Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 05/Géométrie analitique, article 3

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GÉOMÉTRIE ANALITIQUE.

Essai d’un nouveau mode de discussion de l’équation
générale des lignes et de celle des surfaces du second ordre ;
Par M. Gergonne.
≈≈≈≈≈≈≈≈≈

Jusqu’ici on a employé, pour la discussion géométrique de l’équation générale du second degré, à deux ou à trois indéterminées, ou la résolution effective de cette équation, ou la transformation des coordonnées, ou enfin la connaissance de quelques propriétés appartenant exclusivement aux diamètres principaux des lignes et surfaces du second ordre.

La discussion par la résolution effective de l’équation on, autrement dit, la méthode de Chezy, est sans doute bien préférable à ce qu’on rencontrait autrefois sur ce sujet dans les Traités d’application de l’algèbre à la géométrie ; mais, outre qu’après des calculs peu symétriques, elle ne conduit, en définitif, qu’à la connaissance d’un système unique de diamètres conjugués, c’est à tort, ce me semble, qu’on la présente comme modèle de la méthode à suivre, dans la discussion des lignes et surfaces de degrés plus élevés, puisque, passé le quatrième degré, la résolution de l’équation est impraticable dans l’état actuel de l’analise, et que dès le troisième, la discussion de l’équation résolue présente des difficultés à peu près insurmontables.

La discussion par la transformation des coordonnées semblerait, pour cette raison, mériter la préférence ; d’autant qu’elle est susceptible d’une certaine élégance. M. Bret, en particulier, dans divers articles de ce recueil, a montré tout le parti qu’on en pouvait tirer.

Cependant, on sait que, déjà pour les surfaces du second ordre, elle n’est point exempte de difficultés ; et que, dans tous les cas, elle exige des calculs assez compliqués, sur-tout lorsqu’on veut rapporter les grandeur et direction des diamètres principaux aux axes primitifs, et que ceux-ci ne sont point rectangulaires.

Quant à la discussion tirée de la connaissance préalable de quelque propriété appartenant exclusivement aux diamètres principaux, bien qu’elle soit peut-être la plus briève de toutes, comme M. Bérard l’a prouvé dans un article de ce recueil et dans un ouvrage particulier[1] ; on sent pourtant qu’elle ne saurait être considérée comme un procédé vraiment élémentaire, puisque c’est a la discussion même de l’équation qu’il appartient de faire découvrir les propriétés que cette méthode met en usage.

La méthode dont je me propose de tracer ici les principaux linéamens me paraît n’avoir aucun de ces inconvéniens, et semble en même temps plus naturelle qu’aucune de celles-là. Elle serait sans doute susceptible de perfectionnement ; aussi je ne la présente que comme un simple essai. Elle a sur-tout cet avantage que les résultats qu’on en obtient forment un tout dont les parties ont entre elles une étroite liaison. À la vérité, cette liaison n’est pas sans quelque inconvénient dans les exercices et examens publics, où il est beaucoup plus commode de savoir établir chaque proposition, indépendamment de toutes les autres ; mais il n’est point du tout démontré que ce qu’il faut faire pour briller dans les examens, du moins suivant leur mode actuel, soit aussi ce qu’il y a de plus propre à se rendre habile dans la science.

Je vais d’abord m’occuper des lignes du second ordre ; je passerai ensuite à la considération des surfaces du même ordre. Mais, comme il a déjà été fréquemment question des unes et des autres dans ce recueil, j’élaguerai tout ce qui ne sera pas proprement relatif à la méthode que j’ai en vue d’exposer.

§. I.
Discussion des lignes du second ordre.

Soit l’équation

(1)

exprimant une courbe rapportée à deux axes quelconques, formant entre eux un angle Soit

(2)

l’équation d’une droite quelconque, rapportée aux mêmes axes. En éliminant entre elles, il vient

(3)

ainsi, généralement parlant, la droite (2) coupe la courbe (1) en deux points.

On sait que si, dans une équation, on délivre le premier terme de son coefficient, le coefficient du second terme, pris avec un signe contraire, devient alors la somme des racines ; et comme, d’un autre côté, l’abscisse du milieu d’une droite est la demi-somme des abscisses de ses deux extrémités, il s’ensuit que, pour le milieu, de la corde interceptée par (1) sur (2), on a

(4)

En substituant cette valeur dans (2), on trouvera, pour le même milieu,

(5)

Les équations (4), (5) sont donc celles du milieu de la corde interceptée par (1) sur (2).

