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Bible Sacy/Juges

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JUGES.
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APRÈS la mort de Josué, les enfants d’Israël consultèrent le Seigneur, et lui dirent : Qui marchera à notre tête pour combattre les Chananéens, et qui sera notre chef dans cette guerre ?

2 Le Seigneur répondit : Ce sera Juda qui marchera devant vous : je lui ai livré le pays.

3 Alors Juda dit à Siméon, son frère : Venez m’aider à me rendre maître de la part qui m’est échue au sort, et à combattre les Chananéens ; et ensuite j’irai vous aider à conquérir ce qui vous est échu. Siméon s’en alla donc avec Juda.

4 Et Juda ayant marché contre les ennemis, le Seigneur livra entre leurs mains les Chananéens et les Phérézéens, et ils taillèrent en pièces dix mille hommes à Bézec.

5 Ils trouvèrent à Bézec, Adonibézec : ils le combattirent, et défirent les Chananéens et les Phérézéens.

6 Adonibézec avant pris la fuite, ils le poursuivirent, le prirent et lui coupèrent les extrémités des mains et des pieds.

7 Alors Adonibézec dit : J’ai fait couper l’extrémité des mains et des pieds à soixante et dix rois qui mangeaient sous ma table les restes de ce qu’on me servait. Dieu m’a traité comme j’ai traite les autres. Ensuite ils l’amenèrent à Jérusalem, où il mourut.

8 Car les enfants de Juda ayant mis le siège devant Jérusalem, la prirent, taillèrent en pièces tout ce qu’ils y trouvèrent, et mirent le feu dans toute la ville.

9 Ils descendirent ensuite pour combattre les Chananéens dans le pays des montagnes, vers le midi et dans la plaine.

10 Et Juda ayant marché contre les Chananéens qui habitaient à Hébron, dont le nom était autrefois Cariath-Arbé, défit Sésaï, Ahiman et Tholmaï.

11 Étant parti de là, il marcha contre les habitants de Dabir, qui s’appelait autrefois Cariath-Sépher, c’est-à-dire, la ville des lettres.

12 Alors Caleb dit : Je donnerai ma fille Axa pour femme à celui qui prendra et ruinera Cariath-Sépher.

13 Et Othoniel, fils de Cénez et jeune frère de Caleb, l’ayant prise, il lui donna pour femme sa fille Axa.

14 Et lorsque Axa était en chemin, son mari l’avertit de demander un champ à son père. Axa donc étant montée sur un âne, commença à soupirer. Et Caleb lui dit : Qu’avez-vous ?

15 Elle lui répondit : Donnez-moi votre bénédiction, et m’accordez une grâce. Vous m’avez donné une terre sèche, donnez m’en une aussi où il y ait des eaux en abondance. Caleb donc lui donna une terre dont le haut et le bas étaient arrosés d’eau.

16 Or les enfants de Jéthro, Cinéen, allié de Moïse, montèrent de la ville des palmes avec les enfants de Juda, au désert qui était échu en partage à cette tribu, et qui est vers le midi d’Arad ; et ils habitèrent avec eux.

17 Juda s’en étant allé aussi avec son frère Siméon, ils défirent ensemble les Chananéens qui habitaient à Séphaath, et les passèrent au fil de l’épée. Et cette ville fut appelée Horma, c’est-à-dire, anathème.

18 Juda prit aussi Gaza avec ses confins, Ascalon et Accaron avec leurs confins.

19 Le Seigneur fut avec Juda, et il se rendit maître de toutes les côtes des montagnes ; mais il ne put défaire ceux qui habitaient dans la vallée, parce qu’ils avaient une grande quantité de chariots armés de faux.

20 Et ils donnèrent, selon que Moïse l’avait ordonné, Hébron à Caleb, qui en extermina les trois fils d’Enac.

21 Mais les enfants de Benjamin ne tuèrent point les Jébuséens qui demeuraient à Jérusalem : et les Jébuséens demeurèrent à Jérusalem avec les enfants de Benjamin, comme ils y sont encore aujourd’hui.

22 La maison de Joseph marcha aussi contre Béthel, et le Seigneur était avec eux.

23 Car lorsqu’ils assiégeaient la ville, qui s’appelait auparavant Luza,

24 ayant vu un homme qui en sortait, ils lui dirent : Montrez-nous par où l’on peut entrer dans la ville, et nous vous ferons miséricorde.

25 Cet homme le leur ayant montré, ils passèrent au fil de l’épée tout ce qui se trouva dans la ville, et conservèrent cet homme avec toute sa maison.

26 Cet homme étant libre, s’en alla au pays d’Hetthim, où il bâtit une ville qu’il appela Luza, qui est le nom qu’elle porte encore aujourd’hui.

27 Manassé aussi ne détruisit pas Bethsan et Thanac avec les villages qui en dépendent, ni les habitants de Dor, de Jéblaam et de Mageddo, avec les villages voisins ; et les Chananéens commencèrent à demeurer avec eux.

28 Lorsque Israël fut devenu plus fort, il les rendit tributaires ; mais il ne voulut point les exterminer.

29 Ephraïm ne tua point aussi les Chananéens qui habitaient à Gazer ; mais les Chananéens demeurèrent avec eux.

30 Zabulon n’extermina point les habitants de Cétron et de Naalol ; mais les Chananéens demeurèrent au milieu d’eux, et ils devinrent leurs tributaires.

31 Aser n’extermina point non plus les habitants d’Accho, de Sidon, d’Ahalab, d’Achazib, d’Helba, d’Aphec et de Rohob ;

32 et ils demeurèrent au milieu des Chananéens qui habitaient dans ce pays-là, et ils ne les tuèrent point.

33 Nephthali n’extermina point non plus les habitants de Beth-samès et de Beth-anath ; mais il demeura au milieu des Chananéens qui habitaient en ce pays-là ; et ceux de Beth-samès et de Beth-anath lui devinrent tributaires.

34 Les Amorrhéens tinrent les enfants de Dan fort resserrés dans la montagne, sans leur donner lieu de s’étendre en descendant dans la plaine :

35 et les Amorrhéens habitèrent sur la montagne d’Harès, c’est-à-dire, de l’argile, dans Aïalon et dans Salébim ; mais lamaisonde Joseph étant devenue plus puissante, elle se les rendit tributaires.

36 Et le pays des Amorrhéens eut pour limites la montée du Scorpion, Pétra, et les lieux plus élevés.



ALORS l’Ange du Seigneur vint de Galgala au lieu appelé le Lieu des pleurants, et il dit : Je vous ai tirés de l’Egypte, je vous ai fait entrer dans la terre que j’avais juré de donner à vos pères, et je vous ai promis de garder à jamais l’alliance que j’avais faite avec vous ;

2 mais à condition que vous ne feriez point d’alliance avec les habitants du pays de Chanaan, et que vous renverseriez leurs autels ; et cependant vous n’avez point voulu écouter ma voix. Pourquoi avez-vous agi de la sorte ?

3 C’est pour cette raison que je n’ai point aussi voulu exterminer ces peuples devant vous ; en sorte que vous les ayez pour ennemis, et que leurs dieux vous soient un sujet de ruine.

4 Lorsque l’Ange du Seigneur disait ces paroles à tous les enfants d’Israël, ils élevèrent leur voix, et se mirent à pleurer.

5 Et ce lieu fut appelé le Lieu des pleurants, ou le lieu des larmes : et ils immolèrent des hosties au Seigneur.

6 Josué renvoya donc le peuple ; et les enfants d’Israël s’en allèrent chacun dans le pays qui leur était échu en partage, pour s’en rendre maîtres :

7 et ils servirent le Seigneur tout le temps de la vie de Josué et des anciens qui vécurent longtemps après lui, et qui savaient toutes les œuvres merveilleuses que le Seigneur avaient faites en faveur d’Israël.

8 Cependant Josué, fils de Nun, serviteur du Seigneur, mourut âgé de cent dix ans,

9 et on l’ensevelit dans l’héritage qui lui était échu à Thamnath-saré, sur la montagne d’Ephraïm, vers le septentrion du mont Gaas.

10 Toute la race de ces premiers hommes ayant donc été réunie à leurs pères, il s’en éleva d’autres en leur place qui ne connaissaient point le Seigneur, ni les merveilles qu’il avait faites en faveur d’Israël.

11 Alors les enfants d’Israël firent le mal à la vue du Seigneur, et ils servirent Baal.

12 Ils abandonnèrent le Seigneur, le Dieu de leurs pères, qui les avait tirés du pays de l’Egypte ; et ils servirent des dieux’ étrangers, les dieux des peuples qui demeuraient autour d’eux. Ils les adorèrent, et ils irritèrent la colère, du Seigneur,

13 l’ayant quitté pour servir Baal et Astaroth.

14 Le Seigneur étant donc en colère contre Israël, les exposa en proie et les livra entre les mains de leurs ennemis, qui les ayant pris, les vendirent aux nations ennemies qui demeuraient autour d’eux, et ils ne purent résister à ceux qui les attaquaient.

15 Mais de quelque côté qu’ils allassent, la main du Seigneur était sur eux, comme le Seigneur le leur avait dit, même avec serment ; et ils tombèrent dans des misères extrêmes.

16 Dieu leur suscita ensuite des juges, pour les délivrer des mains de ceux qui les opprimaient ; mais ils ne voulurent pas seulement les écouter.

17 Ils se prostituèrent aux dieux étrangers en les adorant. Ils abandonnèrent bientôt la voie par laquelle leurs pères avaient marche ; et ayant entendu les ordonnances du Seigneur, ils tirent tout le contraire.

18 Lorsque Dieu leur avait suscité des juges, il se laissait fléchir à sa miséricorde pendant que ces juges vivaient : il écoutait les soupirs des affligés, et les délivrait de ceux qui les avaient pillés et qui en avaient fait un grand carnage.

19 Mais après que le juge était mort, ils retombaient aussitôt dans leurs péchés, et faisaient des actions encore plus criminelles que leurs pères, en suivant des dieux étrangers, en les servant et les adorant. Ils ne quittaient point leurs malheureuses habitudes, ni la voie très-dure par laquelle ils avaient accoutumé de marcher.

20 La fureur du Seigneur s’alluma donc contre Israël, et il dit : Puisque ce peuple a violé l’alliance que j’avais faite avec ses pères, et qu’il a néglige d’entendre ma voix,

21 je n’exterminerai point aussi les nations que Josué a laissées lorsqu’il est mort :

22 afin que j’éprouve par là si les enfants d’Israël gardent ou ne gardent pas la voie du Seigneur, et s’ils y marchent comme leurs pères y ont marché.

23 C’est pour cette raison que le Seigneur laissa subsister toutes ces nations, qu’il ne voulut point les détruire en peu de temps, et qu’il ne les livra point entre les mains de Josué.



VOICI les peuples que le Seigneur laissa vivre, pour servir d’exercice et d’instruction aux Israélites, et à tous ceux qui ne connaissaient point les guerres des Chananéens :

2 afin que leurs enfants apprissent après eux à combattre contre leurs ennemis, et qu’ils s’accoutumassent à ces sortes de combats.

3 Ces peuples furent les cinq princes des Philistins, tous les Chananéens, les Sidoniens et les Hévéens qui habitaient sur le mont Liban, depuis la montagne de Baal-Hermon jusqu’à l’entrée d’Emath.

4 Le Seigneur laissa ces peuples pour éprouver ainsi Israël, et pour voir s’il obéirait ou s’il n’obéirait pas aux commandements du Seigneur qu’il avait donnés à leurs pères par Moïse.

5 Les enfants d’Israël habitèrent donc au milieu des Chananéens, des Héthéens, des Amorrhéens, des Phérézéens, des Hévéens et des Jébuséens.

6 Ils épousèrent leurs filles, et donnèrent leurs filles en mariage à leurs fils, et ils adorèrent leurs dieux.

7 Ils firent le mal aux yeux du Seigneur, et ils oublièrent leur Dieu, adorant Baalim et Astaroth.

8 Le Seigneur donc étant en colère contre Israël, les livra entre les mains de Chusan-Rasathaïm, roi de Mésopotamie, auquel ils furent assujettis pendant huit ans.

