À une route

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À une route[1].


Route qui vas vers lui, route à l’ornière large,
Puisses-tu posséder toujours des arbres frais !
Que le pas des oiseaux les plus chanteurs te charge !
Que les oiseaux pour toi désertent les forêts !

Que vers la plaine vaste où blanche tu reposes,
Le fleuve alerte accoure et dise : La voilà !
Ornez ses bords, ô fleurs de joie, ô nobles roses,
Et toi, fleur des longs deuils, hyacinthe, fuis-la !

Que propice aux vieillards, aux vœux voilés des vierges,
Tu fasses de leurs pieds le rythme retentir !
Qu’à celui qui te suit sous les nocturnes cierges
Léger soit le regret, léger le repentir !

Puisque par tes détours tu mènes ma pensée
Vers la maison qui songe au bas du coteau noir.
Quand la nuit te fait pâle, ô route, et délaissée.
Guide donc vers mon seuil le sommeil et l’espoir !

  1. Extrait de Lueurs et Flammes (1906).