Aller au contenu

813 (1910, Le Journal)/04/01

La bibliothèque libre.

CHAPITRE PREMIER

LES SEPT BANDITS

I

— Madame peut-elle recevoir ?

Dolorès Kesselbach prit la carte que lui tendait le domestique et lut :

André Mauny.

— Non, dit-elle, je ne connais pas.

— Ce monsieur insiste beaucoup, madame. Il dit que madame attend sa visite.

— Ah !… peut-être… en effet… Conduisez-le jusqu’ici.

Depuis les événements qui avaient bouleversé sa vie et qui l’avaient frappée avec un acharnement implacable, Dolorès, après un séjour à l’hôtel Bristol, venait de s’installer dans une paisible maison de la rue des Vignes, au fond de Passy.

Un joli jardin s’étendait par derrière, encadré d’autres jardins touffus. Quand des crises plus douloureuses ne la maintenaient pas des jours entiers dans sa chambre, les volets clos, elle se faisait porter sous les arbres, et les rares amis qu’elle consentait encore à recevoir la trouvaient là, étendue, mélancolique, incapable de réagir contre le mauvais destin.

Le sable de l’allée craqua de nouveau, et, accompagné par le domestique, un jeune homme apparut, élégant de tournure, habillé très simplement, à la façon un peu surannée de certains peintres, col rabattu, cravate flottante à pois blancs sur fond bleu marine.

Le domestique s’éloigna.

— André Mauny, n’est-ce pas ? dit Dolorès.

— Oui, madame.

— Je n’ai pas l’honneur.

— Si, madame. Sachant que j’étais un des amis de Mme Ernemont, la grand’mère de Geneviève, vous avez écrit à cette dame, à Garches, que vous désiriez avoir un entretien avec moi. Me voici.

Dolorès se souleva, très émue,

— Ah ! vous êtes…

— Oui.

Elle balbutia :

— Vraiment ?… C’est vous ?… Je ne vous reconnais pas.

— Vous ne reconnaissez pas le prince Paul Sernine ?

— Non… rien n’est semblable… ni le front… ni les yeux… Et ce n’est pas non plus ainsi…

— … Que les journaux ont représenté le prévenu de la Santé, dit-il en souriant… Pourtant, c’est bien moi.

Un long silence suivit, où ils demeurèrent embarrassés et mal à l’aise. Enfin il prononça :

— Puis-je savoir la raison ?

— Geneviève ne vous a pas dit ?…

— Je ne l’ai pas vue… mais sa grand’mère a cru comprendre que vous aviez besoin de mes services.

— C’est cela… c’est cela…

— Et en quoi ? Je suis si heureux…

Elle hésita une seconde, puis murmura :

— J’ai peur.

— Peur ? s’écria-t-il.

— Oui, fit-elle à voix basse, j’ai peur, j’ai peur de tout, peur de ce qui est et de ce qui sera demain, après-demain… peur de la vie. J’ai tant souffert… je ne puis plus…

Il la regardait avec une grande pitié. Le sentiment confus qui l’avait toujours poussé vers cette femme prenait un caractère plus précis aujourd’hui qu’elle lui demandait protection. C’était un besoin ardent de se dévouer à elle, entièrement, sans espoir de récompense. Elle poursuivit :

— Je suis seule, maintenant. Suzanne a eu peur elle aussi et m’a quittée. Je suis toute seule, avec des domestiques que j’ai pris au hasard, et j’ai peur… je sens qu’autour de moi on s’agite.

— Mais dans quel but ?

— Je ne sais pas. Est-ce ma fortune que l’on convoite ? Je l’ignore. Mais l’ennemi rôde et se rapproche.

— Vous l’avez vu ? vous avez remarqué quelque chose ?

— Oui, dans la rue, ces jours-ci, deux hommes ont passé plusieurs fois, et se sont arrêtés devant la maison.

— Leur signalement ?

— Il y en a un que j’ai mieux vu. Il est grand, fort, tout rasé, et habillé d’une petite veste de drap noir très courte.

— Un garçon de café.

— Oui, un maître d’hôtel. Je l’ai fait suivre par un de mes domestiques. Il a pris la rue de la Pompe et a pénétré dans une maison de vilaine apparence dont le rez-de-chaussée est occupé par un marchand de vin, la première à gauche sur la rue. Enfin, l’autre nuit…

— L’autre nuit ?

— J’ai aperçu, de la fenêtre de ma chambre, une ombre dans le jardin.

— C’est tout ?

— Oui.

Il réfléchit et lui proposa :

— Permettez-vous que deux de mes hommes couchent en bas, dans une des chambres du rez-de-chaussée ?

— Deux de vos hommes ?