En faisant varier dans les formules (4), (5), sans faire varier on obtiendra les coordonnées des milieux d’une suite de cordes toutes parallèles entre elles. On obtiendra donc l’équation du lieu géométrique de ces milieux, en éliminant, entre ces deux formules[2] ; ce qui donnera, par la suppression du facteur commun à tous les termes de l’équation résultante,

(6)

équation d’une ligne droite, quelle que soit Ainsi les courbes comprises dans l’équation (1) jouissent toutes, sans exception, de cette propriété, très-remarquable, que les milieux d’un système de cordes parallèles ; quelle qu’en soit d’ailleurs la direction commune, y sont tous situés sur une même ligne droite que, pour cette raison, nous appellerons, à l’avenir, un diamètre de la courbe. On voit donc que, non seulement ces courbes ont une infinité de diamètres, mais que de plus, ces diamètres affectent, en général, toutes sortes de directions ; de manière qu’il n’est aucun des points d’une ligne du second ordre par lequel on ne puisse en concevoir un.

L’équation d’une parallèle quelconque au diamètre (6) doit être de la forme

(7)

d’où il suit que, si on la représente par

(8)

on aura, entre et l’équation de relation

ou (9)

Cette équation étant symétrique, par rapport à et il en faut conclure que les milieux des cordes parallèles au diamètre (6) sont sur un diamètre parallèle à (2) ; et, comme et demeurent indéterminés, il s’ensuit, plus généralement, que les milieux des cordes parallèles à un diamètre quelconque sont sur le diamètre parallèle aux cordes que le premier coupe en deux parties égales. Ainsi, généralement parlant, à chaque diamètre, il en répond nécessairement un autre tel que les cordes parallèles à chacun d’eux ont leurs milieux sur l’autre. À l’avenir nous appellerons diamètres conjugués les deux diamètres d’un semblable système. On voit donc que, non seulement les lignes du second ordre ont une infinité de systèmes de diamètres conjugués, mais qu’en outre tout diamètre d’une telle ligne en a nécessairement un qui lui est conjugué.

D’après ce qui précède, les équations de deux diamètres, conjugués ou non conjugués, peuvent être représentées ainsi qu’il suit :

(10)

Pour connaître le point où ils se coupent, il faudra combiner ces équations entre elles. Mais si, auparavant, on prend leur différence, puis la différence de leurs produits respectifs par et en divisant chaque fois par il viendra

(11)

Ainsi, dans la recherche de l’intersection des deux diamètres, on pourra remplacer le système des équations (10) par le système des équations (11) ; et puisque ces dernières sont indépendantes, de et il en faut conclure que tous les diamètres des lignes de second ordre se coupent en un même point. Il est de plus aisé de voir que ce point doit être leur milieu commun, puisqu’à chaque diamètre répond un conjugué qui doit le couper en son milieu. Le milieu commun de tous, les diamètres d’une ligne de second ordre est ce qu’on appelle le centre de cette courbe.

Nous remarquerons, avant d’aller plus, loin, que les équations (11) notant autre chose que ce que devient l’équation (6), lorsqu’on y fait successivement il en résulte que ces équations (11) sont respectivement celles des diamètres qui coupent en deux parties, égales les cordes, parallèles à l’axe des et les cordes parallèles à l’axe des c’est-à-dire, en d’autres, termes, que ces équations sont celles des conjugués des diamètres respectivement parallèles aux axes des et des

Si donc, les axes étaient parallèles à deux diamètres conjugués, les diamètres exprimés par les équations (11) devraient être respectivement parallèles aux axes des et des on devrait donc avoir, dans ces équations, et conséquemment dans l’équation (1), Ainsi, le parallélisme des axes des coordonnées avec deux diamètres conjugués jouit de la propriété de priver l’équation (1) du rectangle des coordonnées ; il est de plus aisé de voir que c’est là la seule circonstance où elle puisse en être privée.

Si le centre de la courbe se confondait avec l’origine, les équations (11) devraient appartenir à deux droites passant par cette origine : on devrait donc avoir à la fois Ainsi, la situation du centre à l’origine des coordonnées jouit de la propriété de priver l’équation (1) des premières puissances des deux variables, et il est de plus aisé de voir qu’elle en jouit exclusivement.

