Alice pour les tout-petits/Le Lapin blanc

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Macmillan and co (p. 20-23).

I

LE LAPIN BLANC


Il était une fois une petite fille qui s’appelait Alice — et elle fit un rêve très curieux.

Aimeriez-vous entendre de quoi elle rêva ?

Eh bien, voici la première chose qu’il advint. Un lapin blanc arriva en courant à toute allure ; et, au moment où il passa près d’Alice, il s’arrêta et sortit sa montre de sa poche.


N’était-ce pas une chose amusante ? Avez-vous jamais vu un lapin avec une montre et une poche pour la ranger ? Bien entendu, quand un lapin a une montre, il doit avoir une poche pour l’y mettre : il ne la porterait jamais dans sa bouche — et il a parfois besoin de ses mains pour courir.

N’a-t-il pas de jolis yeux roses (je pense que tous les lapins blancs ont les yeux roses) ; et des oreilles roses ; et une belle veste brune ; et vous pouvez entrevoir un mouchoir rouge dépassant de la poche de sa veste ; avec sa cravate bleue et son gilet jaune, il est vraiment très joliment habillé.

« Oh mon Dieu, mon Dieu ! » dit le lapin. « Je vais être en retard ! » va-t-il être en retard, je me le demande. Eh bien, voyez-vous, il doit rendre visite à la Duchesse (vous verrez bientôt une image de la Duchesse assise dans sa cuisine) : et la Duchesse était une vieille femme colérique : le lapin savait bien qu’elle serait très en colère s’il la faisait attendre. La pauvre créature était donc aussi effrayée qu’on peut l’être (ne voyez-vous pas comme il tremble ? secouez un peu le livre, de droite et de gauche, et vous le verrez bientôt trembler), parce qu’il pense que la Duchesse voudra lui faire couper la tête pour le punir. C’était ce que la Reine de Cœur avait l’habitude de faire quand elle était en colère contre les gens (vous verrez bientôt une image d’elle) : du moins, elle avait l’habitude d’ordonner que leur tête soit coupée, et elle croyait à chaque fois que c’était chose faite, bien qu’on ne le faisait jamais pour de vrai.

Ainsi donc, quand le lapin blanc s’éloigna en courant, Alice eut envie de voir ce qui lui arriverait ; alors elle lui courut après et elle courut, elle courut, jusqu’à ce qu’elle dégringole tout droit dans le terrier du lapin.

Alors elle fit une chute vraiment très longue. Elle tombait, tombait, tombait, jusqu’à ce qu’elle commence à se demander si elle allait traverser le monde de part en part et sortir de l’autre côté !

C’était tout comme un puits très profond : seulement il n’y avait pas d’eau dedans. Si quelqu’un faisait vraiment une chute comme celle-là, cela le tuerait surement : mais vous savez que l’on ne se fait pas très mal en tombant dans un rêve, parce que, tout le temps que vous croyez être en train de tomber, vous êtes en réalité allongé quelque part, sain et sauf, profondément endormi !

Cependant, cette terrible chute se termina enfin, et Alice se retrouva tout en bas sur un tas de branches et de feuilles sèches. Mais elle ne se fit pas du tout mal, et elle sauta sur ses pieds et se remit à courir après le lapin.

Voilà donc ce que fut le début du curieux rêve d’Alice. La prochaine fois que vous voyez un lapin blanc, essayez d’imaginer que vous allez faire un rêve curieux comme celui de la chère petite Alice.