Œuvres complètes de Blaise Pascal Hachette 1871, vol1/Pensées/Article 25

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Hachette (tome Ip. 381-396).


ARTICLE XXV.[1]


1.

Quand notre passion nous porte à faire quelque chose, nous oublions notre devoir. Comme on aime un livre, on le lit, lorsqu’on devroit faire autre chose. Mais, pour s’en souvenir, il faut se proposer de faire quelque chose qu’on hait ; et lors on s’excuse sur ce qu’on a autre chose à faire, et on se souvient de son devoir par ce moyen.


2.

Quel dérèglement de jugement, par lequel il n’y a personne qui ne se mette au-dessus de tout le reste du monde, et qui n’aime mieux son propre bien, et la durée de son bonheur, et de sa vie, que celle de tout le reste du monde !


3.

Il y a des herbes sur la terre ; nous les voyons ; de la lune on ne les verroit pas. Et sur ces herbes des poils ; et dans ces poils de petits animaux : mais après cela, plus rien. — O présomptueux ! — Les mixtes sont composés d’élémens ; et les élémens, non. O présomptueux ! Voici un trait délicat. Il ne faut pas dire qu’il y a ce qu’on ne voit pas ; il faut donc dire comme les autres, mais non pas penser comme eux.


4.

... Non-seulement nous regardons les choses par d’autres côtés, mais avec d’autres yeux ; nous n’avons garde de les trouver pareilles.


5.

Il n’est pas honteux à l’homme de succomber sous la douleur, et il lui est honteux de succomber sous le plaisir. Ce qui ne vient pas de ce que la douleur nous vient d’ailleurs, et que nous recherchons le plaisir ; car on peut rechercher la douleur, et y succomber à dessein, sans ce genre de bassesse. D’où vient donc qu’il est glorieux à la raison de succomber sous l’effort de la douleur, et qu’il lui est honteux de succomber sous l’effort du plaisir ? C’est que ce n’est pas la douleur qui nous tente et nous attire. C’est nous-mêmes qui volontairement la choisissons et voulons la faire dominer sur nous ; de sorte que nous sommes maîtres de la chose ; et en cela c’est l’homme qui succombe à soi-même : mais dans le plaisir, c’est l’homme qui succombe au plaisir. Or il n’y a que la maîtrise et l’empire qui fait la gloire, et que la servitude qui fait la honte[2].


6.

Ceux qui, dans de fâcheuses affaires, ont toujours bonne espérance, et se réjouissent des aventures heureuses, s’ils ne s’affligent également des mauvaises, sont suspects d’être bien aises de la perte de l’affaire ; et sont ravis de trouver ces prétextes d’espérance pour montrer qu’ils s’y intéressent, et couvrir par la joie qu’ils feignent d’en concevoir celle qu’ils ont de voir l’affaire perdue.


7.

Notre nature est dans le mouvement ; le repos entier est la mort.


8.

Nous nous connoissons si peu, que plusieurs pensent aller mourir quand ils se portent bien, et plusieurs pensent se porter bien quand ils sont proche de mourir, ne sentent pas la fièvre prochaine, ou l’abcès prêt à se former.


9.

La nature recommence toujours les mêmes choses, les ans, les jours, les heures ; les espaces de même et les nombres sont bout à bout à la suite l’un de l’autre. Ainsi se fait une espèce d’infini et d’éternel. Ce n’est pas qu’il y ait rien de tout cela qui soit infini et éternel, mais ces êtres terminés se multiplient infiniment ; ainsi il n’y a, ce me semble, que le nombre qui les multiplie qui soit infini.


10.

Quand on dit que le chaud n’est que le mouvement de quelques globules, et la lumière le conatus recedendi que nous sentons, cela nous étonne. Quoi ? que le plaisir ne soit autre chose que le ballet des esprits ? Nous en avons conçu une si différente idée ! et ces sentimens-là nous semblent si éloignés de ces autres que nous disons être les mêmes que ceux que nous leur comparons ! Le sentiment du feu, cette chaleur qui nous affecte d’une manière tout autre que l’attouchement, la réception du son et de la lumière, tout cela nous semble mystérieux, et cependant cela est grossier comme un coup de pierre. Il est vrai que la petitesse des esprits qui entrent dans les pores touchent d’autres nerfs, mais ce sont toujours des nerfs touchés.


11.

Si un animal faisoit par esprit ce qu’il fait par instinct, et s’il parloit par esprit ce qu’il parle par instinct, pour la chasse, et pour avertir ses camarades que la proie est trouvée ou perdue, il parlerait bien aussi pour des choses où il a plus d’affection, comme pour dire : « Rongez cette corde qui me blesse, et où je ne puis atteindre. »


12.

Nous ne nous soutenons pas dans la vertu par notre propre force, mais par le contre-poids de deux vices opposés, comme nous demeurons debout entre deux vents contraires : ôtez un de ces vices, nous tombons dans l’autre.


13.

Ils disent que les éclipses présagent malheur, parce que les malheurs sont ordinaires ; de sorte qu’il arrive si souvent du mal, qu’ils devinent souvent ; au lieu que s’ils disoient qu’elles présagent bonheur, ils mentiraient souvent. Ils ne donnent le bonheur qu’à des rencontres du ciel rares ; ainsi ils manquent peu souvent à deviner.