— Oh ! ne craignez rien… Ce sont deux braves gens, le père Charolais et son fils, qui n’ont pas l’air du tout de ce qu’ils sont. Avec eux, vous serez tranquille. Quant à moi…

Il hésita. Il attendait qu’elle le priât de revenir. Comme elle se taisait, il dit :

— Quant à moi, il est préférable que l’on ne me voie pas ici. Oui, c’est préférable… pour vous. Mes hommes me tiendront au courant.

Il eut voulu en dire davantage, et rester, et s’asseoir auprès d’elle et la réconforter. Mais il avait l’impression que tout était dit de ce qu’ils avaient à se dire, et qu’un seul mot de plus, prononcé par lui, serait un outrage.

Alors, il la salua très bas, et se retira.

Il traversa le jardin, marchant vite, avec la hâte de se retrouver dehors et de dominer son émotion. Le domestique l’attendait au seuil du vestibule. Au moment où il franchissait la porte d’entrée, sur la rue, quelqu’un sonnait, une jeune femme. Il tressaillit :

— Geneviève ! murmura-t-il.

Elle fixa sur lui des yeux étonnés et, tout le suite, bien que déconcertée par l’extrêane jeunesse de ce regard, elle le reconnut, et cela lui causa un tel trouble qu’elle vacilla et dut s’appuyer à la porte.

Il avait ôté son chapeau et la contemplaît, sans oser lui tendre la main. Tendrait-elle la sienne ? Ce n’était plus le prince Sernine… c’était Arsène Lupin. Et elle savait qu’il était Arsène Lupin et qu’il sortait de prison.

Dehors il pleuvait. Elle donna son parapluie au domestique en balbutiant :

— Veuillez l’ouvrir et le mettre de côté…

Et elle passa tout droit.

— Mon pauvre vieux, se dit Lupin en partant, voilà bien des secousses pour un être nerveux et sensible comme toi. Surveille ton cœur, sinon… Allons, bon, voilà que tes yeux se mouillent ! Mauvais signe, monsieur Lupin, tu vieillis.

Il frappa sur l’épaule d’un jeune homme qui traversait la chaussée de la Muette et se dirigeait vers la rue des Vignes.

Le jeune homme s’arrêta, et, après quelques secondes :

— Pardon, monsieur, mais je n’ai pas l’honneur, il me semble…

— Il vous semble mal, mon cher monsieur Pierre Leduc. Ou c’est alors que votre mémoire est bien affaiblie. Rappelez-vous Versailles… la petite chambre de l’hôtel des Trois-Empereurs.

— Vous !

Le jeune homme avait bondi en arrière, avec épouvante.

— Mon Dieu, oui, moi ! Pensiez-vous donc que Lupin avait trépassé ? Ah ! oui, je comprends, la prison… vous espériez… Enfant, va !

Il lui tapota doucement l’épaule.

— Voyons, jeune homme, remettons-nous, nous avons encore quelques bonnes journées paisibles à faire des vers. L’heure n’est pas encore venue. Fais des vers, heureux poète !

Il lui étreignit le bras violemment et lui dit, face à face :

— Mais l’heure approche, poète. N’oublie pas que tu m’appartiens, corps et âme. Et prépare-toi à jouer ton rôle. Il sera rude et magnifique. Et par Dieu, tu me parais vraiment l’homme de ce rôle !

Il éclata de rire, fit une pirouette et laissa le jeune Leduc abasourdi.

Il y avait plus loin, au coin de la rue de la Pompe, le débit de vin dont lui avait parlé Mme Kesselbach. Il entra et causa longuement avec le patron.

Puis il prit une auto et se fit conduire au Grand-Hôtel, où il habitait sous le nom d’André Mauny.

Les frères Doudeville l’y attendaient.

Bien que blasé sur ces sortes de jouissances, Lupin n’en goûta pas moins les témoignages d’admiration et de dévouement dont ses amis l’accablèrent.

— Enfin, patron, expliquez-nous ?… Que s’est-il passé ? Avec vous nous sommes habitués aux prodiges… mais, tout de même, il y a des limites… Alors, vous êtes libre ? Et vous voilà ici, au cœur de Paris, à peine déguisé.

— Un cigare ? offrit Lupin.

— Merci… non.

— Tu as tort, Doudeville. Ceux-là sont estimables. Je les tiens d’un fin connaisseur, qui veut bien se dire mon ami.

— Ah ! peut-on savoir ?

— Le kaiser. Allons, ne faites pas ces têtes d’abrutis ! Jacques Doudeville, mets-moi au courant, je n’ai pas lu de journaux. Mon évasion, quel effet dans le public ?

— Foudroyant, patron !

— La version de la police ?

— Votre fuite aurait eu lieu à Garches, pendant une reconstitution de l’assassinat d’Altenheim. Par malheur, les journalistes ont prouvé que c’était impossible.

— Alors ?

— Alors, c’est l’ahurissement. On cherche, on rit et l’on s’amuse beaucoup.

— Weber ?

— Weber est fort compromis. L’opinion générale est qu’il sautera.