Si donc on prend pour axes des coordonnées deux diamètres conjugués quelconques, l’équation (1) prendra la forme très-simple.

(12)

sous laquelle la discussion en deviendra incomparablement plus facile.

Mais ceci suppose que les droites (11) concourent effectivement en un même point. En combinant leurs équations, on en tire

(13)

d’où l’on voit que, si l’on a la courbe n’a plus de centre, ou que du moins son centre étant infiniment éloigné des axes primitifs ne saurait plus être pris pour origine. Nous verrons bientôt, au surplus, que la courbe est susceptible d’être exprimée par une équation fort simple qui convient également au cas où elle a un centre et à celui où elle en est dépourvue.

Si l’on avait à la fois les trois relations

(14)

dont chacune est comportée par les deux autres, les deux équations (11) rentreraient l’une dans l’autre ; la courbe aurait donc une infinité de centres situés sur l’une ou l’autre de ces droites.

Soient les coordonnées de l’un quelconque des points de la courbe, en sorte qu’on ait

(15)

en désignant pour abréger par les coordonnées du centre, l’équation du diamètre passant par ce point sera

(16)

Si, par le même point, on mène une parallèle au conjugué de ce diamètre, son équation sera, en vertu de l’équation (6),

(17)

Mais, en vertu des équations (11), on a

en conséquence, l’équation (17) deviendra

ou, en développant et transposant,

ou enfin, en ajoutant l’équation de la relation (13) et réduisant,

ou encore

(18)

Cette droite ayant un point commun avec la courbe, et ne pouvant d’ailleurs en être une corde, puisqu’alors ce point en serait à la fois le milieu et l’extrémité ; il faut en conclure que c’est une tangente à cette courbe.

Si l’on suppose que la tangente est l’axe des et que le diamètre au conjugué duquel elle est parallèle est l’axe des  : auquel cas son point de contact avec la courbe sera l’origine ; leurs équations devront être respectivement on devra donc avoir, outre les conditions en sorte que l’équation (1) deviendra simplement

(19)

Telle est donc la forme que prend l’équation de la courbe, lorsqu’on prend pour axes un diamètre et la tangente à son extrémité, ce qui est toujours possible, toutes les fois que l’équation (1) n’est point absurde d’elle-même ; c’est-à-dire, toutes les fois qu’il y a au moins un système de coordonnées réelles, qui y satisfait. La discussion, très-facile, de l’équation (19) fera donc connaître toutes les courbes que peut exprimer l’équation (1).[3]

Les diamètres conjugués rectangulaires sont ce qu’on appelle les diamètres principaux de la courbe, et leurs extrémités en sont les sommets. Pour obtenir les directions de ces diamètres, il suffira de joindre à l’équation

(9)

l’équation suivante

(20)

qui exprime que les deux diamètres sont perpendiculaires l’un à l’autre[4]. La symétrie de ces équations prouve que et seront donnés par une même équation du second degré, et qu’ainsi il n’y a qu’un système unique de diamètres principaux.

Soient les coordonnées de l’un des sommets de la courbe, et sa distance au centre ou la longueur du demi-diamètre principal qui lui répond ; représentons toujours, pour abréger, par les coordonnées du centre, données par les formules (13), nous aurons, à la fois,

(21)
(22)

D’un autre côté l’élimination de entre les équations (9) et (20) donne

(23)

Enfin l’équation (1) peut facilement être mise sous cette forme

faisant donc

et remarquant qu’en vertu des équations (11) on a

elle deviendra simplement

(24)

Cela posé ; si, dans les équations (21) et (24), on introduit pour sa valeur donnée par l’équation (22) elles deviendront

(25)

équations entre lesquelles éliminant il viendra

éliminant enfin entre cette équation et l’équation (20) on aura d’abord

(26)

et ensuite

(27)

L’équation (26) donnera les longueurs des demi-diamètres principaux ; les formules (27) en détermineront la direction ; et ensuite l’une des équations (25), combinée avec l’équation (22), fera connaître les sommets.

Parvenus à l’équation (26), on pourra poursuivre la discussion, comme l’a fait M. Bérard à la page 106 du 3.me volume de ce recueil.