14.

La mémoire est nécessaire pour toutes les opérations de l’esprit.


15.

Instinct et raison, marques de deux natures.


16.

Quand je considère la petite durée de ma vie, absorbée dans l’éternité précédant et suivant ; le petit espace que je remplis, et même que je vois, abîmé dans l’infinie immensité des espaces que j’ignore et qui m’ignorent ; je m’effraye, et m’étonne de me voir ici plutôt que là ; car il n’y a point de raison pourquoi ici plutôt que là, pourquoi à présent plutôt que lors. Qui m’y a mis ? par l’ordre et la conduite de qui ce lieu et ce temps a-t-il été destiné à moi ? — Memoria hospitis unius diei prætereuntis[3].


17.

Combien de royaumes nous ignorent ! Le silence éternel de ces espaces infinis m’effraye.


18.

Je porte envie à ceux que je vois dans la foi vivre avec tant de négligence, et qui usent si mal d’un don duquel il me semble que je ferois un usage si différent.


19.

Chacun est un tout à soi-même, car lui mort, le tout est mort pour soi. Et de là vient que chacun croit être tout à tous. Il ne faut pas juger de la nature selon nous, mais selon elle.


20.

Le monde ordinaire a le pouvoir de ne pas songer à ce qu’il ne veut pas songer. «Ne pensez pas aux passages du Messie[4],» disoit le juif à son fils. Ainsi font les nôtres souvent. Ainsi se conservent les fausses religions ; et la vraie même, à l’égard de beaucoup de gens. Mais il y en a qui n’ont pas le pouvoir de s’empêcher ainsi de songer, et qui songent d’autant plus qu’on leur défend. Ceux-là se défont des fausses religions ; et de la vraie même, s’ils ne trouvent des discours solides.


21.

Qu’il y a loin de la connoissance de Dieu à l’aimer !


22.

Quand la force attaque la grimace, quand un simple soldat prend le bonnet carré d’un premier président, et le fait voler par la fenêtre.


23.

Es-tu moins esclave, pour être aimé et flatté de ton maître ? Tu as bien du bien, esclave : ton maître te flatte. Il te battra tantôt.


24.

Ce n’est pas dans Montaigne, mais dans moi, que je trouve tout ce que j’y vois.


25.

Deviner. La part que je prends à votre déplaisir. M. le cardinal ne vouloit point être deviné.

« J’ai l’esprit plein d’inquiétude. » Je suis plein d’inquétude vaut mieux.

« Éteindre le flambeau de la sédition, » trop luxuriant.

« L’inquiétude de son génie ; » trop, de deux mots hardis.


26.

Ennui. — Rien n’est si insupportable à l’homme que d’être dans un plein repos, sans passion, sans affaire, sans divertissement, sans application. Il sent alors son néant, son abandon, son insuffisance, sa dépendance, son impuissance, son vide. Incontinent il sortira du fond de son âme l’ennui, la noirceur, la tristesse, le chagrin, le dépit, le désespoir.

Agitation. — Quand un soldat se plaint de la peine qu’il a, ou un laboureur, etc., qu’on les mette sans rien faire.


27.

Nature corrompue. — L’homme n’agit point par la raison, qui fait son être.


28.

Bassesse de l’homme, jusqu’à se soumettre aux bêtes, jusqu’à les adorer.


29.

... Tous leurs principes sont vrais, des pyrrhoniens, des stoïques, des athées, etc. Mais leurs conclusions sont fausses, parce que les principes opposés sont vrais aussi.


30.

Les philosophes ont consacré les vices, en les mettant en Dieu même ; les chrétiens ont consacré les vertus.


31.

Immatérialité de l’âme. Les philosophes qui ont dompté leurs passions, quelle matière l’a pu faire ?


32.

Philosophes. — La belle chose, de crier à un homme qui ne se connoît pas, qu’il aille de lui-même à Dieu ! Et la belle chose de le dire à un homme qui se connoît !


33.

Recherche du vrai bien. — Le commun des hommes met le bien dans la fortune et dans les biens du dehors, ou au moins dans le divertissement. Les philosophes ont montré la vanité de tout cela, et l’ont mis où ils ont pu.

Pour les philosophes deux cent quatre-vingt-huit souverains biens[5].

Le souverain bien. Dispute du souverain bien.Ut sis contentus temetipso et ex te nascentibus bonis. Il y a contradiction, car ils conseillent enfin de se tuer. Oh ! quelle vie heureuse, dont on se délivre comme de la peste !

Il est bon d’être lassé et fatigué par l’inutile recherche du vrai bien, afin de tendre les bras au libérateur.


34.

Mon Dieu, que ce sont de sots discours ! « Dieu auroit-il fait le monde pour le damner ? demanderoit-il tant de gens si foibles ? » etc. Pyrrhonisme est le remède à ce mal, et rabattra cette vanité.


35.

Dira-t-on que pour avoir dit que la justice est partie de la terre, les hommes aient connu le péché originel ? — Nemo ante obitum beatus est. C’est-à-dire qu’ils aient connu qu’à la mort la béatitude éternelle et essentielle commence ?


36.

