette démonstration résultera de ce qui va suivre.
  99. Parce qu’il ne va ni en haut ni en bas, restant toujours dans l’orbite qu’il décrit.
  100. Car il faudrait qu’il fût pesant.
  101. Car il faudrait qu’il fût léger.
  102. Voir au chapitre précédent, § 3.
  103. Le texte n’est pas tout à fait aussi précis.
  104. C’est-à-dire étant porté en ligne droite.
  105. Voir la Physique, liv. V, ch. 7, §§ 4 et suiv., tome II, p. 320 de ma traduction.
  106. La pensée de ce § est assez obscure ; je la paraphrase pour l’éclaircir. D’abord, il semble qu’Aristote répond ici à une objection secrète, comme le suppose saint Thomas ; et cette objection serait celle-ci : Il est vrai que le cinquième élément peut avoir dans sa totalité un mouvement circulaire ; mais ses parties peuvent avoir aussi une autre espèce de mouvement. Aristote répond : « Le tout et les parties qui le composent sont toujours soumises à un seul et même mouvement. Une motte de terre se dirige vers le centre, tout aussi bien que s’y dirige la terre dans sa masse totale. De ceci ressortent deux conséquences : la première, c’est que le cinquième élément, dont la course est circulaire ne peut avoir ni pesanteur ni légèreté ; car s’il en avait, il serait naturellement porté vers le centre, ou il s’éloignerait du centre ; la seconde, c’est que le cinquième élément ne peut pas avoir aucune de ses parties soumise à un autre mouvement que celui dont il est animé lui-même. » Je ne soutiens pas que cette argumentation soit très-solide ; mais il me semble certain que c’est celle qui ressort du texte. — Le corps qui se meut circulairement, l’original n’est pas aussi précis. — Car alors il pourrait… avoir un mouvement en ligne droite qui lui serait naturel, et il serait porté soit en haut soit en bas, selon qu’il aurait légèreté ou pesanteur. — Que le mouvement circulaire, j’ai ajouté ce développement pour compléter la pensée. — Ni pour aucune de ses parties, cette phrase m’a permis de préciser un peu davantage ma traduction, quand j’ai dit un peu plus haut : « Il est impossible qu’une partie de ce corps, etc. »
  107. C’est un argument logique, mais qui pour cela n’en a pas moins de force.
  108. Voir la Physique, liv. I, ch. 7, § 9, tome I, page 465 de ma traduction, et les chapitres suivants.
  109. Ceci se rapporte à la Physique, locc. laudd., comme l’ont reconnu les commentateurs, et Simplicius le premier.
  110. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte grec.
  111. L’original est moins précis.
  112. Voir cette démonstration dans la Physique, livre VIII, ch. 12, § 41, tome II, page 547 de ma traduction.
  113. Le texte n’est pas tout à fait aussi formel.
  114. Et qui est assimilé, pour accroître le corps.
  115. Quand la chose périt et disparaît en perdant sa forme.
  116. Le texte n’a qu’un mot tout à fait indéterminé.
  117. Ici encore le texte n’a qu’un pronom ; j’ai dû être plus précis. Ceci d’ailleurs est tout à fait d’accord avec l’éternité du monde, et l’éternité du mouvement, telle qu’Aristote l’a toujours soutenue ; voir la Physique, livre VIII, tome II, page 453 de ma traduction.
  118. C’est l’hypothèse faite pour le ciel et le premier élément des choses.
  119. Voir la définition de l’altération ou mouvement dans la qualité, Physique, livre III, ch. 1, § 8, tome II, page 71 de ma traduction. — Un mouvement dans la qualité, Voir pour cette expression la Physique, loc. cit.
  120. voir les Catégories, ch. 8, § 3, page 95 de ma traduction.
  121. L’original ici n’est pas moins pénible que ma traduction ; il eût été facile d’être à la fois plus simple et plus clair.
  122. Qui sont en effet dans un changement perpétuel, soit qu’ils croissent soit qu’ils dépérissent.
  123. Ceci ne se conçoit pas bien. Il s’agit sans doute des diverses parties de la matière inerte.
  124. Le texte dit simplement : « Le corps circulaire. » Peut-être aurait-il fallu garder cette dernière expression.
  125. Et de là, l’éternité du monde dans le système d’Aristote.
  126. Si ce n’est celle du mouvement, qui d’ailleurs ne change en rien la substance ; voir la Physique, livre VIII, chap. 10, § 12, tome II, p. 524 de ma traduction.
  127. Aristote a toujours attaché une égale importance à l’observation des faits et à la théorie. Voir ma préface à la Météorologie, page XLIV et suiv.
  128. J’ai ajouté ces mots pour rendre la force de l’expression grecque.
  129. Le consentement universel ou à peu près universel est un argument très puissant, et dont il a été fait grand usage depuis Aristote et Platon.
  130. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte.
  131. C’est-à-dire qu’ils donnent le ciel éternel pour demeure aux Dieux éternels comme lui.
  132. Parce qu’en effet un être immortel ne pourrait avoir une demeure caduque et passagère.
  133. C’est-à dire le cinquième élément ou le ciel.
  134. Non pas en tant que l’on peut observer individuellement, mais en tant que les observations peuvent se transmettre d’âges en âges.