9 Et ayant crié au Seigneur, il leur suscita un sauveur qui les délivra : savoir, Othoniel, fils de Cénez, frère puîné de Caleb.

10 L’Esprit du Seigneur fut en lui, et il jugea Israël. Et s’étant mis en campagne pour combattre Chusan-Rasathaïm, roi de Syrie, le Seigneur le livra entre les mains d’Othoniel qui le défit.

11 Le pays demeura en paix durant quarante ans, et Othoniel, fils de Cénez, mourut ensuite.

12 Alors les enfants d’Israël commencèrent encore à faire le mal aux yeux du Seigneur, qui fortifia contre eux Eglon, roi de Moab, parce qu’ils avaient péché devant lui.

13 Il joignit les enfants d’Ammon et d’Amalec à Eglon, qui s’étant avancé avec eux, défit Israël, et se rendit maître de la ville des palmes.

14 Les enfants d’Israël furent assujettis à Eglon, roi de Moab, pendant dix-huit ans.

15 Après cela ils crièrent au Seigneur, et il leur suscita un sauveur nommé Aod, fils de Géra, fils de Jémini, qui se servait de la main gauche comme de la droite. Les enfants d’Israël envoyèrent par lui des présents à Eglon, roi de Moab.

16 Aod se fit faire une dague à deux tranchants, qui avait une garde de la longueur de la paume de la main, et il la mit sous sa casaque à son côté droit.

17 Et il offrit ses présents à Eglon, roi de Moab. Or Eglon était extrêmement gros.

18 Et Aod lui ayant offert ses présents, s’en retourna avec ses compagnons qui étaient venus avec lui.

19 Puis étant retourne de Galgala, où étaient les idoles, il dit au roi : J’ai un mot à vous dire en secret, ô prince. Le roi ayant fait signe qu’on se tût, et tous ceux qui étaient auprès de sa personne étant sortis,

20 Aod s’approcha du roi qui était seul assis dans sa chambre d’été, et il lui dit : J’ai à vous dire une parole de la part de Dieu. Aussitôt le roi se leva de son trône.

21 Et Aod ayant porté la main gauche à la dague qu’il avait à son côté droit, la tira et la lui enfonça si avant dans le ventre,

22 que la poignée y entra tout entière avec le fer, et se trouva serrée par la grande quantité de graisse qui se rejoignit par-dessus. Aod ne retira donc point sa dague : mais après avoir donné le coup, il la laissa dans le corps ; et aussitôt les excréments qui étaient dans le ventre s’écoulèrent par les conduits naturels.

23 Mais Aod ayant fermé à clef avec grand soin les portes de la chambre,

24 sortit par la porte de derrière. Cependant les serviteurs du roi étant venus, trouvèrent la porte fermée, et ils dirent : C’est peut-être qu’il a quelque besoin dans sa chambre d’été.

25 Et après avoir longtemps attendu jusqu’à en devenir tout honteux, voyant que personne n’ouvrait, ils prirent la clef, ouvrirent la chambre, et trouvèrent leur seigneur étendu mort sur la place.

26 Pendant ce grand trouble où ils étaient, Aod trouva le moyen de se sauver ; et ayant passé le lieu des idoles, d’où il était revenu, il vint à Séirath.

27 Aussitôt il sonna de la trompette sur la montagne d’Ephraïm, et les enfants d’Israël descendirent avec Aod qui marchait à leur tête,

28 et qui leur dit : Suivez-moi : car le Seigneur nous a livré entre les mains les Moabites, nos ennemis. Les Israélites suivirent Aod, se saisirent des gués du Jourdain par où l’on passe au pays de Moab, et ne laissèrent passer aucun des Moabites.

29 Ils en tuèrent environ dix mille, qui étaient tous hommes forts et vaillants. Et nul d’entre eux ne put échapper.

30 Moab fut humilié en ce jour-là sous la main d’Israël, et le pays demeura en paix pendant quatre-vingts ans.

31 Après Aod, Samgar, fils d’Anath, fut en sa place. Ce fut lui qui tua six cents Philistins avec un soc de charrue : et il fut aussi le défenseur et le libérateur d’Israël.



LES enfants d’Israël recommencèrent encore à faire le mal aux yeux du seigneur après la mort d’Aod.

2 Et le Seigneur les livra entre les mains de Jabin, roi des Chananéens, qui régna dans Asor. Il avait pour général de son armée un nommé Sisara, et il demeurait à Haroseth, ville des nations.

3 Les enfants d’Israël crièrent donc au Seigneur. Car Jabin ayant neuf cents chariots armés de faux, les avait étrangement opprimés pendant vingt ans.

4 Il y avait en ce temps-là une prophétesse nommée Débora, femme de Lapidoth, laquelle jugeait le peuple.

5 Elle s’asseyait sous un palmier qu’on avait appelé de son nom, entre Kama et Béthel, sur la montagne d’Ephraïm ; et les enfants d’Israël venaient à elle, pour faire juger tous leurs différends.

6 Elle envoya donc vers Barac, fils d’Abinoëm, de Cédés de Nephthali ; et l’ayant fait venir, elle lui dit : Le Seigneur, le Dieu d’Israël, vous donne cet ordre : Allez, et menez l’armée sur la montagne de Thabor. Prenez avec vous dix mille combattants des enfants de Nephthali et des enfants de Zabulon.

7 Quand vous serez au torrent de Cison, je vous amènerai Sisara, général de l’armée de Jabin, avec ses chariots et toutes ses troupes, et je vous les livrerai entre les mains.

8 Barac lui répondit : Si vous venez avec moi, j’irai ; si vous ne voulez point venir avec moi, je n’irai point.

9 Débora lui dit : Je veux bien aller avec vous ; mais la victoire pour cette fois ne vous sera point attribuée, parce que Sisara sera livré entre les mains d’une femme. Débora partit donc aussitôt, et s’en alla à Cédés avec Barac ;

10 lequel ayant fait venir ceux de Zabulon et de Nephthali, marcha avec dix mille combattants, étant accompagné de Débora.

11 Or Haber, Cinéen, s’était retiré il y avait longtemps de ses autres frères Cinéens, fils d’Hobab, allié de Moïse, et il avait dressé ses tentes jusqu’à la vallée appelée Sennim, et il était près de Cèdes.

12 En même temps Sisara fut averti que Balac, fils d’Abinoëm, s’était avancé sur la montagne de Thabor.

13 Et il fit assembler ses neuf cents chariots armés de faux, et fit marcher toute son armée de Haroseth, pays des gentils, au torrent de Cison.

14 Alors Débora dit à Barac : Courage : car voici le jour où le Seigneur a livré Sisara entre vos mains ; voilà le Seigneur lui-même qui vous conduit. Barac descendit donc de la montagne de Thabor, et dix mille combattants avec lui.

15 En même temps le Seigneur frappa de terreur Sisara, tous ses chariots et toutes ses troupes, et les fit passer au fil de l’épée aux yeux de Barac ; de sorte que Sisara sautant de son chariot en bas, s’enfuit à pied.

16 Barac poursuivit les chariots qui s’enfuyaient et toutes les troupes jusqu’à Haroseth, pays des gentils ; et toute cette multitude si nombreuse d’ennemis fut taillée en pièces, sans qu’il en restât un seul.

17 Sisara fuyant ainsi, vint à la tente de Jahel, femme d’Haber, Cinéen. Car il y avait paix alors entre Jabin, roi d’Asor, et la maison d’Haber, Cinéen.

18 Jahel étant donc sortie au-devant de Sisara, lui dit : Entrez chez moi, mon seigneur ; entrez, ne craignez point. Il entra donc dans sa tente, et elle le couvrit d’un manteau.

19 Sisara lui dit : Donnez-moi, je vous prie, un peu d’eau, parce que j’ai une extrême soif. Elle lui apporta un vase plein de lait, et l’ayant découvert, elle lui en donna à boire, et remit le manteau sur lui.

20 Alors Sisara lui dit : Tenez-vous à l’entrée de votre tente, et si quelqu’un vous interroge, et vient vous dire : N’y a-t-il personne ici ? vous lui répondrez : Il n’y a personne.

21 Jahel, femme d’Haber, ayant donc pris un des grands clous de sa tente, avec un marteau, entra tout doucement sans faire aucun bruit ; et ayant mis le clou sur la tempe de Sisara, elle le frappa avec son marteau, et lui en transperça le cerveau, l’enfonçant jusque dans la terre : et Sisara ayant été tué de cette sorte, passa du sommeil naturel à celui de la mort.

22 En même temps Barac arriva poursuivant Sisara ; et Jahel étant sortie au-devant de lui, lui dit : Venez, je vous montrerai l’homme que vous cherchez. Il entra chez elle, et il vit Sisara étendu mort, ayant la tempe percée de ce clou.

23 Dieu confondit donc en ce jour-là Jabin, roi de Chanaan, devant les enfants d’Israël,

24 qui croissant tous les jours en vigueur, se fortifièrent de plus en plus contre Jabin, roi de Chanaan, et l’accablèrent jusqu’à ce qu’il fût ruiné entièrement.



EN ce jour-là Débora et Barac, file d’Abinoëm, chantèrent ce cantique :

2 Vous qui vous êtes signalés parmi les enfants d’Israël, en exposant volontairement votre vie au péril, bénissez le Seigneur.

3 Ecoutez, rois ; princes, prêtez l’oreille. C’est moi, c’est moi qui chanterai un cantique au Seigneur, qui consacrerai des hymnes au Seigneur qui est le Dieu d’Israël.

4 Seigneur ! lorsque vous êtes sorti de Séïr, et que vous passiez par le pays d’Edom, la terre a tremblé, les cieux et les nuées se sont fondues en eaux.

5 Les montagnes se sont écoulées comme l’eau, devant la face du Seigneur ; aussi bien que Sinaï, en la présence du Seigneur qui est le Dieu d’Israël.

6 Au temps de Samgar, fils d’Anath, au temps de Jahel, les sentiers n’étaient plus battus de personne ; et ceux qui devaient y aller ont marché par des routes détournées.

7 On a cessé de voir de vaillants hommes dans Israël. Il ne s’en trouvait plus, jusqu’à ce que Débora se soit élevée, jusqu’à ce qu’il se soit élevé une mère dans Israël.

8 Le Seigneur a choisi de nouveaux combats, et il a renversé lui-même les portes des ennemis ; au lieu qu’auparavant on ne voyait ni bouclier ni lance parmi quarante mille soldats d’Israël.

9 Mon cœur aime les princes d’Israël. Vous qui vous êtes exposés volontairement au péril, bénissez le Seigneur.

10 Parlez, vous autres, vous qui montez sur des ânes d’une force et d’une beauté singulière ; vous qui remplissez les sièges de la justice, vous qui êtes sur les chemins.

11 Que dans le lieu où les chariots ont été brisés, et l’armée des ennemis taillée en pièces, l’on publie la justice du Seigneur, et sa clémence envers les braves d’Israël : alors le peuple du Seigneur a paru aux portes des villes, et s’est acquis la principauté.

12 Courage, courage, Débora ; excitezvous, animez-vous, et chantez un cantique au Seigneur. Excitez-vous, ô Barac, saisissez-vous des captifs que vous avez faits, fils d’Abinoëm.

13 Les restes du peuple de Dieu ont été sauvés : c’est le Seigneur qui a combattu dans les vaillants hommes.

14 Il s’est servi d’Ephraïm pour exterminer les Chananéens en la personne des Amalécites ; et il s’est servi encore depuis de Benjamin contre tes peuples, ô Amalec. Les princes sont descendus de Machir, et il en est venu de Zabulon pour mener l’armée au combat.

15 Les chefs d’Issachar ont été avec Débora, et ont suivi les traces de Barac, qui s’est jeté dans le péril comme s’il se fût précipité dans un abîme. Ruben alors était divisé contre lui-même, et les plus vaillants de cette tribu n’ont fait autre chose que disputer.