Le bon sens. — Ils sont contraints de dire : « Vous n’agissez pas de bonne foi ; nous ne devrions pas, » etc. Que j’aime à voir cette superbe raison humiliée et suppliante ! Car ce n’est pas là le langage d’un homme à qui on dispute son dro t, et qui le défend les armes et la force à la main. Il ne s’amuse pas à dire qu’on n’agit pas de bonne foi, mais il punit cette mauvaise foi par la force.


37.

L’Ecclésiaste montre que l’homme sans Dieu est dans l’ignorance de tout, et dans un malheur inévitable. Car c’est être malheureux que de vouloir et ne pouvoir. Or il veut être heureux, et assuré de quelque vérité, et cependant il ne peut ni savoir, ni ne désirer point de savoir. Il ne peut même douter.


38.

On a bien de l’obligation à ceux qui avertissent des défauts, car ils mortifient. Ils apprennentqu’on a été méprisé, ils nempêchent pas qu’on ne le soit à l’avenir, car on a bien d’autres défauts pour l’être. Ils préparent l’exercice de la correction et l’exemption d’un défaut.


39.

Nulle secte ni religion n’a toujours été sur la terre que la religion chrétienne.

Il n’y a que la religion chrétienne qui rende l’homme aimable et heureux tout ensemble. Dans l’honnêteté, on ne peut être aimable et heureux tout ensemble.


40.

La foi est un don de Dieu. Ne croyez pas que nous disions que c’est un don de raisonnement. Les autres religions ne disent pas cela de leur foi ; elles ne donnoient que le raisonnement pour y arriver, qui n’y mène pas néanmoins[6].


41.

Les figures de la totalité de la rédemption, comme que le soleil éclaire à tous, ne marquent qu’une totalité ; mais lesfigurantes des exclusions, comme des juifs élus à l’exclusion des gentils, marquent l’exclusion.

« Jésus-Christ rédempteur de tous. » — Oui, car il a offert ; comme un homme qui a racheté tous ceux qui voudront venir à lui. Ceux qui mourront en chemin, c’est leur malheur : mais quant à lui, il leur offroit rédemption. — Cela est bon en cet exemple, où celui qui rachète et celui qui empêche de mourir sont deux, mais non pas en Jésus-Christ, qui fait l’un et l’autre. — Non, car Jésus-Christ, en qualité de rédempteur, n’est pas peut-être maître de tous ; et ainsi, en tant qu’il est en lui, il est rédempteur de tous.


42.

Les prophéties[7] citées dans l’Évangile, vous croyez qu’elles sont rapportées pour vous faire croire. Non, c’est pour vous éloigner de croire. Les miracles ne servent pas à convertir, mais à condamner.


43.

Quand Épictète auroit vu parfaitement bien le chemin, il dit aux hommes : « Vous en suivez un faux ; » il montre que c’en est un autre, mais il n’y mène pas. C’est celui de vouloir ce que Dieu veut ; Jésus-Christ seul y mène : Via, veritas[8].


44.

Je considère Jésus-Christ en toutes les personnes et en nous-mêmes. Jésus-Christ comme père en son père, Jésus-Christ comme frère en ses frères, Jésus-Christ comme pauvre en les pauvres, Jésus-Christ comme riche en les riches, Jésus-Christ comme docteur et prêtre en les prêtres, Jésus-Christ comme souverain en les princes, etc. Car il est par sa gloire tout ce qu’il y a de grand, étant Dieu, et est par sa vie mortelle tout ce qu’il y a de chétif et d’abject : pour cela il a pris cette malheureuse condition, pour pouvoir être en toutes les personnes, et modèle de toutes conditions.


45.

Différence entre Jésus-Christ et Mahomet. — Les psaumes chantés par toute la terre.

Qui rend témoignage de Mahomet ? Lui-même. Jésus-Christ veut que son témoignage ne soit rien.

La qualité de témoins fait qu’il faut qu’ils soient toujours et partout, et, misérable, il est seul.


46.

Ce n’est pas une chose rare qu’il faille reprendre le monde de trop de docilité ; c’est un vice naturel comme l’incrédulité, et aussi pernicieux. Superstition.


47.

Il y a peu de vrais chrétiens, je dis même pour la foi. Il y en a bien qui croient, mais par superstition ; il y en a bien qui ne croient pas, mais par libertinage : peu sont entre deux.

Je ne comprends pas en cela ceux qui sont dans la véritable piété de mœurs, et tous ceux qui croient par un sentiment du cœur.


48.

Ceux qui n’aiment pas la vérité prennent le prétexte de la contestation de la multitude de ceux qui la nient. Et ainsi leur erreur ne vient que de ce qu’ils n’aiment pas la vérité ou la charité ; et ainsi ils ne sont pas excusés.


49.

Tant s’en faut que d’avoir ouï dire une chose soit la règle de votre créance, que vous ne devez rien croire sans vous mettre en l’état comme si jamais vous ne l’aviez ouï. C’est le consentement de vous à vous-même, et la voix constante de votre raison, et non des autres, qui vous doit faire croire.

Le croire est si important ! Cent contradictions seroient vraies.

Si l’antiquité étoit la règle de la créance, les anciens étoient donc sans règle. Si le consentement général ; si les hommes étoient péris ?

