Le Coffret de santal (éd. 1879)/Berceuse

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Le Coffret de santalTresse (p. 158-160).


BERCEUSE



Au comte de Trévelec


Endormons-nous, petit chat noir.
Voici que j’ai mis l’éteignoir
               Sur la chandelle.
Tu vas penser à des oiseaux
Sous bois, à de félins museaux…
               Moi rêver d’Elle.

Nous n’avons pas pris de café,
Et, dans notre lit bien chauffé
              (Qui veille pleure.)

Nous dormirons, pattes dans bras.
Pendant que tu ronronneras,
            J’oublierai l’heure.

Sous tes yeux fins, appesantis,
Reluiront les oaristys
            De la gouttière.
Comme chaque nuit, je croirai
La voir, qui froide a déchiré
            Ma vie entière.

Et ton cauchemar sur les toits
Te dira l’horreur d’être trois
            Dans une idylle.
Je subirai les yeux railleurs
De son faux cousin, et ses pleurs
            De crocodile.

Si tu t’éveilles en sursaut
Griffé, mordu, tombant du haut
            Du toit, moi-même
Je mourrai sous le coup félon
D’une épée au bout du bras long
            Du fat qu’elle aime.


Puis, hors du lit, au matin gris,
Nous chercherons, toi, des souris
               Moi, des liquides
Qui nous fassent oublier tout,
Car, au fond, l’homme et le matou
               Sont bien stupides.