  135. Voir la Météorologie, sur la durée séculaire des observations humaines pour certains faits, livre I, chap. 14, § 7, pages 88 et suiv.
  136. Peut-être la science moderne pourrait-elle citer des faits contraires à cette théorie ; mais les changements observés, s’il y en a bien réellement, sont si peu considérables que la science peut les omettre sans danger, et qu’elle peut affirmer l’immuabilité du système du monde.
  137. Qu’ont beaucoup reculées pour les modernes les instruments ingénieux et puissants qu’ils ont inventés.
  138. Il faut se rappeler qu’Aristote distingue parfois le ciel de cette partie du monde qui s’étend de la lune jusqu’à notre terre.
  139. Aristote a toujours professé le respect le plus sincère pour la tradition ; voir un peu plus loin, livre II, ch. 1, § 2.
  140. Voir la Météorologie, livre I, ch. 3, § 4, page 10 de ma traduction.
  141. Voir des idées tout à fait analogues dans la Météorologie, loc. cit. et les notes. Cette étymologie du mot Éther est bien peu vraisemblable, et ce n’est pas le Cratyle de Platon qui peut lui donner plus d’autorité. On la fait venir souvent aussi d’un autre mot qui signifie Brûler ; et alors elle confirmerait la théorie d’Anaxagore, qui confond l’éther et le feu.
  142. Voir la Météorologie, loc. cit., où le même reproche est adressé à Anaxagore.
  143. Selon Aristote, il y a cinq corps simples, les quatre éléments, plus l’éther ou le ciel. Ce dernier élément, qui est supérieur à tous les autres, a un mouvement circulaire ; les quatre autres ont le mouvement en ligne droite, soit en haut, soit en bas, deux par deux.
  144. Voir plus haut chap. 2, §§ 3 et suiv., page 1.
  145. Ou force centrifuge.
  146. Ou force centripète. Le premier mouvement appartient à l’air et au feu ; le second appartient à la terre et à l’eau. Aujourd’hui toute cette cosmologie peut nous paraître bien grossière et bien peu précise. Mais il faut se reporter au temps d’Aristote où toutes ces théories étaient fort neuves et pouvaient passer pour un grand progrès. Il faut ajouter qu’elles ont été dominantes jusqu’au seizième siècle, et que ce n’est guère que depuis lors que l’analyse a été poussée plus loin, et qu’on a fait de nombreuses et importantes découvertes, par des méthodes que la scholastique n’avait pas pratiquées, mais qui étaient bien déjà celles d’Aristote.
  147. Plus haut, ch. 2, § 7, ce principe a été admis sans qu’il fût démontré ; ici on en donne la démonstration, qui n’est peut-être pas très-nécessaire.
  148. On pourrait comprendre aussi le mouvement en ligne droite, au lieu de la ligne droite.
  149. Ou au mouvement circulaire.
  150. La ligne qui termine la circonférence offre ces deux caractères, selon qu’on la considère en dedans ou en dehors. Le convexe et le concave sont bien opposés entr’eux ; mais la même ligne qui a ces deux caractères est opposée aussi à la ligne droite.
  151. Comme elles le sont, quand elles déterminent une circonférence.
  152. Il a été démontré dans la Physique, livre VIII, ch. 12, § 41, tome II, page 547 de ma traduction, que le mouvement circulaire n’a pas de contraire.
  153. Voir la Physique, livre VIII, ch. 12, § 4, tome II, page 530 de ma traduction.
  154. Seuls mouvements qui puissent se faire en ligne droite.
  155. L’expression est assez singulière en notre langue ; mais j’ai tenu à conserver l’analogie de Contraire et de Contrariété, qui répond davantage au texte grec.
  156. Le texte dit précisément : Ensuite.
  157. Dans le mouvement en ligne droite, il y a des contraires ; on pourrait croire aussi qu’il y en a dans le mouvement circulaire ; mais cela n’est pas.
  158. Il faut imaginer que c’est un mouvement sur un simple arc de cercle, et non pas encore sur une demi-circonférence, ni sur un cercle entier.
  159. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte. Voir sur le mouvement contraire, la Physique, livre VIII, ch. 2, § 14, tome II, page 530 de ma traduction, et livre VIII, ch. 14, § 4.
  160. On ne voit pas très-bien la force de cet argument, et l’expression n’est pas suffisante. Aristote veut dire sans doute qu’entre deux points donnés on ne peut mener qu’une seule ligne droite, tandis qu’on y peut faire passer un nombre infini de lignes courbes. Il s’ensuit que le mouvement fait sur une de ces courbes, ne peut pas être aussi directement contraire à un autre mouvement sur ces mêmes courbes, que le mouvement sur une seule ligne droite est contraire au mouvement sur cette même ligne ; car celui-ci est obligé de revenir par le même chemin qu’a suivi l’autre, et dès lors il lui est absolument contraire.
  161. Le texte n’est pas tout à fait aussi explicite ; j’ai dû le paraphraser un peu pour le rendre plus clair.
  162. De telle façon que le mouvement allât d’une extrémité du demi-cercle à l’autre, et revint, par la même voie, de la seconde extrémité à la première.
