Œuvres complètes (Crémazie)/Lettres 35

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à son frère joseph.


Paris, 2 avril 1877
Mon cher frère,

Hier, jour de Pâques, le temps a été couvert toute la journée, et, au sortir des vêpres, nous avons eu un peu de pluie. Aujourd’hui, le temps est encore nuageux, avec des éclaircies de soleil. Il y avait un monde énorme, hier, dans les églises, c’est tous les ans la même chose. Il y a au moins trois cent mille Parisiens qui ne mettent le pied dans les églises que quatre fois par an : à Pâques, à Noël, à l’Assomption et à la Toussaint. Pour les radicaux, ces trois cent mille Parisiens-là sont des cléricaux, des calotins et devront être fusillés à la prochaine Commune.

À Saint-Laurent, nous avons eu une fort belle messe en musique. Il y avait un baryton qui chantait les soli d’une façon tout à fait remarquable. Dans les rues, on voyait une foule énorme.

Ici, pour les dames et les enfants, le jour de Pâques offre le même attrait que le premier de l’an, car les œufs de Pâques ne sont qu’une seconde édition des étrennes. On n’a pas d’idée du luxe de ces œufs de Pâques. Il y en a pour toutes les bourses : depuis le petit coco de deux sous jusqu’à l’œuf colossal en matière précieuse renfermant des bijoux, quelquefois une rivière en diamants, qui vaut de 100 à 500,000 francs. Je te conseille de ne pas faire venir une grosse de ces œufs-là…