— Tant mieux. C’est un incapable. Il est honteux que la police ait à sa tête…

Il s’interrompit et reprit sérieusement :

— En dehors de cela, rien de nouveau au service de la Sûreté ?

— Non, patron.

— Aucune découverte sur l’assassin ?

— Aucune.

— Pas d’indice qui nous permette d’établir l’identité d’Altenheim ?

— Non.

— Sont-ils bêtes ? Quand on pense que nous payons des millions par an pour nourrir ces gens-là. Si ça continue, je refuse de payer mes contributions. Avec toutes les ressources dont ils disposent, ils n’arrivent même pas à savoir ce qu’était le pseudo-baron Altenheim. C’est pourtant l’essentiel. Par Altenheim et sa bande on remonte à l’assassin.

— Mais vous, patron ?

— Moi, je me donne trois heures pour déblayer le terrain. Il faut bien les aider, les malheureux. Va-t’en, Doudeville, et maquille-toi en vieillard respectable, ancien magistrat. Rendez-vous à huit heures, en face des Variétés. Toi, Jean, prends un siège et une plume. Tu porteras cette lettre ce soir au Grand Journal. Il y a longtemps que l’univers n’a plus de mes nouvelles. Il doit haleter d’impatience. Écris :

Il dicta :

« Monsieur le Directeur,

» Je m’excuse auprès du public, dont la légitime impatience sera déçue.

» Je me suis évadé de prison, et il m’est impossible de dévoiler comment je me suis évadé. De même, depuis mon évasion, j’ai découvert le fameux secret, et il m’est impossible de dire quel est ce secret et comment je l’ai découvert.

» Tout cela fera, un jour ou l’autre, l’objet d’un récit quelque peu original que publiera, d’après mes notes, mon biographe ordinaire. C’est une page de l’histoire de France que nos petits-enfants ne liront pas sans intérêt.

» Pour l’instant, j’ai mieux à faire. Révolté de voir en quelles mains sont tombées les fonctions que j’exerçais, las de constater que l’affaire Kesselbach-Altenheim en est toujours au même point, je destitue M. Weber et je reprends le poste d’honneur que j’occupais avec tant d’éclat et à la satisfaction générale, sous le nom de M. Lenormand.

» Arsène Lupin,
» Chef de la Sûreté. »

II

À huit heures du soir, Arsène Lupin et Doudeville faisaient leur entrée chez Caillard, le restaurant à la mode. Lupin serré dans son frac, mais avec le pantalon un peu trop large de l’artiste et la cravate un peu trop lâche ; Doudeville en redingote, la tenue et l’air grave d’un magistrat.

Ils choisirent la partie du restaurant qui est en renfoncement et que deux colonnes séparent de la grande salle.

Un maître d’hôtel, correct et dédaigneux, attendit les ordres, un carnet à la main. Lupin commanda avec une minutie et une recherche de fin gourmet.

— Certes, dit-il, l’ordinaire de la prison était acceptable, mais tout de même ça fait plaisir, un repas soigné.

Il mangea de bon appétit et silencieusement, se contentant parfois de prononcer une courte phrase qui indiquait la suite de ses préoccupations.

— Évidemment, ça s’arrangera… mais ce sera dur… Quel adversaire !… Ce qui m’épate, c’est qu’après six mois de lutte, je ne sache même pas ce qu’il veut !… Le principal complice est mort, nous touchons au terme de la bataille, et pourtant je ne vois pas plus clair dans son jeu… Que cherche-t-il, le misérable ?… Moi, mon plan est net : mettre la main sur le grand-duché, flanquer sur ce trône un archiduc de ma composition, lui donner Geneviève comme épouse… et régner !… Voilà qui est limpide, honnête et loyal. Mais lui, l’ignoble personnage, cette larve des ténèbres, à quel but veut-il atteindre ?

Il appela :

— Garçon !

Le maître d’hôtel s’approcha.

— Monsieur désire ?

— Les cigares.

Le maître d’hôtel revint et ouvrit plusieurs boîtes.

— Qu’est-ce que vous me conseillez ? dit Lupin

— Voici des upman excellents.

Lupin offrit un upman à Doudeville, en prit un pour lui et le coupa.

Le maître d’hôtel fit flamber une allumette et la présenta.

Vivement, Lupin lui saisit le poignet.

— Pas un mot… je te connais… tu t’appelles de ton vrai nom Dominique Lecas…

L’homme, qui était gros et fort, voulut se dégager. Il étouffa un cri de douleur, Lupin lui avait tordu le poignet.

— Tu t’appelles Dominique… tu habites rue de la Pompe, au quatrième étage, où tu t’es retiré avec une petite fortune acquise au service — mais, écoute donc, imbécile, ou je te casse les os — acquise au service du baron Altenheim, chez qui tu étais maître d’hôtel.