  163. C’est-à-dire que les deux extrémités sont celles du diamètre, soit que ce mouvement soit curviligne, soit qu’il soit en ligne droite. Mais dans un cas il suit une ligne courbe ; tandis que, dans l’autre, il parcourt une même ligne droite en allant et en revenant.
  164. C’est-à-dire le point où le mouvement commence et le point où il finit.
  165. Qui est le diamètre, quand on trace un cercle et quand le mouvement suit la circonférence.
  166. Nouvelle hypothèse pour expliquer comment le mouvement circulaire ne peut être contraire à un mouvement circulaire. Ce n’est plus un mouvement qui reviendrait sur la même ligne courbe, qu’il aurait préalablement parcourue sur une demi-circonférence ; mais ce serait la demi-circonférence du haut qu’on regarderait comme contraire à la demi-circonférence du bas.
  167. J’ai ajouté ce dernier mot.
  168. C’est-à-dire les mouvements qui ne se bornent plus à une demi-circonférence, mais qui parcourent la circonférence tout entière.
  169. Ce sont deux mouvements qui parcourraient l’un et l’autre la circonférence entière, mais dont l’un irait de droite à gauche, par exemple, pendant que l’autre irait de gauche à droite. Aristote soutient que, même dans ce cas, les mouvements ne sont pas contraires. Cette théorie est contestable, et Philopon a essayé de montrer qu’elle n’était pas exacte.
  170. J’ai ajouté ces mots pour que la pensée fût plus claire.
  171. Et, par exemple, le mouvement part de A pour revenir circulairement à A, soit qu’il aille à droite, soit qu’il aille à gauche.
  172. Voir la Physique, livre V, ch. 6 et 7, t. II, p. 306 et 320 de ma traduction.
  173. Voir la Physique, livre V, ch. 7, § 12, p. 326. § 7.
  174. Argument tout métaphysique et qui tient à la théorie des causes finales, dont Aristote a toujours été un des plus fermes partisans.
  175. Le texte n’est pas aussi précis.
  176. Voir la Physique, livre VIII, ch. 14, § 1 et suiv., t. II, p. 553 de ma traduction.
  177. Ou plus brièvement : « les contrariétés de lieu. »
  178. Ou peut-être encore : « Si ces forces étaient égales. » Le texte est indéterminé.
  179. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte.
  180. Parce qu’il serait neutralisé, étant le plus faible.
  181. Le texte est moins précis.
  182. Comparaison vulgaire et assez inattendue dans un sujet si relevé. C’est peut-être une interpolation.
  183. Fécond principe qu’Aristote a toujours soutenu, et qu’on aurait le plus grand tort de bannir de la philosophie. Voir l’admirable apologie de la nature et la réfutation développée du système du hasard, Physique, livre II, ch. 8, t. II, p. 52 de ma traduction.
  184. Cette question a été agitée dans la Physique, livre III, ch. 7, t. III, p. 100 de ma traduction, où Aristote s’est prononcé pour la négative. Il donnera ici une solution semblable.
  185. Simplicius nomme parmi ces philosophes Anaximène, Anaximandre, Démocrite, Anaxagore, qui ont cru à l’existence de l’infini, et qui en ont fait un principe.
  186. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte.
  187. Le texte n’est pas tout à fait aussi précis.
  188. Simplicius pense avec raison qu’il s’agit ici des atomes de Démocrite.
  189. Et par exemple, qu’une ligne est toujours divisible en deux parties. Avec la théorie des atomes de Démocrite, on arrive aux lignes insécables, puisqu’elles n’ont plus aucune longueur ; ce qui est contradictoire.
  190. On peut voir dans la Physique, livre III, ch. 4, § 2, t. II, p. 88 de ma traduction, le rôle considérable que plusieurs philosophes ont donné à l’infini, dans le système du monde.
  191. Le texte n’est pas aussi précis ; mais il est clair qu’Aristote traite comme une hypothèse sans solidité la théorie qu’il a énergiquement combattue dans la Physique, loc. laud.
  192. C’est une discussion spéciale qu’on peut voir dans la Météorologie, livre I, ch. 3, § 5, p. 40 de ma traduction. Les corps simples sont les quatre éléments, dont aucun ne peut être infini.
  193. J’ai ajouté ces mots pour que la pensée fût plus claire.
  194. Le texte n’est pas tout à fait aussi précis.
  195. Voir la Météorologie, livre I, ch. 3, § 5, p. 40 de ma traduction.
  196. Dans ce qui va suivre.
  197. C’est-à-dire du cinquième élément, l’éther, ou le Ciel.
  198. Le centre du monde est la terre ; et les lignes abaissées du centre seraient celles qui, de la terre, iraient jusqu’aux extrémités du Ciel.
  199. En longueur tout aussi bien qu’en nombre.
  200. Cette expression n’est pas très-nette ; mais c’est celle même de l’original, que je n’ai pas cru devoir changer. Voir la définition de l’infini dans la Physique, livre III, ch. 6, t. I, p. 96 de ma traduction.