Dans le cas particulier où l’on aura la courbe, n’ayant point de centre, n’aura qu’un diamètre principal et conséquemment qu’un seul sommet que l’on pourra déterminer comme il suit. L’équation (16) du diamètre deviendra simplement

en exprimant donc que ce diamètre est perpendiculaire à la tangente à son extrémité, donnée par l’équation (18) il viendra

équation qui, combinée avec l’équation (15), ne donnera, en ayant égard à la relation qu’un seul système de valeurs de et lesquelles seront les coordonnées du sommet. Il est aisé de voir qu’alors tous les diamètres seront parallèles.

Lorsque, comme on le fait communément dans les traités élémentaires, on suppose les axes des coordonnées rectangulaires, les dernières recherches et les résultats qu’on en obtient se simplifient considérablement.

§. II.
Discussion des surfaces du second ordre.

Soit l’équation

(1)

exprimant une surface rapportée à deux axes quelconques, formant entre eux des angles Soient de plus

(2)

les équations d’une droite quelconque. En éliminant et entre elles et l’équation (1), il viendra

(3)

En raisonnant comme dans le §. précédent, on verra que le milieu de la corde interceptée par (1) sur (2) est donné par les équations (2), jointes à l’équation

(4)

Si donc on élimine et entre elles, l’équation résultante, en sera celle du lieu des milieux des cordes parallèles à (2). Cette équation est, toutes réductions faites,

(5)

équation d’un plan quels que soient et Ainsi, les surfaces comprises dans l’équation (1) jouissent toutes, sans exception, de cette propriété très-remarquable, que les milieux d’un système de cordes parallèles, quelle qu’en soit d’ailleurs la direction commune, sont tous situés dans un même plan que, pour cette raison, nous appellerons à l’avenir plan diamétral de la surface. Ainsi, non seulement ces surfaces ont une infinité de plans diamétraux, mais ces plans affectent en général, toutes sortes de directions ; en sorte qu’il n’est aucun point de l’espace par lequel on ne puisse en concevoir un.

Soient présentement trois droites quelconques

les équations des plans diamétraux qui couperont en deux parties égales les cordes parallèles à ces droites seront respectivement

(5)
(5′)
(5″)

Or, la droite (2) étant prise arbitrairement, ce qui fixe la situation du plan (5), on peut toujours assujettir les droites à être parallèlles à ce plan ; et, comme par ces conditions elles demeurent encore indéterminées, on peut en outre assujettir l’une d’elles à être parallèle au plan que détermine l’autre. En se rappelant donc la condition de parallélisme entre un plan et une droite dans l’espace, cela donnera les trois équations

(6)

puis donc que ces équations sont symétriques en et et et il en faut conclure qu’alors chacun des plans (5), (5′), (5″) coupera en deux parties égales les cordes parallèles à l’intersection des deux autres. Les trois plans d’un pareil système sont ce qu’on appelle des plans conjugués, et leurs intersections deux à deux, lesquelles ont évidemment leur milieu commun au point d’intersection des trois plans ; sont ce qu’on appelle des diamètres conjugués. Ainsi, non seulement les surfaces du second ordre ont une infinité de systèmes de diamètres conjugués, mais ces diamètres affectent en général toutes sortes de directions, en sorte qu’on peut toujours trouver un système de tels diamètres, et même une infinité, où l’un de ces diamètres passera par un point donné arbitrairement.

Que les plans diamétraux donnés par les équations (5), (5′), (5″) soient conjugués ou non conjugués, si l’on prend successivement la somme des produits de ces équations par et par en divisant, dans chaque cas, l’équation résultante par , il viendra

(7)

équations qui, ayant lieu en même temps que les équations (5), (5′), (5″), pourront conséquemment leur être substituées, dans la recherche du point d’intersection des trois plans qu’expriment celles-ci ; puis donc que les équations (7) sont indépendantes de il faut en conclure que les plans diamétraux des surfaces du second ordre se coupent tous au même point ; il est de plus facile de voir, par ce qui a été dit ci-dessus, que toutes les cordes qui passent par ce point doivent y avoir leur milieu, et en conséquence on l’appelle le centre de la surface.

Nous remarquerons, avant d’aller plus loin, que les équations (7) n’étant autre chose que ce que devient l’équation (5) lorsqu’on y fait successivement il s’ensuit que ces équations sont respectivement celles des plans diamétraux qui coupent en deux parties égales les cordes parallèles à l’axe des , les cordes parallèles à l’axe des et les cordes parallèles à l’axe des c’est-à-dire, en d’autres termes, que ces équations sont celles des plans conjugués aux diamètres respectivement parallèles aux trois axes.