L’autre s’immobilisa, le visage blême de peur.

Autour d’eux, la petite salle était vide. À côté, dans le restaurant, trois messieurs fumaient, et deux couples devisaient en buvant des liqueurs.

— Tu vois, nous sommes tranquilles… on peut causer.

— Qui êtes-vous ? Qui êtes-vous ?

— Tu ne me remets pas ? Cependant, rappelle-toi ce fameux déjeuner de la villa Dupont… c’est toi-même, vieux larbin, qui m’as offert l’assiette de gâteaux… et quels gâteaux !…

— Le prince… le prince… balbutia l’autre.

— Mais oui, le prince Arsène, le prince Lupin en personne… ah ! ah ! tu respires… tu te dis que tu n’as rien à craindre de Lupin, n’est-ce pas ? Erreur, mon vieux, tu as tout à craindre.

Il tira de sa poche une carte et la lui montra :

— Tiens, regarde, je suis de la police, maintenant… Que veux-tu, c’est toujours comme ça que nous finissons, nous autres, les grands seigneurs du vol, les empereurs du crime.

— Et alors ? reprit le maître d’hôtel, toujours inquiet.

— Alors, réponds à ce client qui t’appelle là-bas, fais ton service et reviens. Surtout, pas de blague, n’essaie pas de te tirer des pattes. J’ai dix agents dehors qui ont l’œil sur toi. File.

Le maître d’hôtel obéit. Cinq minutes après, il était de retour. Et, debout devant la table, le dos tourné au restaurant, comme s’il discutait avec des clients sur la qualité de leurs cigares, il disait :

— Eh bien, de quoi s’agit-il ?

Lupin aligna sur la table quelques billets de cent francs.

— Autant de réponses précises à mes questions, autant de billets.

— Ça colle.

— Je commence. Combien étiez-vous avec le baron Altenheim ?

— Sept, sans me compter.

— Pas davantage ?

— Non. Une fois seulement on a racolé des ouvriers d’Italie pour faire les souterrains de la villa des Glycines, à Garches.

— Il y avait deux souterrains ?

— Oui, l’un conduisait au pavillon Hortense, l’autre s’amorçait sur le premier et venait sous le pavillon de Mme Kesselbach.

— Que voulait-on ?

— Enlever Mme Kesselbach.

— Ses deux bonnes, Suzanne et Gertrude, étaient vos complices ?

— Oui.

— Qu’est devenue Suzanne ?

— Je ne sais pas.

— Et tes sept compagnons, ceux de la bande Altenheim ?

— La bande s’est reformée avec un autre patron. Moi, je suis rentré…

— Dans le civil. C’est bien dit. Je continue. Le nom de l’autre patron ?

— Je l’ignore.

— Oh ! oh ! es-tu bien sûr ? Prends garde. C’est grave.

— Eh bien, oui, je sais son nom. Et je sais le nom qu’ils ont pris, chacun d’eux, et leur adresse, et ce qu’ils font, et où ils se retrouvent ; mais les trahir, ça, jamais. J’aimerais mieux crever.

— Cinq cents francs.

— Pas pour cing cent mille.

— Lupin le regarda attentivement. C’était sérieux. Il dit :

— Soit, ce sentiment t’honore, Dominique. N’en parlons plus. Seulement il est un point auquel je tiens essentiellement. Là, pas de faux-fuyants, pas de scrupules. Quel était le nom, le vrai nom d’Altenheim ? Tu le connais ?

— Oui.

— Alors ?

Ribeira.

— Dominique, ça va mal tourner. Ribeira n’était qu’un nom de guerre. Je te demande le vrai nom.

— Parbury.

— Autre nom de guerre.

Le maître d’hôtel hésitait. Lupin aligna trois billets de banque.

— Et puis zut ! s’écria l’homme. Après, tout, il est mort, n’est-ce pas ? et bien mort ? Par conséquent, je ne trahis personne.

— Son nom, dit Lupin.

— Son nom ? Le chevalier Raoul de Malreich.

Lupin sauta sur sa chaise.

— Quoi ? Qu’est-ce que tu as dit ? Le chevalier ? Répète… le chevalier ?

— Raoul de Malreich.

Un long silence. Lupin, les yeux fixes, pensait à la folle de Veldenz, morte empoisonnée. Isilda portait ce même nom : de Malreich, et c’était le nom que portait le petit gentilhomme français venu à la tour de Veldenz au dix-huitième siècle. Il reprit :

— De quel pays, ce Malreich ?

— D’origine française, mais né en Allemagne… j’ai aperçu des papiers une fois. C’est comme ça que j’ai appris son nom. Ah ! s’il l’avait su, il m’aurait étranglé, je crois.

Lupin réfléchit et prononça :

— C’est lui qui vous commandait tous ?

— Oui.

— Mais il avait un complice, un associé ?