  201. Si l’on suppose les lignes abaissées du centre prolongées à l’infini.
  202. Et alors la réciproque est vraie pour des lignes infinies, comme le sont celles qu’on suppose.
  203. Cet argument ne paraît pas ici tout à fait à sa place, et il eût été plus régulier de le mettre un peu plus haut, aussitôt après avoir dit que les lignes abaissées du centre sont infinies.
  204. J’ai ajouté le mot de Précisément.
  205. Voilà le point essentiel de l’argumentation. La distance étant infinie entre les lignes abaissées du centre, il est bien clair que la circonférence entière, décrite par le corps à mouvement circulaire, sera infinie à plus forte raison ; et par conséquent, ce corps ne pourra jamais parcourir son orbite.
  206. C’est le témoignage même de nos sens.
  207. Voir plus haut, ch. 2, § 5, p. 1.
  208. J’ai ajouté ce mot.
  209. Pour prouver que le corps à mouvement circulaire ne peut être infini.
  210. Ce postulat est de toute évidence, et il trouvera son application un peu plus bas.
  211. Le texte n’est pas tout à fait aussi formel ; j’ai dû le préciser, d’après les explications de Simplicius et des autres commentateurs.
  212. Il a été démontré dans la Physique, livre VI, ch. 5, § 1, tome II, page 362, de ma traduction, que le temps, le mouvement et le mobile étaient trois termes corrélatifs, dont l’un ne peut changer sans que les autres n’éprouvent aussi des changements analogues et proportionnels. C’est en partant du temps qu‘Aristote prouvera que le corps à mouvement circulaire doit être nécessairement fini, puisque le temps qui mesure sa course est fini lui-même.
  213. Ici encore le texte est beaucoup moins précis que ma traduction.
  214. D’après les explications que donne Simplicius, voici la figure qu’il conviendrait de tracer : Soit un cercle, dont le centre est C. Le point A est sur la circonférence, et le point E indique que la ligne du centre est infinie en ce sens. Plus loin, une sécante parallèle au rayon CA coupe la circonférence en deux points, sans passer par le centre ; et les deux lettres BB qui la désignent indiquent qu’elle est infinie dans l’un et l’autre sens. C’est la figure qui, de l’antiquité, a été transmise à la Scholastique, et qu’on peut trouver à peu près telle que je la donne ici dans les œuvres de Saint-Thomas et d’Albert.
  215. Le centre C serait alors la terre immobile, et le point E indiquerait la partie du Ciel où se passe la révolution des astres.
  216. Le texte dit précisément : « coupant à un moment donné, » et peut être eût-il mieux valu traduire : « et devenant sécante à un certain moment. »
  217. Peut-être vaudrait-il mieux dire : « la ligne CAE, » selon la disposition des lettres, dans la figure.
  218. Le texte n’a qu’un seul mot. Ce temps fini et limité est celui que, selon les théories d’Aristote, le Ciel met à faire sa révolution autour de la Terre, c’est-à-dire vingt-quatre heures.
  219. En d’autres termes, il y aura un moment où la ligne ACE, qui est en mouvement, atteindra la ligne BB, qui est supposée immobile.
  220. C’est la durée du jour.
  221. La ligne ACE atteint dans sa révolution la ligne BB ; elle la coupe, et elle met un certain temps à ta couper. Si l’on retranche ce temps du temps total que la ligne ACE met à décrire le Cercle entier, il est clair que le temps partiel sera fini, puisque le temps total est fini lui-même.
  222. Puisqu’on suppose que la ligne BB est infinie, et qu’il est impossible qu’elle ait un commencement, comme elle devrait en avoir un, d’après l’axiôme posé au début du §.
  223. La conclusion est évidente, et la proposition serait contradictoire, puisque le cercle est nécessairement limité par la circonférence.
  224. Alexandre d’Aphrodisée, d’après Simplicius, reconnaissait ici qu’Aristote n’a pas voulu nier l’infinité du monde, mais seulement l’infinité du Ciel, qui se meut circulairement, et qui, par conséquent, ne peut pas être infini.
  225. C’est la troisième raison pour affirmer que le corps qui se meut circulairement, c’est-à-dire le Ciel, ne peut être infini.
  226. Ni circulairement ni de toute autre manière ; voir un peu plus bas la conclusion du § 6.
  227. Il suffit, pour la figure, de tracer deux lignes parallèles, dont l’une des deux ou toutes les deux seraient supposées se mouvoir, sans perdre leur parallélisme.
  228. C’est la première supposition ; mais pour arriver à la démonstration, il faudra supposer un peu plus bas que l’une des deux lignes est infinie.
  229. Ou s’éloigne en se dégageant.
  230. Ce sont là des axiômes très-vrais et très-importants dans la théorie générale du mouvement ; mais on ne voit pas assez distintement comment ils se rattachent à la présente démonstration.
  231. C’est évidemment la Physique, qu’Aristote veut désigner ; et l’on y trouve en effet cette théorie exposée tout au long, livre VI, ch. 1, § 22, t. II, p. 350 de ma traduction.