16 Pourquoi donc demeurez-vous entre deux limites pour entendre les cris des troupeaux ? Car Ruben étant divisé contre lui-même, les plus vaillants de cette tribu ne se sont occupés qu’à contester.

17 Mais pendant que Galaad était en repos au delà du Jourdain, et que Dan s’occupait à ses vaisseaux, qu’Aser demeurait sur le rivage de la mer, et se tenait dans ses ports,

18 Zabulon et Nephthali se sont exposés à la mort au pays de Méromé.

19 Les rois sont venus, et ont combattu ; les rois de Chanaan ont combattu à Thanach, près les eaux de Mageddo, et ils n’ont pu remporter aucun butin.

20 On a combattu contre eux du haut du ciel : les étoiles demeurant dans leur rang et dans leur cours ordinaire, ont combattu contre Sisara.

21 Le torrent de Cison a entraîné leurs corps morts, le torrent de Cadumim, le torrent de Cison ; ô mon âme, foule aux pieds les corps de ces braves.

22 Leurs chevaux se sont rompu la corne du pied dans l’impétuosité de leur course ; les plus vaillants des ennemis fuyant à toute bride, et se renversant les uns sur les autres.

23 Malheur à la terre de Méroz ! dit l’Ange du Seigneur : malheur à ceux qui l’habitent, parce qu’ils ne sont point venus au secours du Seigneur, au secours des plus vaillants d’entre ses guerriers !

24 Bénie soit entre les femmes Jahel, femme d’Haber, Cinéen, et qu’elle soit bénie dans sa tente !

25 Lorsque Sisara lui demanda de l’eau, elle lui donna du lait ; elle lui présenta de la crème dans un vase digne d’un prince.

26 Elle prit le clou de la main gauche, et de la droite le marteau des ouvriers ; et choisissant l’endroit de la tête de Sisara où elle donnerait son coup, elle lui enfonça son clou dans la tempe.

27 Il tomba à ses pieds, et perdit toute sa force : il rendit l’esprit, après s’être roulé et agité devant elle ; et il demeura étendu mort sur la terre, dans un état misérable.

28 Cependant sa mère regardait par la fenêtre ; et parlant de sa chambre, elle criait : Pourquoi son char ne revient-il pas encore ? pourquoi ses chevaux tardent-ils tant ?

29 Et la plus sage d’entre les femmes de Sisara répondit ainsi à sa belle-mère :

30 Peut-être que maintenant on partage le butin, et qu’on choisit pour Sisara la plus belle d’entre les captives ; on choisit d’entre toutes les dépouilles des vêtements de diverses couleurs pour les donner à Sisara, et on lui destine quelque écharpe précieuse brodée à l’aiguille, qu’il puisse porter sur lui comme un ornement.

31 Qu’ainsi périssent, Seigneur ! tous vos ennemis : mais que ceux qui vous aiment, brillent comme le soleil, lorsque ses rayons éclatent au matin.

32 Tout le pays ensuite demeura en paix pendant quarante ans.



LES enfants d’Israël firent encore le mal aux yeux du Seigneur, et il les livra pendant sept ans entre les mains des Madianites.

2 Ces peuples les tinrent dans une si grande oppression, qu’ils furent obligés de se retirer dans les antres et dans les cavernes des montagnes, et dans les lieux les plus forts, pour pouvoir résister aux Madianites.

3 Après que les Israélites avaient semé, les Madianites, les Amalécites et les autres peuples de l’Orient venaient sur leurs terres,

4 y dressaient leurs tentes, ruinaient tous les grains en herbe jusqu’à l’entrée de Gaza, et ne laissaient aux Israélites rien de tout ce qui était nécessaire à la vie, ni brebis, ni bœufs, ni ânes.

5 Car ils venaient avec tous leurs troupeaux et avec leurs tentes ; et comme ils étaient une multitude innombrable d’hommes et de chameaux, semblable à un nuage de sauterelles, ils remplissaient tout, et gâtaient tout par où ils passaient.

6 Israël fut donc extrêmement humilié sous Madian.

7 Et ils crièrent au Seigneur, lui demandant secours contre les Madianites.

8 Alors le Seigneur leur envoya un prophète qui leur dit : Voici ce que dit le Seigneur, le Dieu d’Israël : Je vous ai fait sortir d’Egypte, et je vous ai tirés d’un séjour de servitude :

9 je vous ai délivrés de la main des Egyptiens, et de tous les ennemis qui vous affligeaient : j’ai chassé les Amorrhéens de cette terre à votre entrée, je vous ai donné le pays qui était à eux.

10 Et je vous ai dit : Je suis le Seigneur, votre Dieu ; ne craignez point les dieux des Amorrhéens dans le pays desquels vous habitez : cependant vous n’avez point voulu écouter ma voix.

11 Or l’Ange du Seigneur vint s’asseoir sous un chêne qui était à Ephra, et qui appartenait à Joas, père de la famille d’Ezri, ou d’Abiézer. Et Gédéon, son fils, était occupé alors à battre le blé dans le pressoir, et à le vanner, pour se sauver ensuite avec son blé des incursions des Madianites.

12 L’Ange du Seigneur apparut donc à Gédéon, et lui dit : Le Seigneur est avec vous, ô le plus fort d’entre les hommes !

13 Gédéon lui répondit : D’où vient donc, mon Seigneur, je vous prie, que tous ces maux sont tombés sur nous, si le Seigneur est avec nous ? Où sont ces merveilles qu’il a faites, et que nos pères nous ont rapportées en nous disant : Le Seigneur nous a tirés de l’Egypte ? Et maintenant le Seigneur nous a abandonnés, et nous a livrés entre les mains des Madianites.

14 Alors le Seigneur le regardant, lui dit : Allez dans cette force dont vous êtes rempli, et vous délivrerez Israël de la puissance des Madianites. Sachez que c’est moi qui vous ai envoyé.

15 Gédéon lui répondit : Hélas ! mon Seigneur, comment, je vous prie, délivrerai-je Israël ? Vous savez que ma famille est la dernière de Manassé, et que je suis le dernier dans la maison de mon père.

16 Le Seigneur lui dit : Je serai avec vous, et vous battrez les Madianites, comme s’ils n’étaient qu’un seul homme.

17 Sur quoi Gédéon repartit : Si j’ai trouvé grâce devant vous, faites-moi connaître par un signe que c’est vous qui me parlez.

18 Et ne vous retirez point d’ici, jusqu’à ce que je retourne vers vous, et que j’apporte un sacrifice pour vous l’offrir. L’Ange lui répondit : J’attendrai votre retour.

19 Gédéon étant donc entré chez lui, fit cuire un chevreau, et fit d’une mesure de farine des pains sans levain ; et ayant mis la chair dans une corbeille, et le jus de la chair dans un pot, il apporta tout sous le chêne, et le lui offrit.

20 L’Ange du Seigneur lui dit : Prenez la chair et les pains sans levain, mettez-les sur cette pierre, et versez dessus le jus de la chair. Ce que Gédéon ayant fait,

21 l’Ange du Seigneur étendit le bout du bâton qu’il tenait en sa main, et en toucha la chair et les pains sans levain : et aussitôt il sortit un feu de la pierre qui consuma la chair et les pains sans levain ; et en même temps l’Ange du Seigneur disparut de devant ses yeux.

22 Gédéon voyant que c’était l’Ange du Seigneur, dit : Hélas ! Seigneur, mon Dieu ! car j’ai vu l’Ange du Seigneur face à face.

23 Le Seigneur lui dit : La paix soit avec vous ! Ne craignez point : vous ne mourrez pas.

24 Gédéon éleva donc en ce même lieu un autel au Seigneur, et l’appela, la Paix du Seigneur, nom qu’il garde encore aujourd’hui. Et lorsqu’il était encore à Ephra, qui appartient à la famille d’Ezri,

25 le Seigneur lui dit la nuit suivante : Prenez un taureau de votre père, et un autre taureau de sept ans, et renversez l’autel de Baal qui est à votre père, et coupez par le pied le bois qui est autour de l’autel.

26 Dressez aussi un autel au Seigneur, votre Dieu, sur le haut de cette pierre, sur laquelle vous avez offert votre sacrifice, et prenez le second taureau que vous offrirez en holocauste sur un bûcher fait des branches d’arbres que vous aurez coupées de ce bois.

27 Gédéon ayant donc pris dix de ses serviteurs, fit ce que le Seigneur lui avait commandé. Il ne voulut pas néanmoins le faire le jour, parce qu’il craignait ceux de la maison de son père, et les hommes de cette ville-là ; mais il fit tout pendant la nuit.

28 Les habitants de cette ville étant donc venus au matin, virent l’autel de Baal détruit, le bois coupé, et le second taureau mis sur l’autel qui venait d’être élevé.

29 Alors ils se dirent les uns aux autres : Qui est-ce qui a fait cela ? Et cherchant partout qui était l’auteur de cette action, on leur dit : C’est Gédéon, fils de Joas, qui a fait toutes ces choses.

30 Ils dirent donc à Joas : Faites venir ici votre fils, afin qu’il meure ; parce qu’il a détruit l’autel de Baal, et qu’il en a coupé le bois.

31 Joas leur répondit : Est-ce à vous à prendre la vengeance de Baal et à combattre pour lui ? Que celui qui est son ennemi, meure avant que le jour de demain soit venu. Si Baal est dieu, qu’il se venge de celui qui a détruit son autel.

32 Depuis ce jour Gédéon fut appelé Jérobaal, à cause de cette parole que Joas avait dite : Que Baal se venge de celui qui a renversé son autel.

33 Cependant tous les Madianites, les Amalécites et les peuples d’Orient se joignirent ensemble, et ayant passé le Jourdain, ils vinrent se camper dans la vallée de Jezraël.

34 En même temps l’Esprit du Seigneur remplit Gédéon, qui sonnant de la trompette assembla toute la maison d’Abiézer, afin qu’elle le suivît.

35 Il envoya aussi des gens dans toute la tribu de Manassé, qui le suivit aussi ; et il en envoya d’autres dans la tribu d’Aser, de Zabulon et de Nephthali : et ceux de ces tribus vinrent au-devant de lui.

36 Alors Gédéon dit à Dieu : Si vous voulez vous servir de ma main pour sauver Israël, comme vous l’avez dit,

37 je mettrai dans l’aire cette toison ; et si toute la terre demeurant sèche, la rosée ne tombe que sur la toison, je reconnaîtrai par là que vous vous servirez de ma main, selon que vous l’avez promis, pour délivrer Israël.

38 Ce que Gédéon avait proposé, arriva. Car s’étant levé de grand matin,il pressa la toison, et remplit une tasse de la rosée qui en sortit.

39 Gédéon dit encore à Dieu : Que votre colère ne s’allume pas contre moi, si je fais encore une fois une épreuve, en demandant un second signe dans la toison. Je vous prie, Seigneur ! que toute la terre soit trempée de la rosée, et que la toison seule demeure sèche.

40 Le Seigneur fit cette nuit-là même ce que Gédéon avait demandé. La rosée tomba sur toute la terre, et la toison seule demeura sèche.



JÉROBAAL, qui s’appelle aussi Gédéon, se leva donc avant le jour, et vint, accompagné de tout le peuple, à la fontaine nommée Harad. Quant aux Madianites, ils étaient campés dans la vallée, vers le côté septentrional d’une colline fort élevée.

2 Alors le Seigneur dit à Gédéon : Vous avez avec vous un grand peuple. Madian ne sera point livré entre les mains de tant de gens, de peur qu’Israël ne se glorifie contre moi, et ne dise : C’est par mes propres forces que j’ai été délivré.

3 Parlez au peuple, et faites publier ceci devant tous : Que celui qui est timide, et qui manque de cœur, s’en retourne. Et vingt-deux mille hommes du peuple se retirèrent de la montagne de Galaad, et s’en retournèrent ; et il n’en demeura que dix mille.

