Œuvres complètes de Démosthène et Eschine (Traduction de Joseph Planche)/Volume VI/Sommaire de la harangue contre Androtion

La bibliothèque libre.
__________________________________________


SOMMAIRE


DE LA HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE


CONTRE ANDROTION..


_______________


Nous ne répéterons pas ce que nous avons déjà dit, dans plusieurs endroits, du sénat des Cinq-cents : ce sénat changeait tous les ans ; le trésor lui remettait une somme pour faire construire de nouvelles galères. C’était l’usage de récompenser le sénat d’une couronne d’or, lorsqu’il sortait de charge, supposé qu’il se fût bien conduit, et que le peuple l’en jugeât digne. Mais s’il n’avait pas fait construire de galères, il lui était défendu, par la loi, de demander une récompense. Androtion, avocat de cet ordre, porta un décret pour faire décerner une couronne d’or au dernier sénat, quoiqu’il n’y eût pas eu de galères construites, l’intendant des ouvriers s’étant enfui avec la caisse. Euctémon et Diodore, ennemis mortels d’Androtion, attaquent son décret. Ëuctémon avait parlé le premier ; Diodore, pour lequel Démosthène a composé cette harangue, ne parle qu’en second.

Après un court exorde, où il expose les motifs de ressentiment particulier et les vues d’intérêt public, qui lui ont fait intenter l’accusation présente, il attaque le décret. par forme de réfutation , comme illégal et comme illégitime. Androlion n’avait pas fait adopter son décret par le sénat actuel ; c’était une formalité nécessaire : l’orateur réfute en peu de mots la raison subtile par laquelle il prétendait justifier ce défaut de formalité. Il se défendait par Tusage ; il disait que tous les sénats avaient obtenu leur récompense de cette façon : Démoslhène nie le fait , et montre que , quand il serait véritable , ce ne serait pas une raison pour enfreindre de nouveau la loi. Il est défendu au sénat , dit l’accusé, de demander une récompense , quand il n’a point construit de vaisseaux ; mais il n’est point défendu au peuple de lui en accorder , quand d’ailleurs il l’en juge digne : l’accusateur répond, i.•* que les sénateurs ont fait des demandes ; 2.• que le peuple n’est pas libre d’accorder une récompense au sénat qui n’a point construit de vaisseaux , et que c’est-là l’esprit de la loi. Il explique cette loi , et prouve qu’elle doit être observée à la rigueur, par l’importance de la marine pour la ville d’Athènes. Il s’étend un peu là-dessus, et rapporte plusieurs exemples. En vain Androlion objectera que l’intendanl des ouvriers s’était enfui avec la caisse : on ne doit pas recevoir d’excuse ; il faut que les vaisseaux soient présentés tout construits. Enfin , il a tort de dire qu’on ne doive pas s’en prendre au sénat, qu’il n’y a point eu de vaisseaux construits. Tels sont les chefs principaux de l’accusation ; il y avait outre cela deux chefs accessoires. Androtion est coupable d’impudicité , son père est débiteur du trésor : c’est une double raison pour qu’il ne lui soit point permis de parler en public , de porter des décrets. Par rapport au premier chef, le reproche qu’on me fait d’impudicité , dit Androtion, est une pure invective. D’ailleurs, s’il était vraiment coupable , on devait le dénoncer aux thesmolhètes. Ce n’est pas une pure invective, répond Démosthène , puisque je prouve ce que j’avance , par une déposition digne de foi. Je vous dénoncerai aux ihesmolhètes, mais je peux m’en dispenser ici. 11 le prouve par un raisonnement, et par les lois de Solon , qui offraient plusieurs moyens de poursuivre un coupable. Il explique Tintenlion du législateur, qui se contentait de défendre à un homme convaincu d’impudicité , de parlera la tribune , de prendre part à l’administration publique. Quant au second chef , Androlion ne peut pas dire non plus qu’on devait le dénoncer, il doit prouver que son père n’est pas débiteur du trésor ; car, s’il l’est véritablement , héritier de sa diffamation , il ne peut ni parler en public , ni proposer de décrets. L’orateur réfute quelques autres défenses de l’accusé , s’efforce de décréditer la démarche des citoyens qui doivent solliciter en sa faveur , lui ôte un refuge auquel il avait recours (Je suis persécuté , disait-il , à cause des contributions levées par moi au nom du peuple) ; et termine sa harangue par une longue et véhémente déclamation contre son ministère.

Les anciens rhéteurs ont dit de cette harangue que Démosthène l’avait travaillée avec un soin particulier , étant jaloux de l’emporter pour l’éloquence sur Androtion, disciple d’Isocrate , orateur très-subtil , fortifié dans le talent de la parole par un long exercice. On y remarque , en effet , beaucoup de raisons extrêmement subtiles , et il semble que Démosthène y ait voulu faire assaut de subtilité contre un orateur qui s’en piquait. Elle est de même date que la harangue contre Leptine , et par conséquent elle a été composée avant celle contre Midias , sous l’archonte Callistrate , dans la seconde année de la CVI.• olympiade , et dans la vingt-septième de Démosthène. Le texte est obscur et embrouillé en plusieurs endroits ; j’aî tâché de l’éclaircir le mieux qu’il m’a été possible.




________________