Fausse humilité, orgueil. Levez le rideau. Vous avez beau faire ; si faut-il ou croire, ou nier, ou douter. N’aurons-nous donc pas de règle ? Nous jugeons des animaux qu’ils font bien ce qu’ils font : n’y aura-t-il point une règle pour juger des hommes ? Nier, croire, et douter bien, sont à l’homme ce que le courir est au cheval[9].


50.

Notre religion est sage et folle. Sage, parce qu’elle est la plus savante, et la plus fondée en miracles, prophéties, etc. Folle, parce que ce n’est point tout cela qui fait qu’on en est ; cela fait bien condamner ceux qui n’en sont pas, mais non pas croire ceux qui en sont. Ce qui les fait croire, c’est la croix, ne evacuata sit crux. Et ainsi saint Paul, qui est venu en sagesse et signes, dit qu’il n’est venu ni en sagesse ni en signes, car il venoit pour convertir. Mais ceux qui ne viennent que pour convaincre peuvent dire qu’ils viennent en sagesse et signes.


51.

La loi obligeoit à ce qu’elle ne donnoit pas. La grâce donne ce à quoi elle oblige.


52.

Ce que les hommes, par leurs plus grandes lumières, avoient pu connoître, cette religion l’enseignoit à ses enfans.


53.

Que je hais ces sottises, de ne pas croire l’Eucharistie, etc. ! Si l’Évangile est vrai, si Jésus-Christ est Dieu, quelle difficulté y a-t-il là ?


54.

Le juste agit par foi dans les moindres choses : quand il reprend ses serviteurs, il souhaite leur conversion par l’esprit de Dieu, et prie Dieu de les corriger, et attend autant de Dieu que de ses répréhensions, et prie Dieu de bénir ses corrections. Et ainsi aux autres actions.

De tout ce qui est sur la terre, il ne prend part qu’aux déplaisirs, non aux plaisirs. Il aime ses proches, mais sa charité ne se renferme pas dans ces bornes, et se répand sur ses ennemis, et puis sur ceux de Dieu.


55.

Pourquoi Dieu a établi la prière. — 1° Pour communiquer à ses créatures la dignité de la causalité. 2° Pour nous apprendre de qui nous tenons la vertu. 3° Pour nous faire mériter les autres vertus par travail. — Objection. Mais on croira qu’on tient la prière de soi. — Cela est absurde, car puisque, ayant la foi, on ne peut pas avoir les vertus. comment auroit-on la foi ? Y a-t-il pas plus de distance de l’infidélité à la foi que de la foi à la vertu ?

Dieu ne doit que suivant ses promesses. Il a promis d’accorder la justice aux prières : jamais il n’a promis les prières qu’aux enfans de la promesse.


56.

M. de Roannez disoit : « Les raisons me viennent après, mais d’abord la chose m’agrée ou me choque sans en savoir la raison, et cependant cela me choque par cette raison que je ne découvre qu’ensuite. » Mais je crois, non pas que cela choquoit par ces raisons qu’on trouve après, mais qu’on ne trouve ces raisons que parce que cela choque.


57.

Il n’aime plus cette personne qu’il aimoit il y a dix ans. Je crois bien, elle n’est plus la même, ni lui non plus. Il étoit jeune et elle aussi ; elle est tout autre. Il l’aimeroit peut-être encore, telle qu’elle étoit alors.


58.

Craindre la mort hors du péril, et non dans le péril, car il faut être homme.

Mort soudaine seule à craindre, et c’est pourquoi les confesseurs demeurent chez les grands.


59.

Il faut se connoître soi-même : quand cela ne serviroit pas à trouver le vrai ; cela au moins sert à régler sa vie, et il n’y a rien de plus juste.


60.

Quand notre passion nous porte à faire quelque chose, nous oublions notre devoir. Comme on aime un livre on le lit, lorsqu’on devrait faire autre chose. Mais pour s’en souvenir, il faut se proposer de faire quelque chose qu’on hait ; et lors on s’excuse sur ce qu’on a autre chose à faire, et on se souvient de son devoir par ce moyen.


61.

Miracles. — Que je hais ceux qui font les douteurs de miracles ! Montaigne en parle comme il faut dans les deux endroits. On voit en l’un combien il est prudent, et néanmoins il croit en l’autre et se moque des incrédules[10].


62.

Quand on veut poursuivre les vertus jusqu’aux extrêmes de part et d’autre, il se présente des vices qui s’y insinuent insensiblement, dans leurs routes insensibles, du côté du petit infini ; et il s’en présente, des vices, en foule du côté du grand infini, de sorte qu’on se perd dans les vices, et on ne voit plus les vertus[11].


63.

Diversité. — La théologie est une science, mais en même temps combien est-ce de sciences ! Un homme est un suppôt : mais si on l’anatomise, sera-ce la tête, le cœur, l’estomac, les veines, chaque veine, chaque portion de veine, le sang, chaque humeur du sang ?

Une ville, une campagne, de loin est une ville et une campagne ; mais à mesure qu’on s’approche, ce sont des maisons, des arbres, des tuiles, des feuilles, des herbes, des fourmis, des jambes de fourmi, à l’infini. Tout cela s’enveloppe sous le nom de campagne[12].


64.