  232. La démonstration s’allonge inutilement, et elle n’aboutit pas aussi vite qu’elle le pourrait.
  233. Même remarque.
  234. Voilà la partie essentielle de la démonstration.
  235. Parallèlement à une ligne infinie. — Suivant la ligne finie, ou parallèlement à une ligne finie.
  236. Conclusion de cette longue démonstration.
  237. J’ai ajouté ces mots.
  238. C’est-à-dire dans les vingt-quatre heures.
  239. Représentant la partie intérieure d’une circonférence.
  240. Le texte est moins explicite.
  241. Quatrième argument pour démontrer que le corps qui a le mouvement circulaire, ne peut pas être infini.
  242. Il semble qu’il y a ici une contradiction jusque dans les termes, et que ce soit là une vérité par trop évidente.
  243. Même observation.
  244. En effet qui dit figure, dit limite et détermination, par cela même.
  245. Il y a quelque redondance dans tous ces développements.
  246. Ou plutôt il est impossible que le corps qui se meut circulairement, soit infini.
  247. Cinquième argument pour démontrer que le corps qui se meut circulairement, ne peut pas être infini. La figure qui serait à tracer, d’après les explications de Simplicius, serait la suivante : Un cercle ; le centre C ; une ligne infinie dans les deux sens et passant par le centre, AB ; une autre ligne également infinie E, qui ne passe pas le centre ; CD, ligne menée du centre, et par conséquent finie de ce côté et infinie de l’autre. Elle touche la ligne infinie E au point F ; et comme cette ligne E est infinie, CD ne pourra la parcourir ; par suite, elle ne pourra jamais accomplir un mouvement circulaire et fermé.
  248. C’est-à-dire comme une ligne touchant E à un autre point que la circonférence. Simplicius n’est pas entièrement satisfait de cette argumentation, et il ne la trouve pas assez claire.
  249. Ce qui est contradictoire, et ce qui est impossible comme il a été démontré dans la Physique, livre VI, ch. 11, § 7, t.  II, p. 386 de ma traduction.
  250. Il faut entendre par là l’espace infini ; et dans ce ciel immobile, se meut le ciel que nous observons, et qui, selon les théories d’Aristote, fait sa révolution en vingt-quatre heures ou dans l’espace d’un jour.
  251. À l’espace dans lequel il accomplit son mouvement.
  252. Dans la Physique, livre VI, ch. 2, loc. cit. Ce sixième argument n’est pas plus net que les autres, bien qu’au point de vue où se place l’auteur, il ait peut-être plus de force. Si le ciel était infini, le temps qu’il lui faudrait pour sa révolution serait également infini ; or, sa révolution s’accomplit évidemment dans un temps fini ; donc, etc.
  253. C’est-à-dire en raisonnant du temps à la grandeur, au lieu de raisonner de la grandeur au temps. Sur les relations du corps, du temps et de l’espace, voir la Physique, livre VI, ch. II, t. II, p.  385, et suiv. de ma traduction.
  254. Puisque le Ciel ne se déplace pas et qu’il fait une simple révolution sur lui-même.
  255. Résumé assez exact de ce chapitre.
  256. C’est le Ciel tout entier, moins la Terre qui reste immobile, et autour de laquelle tourne tout le reste, d’après les théories d’Aristote.
  257. Après avoir prouvé que le corps qui se meut circulairement ne peut être infini, on applique cette démonstration aux corps qui, au lieu de se mouvoir circulairement, sont animés d’un mouvement en ligne droite, soit qu’ils tombent vers le centre par leur poids naturel, comme la terre et l’eau, soit qu’ils s’éloignent du centre par leur légèreté, comme l’air et le feu. En un mot, si le cinquième élément ne peut être infini, les quatre autres ne le sont pas plus que lui.
  258. Ou vers le centre. J’ai conservé le mot de Milieu, pour me rapprocher davantage du texte.
  259. J’ai ajouté ces mots pour compléter la pensée et l’éclaircir.
  260. J’ai préféré ce mot à celui de Mouvements.
  261. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte. C’est d’ailleurs l’action de la pesanteur, à la surface du globe entier de la terre. Les graves, si leur chute pouvait se continuer jusqu’au centre, devraient nécessairement s’y arrêter, sans pouvoir aller au-delà.
  262. Ceci revient à dire que l’attraction, que le globe de la terre exerce sur tous les corps graves à sa surface, doit cesser à un certain point de l’espace ; et tout en partant de raisons purement métaphysiques, Aristote pressent la vérité.
  263. Le texte dit simplement : l’intermédiaire.
  264. Il faut entendre le mouvement en ligne droite des corps qui descendent ou qui s’élèvent, selon leur pesanteur ou leur légèreté ; or ce mouvement ne peut pas être infini, puisqu’il ne peut dépasser le centre.
  265. Dans le § précédent, ou dans ce qui a été dit au ch. 5, en traitant du mouvement circulaire.
  266. Il semble que c’est l’intermédiaire qu’il faudrait dire et non le milieu, puisque jusqu’à présent le milieu a été pris pour le centre ; et que le haut et le bas étant déterminés, on veut prouver que l’intervalle qui les sépare doit l’être comme eux.
