Œuvres (Ferrandière)/Fables/Fable 149

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Janet et Cotelle (Première partie : Fables — Seconde partie : Poésiesp. 161).

FABLE CXLIX.

L’AIGLE ET LE CHAT.


Bien moins friand de souris que d’oiseaux,
Un chat guettoit aux bois un nid de tourtereaux,
L’oiseau de Jupiter, caché sous le branchage,
Suivoit du bon matois les moindre mouvemens,
Certain de l’arrêter quand il en seroit tems.
L’adroit minet écarte le feuillage,
D’abord fait patte de velours ;
La griffe vient à son secours ;
Il trouble tout enfin, repos, bonheur, amours ;
Car il tient père et mère et petits de tout âge.
Sitôt qu’il fut maître du nid,
Sur notre dénicheur le roi des airs fondit,
Emportant avec lui le chat et le ménage.
Ennuyé d’un si long voyage,
Regrettant son butin, le gourmand se plaignit
Tais-toi, lui dit l’aigle en colère :
Les dieux ne créèrent les chats
Que pour manger les souris et les rats :
Et tu viens dérober ainsi ma bonne chère !
Il faudroit que chacun ne fît que son métier,
Tout en iroit mieux sur la terre :
Oh ! si tu n’étois point sorti de ton grenier,
Tu ne serois pas sous ma serre.