4 Alors le Seigneur dit à Gédéon : Le peuple est encore en trop grand nombre. Menez-les près de l’eau, et je les éprouverai là. Je vous marquerai celui que je veux qui aille avec vous ; et celui que j’en empêcherai, s’en retournera.

5 Le peuple étant venu en un lieu où il y avait des eaux, le Seigneur dit encore à Gédéon : Mettez d’un côté ceux qui auront pris de l’eau avec la langue, comme les chiens ont accoutumé de faire ; et mettez de l’autre ceux qui auront mis les genoux en terre pour boire.

6 Il s’en trouva donc trois cents qui prenant l’eau avec la main, la portèrent a leur bouche ; mais tout le reste du peuple avait mis les genoux en terre pour boire.

7 Après quoi le Seigneur dit à Gédéon : C’est par ces trois cents hommes qui ont pris l’eau avec la langue, sans mettre les genoux en terre, que je vous délivrerai, et que je ferai tomber Madian entre vos mains : faites donc retirer le reste du peuple.

8 Gédéon leur ayant commandé à tous de se retirer dans leurs tentes, prit des vivres avec des trompettes pour le nombre de gens qu’il avait, et marcha avec ses trois cents hommes pour combattre les ennemis. Or le camp de Madian était en bas dans la vallée.

9 La nuit suivante le Seigneur dit à Gédéon : Levez-vous, et descendez dans le camp, parce que j’ai livré les Madianites entre vos mains.

10 Si vous craignez d’y aller seul, que Phara, votre serviteur, y aille avec vous.

11 Et lorsque vous aurez entendu ce que les Madianites diront, vous en deviendrez plus fort, et vous descendrez ensuite avec plus d’assurance pour attaquer le camp des ennemis. Gedéon prenant donc avec lui son serviteur Phara, s’en alla à l’endroit du camp où étaient les sentinelles de l’armée.

12 Or les Madianites, les Amalécites, et tous les peuples de l’Orient étaient étendus dans la vallée comme une multitude de sauterelles, avec des chameaux sans nombre, comme le sable qui est sur le rivage de la mer.

13 Et lorsque Gédéon se fut approché, il entendit un soldat qui contait son songe à un autre, et qui lui rapportait ainsi ce qu’il avait vu : J’ai eu un songe, disait-il, et il me semblait que je voyais comme un pain d’orge cuit sous la cendre, qui roulait en bas et descendait dans le camp des Madianites ; et y ayant rencontré une tente, il l’a ébranlée, renversée, et jetée tout à fait par terre.

14 Celui à qui il parlait lui répondit : Tout cela n’est autre chose que l’épée de Gédéon, fils de Joas, Israélite ; parce que le Seigneur lui a livré entre les mains les Madianites avec toute leur armée.

15 Gédéon ayant entendu ce songe et l’interprétation qui en avait été donnée, adora Dieu. Et étant retourné au camp d’Israël, il dit aux siens : Allons promptement : car le Seigneur a livré entre nos mains le camp de Madian.

16 Et ayant divisé ses trois cents hommes en trois bandes, il leur donna des trompettes à la main et des pots de terre vides avec des lampes au milieu des pots ;

17 et il leur dit : Faites ce que vous me verrez faire. J’entrerai par un endroit du camp : faites tout ce que je ferai.

18 Quand vous me verrez sonner de la trompette que j’ai à la main, sonnez de même de la trompette tout autour du camp ; et criez tous ensemble : L’épée du Seigneur et de Gédéon.

19 Gédéon suivi de ses trois cents hommes, entra donc par un endroit du camp au commencement de la veille du milieu de la nuit. Et les gardes s’étant réveillés, Gédéon et ses gens commencèrent à sonner de la trompette, et à heurter leurs pots de terre l’un contre l’autre.

20 Faisant donc autour du camp en trois endroits différents un fort grand bruit, et ayant rompu leurs pots de terre, ils tinrent leurs lampes de la main gauche, et de la droite les trompettes dont ils sonnaient, et crièrent tous ensemble : L’épée du Seigneur et de Gédéon.

21 Chacun demeura en son poste autour du camp des ennemis. Aussitôt le camp des Madianites se trouva tout en désordre : ils jetèrent de grands cris, et ils s’enfuirent tous.

22 Les trois cents hommes continuèrent à sonner toujours de la trompette, et le Seigneur tourna les épées de tous ceux du camp les unes contre les autres, et ils se tuaient mutuellement.

23 Et ceux qui échappèrent de ce carnage, s’enfuirent jusqu’à Beth-setta et jusqu’au bord d’Abel-méhula en Tebbath. Mais les enfants d’Israël des tribus de Nephthali et d’Aser, et tous ceux de la tribu de Manassé criant tous ensemble, poursuivirent les Madianites.

24 Et Gédéon envoya des gens sur toute la montagne d’Ephraïm, pour dire au peuple : Marchez au-devant des Madianites, et saisissez-vous des eaux jusqu’à Beth-béra, et de tous les passages du Jourdain. Tous ceux d’Ephraïm criant donc aux armes, se saisirent des bords de l’eau, et de tous les passages du Jourdain jusqu’à Beth-béra.

25 Et ayant pris deux chefs des Madianites, Oreb et Zeb, ils tuèrent Oreb au rocher d’Oreb, et Zeb au pressoir de Zeb : et ils poursuivirent les Madianites, ayant à la main les têtes d’Oreb et de Zeb, qu’ils portèrent à Gédéon au delà du Jourdain.



ALORS les enfants d’Ephraïm lui dirent : Pourquoi nous avez-vous traités de cette sorte, de ne nous avoir pas fait avertir, lorsque vous alliez combattre les Madianites ? Et ils le querellèrent fort aigrement, jusqu’à en venir presque à la violence.

2 Gédéon leur répondit : Que pouvais-je faire qui égalât ce que vous avez fait ? N’est-il pas vrai qu’une grappe de raisin d’Ephraïm vaut mieux que toutes les vendanges d’Abiézer ?

3 Le Seigneur a livré entre vos mains les princes de Madian, Oreb et Zeb. Qu’ai-je pu faire qui approchât de ce que vous avez fait ? Leur ayant parlé de cette sorte, il apaisa leur colère, lorsqu’elle était près d’éclater contre lui.

4 Gédéon étant venu ensuite sur le bord du Jourdain, le passa avec les trois cents hommes qui le suivaient, qui étaient si las qu’ils ne pouvaient plus poursuivre les Madianites qui fuyaient.

5 Il dit donc à ceux de Soccoth : Donnez, je vous prie, du pain à ceux qui sont avec moi, parce qu’ils n’en peuvent plus : afin que nous puissions poursuivre les rois des Madianites, Zébée et Salmana.

6 Mais les principaux de Soccoth lui répondirent : C’est peut-être que vous avez déjà Zébée et Salmana en votre pouvoir ; et c’est ce qui vous fait demander ainsi que nous donnions du pain à vos gens.

7 Gédéon leur répondit : Lors donc que le Seigneur aura livré entre mes mains Zébée et Salmana, je vous ferai briser le corps avec les épines et les ronces du désert.

8 Ayant passé au delà, il vint à Phanuel ; et il fit la même demande aux habitants du pays, qui lui firent la même réponse que ceux de Soccoth.

9 Gédéon leur répliqua donc de même : Lorsque je serai revenu en paix et victorieux , j’abattrai cette tour-là.

10 Or Zébée et Salmana reprenaient haleine-avec le reste de leur armée : car il n’était resté à ce peuple d’Orient que quinze mille hommes de toutes leurs troupes, ayant perdu en cette défaite cent vingt mille hommes, tous gens de guerre et portant les armes.

11 Gédéon tirant donc vers ceux qui habitaient dans les tentes du côté oriental de Nobé et de Jegbaa, défit l’armée des ennemis, qui se croyaient en assurance, s’imaginant qu’ils n’avaient plus rien à craindre.

12 Zébée et Salmana s’enfuirent aussitôt, toutes leurs troupes étant en désordre : mais Gédéon les poursuivit, et les prit tous deux.

13 Il retourna du combat avant le lever du soleil ;

14 et ayant pris un jeune homme de ceux de Soccoth, il demanda les noms des principaux et des sénateurs de Soccoth : cet homme lui en marqua soixante et dix-sept.

15 Gédéon étant venu ensuite à Soccoth, dit aux premiers de la ville : Voici Zébée et Salmana sur le sujet desquels vous m’avez insulté, en me disant : C’est peut-être que vous avez déjà Zébée et Salmana en votre pouvoir ; et c’est ce qui vous fait demander ainsi que nous donnions du pain à vos gens qui sont si las qu’ils n’en peuvent plus.

16 Ayant donc pris les anciens de la ville die Soccoth, il leur brisa le corps avec les épines et les ronces du désert.

17 Il abattit aussi la tour de Phanuel, après avoir tué les habitants de la ville.

18 Il dit ensuite à Zébée et à Salmana : Comment étaient faits ceux que vous avez tués au mont Thabor ? Ils lui répondirent : Ils étaient comme vous, et l’un d’eux paraissait un fils de roi.

19 Gédéon ajouta : C’étaient mes frères et les enfants de ma mère. Vive le Seigneur ! si vous leur aviez sauvé la vie, je ne vous tuerais pas maintenant.

20 Il dit ensuite à Jéther, son fils aîné : Allez, tuez-les. Mais Jéther ne tira point son épée, parce qu’il craignait, n’étant encore qu’un enfant.

21 Zébée et Salmana dirent donc à Gédéon : Venez vous-même, et tuez-nous : car c’est l’âge qui rend l’homme fort. Gédéon s’étant avancé, tua Zébée et Salmana. Il prit ensuite tous les ornements et les bossettes qu’on met d’ordinaire au cou des chameaux des rois.

22 Alors tous les enfants d’Israël dirent à Gédéon : Soyez notre prince, et commandez-nous, vous, votre fils et le fils de votre fils, parce que vous nous avez délivrés de la main des Madianites.

23 Gédéon leur répondit : Je ne serai point votre prince, et je ne vous commanderai point, ni moi, ni mon fils ; mais ce sera le Seigneur qui sera votre prince, et qui vous commandera.

24 Et il ajouta : Je ne vous demande qu’une chose : Donnez-moi les pendants d’oreilles que vous avez eus de votre butin. Car les Ismaélites qu’ils venaient de défaire, avaient accoutumé de porter des pendants d’oreilles d’or.

25 Ils lui répondirent : Nous vous les donnerons de tout notre cœur. Et étendant un manteau sur la terre, ils jetèrent dessus les pendants d’oreilles qu’ils avaient eus de leur butin.

26 Ces pendants d’oreilles que Gédéon avait demandés, se trouvèrent peser mille sept cents sicles d’or, sans les ornements, les colliers précieux, et les vêtements d’écarlate dont les rois de Madian avaient accoutumé d’user, et sans les carcans d’or des chameaux.

27 Gédéon fit de toutes ces choses précieuses un éphod qu’il mit dans sa ville d’Ephra. Et cet éphod devint aux Israélites un sujet de tomber dans la prostitution de l’idolâtrie, et causa la ruine de Gédéon et de toute sa maison.

28 Les Madianites furent donc humiliés devant les enfants d’Israël, et ils ne purent plus lever la tête : mais tout le pays demeura en paix pendant les quarante années du gouvernement de Gédéon.

29 Après cela Jérobaal, fils de Joas, étant revenu, demeura dans sa maison :

30 et il eut soixante et dix fils qui étaient sortis de lui, parce qu’il avait plusieurs femmes ;

31 et sa concubine qu’il avait à Sichem, eut de lui un fils nommé Abimélech.

32 Gédéon, fils de Joas, mourut enfin dans une heureuse vieillesse, et il fut enseveli dans le sépulcre de Joas, son père. à Ephra, qui appartenait à la famille d’Ezri.

33 Après la mort de Gédéon, les enfants d’Israël se détournèrent du culte de Dieu, et se prostituèrent à l’idolâtrie de Baal. Ils firent alliance avec Baal, afin qu’il fût leur dieu :

34 et ils oublièrent le Seigneur, leur Dieu, qui les avait délivrés des mains de tous leurs ennemis, dont ils étaient environnés.