Deux sortes de gens égalent les choses, comme les fêtes aux jours ouvriers, les chrétiens aux prêtres, tous les péchés entre eux, etc. Et de là les uns concluent que ce qui est donc mal aux prêtres l’est aussi aux chrétiens ; et les autres, que ce qui n’est pas mal aux chrétiens est permis aux prêtres.


65.

La nature s’imite. Une graine, jetée en bonne terre, produit. Un principe, jeté dans un bon esprit, produit. Les nombres imitent l’espace, qui sont de nature si différente. Tout est fait et conduit par un même maître : la racine, la branche, les fruits ; les principes, les conséquences.


66.

La gloire. — L’admiration gâte tout dès l’enfance. Oh ! que cela est bien dit 1 qu’il a bien fait ! qu’il est sage ! etc. Les enfans de Port-Royal, auxquels on ne donne point cet aiguillon d’envie et de gloire, tombent dans la nonchalance.


67.

L’expérience nous fait voir une différence énorme entre la dévotion et la bonté.


68.

Quel dérèglement de jugement, par lequel il n’y a personne qui ne se mette au-dessus de tout le reste du monde, et qui n’aime mieux son propre bien, et la durée de son bonheur et de sa vie que celle de tout le reste du monde !


69.

On aime à voir l’erreur, la passion de Cléobuline, parce qu’elle ne la connoît pas. Elle déplairoit, si elle n’étoit trompée.


70.

Prince à un roi plaît, parce qu’il diminue sa qualité[13].


71.

On ne s’ennuie point de manger et dormir tous les jours, car la faim renaît, et le sommeil : sans cela on s’en ennuieroit. Ainsi, sans la faim des choses spirituelles, on s’en ennuie. Faim de la justice ; béatitude huitième.


72.

Il n’y a que deux sortes d’hommes : les uns justes, qui se croient pécheurs ; les autres pécheurs, qui se croient justes.


73.

Il n’est pas bon d’être trop libre. Il n’est pas bon d’avoir tout le nécessaire.


74.

L’espérance que les chrétiens ont de posséder un bien infini est mêlée de jouissance aussi bien que de crainte : car ce n’est pas comme ceux qui espéreroient un royaume, dont ils n’auroient rien étant sujets ; mais ils espèrent la sainteté, l’exemption d’injustice, et ils en ont quelque chose.


75.

Scaramouche, qui ne pense qu’à une chose. Le docteur, qui parle un quart d’heure après avoir tout dit, tant il est plein du désir de dire. Le bec du perroquet, qu’il essuie quoiqu’il soit net.


76.

Comminutum cor. Saint Paul. Voilà le caractère chrétien. «Albe vous a nommé, je ne vous connois plus. » Corneille. Voilà le caractère inhumain. Le caractère humain est le contraire.


77.

Symétrie est ce qu’on voit d’une vue. Fondée sur ce qu’il n’y a pas de raison de faire autrement. Et fondée aussi sur la figure de l’homme, d’où il arrive qu’on ne veut la symétrie qu’en largeur, non en hauteur ni profondeur.


78.

Universel. — Morale et langage sont des sciences particulières, mais universelles.


79.

Mais il est impossible que Dieu soit jamais la fin, s’il n’est le principe. On dirige sa vue en haut ; mais on s’appuie sur le sable : et la terre fondra, et on tombera en regardant le ciel.


80.

L’ennui qu’on a de quitter les occupations où l’on s’est attaché. Un homme vit avec plaisir en son ménage : qu’il voie une femme qui lui plaise, qu’il joue cinq ou six jours avec plaisir ; le voilà misérable s’il retourne à sa première occupation. Rien n’est plus ordinaire que cela.


81.

La prévention induisant en erreur. — C’est une chose déplorable de voir tous les hommes ne délibérer que des moyens, et point de la fin. Chacun songe comment il s’acquittera de sa condition ; mais pour le choix de la condition, et de la patrie, le sort nous le donne. Cest une chose pitoyable, de voir tant de Turcs, d’hérétiques, d’infidèles, suivre le train de leurs pères, par cette seule raison qu’ils ont été prévenus chacun que c’est le meilleur. Et c’est ce qui détermine chacun à chaque condition, de serrurier, soldat, etc. C’est par là que les sauvages n’ont que faire de la Provence[14].


82.

Description de l’homme. Dépendance, désir d’indépendance, besoin.


83.

On n’est pas misérable sans sentiment : une maison ruinée ne l’est pas. Il n’y a que l’homme de misérable. Ego vir videns[15].


84.

La nature de l’homme est toute nature, omne animal. Il n’y a rien qu’on ne rende naturel ; il n’y a naturel qu’on ne fasse perdre.

... La vraie nature étant perdue, tout devient sa nature ; comme, le véritable bien étant perdu, tout devient son véritable bien.


85.

Injustice. — La juridiction ne se donne pas pour le juridiciant, mais pour le juridicié. Il est dangereux de le dire au peuple : mais le peuple a trop de croyance en vous ; cela ne lui nuira pas, et peut vous servir. Il faut donc le publier. Pasce oves meas, non tuas[16]. Vous me devez pâture.


86.

La Sagesse nous envoie à l’enfance : Nisi efficiamini sicut parvuli[17].


87.

La vraie religion enseigne nos devoirs, nos impuissances (orgueil et concupiscence), et les remèdes (humilité, mortification).


88.