Si donc les axes des coordonnées étaient parallèles à trois diamètres conjugués ou, ce qui revient au même, si les plans coordonnés étaient respectivement parallèles à trois plans diamétraux conjugués ; des trois équations (7) la première ne devrait renfermer que seulement, la seconde que et la troisième que on devrait donc avoir, dans ces équations, et conséquemment dans l’équation (1)

Ainsi, le parallélisme des axes des coordonnées avec trois diamètres conjugués jouit de la propriété de priver l’équation (1) des rectangles des coordonnées ; et il est de plus aisé de voir que c’est là la seule circonstance où elle puisse en être privée.

Si le centre de la surface se trouvait à l’origine, les équations (7) devraient être celles de trois plans passant par cette origine on devrait donc avoir, à la fois,

Ainsi, la situation du centre à l’origine des coordonnées jouit de la propriété de priver l’équation (1) des premières puissances des trois variables, et il est de plus aisé de voir qu’elle en jouit exclusivement.

Si donc on prend pour axes des coordonnées trois diamètres conjugués quelconques, l’équation (1) prendra la forme très simple

(8)

sous laquelle la discussion en deviendra incomparablement plus facile[5].

Mais tout ceci suppose que les équations (7) donnent pour des valeurs finies et déterminées ; en les résolvant par rapport à ces inconnues, on obtient

(9)

Or, si l’on a

la surface n’aura point de centre ; ou, pour mieux dire, son centre se trouvant à une distance infinie, ne pourra être pris pour origine. Si une seule des coordonnées du centre était indéterminée, chacune des équations (7) se trouverait comportée par les deux autres, et la surface aurait une infinité de centres, situés sur une droite donnée par le système de deux quelconques de ces équations. Si deux des coordonnées du centre se trouvaient indéterminées, la troisième le serait aussi, alors les trois équations (7) ne seraient point distinctes les unes des autres, et le plan exprimé par l’une quelconque d’entre elles deviendrait le lieu des centres. Au surplus. nous verrons bientôt que les surfaces du second ordre peuvent être exprimées par une équation simple qui convient également à celles qui ont un centre et à celles qui en sont dépourvues.

Soient les coordonnées de l’un quelconque des points de la surface courbe, en sorte qu’on ait

(10)

en désignant, pour abréger, par les coordonnées du centre, les équations du diamètre passant par ce point seront

(11)

l’équation du plan mené, par l’extrémité de ce diamètre, parallèlement au plan qui contient ses deux conjugués sera, en vertu de l’équation (5)

(12)

Mais, en vertu des équations (7), on a

en conséquence l’équation (12) deviendra

ou, en développant et transposant


ou enfin ; en ajoutant l’équation de relation (10) et réduisant

ou encore

(13)

Ce plan a un point commun avec la surface courbe : c’est celui dont les coordonnées sont  ; mais il ne saurait en avoir plusieurs ; car, si cela était, en menant par ce même point des parallèles aux deux conjugués du diamètre qui s’y termine, il y en aurait au moins une qui serait une corde de la surface, et qui, au lieu d’avoir son milieu sur le plan diamétral qui doit la couper en deux parties égales, y aurait au contraire son extrémité ; le plan (13) est donc un plan tangent à la surface courbe.

Si l’on suppose que le plan tangent est le plan même des et que le diamètre par l’extrémité duquel il passe est l’axe des auquel cas le point du contact sera l’origine des coordonnées ; à cause de l’équation (13) deviendra d’abord

et, comme alors elle devra se réduire simplement à on devra avoir

Si de plus les axes des et des sont respectivement parallèles à deux conjugués du diamètre qui se confond avec l’axe des ou, ce qui revient au même, si les plans des et des sont conjugués à celui auquel le plan des est parallèle, on devra avoir en outre ; comme ci-dessus,

l’équation (1) deviendra donc alors simplement

(14)

et pourra indistinctement exprimer toutes les surfaces du second ordre. Cette dernière équation a donc, dans le fond, autant de généralité que l’équation (1) ; du moins lorsque cette dernière n’est point généralement absurde ; c’est-à-dire, toutes les fois qu’il existe au moins un système de valeurs de qui y satisfait.[6]

Les diamètres conjugués rectangulaires d’une surface courbe sont ce qu’on appelle ses Diamètres principaux, et leurs extrémités en sont les sommets. Pour s’assurer de l’existence de tels diamètres, dans les surfaces du second ordre, et en fixer la direction, il faut joindre aux équations (6) les équations suivantes

(15)

qui expriment[7] que les diamètres conjugués sont, deux à deux, perpendiculaires l’un à l’autre.