35 Ils n’usèrent point de miséricorde envers la maison de Gédéon, appelé aussi Jérobaal, pour reconnaître tout le bien qu’il avait fait à Israël.



ALORS Abimélech, fils de Jérobaal, s’en alla à Sichem trouver les frères de sa mère, et tous ceux de la famille du père de sa mère, et il leur parla à tous en ces termes :

2 Représentez ceci, leur dit-il, à tous les habitants de Sichem : Lequel est le meilleur pour vous, ou d’être dominés par soixante et dix hommes, tous enfants de Jérobaal, ou de n’avoir qu’un seul homme qui vous commande ? Et de plus considérez que je suis votre chair et votre sang.

3 Tous les parents de sa mère ayant donc parlé de lui en cette manière à tous les habitants, ils gagnèrent leur cœur et leur affection pour Abimélech, en leur disant : C’est notre frère.

4 Et ils lui donnèrent soixante et dix sicles d’argent, qu’ils prirent du temple de Baal-bérith. Abimélech avec cet argent leva une troupe de gens misérables et vagabonds qui le suivirent :

5 et étant venu en la maison de son père à Ephra, il tua sur une même pierre les soixante et dix fils de Jérobaal, ses frères ; et de tous les enfants de Jérobaal il ne resta que Joatham, le plus jeune de tous, que l’on cacha.

6 Alors tous les habitants de Sichem s’ctant assemblés avec toutes les familles de la ville de Mello, allèrent établir roi Abimélech près du chêne qui est à Sichem.

7 Joatham en ayant reçu la nouvelle, s’en alla au haut de la montagne de Garizim, où se tenant debout il cria à haute voix, et parla de cette sorte : Écoutez-moi, habitants de Sichem, comme vous voulez que Dieu vous écoute.

8 Les arbres s’assemblèrent un jour pour s’élire un roi, et ils dirent à l’olivier : Soyez notre roi.

9 L’olivier leur répondit : Puis-je abandonner mon suc et mon huile dont les dieux et les hommes se servent, pour venir m’établir au-dessus des arbres ?

10 Les arbres dirent ensuite au figuier : Venez régner sur nous.

11 Le figuier leur répondit : Puis-je abandonner la douceur de mon suc et l’excellence de mes fruits, pour venir m’établir au-dessus des arbres ?

12 Les arbres s’adressèrent encore à la vigne, et lui dirent : Venez prendre le commandement sur nous.

13 La vigne leur répondit : Puis-je abandonner mon vin qui est la joie de Dieu et des hommes, pour venir m’établir au-dessus des arbres ?

14 Enfin tous les arbres dirent au buisson : Venez, vous serez notre roi.

15 Le buisson leur répondit : Si vous m’établissez véritablement pour votre roi, venez vous reposer sous mon ombre : si vous ne le voulez pas, que le feu sorte du buisson, et qu’il dévore les cèdres du Liban.

16 Considérez donc maintenant si ç’a été pour vous une action juste et innocente d’établir ainsi Abimélech pour votre prince ; si vous avez bien traité Jérobaal et sa maison ; si vous avez reconnu, comme vous deviez, les grands services de celui qui a combattu pour vous,

17 et qui a exposé sa vie à tant de périls pour vous délivrer des mains des Madianites ;

18 et si vous avez dû vous élever, comme vous avez fait, contre la maison de mon père, en tuant sur une même pierre ses soixante et dix fils, et en établissant Abimélech, fils de sa servante, pour prince sur les habitants de Sichem, parce qu’il est votre frère.

19 Si donc vous avez traité comme vous deviez Jérobaal et sa maison, et que vous ne lui ayez point fait d’injustice, qu’Abimélech soit votre bonheur, et puissiez-vous être aussi le bonheur d’Abimélech.

20 Mais si vous avez agi contre toute justice, que le feu sorte d’Abimélech, qu’il consume les habitants de Sichem, et la ville de Mello ; et que le feu sorte des habitants de Sichem et de la ville de Mello, et qu’il dévore Abimélech.

21 Ayant dit ces paroles, il s’enfuit, et s’en alla à Béra, où il demeura, parce qu’il craignait Abimélech, son frère.

22 Abimélech fut donc prince d’Israël pendant trois ans.

23 Mais le Seigneur envoya un esprit de haine et d’aversion entre Abimélech et les habitants de Sichem, qui commencèrent à le détester,

24 et à faire retomber sur Abimélech, leur frère, et sur les principaux des Sichimites qui l’avaient soutenu, le crime du meurtre des soixante et dix fils de Jérobaal, et de la cruelle effusion de leur sang.

25 Ils lui dressèrent donc des embûches au haut des montagnes, et en attendant qu’il vînt, ils s’exerçaient à des brigandages, et volaient les passants ; mais Abimélech en fut averti.

26 Cependant Gaal, fils d’Obed, vint avec ses frères, et passa à Sichem ; et les Sichimites à son arrivée ayant pris une nouvelle confiance,

27 sortirent en campagne, ravagèrent les vignes, foulèrent aux pieds les raisins, et dansant et chantant, ils entrèrent dans le temple de leur dieu, où parmi les festins et les pots ils faisaient des imprécations contre Abimélech ;

28 et Gaal, fils d’Obed, criait à haute voix : Qui est Abimélech ? et quelle est la ville de Sichem pour être assujettie à Abimélech ? N’est-il pas fils de Jérobaal ? et cependant il a établi un Zébul, son serviteur, pour gouverner sous lui ceux de la maison d’Hémor, père de Sichem. Pourquoi donc serons-nous assujettis à Abimélech ?

29 Plût à Dieu que quelqu’un me donnât l’autorité sur ce peuple pour exterminer Abimélech ! Cependant on vint dire à Abimélech : Assemblez une grande armée, et venez.

30 Zébul, gouverneur de la ville, ayant entendu ces discours de Gaal, fils d’Obed, entra dans une grande colère,

31 et envoya en secret des courriers à Abimélech, pour lui dire : Gaal, fils d’Obed, est venu à Sichem avec ses frères, et il presse la ville de se déclarer contre vous.

32 Venez donc de nuit avec les troupes qui sont avec vous ; tenez-vous caché dans les champs ;

33 et au point du jour, lorsque le soleil se lèvera, venez fondre sur la ville. Gaal sortira contre vous avec ses gens, et alors usez de vos forces contre lui.

34 Abimélech ayant donc marché de nuit avec toute son armée, dressa des embuscades en quatre endroits près de Sichem.

35 Gaal, fils d’Obed, étant sorti de la ville, se tint à l’entrée de la porte, et Abimélech sortit de l’embuscade avec toute son armée.

36 Gaal ayant aperçu les gens d’Abimélech, dit a Zébul : Voilà bien du monde qui descend des montagnes. Zébul lui répondit : Ce sont les ombres des montagnes, qui vous paraissent des têtes d’hommes, et c’est là ce qui vous trompe.

37 Gaal lui dit encore : Voilà un grand peuple qui sort du milieu de la terre, et j’en vois venir une grande troupe par le chemin qui regarde le chêne.

38 Zébul lui répondit : Où est maintenant cette audace avec laquelle vous disiez : Qui est Abimélech, pour nous tenir assujettis à lui ? Ne sont-ce pas là les gens que vous méprisiez ? Sortez donc, et combattez contre eux.

39 Gaal sortit ensuite à la vue de tout le peuple de Sichem, et combattit contre Abimélech.

40 Mais Abimélech le contraignit de fuir, le poursuivit et le chassa jusqu’à la ville ; et plusieurs de ses gens furent tués jusqu’a la porte de Sichem.

41 Abimélech s’arrêta ensuite à Ruma ; et Zébul chassa de la ville Gaal avec ses gens, et ne souffrit plus qu’il y demeurât.

42 Le lendemain le peuple de Sichem se mit en campagne, et Abimélech en ayant eu nouvelle,

43 mena son armée contre les Sichimites, la divisa en trois bandes, et leur dressa des embuscades dans les champs. Lorsqu’il vit que les habitants sortaient de la ville, il se leva de l’embuscade,

44 il les chargea vivement avec ses troupes, et il vint assiéger la ville. Cependant les deux autres corps de son armée poursuivaient les ennemis qui fuyaient çà et là dans la campagne.

45 Abimélech attaqua la ville pendant tout ce jour ; et l’ayant prise il en tua tous les habitants, et la détruisit d’une telle sorte qu’il sema du sel au lieu où elle avait été.

46 Ceux qui habitaient dans la tour de Sichem ayant appris ceci, entrèrent dans le temple de leur dieu Bérith, où ils avaient fait alliance avec lui : ce qui avait fait donner à ce lieu le nom de Bérith ; et ce lieu était extrêmement fort.

47 Abimélech ayant appris de son côté, que tous ceux de cette tour s’étaient réfugiés et renfermés tous ensemble en un seul lieu,

48 il monta sur la montagne de Selmon avec tous ses gens, coupa une branche d’arbre avec une hache, la mit sur son épaule, et dit à ses compagnons : Faites promptement ce que vous m’avez vu faire.

49 Ils coupèrent donc tous à l’envi des branches d’arbres, et suivirent leur chef ; et environnant cette forteresse, ils y mirent le feu, qui y prit d’une telle force, que mille personnes, tant hommes que femmes, qui demeuraient dans cette tour de Sichem, y furent tous étouffés par le feu ou par la fumée.

50 Abimélech marcha de là vers la ville de Thèbes, qu’il investit et assiégea avec son armée, et la prit.

51 Il y avait au milieu de la ville une haute tour, où tous les principaux de la ville, hommes et femmes, s’étaient réfugiés : ils avaient bien fermé et barricadé la porte, et étaient montés sur le haut de la tour pour se défendre par les créneaux.

52 Abimélech était au pied de la tour combattant vaillamment ; et s’approchant de la porte, il tâchait d’y mettre le feu.

53 En même temps une femme jetant d’en haut un morceau d’une meule de moulin, cassa la tête à Abimélech, et lui en fit sortir la cervelle.

54 Aussitôt il appela son écuyer, et lui dit : Tirez votre épée, et tuez-moi, de peur qu’on ne dise que j’ai été tué par une femme. L’écuyer faisant ce qu’il lui avait commandé, le tua.

55 Abimélech étant mort, tous ceux d’Israël qui étaient avec lui retournèrent chacun en sa maison.

56 Et Dieu rendit à Abimélech le mal qu’il avait commis contre son père, en tuant ses soixante et dix frères.

57 Les Sichimites aussi reçurent la punition de ce qu’ils avaient fait ; et la malédiction que Joatham, fils de Jérobaal, avait prononcée, tomba sur eux.



APRÈS Abimélech, Thola, fils de Phua, oncle paternel d’Abimélech, qui était de la tribu d’Issachar et qui demeurait à Samir en la montagne d’Ephraïm, fut établi chef d’Israël.

2 Et après avoir jugé Israël pendant vingt-trois ans, il mourut, et fut enseveli dans Samir.

3 Jaïr de Galaad lui succéda, et il fut juge dans Israël pendant vingt-deux ans.

4 Il avait trente fils qui montaient sur trente poulains d’ânesses, et qui étaient princes de trente villes au pays de Galaad, qui jusqu’aujourd’hui sont nommées de son nom, Havoth-Jaïr, c’est-à-dire, les villes de Jaïr.

5 Jaïr mourut depuis, et fut enseveli au lieu appelé Camon.

6 Mais les enfants d’Israël joignant de nouveaux crimes aux anciens, firent le mal aux yeux du Seigneur, et adorèrent les idoles de Baal et d’Astaroth, et les dieux de Syrie et de Sidon, de Moab, des enfants d’Ammon, et des Philistins : ils abandonnèrent le Seigneur et cessèrent de l’adorer.