— Ah ! taisez-vous… taisez-vous…

La figure du maître d’hôtel exprimait soudain l’anxiété la plus vive. Lupin discerna la même sorte d’effroi, de répulsion qu’il éprouvait lui-même en songeant à l’assassin.

— Qui est-ce ? Tu l’as vu ?

— Oh ! ne parlons pas de celui-là… on ne doit pas parler de lui.

— Qui est-ce, je te demande ?

— C’est le maître… le chef ; personne ne le connaît.

— Mais tu las vu, toi. Réponds. Tu l’as vu ?

— Dans l’ombre. Quelquefois… la nuit. Jamais en plein jour.

— Son nom ?

— Je l’ignore. On ne parlait jamais de lui. Ça portait malheur.

— Le nouveau patron de la bande ?

— Ce n’est pas lui… non. Celui-là, c’est l’un de nous. Lui, il la dirige de loin, comme il nous dirigeait. Ses ordres arrivent sur des petits bouts de papier… ou par téléphone ; ou bien, comme je vous dis, il passe, la nuit…

— Il est vêtu de noir, n’est-ce pas ?

— Oui, de noir. Il est petit et mince… blond…

— Et il tue, n’est-ce pas ?

— Oui, il tue… il ne faut pas en parler… Je vous le dis, ça porte malheur.

Lupin se tut, impressionné malgré tout par l’angoisse de cet homme.

Il resta longtemps pensif, puis il se leva et dit au maître d’hôtel :

— Tiens, voilà ton argent, mais si tu veux vivre en paix, tu feras sagement de ne souffler mot à personne de notre entrevue.

Il sortit du restaurant avec Doudeville et il marcha jusqu’à la porte Saint-Denis sans mot dire, préoccupé par tout ce qu’il venait d’apprendre.

Enfin, il saisit le bras de son compagnon et prononça :

— Écoute bien, Doudeville. Tu vas aller à la gare du Nord, où tu arriveras à temps pour sauter dans l’express de Luxembourg. Tu iras à Veldenz, la capitale du grand-duché de Deux-Ponts-Veldenz. À la Maison de Ville, tu obtiendras facilement l’acte de naissance du chevalier de Malreich et des renseignements sur la famille. Après-demain, samedi, tu seras de retour.

— Dois-je prévenir à la Sûreté ?

— Je m’en charge. Je téléphonerai que tu es malade.

La journée du vendredi sembla longue à Lupin, malgré les mille soucis divers sollicitant son attention. Tout lui était indifférent à côté de cette énigme : quel lien rattachait Isilda au baron Altenheim ? Il entrevoyait bien plusieurs solutions, mais il ne voulait pas réfléchir, pour ne pas s’embarrasser d’idées préconçues.

Enfin, la seconde nuit s’écoula. Dès le matin il descendit dans le hall du Grand-Hôtel, et vingt fois il consulta sa montre.

— Doudeville ! enfin, c’est toi. Tu as les renseignements ?

— Oui, patron.

— L’acte de naissance ?

— Oui, patron, un papier officiel, tout ce qu’il faut.

— Vite, parle.

— Au dix-huitième siècle, un chevalier de Malreich est venu à la cour…

— Je sais. Passons. Ce qui m’intéresse, c’est Altenheim.

— Le grand-père d’Altenheim vivait encore.

— Je te parle d’Altenheim.

— Eh bien, le père et la mère d’Altenheim ont été chassés du grand-duché de Veldenz pour conduite scandaleuse. Le père est mort dans un accès de delirium tremens il y a vingt ans. La mère s’est tuée dans un accès de folie. Ils laissaient trois enfants.

— Trois ?

— Oui, l’aîné aurait aujourd’hui trente ans. Il s’appelait Raoul de Malreich.

— C’est notre homme, Altenheim. Après ?

— Le plus jeune enfant était une fille, Isilda. Le registre porte, à l’encre fraîche : « Décédée. »

— Isilda… Isilda… redit Lupin, c’est bien de que je pensais. Isilda était la sœur d’Altenheim. J’avais bien vu en elle une expression de physionomie que je connaissais. Voilà le lien qui les rattachait. Mais l’autre, le troisième enfant, ou plutôt le second, le cadet ?

— Un fils. Il aurait actuellement vingt-six ans.

— Son nom ?

— Louis de Malreich.

Lupin eut un petit choc.

— Ça y est ! Louis de Malreich… Les initiales L. M. L’affreuse et terrifiante signature. L’assassin se nomme Louis de Malreich. C’était le frère d’Altenheim et le frère d’Isilda. Et il a tué l’un, et il a tué l’autre, par crainte de leurs révélations.

Lupin demeura longtemps taciturne, sombre, avec l’obsession, sans doute, de l’être mystérieux.

Doudeville objecta :

— Que pouvait-il craindre de sa sœur Isilda ? Elle était folle, m’a-t-on dit.