L’Écriture a pourvu de passages pour consoler toutes les conditions, et pour intimider toutes les conditions.

La nature semble avoir fait la même chose par ses deux infinis, naturels et moraux : car nous aurons toujours du dessus et du dessous, de plus habiles et de moins habiles, de plus élevés et de plus misérables, pour abaisser notre orgueil, et relever notre abjection.


89.

L’Être éternel est toujours, s’il est une fois.


90.

La corruption de la raison paroît par tant de différentes et extravagantes mœurs. Il a fallu que la vérité soit venue, afin que l’homme ne véquît[18] plus en soi-même.


91.

La coutume est notre nature. Qui s’accoutume à sa foi, la croit, et ne peut plus ne pas craindre l’enfer, et ne croit autre chose. Qui s’accoutume à croire que le roi est terrible., etc. Qui doute donc que, notre âme étant accoutumée à voir nombre, espace, mouvement, croie cela et rien que cela ?


92.

… Que me promettez-vous enfin, sinon dix ans d’amour-propre, à bien essayer de plaire sans y réussir, outre les peines ? Car dix ans, c’est le parti[19].


93.

Fausseté des autres religions. Ils n’ont point de témoins, ceux-ci en ont. Dieu défie les autres religions de produire de telles marques : Isaïe, xliii, 9 ; xliv, 8.


94.

Les deux plus anciens livres du monde sont Moïse et Job, l’un juif, l’autre païen, qui tous deux regardent Jésus-Christ comme leur centre commun et leur objet : Moïse, en rapportant les promesses de Dieu à Abraham, Jacob, etc., et ses prophéties ; et Job : Quis mihi det ut, etc. Scio enimquod redemptor meus vivit, etc.[20].


95.

Je ne serois pas chrétien sans les miracles, dit saint Augustin. On n’auroit point péché en ne croyant pas Jésus-Christ, sans les miracles : Vide an mentiar.

Il n’est pas possible de croire raisonnablement contre les miracles. Ubi est Deus tuus ? Les miracles le montrent, et sont un éclair.


96.

Pour les religions, il faut être sincère ; vrais païens, vrais juifs, vrais chrétiens.


97.

Prophéties. — Que Jésus-Christ seraà la droite, pendant que Dieu lui assujettira ses ennemis. Donc il ne les assujettira pas lui-même.


98.

Si ne marque pas l’indifférence : Malachie, Isaïe. Is., Si volumus, etc. In quacumque die.


99.

Adam forma futuri. Les six jours pour former l’un, les six âges pour former l’autre. Les six jours que Moïse représente pour la formation d’Adam, ne sont que la peinture des six âges pour former Jésus-Christ et l’Église. Si Adam n’eût point péché, et que Jésus-Christ ne fût point venu, il n’y eût eu qu’une seule alliance, qu’un seul âge des hommes, et la création eût été représentée comme faite en un seul temps.


100.

Ne timeas pusillus grex.Timore et tremore.Quid ergo ? Ne timeas, modo timeas : Ne craignez point, pourvu que vous craigniez ; mais si vous ne craignez pas, craignez.

Qui me recipit, non me recipit, sed eum qui me misit.Nemo scit, neque Filius.Nubes lucida obumbravit[21].

Saint Jean devoit convertir les cœurs des pères aux enfans. Et Jésus-Christ met la division. Sans contradiction.

Les effets, in communi et in particulari. Les semi-pélagiens errent en disant in communi, ce qui n’est vrai que in particulari ; et les calvinistes, en disant in particulari, ce qui est vrai in communi, ce me semble.


101.

Joh., viii : Multi crediderunt in eum. Dicebat ergo Jesus si manseritis., VERE mei discipuli eritis, et VERITAS LIBERABIT VOS. » Responderunt : « Semen Abrahæ sumus, et nemini servimus unquam[22]. » Il y a bien de la différence entre les disciples et les vrais disciples. On les reconnoît en leur disant que la vérité les rendra libres. Car s’ils répondent qu’ils sont libres, et qu’il est en eux de sortir de l’esclavage du diable, ils sont bien disciples, mais non pas vrais disciples.


102.

Inconstance et bizarrerie. — Ne vivre que de son travail, et régner sur le plus puissant État du monde, sont choses très-opposées. Elles sont unies dans la personne du Grand Seigneur des Turcs.


103.

Les vrais chrétiens obéissent aux folies néanmoins, non pas qu’ils respectent les folies ; mais l’ordre de Dieu, qui, pour la punition des hommes, les a asservis à ces folies. Omnis creatura subjecta est vanitati. Liberabitur[23].

Ainsi saint Thomas[24] explique le lieu de saint Jacques sur la préférence des riches, que, s’ils ne le font dans la vue de Dieu, ils sortent de l’ordre de la religion.


104.

Abraham ne prit rien pour lui, mais seulement pour ses serviteurs ; ainsi le juste ne prend rien pour soi du monde, ni des applaudissemens du monde ; mais seulement pour ses passions, desquelles il se sert comme maître, en disant à l’une : Va, et à l’autre : Viens. Sub te erit appetitus tuus[25]. Les passions ainsi dominées sont vertus. L’avarice, la jalousie, la colère, Dieu même se les attribue ; et ce sont aussi bien vertus que la clémence, la pitié, la constance, qui sont aussi des passions. Il faut s’en servir comme d’esclaves, et leur laissant leur aliment, empêcher que l’âme n’yen prenne ; car quand les passions sont les maîtresses, elles sont vices, et alors elles donnent à l’âme de leuraliment, et l’âme s’en nourrit et s’en empoisonne.