  267. J’ai ajouté ces mots.
  268. Voir toute la discussion de cette théorie dans la Physique, livre III, ch. 7, §§ 1 et suivants, tome 11, page 101 de ma traduction. Voir aussi la Météorologie, livre I, ch. 3, § 6, page 10 de ma traduction.
  269. C’est une autre série d’arguments, pour démontrer qu’il ne peut pas y avoir de corps infini ; et ces nouveaux arguments sont tirés de la pesanteur ou de la légèreté des corps. La pesanteur ne peut être infinie ; or elle devrait l’être, si le corps était infini ; donc le corps n’est pas infini, puisque la pesanteur ne l’est pas.
  270. Le texte dit simplement : « Aucun de ces corps. »
  271. Attendu que les deux contraires sont soumis aux mêmes conditions.
  272. C’est-à-dire l’air et le feu, parmi les éléments.
  273. La démonstration qui suit n’est pas aussi évidente que l’auteur semble le croire, et l’emploi des formules littérales n’aide pas beaucoup à la clarté.
  274. C’est la supposition contraire à l’axiôme posé dans le § précédent, à savoir que la pesanteur devrait être infinie, si le corps était lui-même infini. Le texte d’ailleurs n’est pas aussi formel que ma traduction.
  275. Supposée finie et non plus infinie.
  276. Qui est représentée par BD.
  277. C’est-à-dire que répétée un certain nombre de fois, elle reproduise exactement la plus grande. Par le plus grand, on doit entendre le corps infini, représenté par AB.
  278. BD représente le plus petit corps qui multiplié, un certain nombre de fois, forme le corps BF avec lequel il est en proportion, sans que ce corps BF puisse jamais être infini.
  279. Qui sera toujours aussi grande que l’on voudra, sans pouvoir jamais égaler l’infini. C’est le cas du corps BF.
  280. En supposant que la pesanteur de l’infini soit finie, comme on vient d’en admettre l’hypothèse, au début du §. Il y a dès lors contradiction évidente ; car la pesanteur du fini ne peut pas égaler la pesanteur de l’infini ; et par conséquent, l’hypothèse n’est pas soutenable.
  281. Autre impossibilité, à savoir que la pesanteur du fini pourrait devenir plus grande que celle de l’infini.
  282. Il faut supposer que le corps HB est plus grand que le corps BF ; et par conséquent, sa pesanteur doit être plus considérable. Or le corps BF a pour pesanteur C, qui est aussi, par supposition, la pesanteur de l’infini. Il s’en suivrait donc que la pesanteur d’un corps fini BF pourrait être même plus grande que celle de l’infini. Ce qui est impossible.
  283. Il faut ajouter en outre que ces grandeurs inégales seraient composées des mêmes éléments ; car autrement le rapport ne serait plus possible, puisqu’une grandeur plus petite pourrait être plus pesante, si la matière dont elle est formée était plus pesante aussi.
  284. C’est une sorte d’objection, au devant de laquelle Aristote croit devoir aller.
  285. Le poids C du corps infini, et le poids E du corps fini.
  286. La même impossibilité que plus haut, à la fin de l’alinéa précédent, à savoir que la pesanteur du fini serait plus grande que celle de l’infini.
  287. Seconde partie de l’hypothèse. Que les poids du fini et de l’infini soient commensurables ou incommensurables entr’eux, la conclusion n’en est pas moins la même. Il semble que ces détails sont un peu subtils et qu’ils ne sont pas très-nécessaires.
  288. C’est-à-dire de conclure de la pesanteur à la grandeur, ou à l’inverse, de la grandeur à la pesanteur. Les poids sont commensurables, si les grandeurs le sont ; et réciproquement, si les grandeurs sont commensurables, les poids le sont aussi. Comme l’une des deux grandeurs comparées est infinie, on peut toujours en retrancher une partie, dont le poids correspondra proportionnellement à celui de l’autre grandeur.
  289. Le texte n’est pas tout à fait aussi formel ; mais le sens ne fait pas le moindre doute. Cette objection nouvelle n’est pas plus grave que l’autre ; et ici encore on aurait pu la négliger sans aucun inconvénient.
  290. J’ai ajouté ces mots pour éclaircir la pensée ; car il est clair qu’il ne peut être question d’ajouter quoi que ce soit à l’infini, puisque l’infini surpasse toujours toute quantité donnée.
  291. Cette démonstration commence plus haut au § 3, et se poursuit jusqu’ici.
  292. C’est l’hypothèse posée au § 3.
  293. Second membre de l’hypothèse.
  294. Le texte n’a ici qu’un pronom indéterminé ; j’ai cru devoir le paraphraser, pour le rendre plus clair.
  295. Ces lois de la chute des graves sont déjà indiquée en partie dans la Physique, VII, ch. 6, t. II, p. 448 de ma traduction.