7 Le Seigneur étant en colère contre eux, les livra entre les mains des Philistins et des enfants d’Ammon.

8 Et tous ceux qui habitaient au delà du Jourdain, au pays des Amorrhéens qui est en Galaad, furent affligés et opprimés cruellement pendant dix-huit ans :

9 de sorte que les enfants d’Ammon ayant passé le Jourdain, ravagèrent les tribus de Juda, de Benjamin et d’Ephraïm ; et Israël se trouva dans une extrême affliction.

10 Les Israélites crièrent donc au Seigneur, et lui dirent : Nous avons péché contre vous, parce que nous avons abandonné le Seigneur, notre Dieu, et que nous avons servi Baal.

11 Et le Seigneur leur dit : Les Egyptiens, les Amorrhéens, les enfants d’Ammon, les Philistins,

12 les Sidoniens, les Amalécites et les Chananéens, ne vous ont-ils pas autrefois opprimés ? et quand vous avez crié vers moi, ne vous ai-je pas délivrés d’entre leurs mains ?

13 Après cela néanmoins vous m’avez abandonné, et vous avez adoré les dieux étrangers. C’est pourquoi je ne penserai plus désormais à vous délivrer.

14 Allez, et invoquez les dieux que vous vous êtes choisis, et qu’ils vous délivrent eux-mêmes de l’affliction qui vous accable !

15 Les enfants d’Israël répondirent au Seigneur : Nous avons pêché ; faites-nous vous-même tout le mal qu’il vous plaira ; mais au moins pour cette heure délivrez-nous de nos maux.

16 Après avoir prié de la sorte, ils jetèrent hors de leurs terres toutes les idoles des dieux étrangers, et ils adorèrent le Seigneur Dieu, qui se laissa toucher de leur misère.

17 Cependant les enfants d’Ammon s’étant assemblés avec de grands cris, se campèrent dans le pays de Galaad ; et les enfants d’Israël s’étant assembles de leur côté pour les combattre, se campèrent à Maspha.

18 Alors les princes de Galaad se dirent les uns aux autres : Le premier d’entre nous qui commencera à combattre contre les enfants d’Ammon, sera le chef du peuple de Galaad.



EN ce temps-là il y avait un homme de Galaad, nommé Jephté, homme de guerre et fort vaillant, qui fut fils d’une courtisane, et qui eut pour père Galaad.

2 Galaad, son père, avait sa femme dont il eut des enfants, qui étant devenus grands chassèrent Jephté de la maison, en lui disant : Vous ne pouvez pas être héritier en la maison de notre père, parce que vous êtes né d’une autre mère.

3 Jephté les fuyant donc et évitant de les rencontrer, demeura au pays de Tob : et des gens qui n’avaient rien et qui vivaient de brigandages, s’assemblèrent près de lui, et le suivaient comme leur chef.

4 En ce même temps les enfants d’Ammon combattaient contre Israël.

5 Et comme ils le pressaient vivement, les anciens de Galaad allèrent trouver Jephté au pays de Tob, pour le faire venir à leur secours.

6 Ils lui dirent donc : Venez, et soyez notre prince pour combattre contre les enfants d’Ammon.

7 Jephté leur répondit : N’est-ce pas vous qui me haïssiez, et qui m’avez chassé de la maison de mon père ? et maintenant vous venez à moi, parce que la nécessité vous y contraint.

8 Les principaux de Galaad lui dirent : C’est pour cela même que nous venons vous trouver ; afin que vous marchiez avec nous, que vous combattiez contre les enfants d’Ammon, et que vous soyez le chef de tous ceux qui habitent dans le pays de Galaad.

9 Jephté leur répondit : Si c’est avec un désir sincère que vous venez m’engager à combattre pour vous contre les enfants d’Ammon, en cas que le Seigneur me les livre entre les mains, serai-je votre prince ?

10 Ils lui répondirent : Que le Seigneur qui nous entend, soit entre vous et nous, et soit témoin que nous voulons accomplir ce que nous vous promettons !

11 Jephté s’en alla donc avec les principaux de Galaad, et tout le peuple l’élut pour son prince. Jephté ayant fait d’abord devant le Seigneur toutes ses protestations à Maspha,

12 il envoya ensuite des ambassadeurs au roi des enfants d’Ammon, pour lui dire de sa part : Qu’y a-t-il de commun entre vous et moi ? Pourquoi êtes-vous venu m’attaquer et ravager mon pays ?

13 Le roi des Ammonites leur répondit : C’est parce qu’Israël venant d’Egypte m’a pris mon pays depuis les confins de l’Arnon jusqu’au Jaboc et jusqu’au Jourdain. Rendez-le-moi donc maintenant de vous-même, et demeurons en paix.

14 Jephté donna de nouveau ses ordres aux ambassadeurs, et leur commanda de dire au roi des Ammonites :

15 Voici ce que dit Jephté : Les Israélites n’ont pris ni le pays de Moab, ni le pays des enfants d’Ammon :

16 mais lorsqu’ils sortirent d’Egypte, ils marchèrent par le désert jusqu’à la mer Rouge, et étant venus à Cadès,

17 ils envoyèrent des ambassadeurs au roi d’Edom, et lui firent dire : Laissez-nous passer par votre pays. Et le roi d’Edom ne voulut point leur accorder ce qu’ils demandaient. Ils envoyèrent aussi des ambassadeurs au roi de Moab, qui les méprisa, et ne voulut point leur donner passage. Ils demeurèrent donc à Cadès ;

18 et ayant côtoyé le pays d’Edom et le pays de Moab, ils vinrent par le côté oriental du pays de Moab se camper au deçà de l’Arnon, sans vouloir entrer dans le pays de Moab : car l’Arnon est la frontière de la terre de Moab.

19 Les Israélites envoyèrent ensuite des ambassadeurs vers Séhon, roi des Amorrhéens, qui habitait dans Hésébon, pour lui dire : Laissez-nous passer par vos terres jusqu’au Jourdain.

20 Séhon méprisant comme les autres la demande des Israélites, leur refusa le passage par ses terres ; et ayant assemblé une armée d’une multitude innombrable, il marcha contre les Israélites à Jasa, et s’opposa à leur passage de toutes ses forces.

21 Mais le Seigneur le livra entre les mains d’Israël avec toute son armée, et Israël le défit et se rendit maître de toutes les terres des Amorrhéens qui habitaient en ce pays-là,

22 et de tout ce qui était renfermé dans leurs limites depuis l’Arnon jusqu’au Jaboc, et depuis le désert jusqu’au Jourdain.

23 Ainsi le Seigneur, le Dieu d’Israël, a ruiné les Amorrhéens, lorsque les Israélites, qui étaient son peuple, combattaient contre eux ; et vous prétendez maintenant que les terres que possède le peuple de Dieu vous appartiennent !

24 Ne croyez-vous pas avoir droit de posséder ce qui appartient à Chamos, votre dieu ? Il est de même bien juste que nous possédions ce que le Seigneur, notre Dieu, s’est acquis par ses victoires.

25 Est-ce que vous êtes plus considérable que Halac, fils de Séphor, roi de Moab ? Ou pouvez-vous faire voir qu’il ait formé contre les Israélites les plaintes que vous formez présentement, ou qu’il leur ait pour cela déclaré la guerre,

26 tant qu’Israël a habité dans Hésébon et dans ses villages, dans Aroër et dans les villages qui en dépendent, ou dans toutes les villes qui sont le long du Jourdain, pendant trois cents ans ? D’où vient que pendant tout ce temps-là vous n’avez fait aucune démarche pour rentrer dans ces droits prétendus ?

27 Ce n’est donc point moi qui vous fais injure ; mais c’est vous qui me la faites, en me déclarant une guerre injuste. Que le Seigneur soit notre arbitre, et qu’il décide aujourd’hui ce différend entre Israël et les enfants d’Ammon.

28 Mais le roi des enfants d’Ammon ne voulut point se rendre à ce que Jephté lui avait fait dire par ses ambassadeurs.

29 Après cela donc l’Esprit du Seigneur se saisit de Jephté ; de sorte qu’allant par tout le pays de Galaad et de Manassé, il passa de Maspha de Galaad jusqu’aux enfants d’Ammon,

30 et fit ce voeu au Seigneur : Seigneur ! si vous livrez entre mes mains les enfants d’Ammon,

31 je vous offrirai en holocauste le premier qui sortira de la porte de ma maison, et qui viendra au-devant de moi, lorsque je retournerai victorieux du pays des enfants d’Ammon.

32 Jephté passa ensuite dans les terres des enfants d’Ammon pour les combattre ; et le Seigneur les livra entre ses mains.

33 Il prit et ravagea vingt villes depuis Aroër jusqu’à Mennith, et jusqu’à Abel, qui est planté de vignes. Les enfants d’Ammon perdirent dans cette défaite un grand nombre d’hommes, et ils furent désolés par les enfants d’Israël.

34 Mais lorsque Jephté revenait de Maspha dans sa maison, sa fille qui était unique, parce qu’il n’avait point eu d’autres enfants qu’elle, vint au-devant de lui en dansant au son des tambours.

35 Jephté l’ayant vue, déchira ses vêtements, et dit : Ah ! malheureux que je suis ! ma fille, vous m’avez trompé, et vous vous êtes trompée vous-même : car j’ai fait un vœu au Seigneur de lui offrir ce qui se présenterait à moi, et je ne puis faire autre chose que ce que j’ai promis.

36 Sa fille lui répondit : Mon père, si vous avez fait vœu au Seigneur, faites de moi tout ce que vous avez promis, après la grâce que vous avez reçue de prendre vengeance de vos ennemis, et d’en remporter une si grande victoire.

37 Accordez-moi seulement, ajouta-t-elle, la prière que je vous fais : Laissez-moi aller sur les montagnes pendant deux mois, afin que je pleure ma virginité avec mes compagnes.

38 Jephté lui répondit : Allez. Et il la laissa libre pendant ces deux mois. Elle allait donc avec ses compagnes et ses amies, et elle pleurait sa virginité sur les montagnes.

39 Après les deux mois elle revint trouver son père, et il accomplit ce qu’il avait voué à l’égard de sa fille, qui en effet ne connut point d’homme. De là vint la coutume qui s’est toujours depuis observée en Israël,

40 que toutes les filles d’Israël s’assemblent une fois l’année, pour pleurer la fille de Jephté de Galaad pendant quatre jours.



CEPENDANT il s’excita une sédition dans la tribu d’Ephraïm : car ceux de cette tribu passant vers le septentrion, dirent à Jephté : Pourquoi n’avez-vous point voulu nous appeler lorsque vous alliez combattre les enfants d’Ammon, afin que nous y allassions avec vous ? Nous allons donc mettre le feu à votre maison.

2 Jephté leur répondit : Nous avions une grande guerre, mon peuple et moi, contre les enfants d’Ammon ; je vous ai priés de nous donner secours, et vous ne l’avez point voulu faire.

3 Ce qu’ayant vu, j’ai exposé ma vie ; j’ai marché contre les enfants d’Ammon, et le Seigneur me les a livrés entre les mains. Qu’ai-je fait en tout cela qui mérite que vous veniez me faire la guerre ?

4 Jephté ayant donc fait assembler tous ceux de Galaad, combattit contre Ephraïm ; et ceux de Galaad défirent ceux d’Ephraïm, qui disaient par mépris : Galaad est un fugitif d’Ephraïm, qui demeure au milieu d’Ephraïm et de Manassé.

5 Mais ceux de Galaad se saisirent des gués du Jourdain, par où ceux d’Ephraïm devaient repasser à leur pays : et lorsque quelqu’un d’Ephraïm fuyant de la bataille, venait sur le bord de l’eau, et disait à ceux de Galaad : Je vous prie de me laisser passer ; ils lui disaient : N’êtes-vous pas Ephratéen ? et lui répondant que non,

6 ils lui répliquaient : Dites donc Schibboleth (qui signifie un épi). Mais comme il prononçait Sibboleth, parce qu’il ne pouvait pas bien exprimer la première lettre de ce nom, ils le prenaient aussitôt, et le tuaient au passage du Jourdain : de sorte qu’il y eut quarante-deux mille hommes de la tribu d’Ephraïm qui furent tués en ce jour-là.