Telles sont donc les équations qui, combinées avec les équations (6), feront connaître et et et et, comme ces trois couples de quantités y entrent symétriquement, on est en droit d’en conclure qu’elles doivent dépendre d’une même équation du troisième degré, et que conséquemment les surfaces du second ordre n’ont qu’un système unique de diamètres principaux ; c’est ce que le calcul va confirmer.

Si l’on prend successivement la différence des produits respectifs de la première et de la dernière des équations (6) par et et par et les équations résultantes pourront être écrites ainsi :

(16)
(17)

En opérant exactement de la même manière sur la première et sur la dernière des équations (15), les deux équations résultantes pourront être mises sous cette forme :

(18)
(19)

Or, en éliminant entre les équations (16) et (18), et entre les équations (17) et (19), disparaîtra de lui-même des équations résultantes, et elles seront

(20)

De ces deux équations on déduirait une équation finale en qui serait du troisième degré seulement, et dont par conséquent les racines seraient les valeurs de On aurait de plus une valeur de fonction de laquelle deviendrait et en y changeant en et mais il sera plus convenable d’opérer comme il suit.

Soient les coordonnées de l’un quelconque des sommets de la surface courbe, et sa distance au centre ou la longueur du demi-diamètre principal qui lui répond ; en continuant, pour abréger, de représenter par les coordonnées du centre, données par les formules (9), nous aurons, à la fois,

(21)
(22)

en outre l’équation (1) peut facilement être mise sous cette forme


posant, pour abréger,

et remarquant qu’en vertu des équations (7) les coefficiens des premières puissances de sont nuls, elle deviendra simplement

(23)

Cela posé, si, dans les équations (21) et (23), on introduit, pour et les valeurs données par les équations (22), elles deviendront

(24)

équations entre lesquelles éliminant , il viendra

(25)

éliminant enfin et entre cette équation et les équations (20) on aura d’abord


(26)

et ensuite

(27)

L’équation (26) donnera les longueurs des demi-diamètres principaux ; les formules (27) en détermineront la direction, et ensuite l’une des équations (24), combinée avec les équations (22), fera connaître les sommets.

Parvenus à l’équation (26), on pourra poursuivre la discussion, comme l’a fait M. Bérard, à la page 110 du troisième volume de ce recueil.

Dans le cas particulier où l’on aura

(28)

la surface, n’ayant point de centre, n’aura qu’un seul diamètre principal que l’on pourra déterminer comme il suit : les équations du diamètre deviendront alors

En exprimant donc que ce diamètre est perpendiculaire au plan tangent à son extrémité, donné par l’équation (13), on aura deux équations en qui, combinées avec l’équation (10), ne donneront, pour ces trois coordonnées, en ayant égard à la relation (28), qu’un seul système de valeurs lesquelles seront les coordonnées du sommet cherché. Il est aisé de voir qu’alors tous les diamètres seront parallèles.

Lorsque, comme on le fait ordinairement dans les traités élémentaires, on suppose les axes des coordonnées rectangulaires, les dernières recherches et les résultats qu’on en obtient se simplifient considérablement.

  1. Voyez la note de la page 294 du 4.me volume de ce recueil.
  2. Les commençans ont d’ordinaire quelque peine à bien comprendre comment ces sortes d’éliminations de constantes conduisent au but où l’on veut atteindre : et c’est qu’en effet la raison qu’on leur en donne communément est plus métaphysique que mathématique. Il me semble que la chose devient évidente, en raisonnant à peu près comme il suit :

    Soient

    les équations de deux courbes rapportées aux mêmes axes. Si, en les considérant comme les équations d’un même problème déterminé à deux inconnues, on en tire les valeurs de et ces valeurs, fonctions de seront les coordonnées de l’intersection des deux courbes.