  296. C’est-à-dire, que plus le poids est considérable, plus le temps écoulé est court.
  297. Il y a ici une impossibilité et une contradiction inévitables, d’après les théories de l’auteur ; mais le texte reste obscur, et la pensée n’est pas assez nette. Si l’on suppose la pesanteur infinie, elle imprimera un mouvement au corps, comme la pesanteur finie en imprime un au corps fini. Mais il n’y a pas de proportion possible entre le fini et l’infini ; et le mouvement du corps qui aurait une pesanteur infinie, devrait être instantané ; or, il a été prouvé, dans la Physique, livre VI, ch. 2, § 8, t. II, p. 355 de ma traduction, qu’il n’y avait pas de mouvement possible dans la durée de l’instant. Ainsi, d’une part, le corps à pesanteur infinie devrait se mouvoir ; et d’autre part, il ne le pourrait pas. Voilà ce qui me semble ressortir de l’argumentation du texte, que n’ont pas assez éclairci les commentaires de Simplicius et de Saint-Thomas d’Aquin, et que je n’ose me flatter d’avoir éclairci davantage.
  298. Le texte n’est pas tout à fait aussi formel.
  299. Même remarque.
  300. J’ai dû encore ici développer le texte pour le rendre plus clair.
  301. Et sans être néanmoins l’instant, qui est une limite de deux temps, le passé et l’avenir, plutôt qu’il n’est lui-même du temps véritable.
  302. C’est-à-dire que le temps, dans lequel serait mu le corps infini, fût le plus court possible.
  303. Dont la pesanteur serait en rapport avec la durée la plus petite possible que le corps infini mettrait à faire son mouvement.
  304. J’ai ajouté : « De temps. »
  305. Il y a quelques manuscrits qui donnent : « plus petit, » au lieu de « plus grand. » La vieille traduction sur laquelle travaillait saint Thomas avait cette leçon, qui pourrait être défendue. J’ai préféré cependant la leçon vulgaire, parce qu’il faut que le poids du corps augmente pour que la rapidité de la chute augmente dans la même proportion, de manière à devenir presqu’instantanée, comme celle du corps à pesanteur infinie.
  306. Ou plutôt, le corps à pesanteur infinie aurait un mouvement égal à celui du corps à pesanteur finie.
  307. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte.
  308. Voir plus haut, § 3.
  309. Id. ibid.
  310. C’est le résumé de tout ce chapitre.
  311. On pourrait traduire, aussi : « En étudiant les éléments un à un » et c’est le sens qu’indique Simplicius ; j’ai préféré l’autre version, parce qu’elle reste aussi vague que le texte.
  312. De l’aveu de tous les commentateurs, il s’agit ici de la Physique, où en effet ces questions ont été traitées, livre III, ch. 7, § 14, t. II, p. 106 de ma traduction.
  313. Il n’est pas probable, en effet, que nous connaissions l’univers ; et ce que nous en voyons n’en doit être qu’une bien faible partie. On voit que la question de la pluralité des mondes n’était pas neuve, quand Fontenelle se plut à la traiter voilà près de deux siècles.
  314. Du moment qu’on en suppose plus d’un, il n’y a pas de raison pour que le nombre n’en soit pas infini, à moins qu’on ne veuille entendre par Monde une partie seulement de l’univers.
  315. Qui ne seront que le résumé de celles qui sont développées tout au long dans la Physique, livre III, ch. 4 et suiv., t. II, p. 87 et suiv. de ma traduction.
  316. Aristote procède ici comme dans beaucoup d’autres cas, par la méthode de division qu’il emprunte à la doctrine platonicienne, tout en en faisant la critique ; voir Premiers Analytiques, livre 1, ch. 31, p. 144 de ma traduction, et Derniers Analytiques, livre II, ch. 5, p. 209 de ma traduction.
  317. J’ai ajouté : En nombre, et la suite justifie cette addition.
  318. Première supposition ; l’infini ne peut pas être composé d’éléments hétérogènes.
  319. Voir plus haut, ch. 2.
  320. Et au nombre de trois : le mouvement en haut, le mouvement en bas, et le mouvement circulaire.
  321. Ce sont la terre, l’eau, l’air et le feu, avec le cinquième élément, qui forme le Ciel. Le mot dont se sert le texte grec pour signifier Espèces est Idea, et j’ai déjà remarqué l’emploi de ce mot dans la Météorologie, livre IV, 3, § 2, p. 284 de ma traduction.
  322. Dans le chapitre précédent.
  323. Second argument pour prouver que les éléments composant l’infini ne peuvent pas être hétérogènes, et ne peuvent être en nombre infini. Les lieux où se dirigeraient ces corps hétérogènes par leur tendance naturelle, devraient être aussi en nombre infini ; or ils ne le sont pas ; donc, etc.
  324. Le texte n’est pas aussi formel.
  325. Il s’agit du mouvement naturel des éléments simples ; la terre et l’eau se dirigeant en bas ; l’air et le feu se dirigeant en haut.
  326. Voir plus haut, ch. 6, § 1.
  327. Qui tombe et descend en bas, il n’y a qu’un seul mot dans le texte.
  328. Ne peut se mouvoir à l’infini, parce qu’il s’arrête au centre et y demeure en repos.
  329. Ni le corps qui s’élève en haut, le haut est déterminé, puisque le bas, son contraire, est déterminé.
  330. J’ai ajouté ces mots pour éclaircir la pensée, qui autrement resterait obscure.
  331. Même observation.
  332. Qui sont les trois espèces du mouvement ; voir la Physique, livre V, ch. 3, § 10, tome II, page 295 de ma traduction.