7 Jephté de Galaad jugea donc le peuple d’Israël pendant six ans ; et il mourut ensuite, et fut enseveli dans sa ville de Galaad.

8 Abesan de Bethléhem fut après lui juge d’Israël.

9 Il avait trente fils et autant de filles. Il fit sortir celles-ci de sa maison en les mariant, et il y fit venir autant de filles qu’il donna pour femmes à ses fils ; et après avoir jugé Israël pendant sept ans,

10 il mourut, et fut enseveli dans Bethléhem.

11 Ahialon de Zabulon lui succéda, et il jugea Israël pendant dix ans ;

12 et étant mort, il fut enseveli dans Zabulon.

13 Abdon, fils d’Illel, de Pharathon, fut après lui juge d’Israël.

14 Il eut quarante fils, et de ces fils trente petits-fils, qui montaient tous sur soixante et dix poulains d’ânesses. Il jugea Israël pendant huit ans ;

15 et étant mort, il fut enseveli à Pharathon, au pays d’Ephraïm, sur la montagne d’Amalec.



LES enfants d’Israël commirent encore le mal aux yeux du Seigneur, qui les livra entre les mains des Philistins pendant quarante ans.

2 Or il y avait un homme de Saraa, de la race de Dan, nommé Manué, dont la femme était stérile.

3 Et l’Ange du Seigneur apparut à sa femme, et lui dit : Vous êtes stérile et sans enfants ; mais vous concevrez et vous enfanterez un fils.

4 Prenez donc bien garde de ne point boire de vin, ni rien de ce qui peut enivrer, et de ne manger rien d’impur ;

5 parce que vous concevrez et vous enfanterez un fils, sur la tête duquel le rasoir ne passera point : car il sera nazaréen, consacré à Dieu dès son enfance et dès le ventre de sa mère, et c’est lui qui commencera à délivrer Israël de la main des Philistins.

6 Etant donc venu trouver son mari, elle lui dit : Il est venu à moi un homme de Dieu, qui avait un visage d’ange, et qui était terrible à voir. Je lui ai demandé qui il était, d’où il venait, et comment il s’appelait ; et il n’a pas voulu me le dire.

7 Mais voici ce qu’il m’a dit : Vous concevrez et vous enfanterez un fils. Prenez bien garde de ne point boire de vin, ni rien de ce qui peut enivrer, et de ne manger rien d’impur : car l’enfant sera nazaréen, consacré à Dieu dès son enfance, et depuis le ventre de sa mère jusqu’au jour de sa mort.

8 Manué pria donc le Seigneur, et lui dit : Seigneur ! je vous prie que l’homme de Dieu que vous avez envoyé, vienne encore, afin qu’il nous apprenne ce que nous devons faire de cet enfant qui doit naître.

9 Le Seigneur exauça la prière de Manué ; et l’Ange de Dieu apparut encore à sa femme, lorsqu’elle était assise dans les champs. Manué, son mari, n’était pas alors avec elle. Ayant donc vu l’Ange,

10 elle courut vite à son mari, et lui dit : Voilà ce même homme que j’avais vu auparavant, qui m’est encore apparu.

11 Manué se leva aussitôt, et suivit sa femme. Et étant venu vers cet homme, il lui dit : Est-ce vous qui avez parlé à cette femme ? Il lui répondit : C’est moi.

12 Manué lui dit : Quand ce que vous avez prédit sera accompli, que voulez-vous que fasse l’enfant, et de quoi devra-t-il s’abstenir ?

13 L’Ange du Seigneur répondit à Manué : Qu’il s’abstienne de tout ce que j’ai marqué à votre femme :

14 qu’il ne mange rien de ce qui naît de la vigne, ni de ce qui peut enivrer ; qu’il ne mange rien d’impur ; et qu’il accomplisse et garde avec soin ce que j’ai ordonné sur son sujet.

15 Manué dit à l’Ange du Seigneur : Je vous prie de m’accorder ce que je vous demande, et de permettre que nous vous préparions un chevreau.

16 L’Ange lui répondit : Quelque instance que vous me fassiez, je ne mangerai point de votre pain ; mais si vous voulez faire un holocauste, offrez-le au Seigneur. Or Manué ne savait pas que ce fût l’Ange du Seigneur.

17 Et il dit à l’Ange : Comment vous appelez-vous ? afin que nous puissions vous honorer, si vos paroles s’accomplissent.

18 L’Ange lui répondit : Pourquoi demandez-vous à savoir mon nom, qui est admirable ?

19 Manué prit donc le chevreau, avec les libations : il les mit sur une pierre, et les offrit au Seigneur, qui est l’auteur des œuvres miraculeuses ; et il considérait, lui et sa femme, ce qui en arriverait.

20 Alors la flamme de l’autel montant vers le ciel, l’Ange du Seigneur y monta aussi au milieu des flammes : ce que Manué et sa femme ayant vu, ils tombèrent le visage contre terre ;

21 et l’Ange du Seigneur disparut de devant leurs yeux. Manué reconnut aussitôt que c’était l’Ange du Seigneur,

22 et il dit à sa femme : Nous mourrons certainement, parce que nous avons vu Dieu.

23 Sa femme lui répondit : Si le Seigneur voulait nous faire mourir, il n’aurait pas reçu de nos mains l’holocauste, et les libations que nous lui avons offertes : il ne nous aurait point fait voir toutes ces choses, ni prédit ce qui doit arriver.

24 Elle enfanta donc un fils, et elle l’appela Samson. L’enfant crût, et le Seigneur le bénit.

25 Et l’Esprit du Seigneur commença à être avec lui, lorsqu’il était dans le lieu appelé le Camp de Dan, entre Saraa et Esthaol.



SAMSON étant descendu à Thamnatha, et ayant vu là une femme entre les filles des Philistins,

2 il revint en parler à son père et à sa mère, et leur dit : J’ai vu dans Thamnatha une femme d’entre les filles des Philistins ; je vous prie de me la faire donner pour femme.

3 Son père et sa mère lui dirent : N’y a-t-il point de femme parmi les filles de vos frères et parmi tout notre peuple, pour vouloir prendre une femme d’entre les Philistins qui sont incirconcis ? Samson dit à son père : Donnez-moi celle-là, parce qu’elle m’a plu quand je l’ai vue.

4 Or son père et sa mère ne savaient pas que ceci se faisait par l’ordre du Seigneur, et qu’il cherchait une occasion pour perdre les Philistins : car en ce temps-là les Philistins dominaient sur Israël.

5 Samson vint donc avec son père et sa mère à Thamnatha. Et lorsqu’ils furent arrivés aux vignes qui sont près de la ville, il parut tout d’un coup un jeune lion furieux et rugissant, qui vint au-devant de Samson.

6 Mais l’Esprit du Seigneur se saisit de Samson : il déchira le lion comme il aurait fait un chevreau, et le mit en pièces, sans avoir rien dans la main. Et il ne voulut point le déclarer à son père ni à sa mère.

7 Il alla ensuite parler à la femme qui lui avait plu.

8 Et quelques jours après il revint pour épouser cette femme. Et s’étant détourné du chemin pour voir le corps du lion qu’il avait tué, il trouva un essaim d’abeilles dans la gueule du lion, et un rayon de miel.

9 Il prit ce rayon de miel entre ses mains, et il en mangeait en marchant. Et lorsqu’il fut arrivé où étaient son père et sa mère, il leur en donna une partie qu’ils mangèrent. Mais il ne voulut point leur découvrir qu’il avait pris ce miel dans la gueule du lion mort.

10 Son père vint donc chez cette femme ; et il fit un festin pour son fils Samson, selon la coutume que les jeunes gens avaient alors.

11 Les habitants de ce lieu l’ayant vu, lui donnèrent trente jeunes hommes pour l’accompagner ;

12 auxquels Samson dit : Je vais vous proposer une énigme ; et si vous pouvez me l’expliquer dans les sept jours du festin, je vous donnerai trente robes et autant de tuniques.

13 Si vous ne pouvez l’expliquer, vous me donnerez aussi trente robes et trente tuniques. Ils lui répondirent : Proposez votre énigme, afin que nous sachions ce que c’est.

14 Samson leur dit : La nourriture est sortie de celui qui mangeait, et la douceur est sortie du fort. Ils ne purent pendant trois jours expliquer cette énigme.

15 Mais le septième jour s’approchant, ils dirent à la femme de Samson : Gagnez votre mari par vos caresses, et faites qu’il vous découvre ce que son énigme signifie. Si vous ne voulez pas le faire, nous vous brûlerons, vous et toute la maison de votre père. Est-ce que vous nous avez conviés à vos noces pour nous dépouiller ?

16 Cette femme pleurait donc auprès de Samson, et se plaignait de lui, en disant : Vous me haïssez, et vous ne m’aimez point ; et c’est pour cela que vous ne voulez point m’expliquer l’énigme que vous avez proposée aux jeunes gens de mon peuple. Samson lui répondit : Je ne l’ai point voulu dire à mon père ni à ma mère : comment donc pourrais-je vous le dire ?

17 Elle pleura ainsi auprès de lui pendant les sept jours du festin. Enfin le septième jour, vaincu par ses importunités, il lui découvrit l’énigme ; et elle alla le redire aussitôt à ceux de sa ville,

18 qui vinrent le même jour, avant que le soleil fut couché, dire à Samson : Qu’y a-t-il de plus doux que le miel, et de plus fort que le lion ? Samson leur répondit : Si vous n’eussiez pas labouré avec ma génisse, vous n’eussiez jamais trouvé ce que mon énigme voulait dire.

19 En même temps l’Esprit du Seigneur saisit Samson, et étant venu à Ascalon, il y tua trente hommes, dont il prit les vêtements, et les donna à ceux qui avaient expliqué son énigme. Et étant dans une très-grande colère, il revint dans la maison de son père.

20 Cependant sa femme épousa un de ces jeunes hommes et de ses amis qui l’avaient accompagné à ses noces.



PEU de temps après, lorsque les jours de la moisson des blés étaient proches, Samson voulant aller voir sa femme, vint lui apporter un chevreau ; et lorsqu’il voulait entrer en sa chambre selon sa coutume, son père l’en empêcha, en disant :

2 J’ai cru que vous aviez de l’aversion pour elle ; c’est pourquoi je l’ai donnée à un de vos amis. Mais elle a une sœur qui est plus jeune et plus belle qu’elle, prenez-la pour votre femme au lieu d’elle.

3 Samson lui répondit : Désormais les Philistins n’auront plus sujet de se plaindre de moi, si je leur rends le mal qu’ils m’ont fait.

4 Après cela il alla prendre trois cents renards qu’il lia l’un à l’autre par la queue, et y attacha des flambeaux ;

5 et les ayant allumés, il chassa les renards, afin qu’ils courussent de tous côtés. Les renards aussitôt allèrent courir au travers des blés des Philistins, et y ayant mis le feu, les blés qui étaient déjà en gerbe, et ceux qui étaient encore sur pied, furent brûlés ; et le feu même se mettant dans les vignes, et dans les plants d’oliviers, consuma tout.

6 Alors les Philistins dirent : Qui a fait ce désordre ? On leur répondit : C’est Samson, gendre d’un homme de Thamnatha, qui a fait tout ce mal, parce que son beau-père lui a ôté sa femme, et l’a donnée à un autre. Et les Philistins étant venus chez cet homme, brûlèrent la femme de Samson avec son père.

7 Alors Samson leur dit : Quoique vous en ayez usé ainsi, je veux néanmoins me venger encore de vous ; et après cela je me tiendrai en repos.

8 Il les battit ensuite, et en fit un si grand carnage, que mettant la jambe sur la cuisse ils demeuraient tout interdits. Après cela Samson demeura dans la caverne du rocher d’Etam.

9 Les Philistins étant donc venus dans le pays de Juda, se campèrent au lieu qui depuis fut appelé Léchi, c’est-à-dire, la mâchoire, où leur armée fut mise en fuite.