105.

On ne s’éloigne de Dieu qu’en s’éloignant de la charité. Nos prières et nos vertus sont abomination devant Dieu, si elles ne sont les prières et vertus de Jésus-Christ. Et nos péchés ne seront jamais l’objet de la miséricorde, mais de la justice de Dieu, s’ils ne sont ceux de Jésus-Christ. Il a adopté nos péchés, et nous a admis à son alliance ; car les vertus lui sont propres, et les péchés étrangers ; et les vertus nous sont étrangères, et nos péchés nous sont propres.

Changeons la règle que nous avons prise jusqu’ici pour juger de ce qui est bon. Nous en avions pour règle notre volonté, prenons maintenant la volonté de Dieu : tout ce qu’il veut nous est bon et juste, tout ce qu’il ne veut pas nous est mauvais ?

Tout ce que Dieu ne veut pas est défendu. Les péchés sont défendus par la déclaration générale que Dieu a faite qu’il ne les vouloit pas. Les autres choses qu’il a laissées sans défense générale, et qu’on appelle par cette raison permises, ne sont pas néanmoins toujours permises. Car quand Dieu en éloigne quelqu’une de nous, et que par l’événement, qui est une manifestation de la volonté de Dieu, il paroît que Dieu ne veut pas que nous ayons une chose, cela nous est défendu alors comme le péché, puisque la volonté de Dieu est que nous n’ayons non plus l’un que l’autre. Il y a cette différence seule entre ces deux choses, qu’il est sûr que Dieu ne voudra jamais le péché, au lieu qu’il ne l’est pas qu’il ne voudra jamais l’autre. Mais tandis que Dieu ne la veut pas, nous la devons regarder comme péché ; tandis que l’absence de la volonté de Dieu, qui est seule toute la bonté et toute la justice, la rend injuste et mauvaise.


106.

« Je m’en suis réservé sept mille. » J’aime les adorateurs inconnus au monde, et aux prophètes mêmes.

107.

Les hommes n’ayant pas accoutumé de former le mérite, mais seulement le récompenser où ils le trouvent formé, jugent de Dieu par eux-mêmes.


108.

Ordre. — J’aurois bien pris ce discours d’ordre comme celui-ci : pour montrer la vanité de toutes sortes de conditions, montrer la vanité des vies communes, et puis la vanité des vies philosophiques (pyrrhoniennes, stoïques) ; mais l’ordre ne seroit pas gardé. Je sais un peu ce que c’est, et combien peu de gens l’entendent. Nulle science humaine ne le peut garder. Saint Thomas ne l’a pas gardé. La mathématique le garde, mais elle est inutile en sa profondeur[26].


109.

Ordre par dialogues. — Que dois-je faire ? Je ne vois partout qu’obscurités. Croirai-je que je ne suis rien ? croirai-je que je suis Dieu ?

Toutes choses changent et se succèdent. — Vous vous trompez, il y a.


110.

… Une lettre, de la folie de la science humaine et de la philosophie. Cette lettre avant le divertissement.


111.

Dans la lettre, de l’injustice, peut venir la plaisanterie des aînés qui ont tout. Mon ami, vous êtes né de ce côté de la montagne ; il est donc juste que votre aîné ait tout.


112.

Il faut mettre au chapitre des Fondemens ce qui est en celui des Figuratifs touchant la cause des figures : pourquoi Jésus-Christ prophétisé en son premier avènement ; pourquoi prophétisé obscurément en la manière.


113.

Nous implorons la miséricorde de Dieu, non afin qu’il nous laisse en paix dans nos vices, mais afin qu’il nous en délivre.


114.

Si Dieu nous donnoit des maîtres de sa main, oh ! qu’il leur faudroit obéir de bon cœur ! La nécessité et les événemens en sont infailliblement.


115.

Eritis sicut dii, scientes bonum et malum[27]. Tout le monde fait le dieu en jugeant : « Cela est bon ou mauvais ; » et s’affligeant ou se réjouissant trop des événemens.


116.

Faire les petites choses comme grandes, à cause de la majesté de Jésus-Christ qui les fait en nous, et qui vit notre vie ; et les grandes comme petites et aisées, à cause de sa toute-puissance.




LE MYSTÈRE DE JÉSUS.[28].


1.

Jésus souffre dans sa passion les tourmens que lui font les hommes ; mais dans l’agonie il souffre les tourmens qu’il se donne à lui-même : turbavit semetipsum[29]. C’est un supplice d’une main non humaine, mais toute-puissante, et il faut être tout-puissant pour le soutenir.

Jésus cherche quelque consolation au moins dans ses trois plus chers amis, et ils dorment. Il les prie de soutenir un peu avec lui, et ils le laissent avec une négligence entière, ayant si peu de compassion qu’elle ne pouvoit seulement les empêcher de dormir un moment. Et ainsi Jésus était délaissé seul à la colère de Dieu.

Jésus est seul dans la terre, non-seulement qui ressente et partage sa peine, mais qui la sache : le ciel et lui sont seuls dans cette connoissance.

