Le Mespris de la vie et consolation contre la mort/« Tu accuses la mort des tourmens rigoureus »
Le Mespris de la vie et consolation contre la mort
XLIII.
Tu accuses la mort des tourmens rigoureus
Que tu souffre en mourant, & si ne considere
Que tu as bien souffert de douleur plus amere,
Estant encore esclave en ce cors langoureus :
Commencant en langeur ton àge douloureus,
Tu les parfaits en pleurs, & finis en misere
La vie, & non la mort de tes maus est la mere,
Qui te rend en mourant, & vivant mal-heureus :
Le bout, & non le bort de nostre foible route
Est-ce qui nous tourmente, & fait que l'on redoute
L'inevitable loy du tems, & du destin :
Ne t'esmerveille donc, puisque nostre souffrance
Vivant avecque nous, avecque nous commence,
Si le soir de nos jours, ressemble à son matin.