Afrique. Arrangements, actes et conventions concernant le nord, l’ouest et le centre de l’Afrique (1881-1898)/Convention relative à la délimitation des possessions françaises et portugaises dans l’Afrique occidentale du 12 mai 1886

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N° 8.

Convention

relative

à la délimitation des possessions françaises et portugaises

dans l’Afrique Occidentale[1].





Le Président de la République française et Sa Majesté le Roi de Portugal et des Algarves, animés du désir de resserrer par des relations de bon voisinage et de parfaite harmonie, les liens d’amitié qui existent entre les deux Pays, ont résolu de conclure, à cet effet, une Convention spéciale pour préparer la délimitation de leurs possessions respectives dans l’Afrique occidentale, et ont nommé pour leurs Plénipotentiaires, savoir :

Le Président de la République française ;

M. Girard de Rialle, Ministre plénipotentiaire, Chef de la Division des Archives au Ministère des Affaires étrangères, Chevalier de l’Ordre national de la Légion d’honneur, etc.

Et M. le Capitaine dé vaisseau O’Neill, Commandeur de l’Ordre national de la Légion d’honneur, etc.

Sa Majesté le Roi de Portugal et des Algarves ;

M. Isâo d’Andrade Corvo, Conseiller d’Etat, Vice-Président de la Chambre des Pairs, Grand’Croix de l’Ordre de Saint-Jacques, Grand’Croix de l’Ordre de la Légion d’honneur, son Envoyé extraordinaire et Ministre plénipotentiaire près le Gouvernement de la République française, etc. ;

Et M. Carlos Roma du Bocage, Député, Capitaine de l’Etat-Major du Génie, son Officier d’ordonnance honoraire et Attaché militaire à la Légation, près Sa Majesté l’Empereur d’Allemagne, Roi de Prusse, Chevalier de l’Ordre Saint-Jacques, Officier de l’Ordre de la Légion d’honner, etc.

Lesquels, après avoir échangé leurs pleins pouvoirs trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :


Article Ier.

En Guinée, la frontière qui séparera les Possessions françaises des Possessions portugaises suivra, conformément au tracé indiqué sur la carte no 1 annexée à la présente Convention :

Au Nord, une ligne qui, partant du Cap Roxo, se tiendra, autant que possible, d’après les indications du terrain, à égale distance des Rivières Cazamance (Casainansa) et San-Domingo de Cacheu (São-Domingos de Cacheu), jusqu’à l’intersection du Méridien 17° 30′ de longitude Ouest de Paris avec le parallèle 12° 40′ de latitude Nord. Entre ce point et le 16° de longitude Ouest de Paris, la frontière se confondra avec le parallèle 12° 49′ de latitude Nord ;

À l’Est, la frontière suivra le Méridien de 16° Ouest, depuis le parallèle 12° 40′ de latitude Nord jusqu’au parallèle 11° 40′ de latitude Nord ;

Au Sud, la frontière suivra une ligne qui partira de l’embouchure de la Rivière Cajet située entre l’île Catack (qui sera au Portugal) et île Tristao (qui sera à la France), et, se tenant autant que possible, suivant les indications du terrain, à égale distance du Rio Componi (Tabati) et du Rio Cassini, puis de la branche septentrionale du Rio Componi (Tabati) et de la branche méridionale du Hio Cassini (Marigot de Rakondo) d’abord, et du Rio grande ensuite, viendra aboutir au point d’intersection du Méridien 16° de longitude Ouest et du parallèle 11° 40′ de latitude Nord.

Appartiendront au Portugal toutes les lies comprises entre le Méridien du Cap Roxo, la côte et la limite Sud formée par une ligne qui suivra le Thalweg de la Rivière Cajet et se dirigera ensuite au Sud-Ouest, à travers la passe des Pilotes, pour gagner le 10° 40′ de latitude Nord, avec lequel elle se confondra jusqu’au Méridien du Cap Roxo.


Art. II.