— Folle, oui, mais capable de se rappeler certains détails de son enfance. Elle aura reconnu le frère avec lequel elle avait été élevée. Et ce souvenir lui a coûté la vie.

Et il ajouta :

— Folle ! mais tous ces gens-là sont fous. La mère folle… Le père alcoolique… Altenheim, une véritable brute… Isilda, une pauvre démente… Et quant à l’autre, l’assassin, c’est le monstre, le maniaque imbécile.

— Imbécile, vous trouvez, patron ?

— Eh oui, imbécile ! Avec des éclairs de génie, avec des ruses et des intuitions de démon, mais un détraqué, un fou comme toute cette famille de Malreich. Il n’y a que les fous qui tuent, et surtout les fous comme celui-là.

On frappa à la porte de la chambre.

— Entrez ! dit Lupin.

C’était un des deux hommes qu’il avait postés chez Dolorès Kesselbach, le père Charolais.

— Du nouveau, Charolais ?

— Oui, patron.

— Raconte.

— On a pénétré cette nuit dans les pièces du bas. Un a volé de l’argenterie et différents objets.

— Comment ! mais c’est là que vous couchez tous les deux, ton fils et toi !

Charolais rougit :

— Oui, seulement c’était à l’autre bout… et nous dormions.

— À merveille. Et vous n’avez rien entendu, ni l’un ni l’autre ?

— Non.

— Et par où a-t-on pénétré dans la maison ?

— Par le jardin.

— Mais dans le jardin ?

— Par le toit d’une écurie voisine.

— Aucun indice ?

— Si… cette vieille enveloppe, avec du tabac dedans, que j’ai ramassée.

— Où ?

— Sur le tapis du salon.

— Donne.

C’était une enveloppe froissée, sale, à moitié déchirée, et où l’on voyait les cachets de la poste et une partie de l’adresse. Il déchiffra : « 5, route de la Révolte, Neuilly. » Il eut une expression de joie ardente :

— Enfin, s’écria-t-il, voilà quelque chose !… la bataille va devenir plus serrée… j’approche de l’ennemi. Bientôt, ce sera le corps-à-corps… Ah ! pour Dieu, je vous jure que j’ai hâte d’y être, à ce moment-là !

III

Le 5 de la route de la Révolte, à Neuilly, est une véritable cité. Une porte cochère ouvre sur une cour intérieure. Et là, c’est une suite de bâtiments, de passages et d’ateliers où grouille une population d’artisans, de femmes et de gamins.

Doudeville, qui était allé en éclaireur, revint vers Lupin et lui dit :

— C’est tout un monde, là-dedans. Impossible de se renseigner. Nous devons aller au hasard.

— Allons.

Lupin se rendit compte par lui-même que l’enquête serait longue, puisqu’ils n’avaient point d’autres informations que le numéro de l’immeuble. En tout cas, d’ailleurs, il fallait commencer par interroger la concierge.

Il se dirigeait vers la loge, quand il croisa un individu qui sortait avec un paquet sous le bras et qui le regarda, de ce regard machinalement inquisiteur où l’on reconnaît si bien les gens dont la conscience n’est pas absolument tranquille.

— Ça, murmura Lupin, c’est du gibier, et qui sent fort… ça se suit à l’odeur.

Et aussitôt un autre individu passa, de même tenue et de même allure.

— Compère et compagnie, reprit Lupin. L’air d’honnêtes gens, parbleu ! mais l’œil du fauve qui sait que l’ennemi est partout et que chaque buisson, chaque touffe d’herbe peut cacher une embûche.

— Faut les suivre, patron ?

— Oui, mais en douceur…

Ils marchèrent à une assez grande distance des deux hommes. L’un après l’autre ceux-ci franchirent la porte des Ternes, chacun d’eux montrant le contenu de son paquet aux employés de l’octroi.

— Tiens, qu’est-ce que je disais ! s’exclama Lupin une minute plus tard, les voilà qui se réunissent.

Les deux hommes tournèrent par la rue Saint-Ferdinand, gagnèrent la rue Duret et l’avenue du Bois-de-Boulogne.

— Bizarre, murmurait Lupin, il y a deux autres individus qui marchent sur l’autre trottoir et qui portent des paquets semblables… On échange des signes… Ah ! on se rejoint… Les voilà quatre, maintenant. Pas d’erreur, c’est une expédition.

Mais sur l’avenue les quatre individus s’assemblèrent autour d’un cinquième qui était assis, et qui avait déposé près de lui un paquet beaucoup plus important, de forme différente et d’où émergeaient trois bâtons de bois articulés.

Il le chargea sur son épaule, et tous les cinq ils traversèrent la contre-allée et prirent la rue de Villejust.

— Ah ! ça, mais, dit Lupin, si cela continue de la sorte, nous aurons affaire à une véritable armée. Que diable peut-il y avoir là-dedans ?