Jésus est dans un jardin, non de délices comme le premier Adam, où il se perdit, et tout le genre humain ; mais dans un de supplices, où il s’est sauvé, et tout le genre humain.

Il souffre cette peine et cet abandon dans l’horreur de la nuit. Je crois que Jésus ne s’est jamais plaint que cette seule fois ; mais

  1. Article XVIII de la seconde partie, dans Bossut. Tous les fragments qui composent cet article sont dus aux découvertes de M. Cousin et à celles de M. Faugère.
  2. Ce fragment commence dans le manuscrit par les lignes suivantes, qui se rapportent à un passage de Montaigne, III, 5, p. 325 : « L’éternument absorbe toutes les fonctions de l’âme, aussi bien que la besogne. Mais on n’en tire pas les mêmes conséquences contre la grandeur de l’homme, parce que c’est contre son gré. Et quoiqu’on se le procure, néanmoins c’est contre son gré qu’on se le procure ; ce n’est pas en vue de la chose même, c’est pour une autre fin : et ainsi ce n’est pas une marque de la foiblesse de l’homme, et de sa servitude sous cette action. Il n’est pas honteux, » etc.
  3. Sagesse, v, 15. — On lit encore dans le manuscrit, p. 49 : « Pourquoi ma connoissance est-elle bornée ? ma taille ? ma durée ? à cent ans plutôt qu’à mille ? Quelle raison a eue la nature de me la donner telle, et de choisir ce nombre plutôt qu’un autre dans l’infinité ? desquels il n’y a pas plus de raison de choisir l’un que l’autre, rien ne tentant plus que l’autre. »
  4. Aux passages qui prouvent que le Messie est venu.
  5. C’est un calcul de Varron, rapporté dans saint Augustin, Cité de Dieu, XX, 2.
  6. On lit encore à la p. 25 du manuscrit : « Lettre qui marque l’utilité des preuves par la machine. La foi est différente de la preuve ; l’une est humaine, l’autre est un don de Dieu. Justus ex fide vivit (Rom., i, 17) : c’est de cette foi que Dieu lui-même met dans le cœur, dont la preuve est souvent l’instrument, fides ex auditu (Rom., x, 17), mais cette foi est dans le cœur, et fait dire non scio, mais credo.
  7. Ce passage est précédé dans le manuscrit des lignes suivantes : « Objection. Visiblement l’Écriture pleine de choses non dictées du Saint-Esprit. Réponse. Elles ne nuisent donc pas à la foi. Obj. Mais l’Église a décidé que tout est du Saint-Esprit. Rep. Je réponds deux choses : l’une que l’Église n’a jamais décidé cela ; l’autre que, quand elle l’auroit décidé, cela se pourroit soutenir. »
  8. Jean xiv, 6.
  9. Pascal a écrit en marge de ce fragment : « Punition de ceux qui pèchent ; erreur. »
  10. On lit encore à la p. 449 du manuscrit : « Montaigne contre les miracles, Montaigne pour les miracles. »
  11. En marge : « On se prend à la perfection même. »
  12. On lit encore p. 110 du manuscrit : « La diversité est si ample, que tous les tons de voix, tous les marchers, toussers, mouchers, éternuers. On distingue des fruits les raisins, et entre ceux-là les muscats, et puis Coindrieu, et puis Dezargues, et puis. [illisible]. Est-ce tout ? en a-t-elle jamais produit deux grappes pareilles ? et une grappe a-t-elle deux grains pareils ? etc. « Je n’ai jamais jugé d’une même chose exactement de même. Je ne puis juger de mon ouvrage en le faisant ; il faut que je fasse comme les peintres, et que je m’en éloigne ; mais non pas trop : de combien donc ? Devinez. »
  13. Il lui est presque une société : les autres hommes sont trop au-dessous.
  14. On lit encore p. 394 du manuscrit : « Pensées. Tout est un, tout est divers. Que de natures en celle de l’homme ! que de vocations ! Et par quoi hasard chacun prend d’ordinaire ce qu’il a ouï estimer ! Talon bien tourné. »
  15. Jérém. Thren., iii, 1 : Ego vir videns paupertatem meam. « Je suis un homme qui vois quel est mon dénûment. »
  16. Jean, xxi, 17.
  17. Matth., xviii, 2.
  18. Nous disons à présent vécût.
  19. On lit p. 440 du manuscrit : « Miton voit bien que la nature est corrompue, et que les hommes sont contraires à l’honnêteté ; mais il ne sait pas pourquoi ils ne peuvent voler plus haut. »
  20. Job, xix, 23-25.
  21. Marc, ix, 36 ; xiii, 32 ; Matth, xvii, 5.
  22. Jean, viii, 30 et suivants.
  23. Rom, viii, 20.
  24. Dans son commentaire sur l’épître de saint Jacques.
  25. Gen., xiv, 7.
  26. On lit, p. 29 du manuscrit, cet autre fragment : « Lettre pour porter à rechercher Dieu. Et puis le faire chercher chez les philosophes, pyrrhoniens et dogmatistes, qui travaillent celui qui le recherchent. »
  27. Gen., iii, 5.
  28. Publié pour la première fois par M. Faugère
  29. Jean, xi, 33.