Sa Majesté le Roi de Portugal et des Algarves reconnaît le Protectorat de la France sur les territoires de Fouta-Djallon, tel qu’il a été établi par les traités passés en 1881 entre le Gouvernement de la République française et les Almamys du Fouta-Djallon.

Le Gouvernement de la République française, de son côté, s’engage à ne pas chercher à exercer son influence dans les limites attribuées à la Guinée portugaise par l’article premier de la présente Convention. Il s’engage, en outre, à ne pas modifier le territoire accordé, de tout temps, aux Sujets portugais, par les Almamys du Fouta-Djallon.


Art. III.

Dans la région du Congo, la frontière des possessions portugaises et françaises suivra, conformément au tracé indiqué sur la carte no 2 annexée à la présente Convention, une ligne qui, partant de la pointe de Chamba, située au confluent de la Loema ou Louisa Loango et de la Lubinda, se tiendra, autant que possible et d’après les indications du terrain, à égale distance de ces deux rivières et, à partir de la source la plus septentrionale de la rivière Luali, suivra la ligne de faite qui sépare les bassins de la Loema ou Louisa Loango et du Chiloango, jusqu’au 10° 30′ de longitude Est de Paris ; puis se confondra avec ce méridien jusqu’à sa rencontre avec le Chiloango qui sert, en cet endroit, de frontière entre les possessions portugaises et l’État libre du Congo.

Chacune des Hautes Parties contractantes s’engage à n’élever à la pointe Ghamba, aucune construction de nature à mettre obstacle à la navigation.

Dans l’estuaire compris entre la pointe de Chamba et la mer, le thalweg servira de ligne de démarcation politique aux possessions des Hautes Parties contractantes.


Art. IV.

Le Gouvernement de la République française reconnaît à Sa Majesté Très Fidèle le droit d’exercer son influence souveraine et civilisatrice dans les territoires qui séparent les possessions portugaises d’Angola et de Mozambique, sous réserve des droits précédemment acquis par d’autres puissances, et s’engage, pour sa part, à s’y abstenir de toute occupation.


Art. V.

Les citoyens français dans les possessions portugaises sur la côte occidentale d’Afrique et les sujets portugais dans les possessions françaises sur la même côte seront respectivement, en ce qui concerne la protection des personnes et des propriétés, traités sur un pied d’égalité avec les sujets et les citoyens de l’autre Puissance contractante.

Chacune des Hautes Parties contractantes jouira , dans lesdites possessions, pour la navigation et le commerce, du régime de là nation la plus favorisée.


Art. VI.

Les propriétés faisant partie du domaine de l’État de chacune des Hautes Parties contractantes dans les territoires qu’elles se sont mutuellement cédés, feront l’objet d’échanges et de compensations.


Art. VII.

Une Commission sera chargée de déterminer, sur les lieux, la position définitive des lignes de démarcation prévues par les articles I et III de la présente Convention, et les membres en seront nommés de la manière suivante :

Le Président de la République française nommera, et Sa Majesté Très fidèle nommera deux commissaires.

Ces commissaires se réuniront au lieu qui sera ultérieurement fixé , d’un commun accord, par les Hautes Parties contractantes, et dans le plus bref délai possible après l’échange des ratifications de la présente Convention.

En cas de désaccord, lesdits commissaires en référeront aux Gouvernements des Hautes Parties contractantes.

Art. VIII.

La présente Convention sera ratifiée, et les ratifications en seront échangées à Lisbonne aussitôt que faire se pourra.

En foi de quoi les Plénipotentiaires respectifs ont signé la présente Convention et y ont apposé le sceau de leurs armes.

Fait à Paris, le 12 mai 1886.


(L. S.) Signé : Girard de Rialle.
(L. S.) Signé : Commandant O’Neill.
(L. S.) Signé : J. d’Andrade Corvo.
(L. S.) Signé : Carlos Roma du Boccage.
  1. Ratifié à Lisbonne le 31 août 1887.