Mais, à l’angle de la rue de Villejust et de la rue Leroux, les cinq individus s’arrêtèrent. Un camion traîné par un cheval débouchait au grand trot. Deux hommes en descendirent.

— Cinq et deux sept, compta Doudeville.

— Oui, sept, répondit Lupin… exactement ce qui reste de la bande Altenheim.

Et il ajouta :

— Ça m’amuse de penser que ce sont les gaillards qui m’ont fait faire un plongeon dans la Seine quand je m’appelais M. Lenormand.

— Avec Gourel, patron.

— Précisément, avec Gourel. Pauvre Gourel, je crois que l’heure de la vengeance ne va pas tarder pour lui.

— Ce n’est pas trop tôt, patron.

— Silence. Ouvrons l’œil.

À son grand étonnement, les sept individus ne continuèrent pas leur promenade. Ils semblaient au contraire s’établir sur la petite place formée par l’intersection des deux rues, comme si c’eût été là leur quartier général. Et, de fait, ils déplièrent leurs paquets.

— Doudeville, je suis curieux de savoir ce qu’il y a là-dedans.

— Moi aussi, patron.

C’était, comme ils le constatèrent, des vêtements de toutes sortes, bourgerons d’ouvriers, haillons, foulards rouges, bonnets de déménageurs, vieux pantalons de soldats, loques multicolores.

Et les sept individus se mirent à endosser ces vêtements, se déguisant ainsi, s’aidant les uns les autres, se maquillant, se barrant la figure de grosses moustaches et de sourcils énormes.

Pendant ce temps, le cinquième compagnon de la bande, celui de l’avenue du Bois, avait défait son paquet et dressait sur le terre-plein du carrefour un grand appareil de photographie qu’il braqua vers un hôtel particulier de la rue de Villejust.

Et les passants s’attroupèrent. Lupin éclata de rire :

— Idiot ! triple idiot ! Doudeville, je ne suis que le dernier des idiots. Voilà une heure que nous perdons à suivre les gens les plus honnêtes du monde.

— Oui, dit Doudeville, qui comprenait, des figurants de cinématographe. Mais pourquoi tant de précautions ? et ces façons d’agir bizarres ?

— C’est nous qui avons vu cela ! effet d’imagination. Regarde plutôt.

Ils s’étaient avancés jusqu’au carrefour et ils voyaient vissée sur la porte de l’hôtel une plaque de cuivre avec ces mot :

« Société du cinématographe Vossard. »

— Et alors ? dit Doudeville.

— Alors, tu vas assister à une représentation d’hôtel cambriolé, donnée par la troupe de cette société cinématographique.

Des agents de police passaient. Un des figurants le pria de maintenir l’ordre. Deux autres s’approchèrent de la maison, dont les volets étaient clos et qui avait l’air inhabitée.

Ils se firent la courte échelle, et un troisième grimpa sur le rebord d’une fenêtre, au rez-de-chaussée. Celui-ci portait une trousse d’où il sortit un levier de fer et des pinces avec lesquels il se mit à crocheter le volet.

Tout cela s’accomplissait par mouvements mécaniques, saccadés, comme étudiés et convenus d’avance.

À deux, puis à trois, puis à quatre ils pénétrèrent dans l’hôtel.

Soudain, une fenêtre s’ouvrit au troisième étage, et un vieillard apparut, en bras de chemise, terrifié.

Il cria :

— Au voleur ! À l’assassin !

Il rentra, et on le vit de nouveau à une autre fenêtre, au second étage. Il voulut crier, mais la main d’un figurant s’appliqua sur sa bouche et le renversa.

Et ce fut le déménagement qui commença.

Les hommes se faisaient la chaîne. Un à un les bibelots d’art, les chaises, les fauteuils légers du dix-huitième siècle, les vieilles tapisseries, les bronzes, les candélabres, passèrent de main en main et furent empilés dans le camion.

En face l’appareil de photographie manœuvrait, tourné par un figurant comme un orgue de Barbarie.

Cela dura une demi-heure.

Par la fenêtre, on vit les figurants qui buvaient, à même la bouteille.

Puis ils redescendirent, la mine farouche et sournoise, l’air d’apaches prêts à jouer du couteau en cas d’alerte.

En quelques secondes, ils s’installèrent sur le siége et sur le toit du camion. Un coup de fouet. La voiture s’éloigna et disparut au coin de l’avenue Victor-Hugo.

— Amusant, dit Doudeville.

— Oui, fit Lupin distraitement.

Il alluma une cigarette, flâna le long des rues durant une vingtaine de minutes, entra dans un bureau de poste et consulta un annuaire du téléphone.

Puis il dit :

— Maintenant, nous pourrons y aller sans scrupule, ce sont des gaillards d’attaque. Plus de danger pour eux.

L’attroupement ne s’était pas encore dissipé, la foule attendant l’inévitable retour des figurants.