  333. C’est un mouvement dans la qualité.
  334. Mouvement de quantité.
  335. Mouvement de lieu.
  336. Si le lieu était infini, le corps ne pourrait jamais arriver en haut, pas plus qu’il ne pourrait jamais arriver en bas, puisque l’infini est infranchissable.
  337. J’ai dû ici paraphraser le texte, dont la concision est extrême ; et j’ai suivi, pour le sens que j’adopte, le commentaire de Simplicius et celui de saint Thomas. C’est une objection à laquelle Aristote semble répondre. On soutient que l’infini n’est pas un continu, mais qu’il se compose de parties séparées et diverses ; la continuité n’est pas nécessaire, et par exemple toutes les parcelles de feu, en se réunissant, peuvent faire que l’élément du feu soit infini, bien que d’abord elles fussent séparées les unes des autres. Simplicius croit que ce passage est une critique indirecte du système d’Anaxagore sur les Homœoméries ; mais il semblerait se rapporter plutôt aux atomes de Démocrite. Il faut reconnaître d’ailleurs que le texte reste toujours très-obscur, parce qu’il n’est pas ici encore assez développé.
  338. Voir plus haut ch. 1, § 4, page 4. C’est d’ailleurs un nouvel argument pour démontrer que l’infini ne peut pas être composé d’éléments dissemblables. Si ces éléments étaient multiples et dissemblables, chacun d’eux serait infini ; ce qui implique contradiction.
  339. C’est la seconde partie de l’alternative posée plus haut § 1. Il vient d’être démontré que l’infini ne peut pas se composer d’éléments hétérogènes ; on va démontrer maintenant qu’il ne peut pas se composer non plus d’éléments homogènes.
  340. Voir plus haut ch. 2, § 2, page 6. Ces mouvements sont au nombre de trois, le mouvement en haut, le mouvement en bas, et le mouvement circulaire.
  341. Soit le mouvement en haut, soit le mouvement en bas ; il sera question ensuite du mouvement circulaire. Si l’infini a le mouvement soit en bas, soit en haut, il y aura dès lors une pesanteur ou une légèreté infinies ; or, il vient d’être démontré, etc., ch. 6, §§ 1 et suiv.
  342. Voir plus haut, ch. 5, § 6.
  343. Voir plus haut, ch. 5, § 10.
  344. Voir plus haut, ch. 5, § 7, la même proposition, mais autrement démontrée.
  345. Parce que le mouvement naturel est le contraire du mouvement forcé, et que l’existence d’un des contraires implique nécessairement l’existence de l’autre.
  346. De celui où le porterait le mouvement forcé.
  347. Parce qu’il y sera porté par son mouvement naturel, comme la terre est portée en bas, et le feu est porté en haut.
  348. Parce qu’alors l’infini aurait deux lieux différents, l’un qui serait égal à lui, et qu’il occuperait, l’autre où il serait porté par son mouvement naturel ; par suite, il ne serait plus l’infini.
  349. Le texte n’est pas aussi formel ; mais le sens ne peut faire de doute ; il s’agit de prouver que l’infini ne peut agir sur le fini, et qu’il ne peut pas non plus en recevoir aucune action.
  350. Le texte est moins explicite.
  351. J’ai ajouté ces mots.
  352. Qui, étant plus petit que B, pourra être avec lui dans un certain rapport.
  353. Sur l’infini A. Le mouvement produit par D sera moindre que le mouvement produit, dans un temps égal, par B, qui est plus grand que D.
  354. On ne voit pas l’utilité de cette nouvelle hypothèse ; et il semble que les précédentes suffisent.
  355. La proportion serait à renverser ; car D est plus petit que B ; et E sera, par suite, plus grand que le terme dont il sera suivi.
  356. Il faut entendre Égal en force, capable de mouvoir de quelque façon que ce soit, le mouvement pouvant être de lieu, de quantité ou de qualité.
  357. Ces principes sont incontestables, et on peut les trouver déjà dans la Physique, livre VII, ch. 6, tome ii, page 446 de ma traduction.
  358. Cette conclusion ne remort pas assez nettement de ce qui précède.
  359. C’est là le seul argument décisif : il y a un rapport possible du fini au fini ; il n’y en a pas du fini à l’infini.
  360. Même remarque.
  361. Voir plus haut le début du § 8.
  362. Ni fini ni infini, comme on va le démontrer.
  363. Comme plus haut, au § 8.
  364. Parce qu’on
  365. Tandis que les considérations qui précèdent sont toutes logiques et métaphysiques, et s’appliquent à l’ensemble de l’univers, et non plus seulement aux choses de la nature.
  366. Voir plus haut, § 17 et § 7.
  367. Il n’y a qu’un seul mot dans le grec.
  368. Altérées et modifiées, Même remarque ; voir aussi la Physique, livre V, chap. 3, § 14. Saint Thomas s’efforce de démontrer, mais avec assez peu de succès, que toutes ces théories d’Aristote sont conformes à la foi catholique.