    Si l’on fait varier la valeur de celle constante le point d’intersection des deux courbes variera aussi, et l’on pourra demander quelle est la courbe dont il ne sortira jamais, quelque valeur que l’on puisse donner à

    Pour résoudre cette question, on considérera qu’en supposant déterminée, le point d’intersection des deux courbes n’est pas seulement donné par les deux équations mais encore par tout système de deux équations que l’on voudra déduire de leur combinaison, ou encore par le système de l’une quelconque d’entre elles et d’une combinaison quelconque de l’une et de l’autre.

    Donc, en particulier, on pourra, dans la recherche du point dont il s’agit, remplacer l’équation par le résultat de l’élimination de entre elle et l’équation en sorte que, si ce résultat est

    le système des équations pourra, dans la recherche du point d’intersection des deux courbes, remplacer celui des équations

    Mais, lorsque la constante varie, la courbe (7) demeure constamment la même ; d’où il suit que cette courbe doit contenir tous les points d’intersection que l’on déduirait de la combinaison des équations en donnant successivement à la constante toutes les valeurs imaginables ; cette courbe est donc la courbe demandée.

    Rien ne serait plus facile que d’étendre ces considérations à la géométrie à trois dimensions.

  3. Sachant mener une tangente à la courbe par un de ses points, il ne sera pas difficile de lui mener une normale par le même point. De là on passera à la tangente et à la normale par un point extérieur. Nous nous bornons à indiquer ces divers objets, sur lesquels nous n’aurions rien de nouveau à dire. Mais nous ne devons pas négliger de remarquer que ce sera naturellement ici le lieu de faire mention des belles propriétés dont jouissent ce qu’on est convenu d’appeler les pôles de lignes du second ordre. On pourra consulter à ce sujet les pages 293 et 302 du troisième volume de ce recueil.
  4. Soient en effet deux droites passant par l’origine des coordonnées que nous supposons former entre elles un angle Pour exprimer que ces droites sont perpendiculaires l’une à l’autre, il est nécessaire et il suffit d’exprimer que deux points pris respectivement sur l’une et l’autre sont les extrémités de l’hypothénuse d’un triangle rectangle dont le sommet de l’angle droit est à l’origine. Cette condition donne

    ou en réduisant

    mais on a d’ailleurs

    ce qui donnera, en substituant et divisant par l’équation mentionnée dans le texte.

  5. On remarquera sans doute que la démonstration de la possibilité de ramener l’équation à cette forme, par un choix convenable des coordonnées, assez difficile à établir, dans les autres systèmes de discussion, même en supposant les coordonnées primitives rectangulaires, se présente, pour ainsi dire, d’elle-même celui-ci.
  6. Sachant ainsi mener un plan tangent à la surface, par un de ses points, il ne sera pas difficile de lui mener une normale par le même point. Il ne s’agira pour cela que de connaître les conditions de perpendiculaire entre un plan et une droite. Or, en supposant, pour plus de simplicité, que l’un et l’autre passent par l’origine, que la droite est et que le plan est il suffira d’exprimer que deux points pris arbitrairement sur l’une et l’autre sont les extrémités de l’hypothénuse d’un triangle rectangle dont le sommet de l’angle droit est à l’origine ; cette condition donne

    ou en réduisant

    mais, par la situation des deux points, on a

    substituant donc, il viendra, en divisant par ,

    et, comme doivent demeurer indéterminés et indépendans, les conditions cherchées seront

    De là on passera aux plans tangens et aux normales par des points extérieurs et, par suite, aux surfaces coniques circonscrites et à leurs lignes de contact. On sera conduit ainsi à exposer les propriétés des surfaces du second ordre, relativement à ce qu’on est convenu d’appeler leurs pôles. On pourra consulter à ce sujet, ce qui a été dit aux pages 293 et 302 du 3.me volume de ce recueil.

  7. Soient, en effet, deux droites que, pour plus de simplicité, nous supposons passer par l’origine ; nous exprimerons qu’elles sont perpendiculaires l’une à l’autre, en exprimant que deux points pris respectivement sur ces deux droites, sont les extrémités de l’hypothénuse d’un triangle rectangle dont le sommet de l’angle droit est à l’origine. Cette condition donnera, comme dans la note précédente ;

    mais on aura ici

    ce qui donnera, en substituant et divisant par la première des équations mentionnées dans le texte.