Lupin aborda les agents de police.

— Ils reviennent, n’est-ce pas ?

— Faut croire. Il y a une autre opération.

— Laquelle ?

— Ma foi, nous ne savons pas. Mais il y a une autre opération, ils nous l’ont dit. Et puis il y a l’appareil.

— Quel appareil ?

— Celui du cinématographe. Ils l’ont laissé à notre garde.

L’appareil, en effet, était encore là, à moitié caché sous son voile noir.

Lupin replia les jambes articulées, enleva le voile, saisit le coffre même de la chambre noire. C’était une simple carcasse, sans objectif, sans pellicules.

— Eh bien, elle est raide, celle-là balbutièrent les agents, ébahis.

Lupin les pria de venir jusqu’à la porte et d’examiner la plaque.

— Cette plaque de cuivre, dit-il, a été vissée cette nuit. Il n’y a pas de société de cinématographe ici. L’hôtel appartient à M. Schiller, actuellement à la campagne, ainsi que les propriétaires de toutes les maisons avoisinantes.

Les agents écarquillèrent les yeux.

— Eh bien, qu’est-ce que ça veut dire ?

— Ça veut dire que vous avez laissé cambrioler l’hôtel de M. Schiller.

— Quoi !

— Et le vieux domestique auquel on avait confié la garde de l’hôtel doit être, à l’heure actuelle, dans un piteux état.

— Vous êtes fou !

— Vous croyez ?

— Parbleu, c’était un figurant.

— Allons voir.

Lupin réquisitionna l’échelle d’un peintre en bâtiments qui stationnait parmi les groupes, l’appliqua contre le mur et montra le chemin aux deux agents et à Doudeville.

Ils traversèrent un salon dévasté, suivirent un couloir, un escalier et visitèrent les chambres du deuxième étage.

Dans la troisième à gauche, le vieillard était étendu, solidement attaché et soigneusement bâillonné.

Une heure plus tard, route de la Révolte, Lupin vit rentrer, les uns après les autres, et comme s’ils ne se connaissaient pas, les sept individus de la bande Altenheim.

Chacun d’eux portait un paquet comme au départ.

— Ils ont mis leur butin en sûreté, dit Doudeville, et ils ont repris leurs vêtements ordinaires.

— Oui, fit Lupin, et je reconnais que tout cela est très bien joué, mais je m’étonne qu’un type comme ce Louis de Malreich perde son temps à cambrioler les maisons.

— Il faut bien vivre.

— Mais non, mais non, nous avons la preuve que ce misérable a tout l’argent qu’il veut à sa disposition. En outre, l’heure actuelle est critique pour lui, et ce serait une bêtise que de s’attarder… Non, pour sûr, il y a autre chose…

Cette autre chose, Lupin la devina, ou du moins la pressentit, le lendemain, quand de très bonne heure, assis sur un banc de la route de la Révolte, il lut dans le journal le récit du cambriolage.

On racontait d’abord l’affaire en ses moindres détails, on expliquait le truc ingénieux du cinématographe, et l’on ajoutait cette note incidente, qui frappa vivement Lupin :

« Un fait assez curieux. M. Schiller était l’ami de M. Kesselbach, la malheureuse victime du Palace-Hôtel. M. Kesselbach avait confié jadis une enveloppe cachetée à son ami, avec mission de l’ouvrir un an après sa mort. En attendant la date fixée, M. Schiller avait déposé cette enveloppe dans un petit meuble à tiroir secret de son salon.

» Or, ce petit meuble, bien que n’ayant point de valeur, est au nombre de ceux qui ont été cambriolés hier.

» Doit-on voir une corrélation entre ce point et le cambriolage lui-même ? »

— Eh oui, parbleu, s’écria Lupin, la corrélation est certaine. L’affaire n’a pas d’autre raison. Malreich connaissait l’existence de ce dépôt, sans savoir exactement où il se trouvait. Par précaution, et craignant l’ouverture de l’enveloppe, où l’on aurait sans doute découvert des preuves contre lui, il a organisé un cambriolage et enlevé tous les meubles, au hasard. Voilà le mot de l’énigme, Doudeville, et je comprends…

Il n’acheva pas, les yeux attentifs.

D’un cabaret voisin, le restaurant Buffalo, un homme sortait, petit, mince, vêtu de noir, blond de cheveux.

L’homme monta sur une bicyclette et s’éloigna rapidement du côté de la porte Maillot.

Lupin entra dans le cabaret, fit venir le patron, lui montra la carte de Doudeville et demanda :

— Le monsieur qui sort d’ici, vous le connaissez ?

— Oui, c’est un de nos clients. Il déjeune ici presque tous les jours.

— Son nom ?

— Son nom ? Léon Massier.

Lupin balbutia, tout ému :

— Léon Massier… L. M… Les deux lettres… C’est Louis de Malreich.