10 Ceux de la tribu de Juda leur dirent : Pourquoi êtes-vous venus contre nous ? Les Philistins leur répondirent : Nous sommes venus pour lier Samson, afin de lui rendre le mal qu’il nous a fait.

11 Alors trois mille hommes de la tribu de Juda vinrent à la caverne du rocher d’Etam, et dirent à Samson : Ne savez-vous pas que nous sommes assujettis aux Philistins ? pourquoi les avez-vous traités de la sorte ? Il leur répondit : Je leur ai rendu le mal qu’ils m’ont fait.

12 Nous sommes venus, lui dirent-ils, pour vous lier, et pour vous livrer entre les mains des Philistins. Jurez-moi, leur dit Samson, et promettez-moi que vous ne me tuerez point.

13 Ils lui répondirent : Nous ne vous tuerons point ; mais après vous avoir lié, nous vous livrerons aux Philistins. Ils le lièrent donc de deux grosses cordes neuves, et ils l’enlevèrent du rocher d’Etam.

14 Etant arrive au lieu appelé la Mâchoire, les Philistins vinrent à sa rencontre avec de grands cris : alors l’Esprit du Seigneur se saisit tout d’un coup de Samson, il rompit en même temps et brisa les cordes dont il était lié, comme le lin se consume lorsqu’il sent le feu ;

15 et ayant trouvé là une mâchoire d’âne qui était à terre, il la prit, et en tua mille hommes ;

16 et il dit : Je les ai défaits avec une mâchoire d’âne, avec la mâchoire d’un poulain d’ânesse ; et j’ai tué mille hommes.

17 Et après qu’il eut dit ces paroles en chantant, il jeta de sa main la mâchoire, et appela ce lieu-là Ramath-léchi, c’est-à-dire, l’élévation de la mâchoire.

18 Il fut ensuite pressé d’une grande soif, et criant au Seigneur, il dit : C’est vous qui avez sauvé votre serviteur, et qui lui avez donné cette grande victoire ; et maintenant je meurs de soif, et je tomberai entre les mains de ces incirconcis.

19 Le Seigneur ouvrit donc une des grosses dents de cette mâchoire d’âne, et il en sortit de l’eau ; Samson en ayant bu, revint de sa défaillance, et reprit ses forces. C’est pourquoi ce lieu a été appelé jusqu’aujourd’hui, la Fontaine sortie de la machoire par l’invocation de Dieu.

20 Et Samson jugea pendant vingt ans le peuple d’Israël, lorsqu’il était dominé par les Philistins.



APRES cela Samson alla à Gaza ; et y avant vu une courtisane, il alla chez elle.

2 Les Philistins l’ayant appris, et le bruit s’étant répandu parmi eux, que Samson était entré dans la ville, ils l’environnèrent, et mirent des gardes aux portes de la ville, où ils l’attendirent en silence toute la nuit pour le tuer au matin lorsqu’il sortirait.

3 Samson dormit jusque sur le minuit. Et s’étant levé alors, il alla prendre les deux portes de la ville avec leurs poteaux et la serrure, les mit sur ses épaules, et les porta sur le haut de la montagne qui regarde Hébron.

4 Après cela il aima une femme qui demeurait dans la vallée de Sorec, et s’appelait Dalila.

5 Et les princes des Philistins étant venus trouver cette femme, ils lui dirent : Trompez Samson, et sachez de lui d’où lui vient une si grande force, et comment nous pourrions le vaincre, et le tourmenter après l’avoir lié. Si vous faites cela, nous vous donnerons chacun onze cents pièces d’argent.

6 Dalila dit donc à Samson : Dites-moi, je vous prie, d’où vous vient cette force si grande ; et avec quoi il faudrait vous lier, pour vous ôter le moyen de vous sauver.

7 Samson lui dit : Si on me liait avec sept grosses cordes, qui ne fussent pas sèches, mais qui eussent encore leur humidité, je deviendrais faible comme les autres hommes.

8 Les princes des Philistins lui apportèrent donc sept cordes comme elle avait dit, dont elle le lia ;

9 et ayant fait cacher dans sa chambre des hommes, qui attendaient l’événement de cette action, elle lui cria : Samson, voila les Philistins qui fondent sur vous. Et aussitôt il rompit les cordes comme se rompt un fil d’étoupe lorsqu’il sent le feu ; et on ne connut point d’où lui venait cette grande force.

10 Dalila lui dit : Vous vous êtes joué de moi, et vous m’avez dit une chose qui n’était point vraie : découvrez-moi donc au moins maintenant avec quoi il faudrait vous lier.

11 Samson lui répondit : Si on me liait avec des cordes toutes neuves dont on ne se serait jamais servi, je deviendrais faible et semblable aux autres hommes.

12 Dalila l’en ayant encore lié, après avoir fait cacher des gens dans sa chambre, elle lui cria : Samson, voilà les Philistins qui fondent sur vous. Et aussitôt il rompit ces cordes comme ou romprait un filet.

13 Dalila lui dit encore : Jusqu’à quand me tromperez-vous, et me direz-vous des choses fausses ? Dites-moi donc avec quoi il faudrait vous lier. Samson lui dit : Si vous faites sept tresses des cheveux de ma tête avec le fil des tisserands, et qu’ayant fait passer un clou par dedans, vous l’enfonciez dans la terre, je deviendrai faible.

14 Ce que Dalila ayant fait, elle lui dit : Samson, voilà les Philistins qui fondent sur vous. Et s’éveillant tout d’un coup, il arracha le clou avec ses cheveux, et le fil qui les tenait.

15 Alors Dalila lui dit : Comment dites-vous que vous m’aimez, puisque vous ne témoignez que de l’éloignement pour moi ? Vous m’avez déjà menti par trois fois, et vous n’avez pas voulu me dire d’où vous vient cette grande force.

16 Et comme elle l’importunait sans cesse, et qu’elle se tint plusieurs jours attachée auprès de lui, sans lui donner aucun temps pour se reposer, enfin la fermeté de son cœur se ralentit, et il tomba dans une lassitude mortelle.

17 Alors lui découvrant toute la vérité de la chose, il lui dit : Le rasoir n’a jamais passé sur ma tête, parce que je suis nazaréen, c’est-à-dire, consacré à Dieu dès le ventre de ma mère. Si l’on me rase la tête, toute ma force m’abandonnera, et je deviendrai faible comme les autres hommes.

18 Dalila voyant qu’il lui avait confessé tout ce qu’il avait dans le cœur, envoya vers les princes des Philistins, et leur fit dire : Venez encore pour cette fois, parce qu’il m’a maintenant ouvert son cœur. Ils vinrent donc chez elle, portant avec eux l’argent qu’ils lui avaient promis.

19 Dalila fit dormir Samson sur ses genoux, et lui fit reposer sa tête dans son sein ; et ayant fait venir un barbier, elle lui fit raser les sept touffes de ses cheveux : après quoi elle commença à le chasser et à le repousser d’auprès d’elle ; car sa force l’abandonna au même moment ;

20 et elle lui dit : Samson, voilà les Philistins qui viennent fondre sur vous. Samson s’éveillant, dit en lui-même : J’en sortirai comme j’ai fait auparavant, et je me dégagerai d’eux. Car il ne savait pas que le Seigneur s’était retiré de lui.

21 Les Philistins l’ayant donc pris, lui arrachèrent aussitôt les yeux, et l’ayant mené à Gaza chargé de chaînes, ils l’enfermèrent dans une prison, où ils lui firent tourner la meule d’un moulin.

22 Ses cheveux commençaient déjà à revenir,

23 lorsque les princes des Philistins firent une grande assemblée pour immoler des hosties solennelles à leur dieu Dagon, et pour faire des festins de réjouissance, en disant : Notre dieu nous a livré entre les mains Samson, notre ennemi.

24 Ce que le peuple ayant aussi vu, il publiait les louanges de son dieu, en disant comme eux : Notre dieu a livré entre nos mains notre ennemi, qui a ruiné notre pays, et qui en a tué plusieurs.

25 Ils firent donc des festins avec de grandes réjouissances ; et après le dîner, ils commandèrent que l’on fît venir Samson, afin qu’il jouât devant eux. Samson ayant été amené de la prison, jouait devant les Philistins, et ils le firent tenir debout entre deux colonnes.

26 Alors Samson dit au garçon qui le conduisait : Laissez-moi toucher les colonnes qui soutiennent toute la maison : afin que je m’appuie dessus, et que je prenne un peu de repos.

27 Or la maison était pleine d’hommes et de femmes. Tous les princes des Philistins y étaient, et il y avait bien trois mille personnes de l’un et de l’autre sexe, qui du haut de la maison regardaient Samson jouer devant eux.

28 Samson ayant alors invoqué le Seigneur, lui dit : Seigneur, mon Dieu ! souvenez-vous de moi ; mon Dieu ! rendez-moi maintenant ma première force : afin que je me venge de mes ennemis en une seule fois pour la perte de mes deux yeux.

29 Et prenant les deux colonnes du milieu sur lesquelles la maison était appuyée, tenant l’une de la main droite et l’autre de la gauche,

30 il dit : Que je meure avec les Philistins. Et ayant fortement ébranlé les colonnes, la maison tomba sur tous les princes et sur tout le reste du peuple qui était là ; et il en tua beaucoup plus en mourant, qu’il n’en avait tué pendant sa vie.

31 Ses frères et tous ses parents étant venus en ce lieu, prirent son corps, et l’ensevelirent entre Saraa et Esthaol dans le sépulcre de son père Manué, après qu’il eut été juge d’Israël pendant vingt ans.



EN ce temps-là il y eut un homme de la montagne d’Ephraïm, nommé Michas,

2 qui dit à sa mère : Les onze cents pièces d’argent que vous aviez mises à part pour vous, et sur le sujet desquelles vous aviez fait devant moi des imprécations, afin qu’on vous les rendît, sont entre mes mains, et je les ai présentement. Sa mère lui répondit : Que le Seigneur comble mon fils de ses bénédictions !

3 Michas rendit donc ces pièces d’argent à sa mère, qui lui dit : J’ai consacré cet argent au Seigneur, et j’en ai fait vœu : afin que mon fils le reçoive de ma main, et qu’il en fasse faire une image de sculpture, et une jetée en fonte : c’est pour cela que je vous le donne maintenant.

4 Après donc qu’il eut rendu cet argent à sa mère, elle en prit deux cents pièces d’argent qu’elle donna à un ouvrier, afin qu’il en fît un ouvrage de sculpture et une jetée en fonte, qui demeura dans la maison de Michas.

5 Michas fit aussi un petit temple pour le dieu, avec un éphod et des théraphim, c’est-à-dire, le vêtement sacerdotal et les idoles ; et il remplit d’offrandes la main d’un de ses fils, qui fut établi son prêtre.

6 En ce temps-là il n’y avait point de roi dans Israël ; mais chacun faisait tout ce qui lui semblait bon.

7 Il y avait aussi un autre jeune homme de Bethléhem en Juda, qui était de la tribu de Juda par sa mère ; il était Lévite, et demeurait là.

8 Il était sorti de Bethléhem dans le dessein d’aller s’établir ailleurs, partout où il trouverait son avantage. Et étant venu en la montagne d’Ephraïm, lorsqu’il était en chemin il se détourna un peu pour aller en la maison de Michas.

9 Michas lui demanda d’où il venait. Il lui répondit : Je suis Lévite de Bethléhem en Juda : je cherche à m’établir où je pourrai, et où je verrai qu’il me sera le plus utile.

10 Michas lui dit : Demeurez chez moi ; vous me tiendrez lieu de père et de prêtre : je vous donnerai chaque année dix pièces d’argent, deux habits, et ce qui est nécessaire pour la vie.

11 Le Lévite s’y accorda, et il demeura chez lui, où il fut traité comme l’un de ses enfants.

12 Michas lui remplit la main d’offrandes, et il retint ce jeune homme chez lui en qualité de prêtre.

13 Je sais maintenant, disait-il, que Dieu me fera du bien, puisque j’ai chez moi un prêtre de la race de Lévi.



EN ce temps-là il n’y avait point de roi dans Israël, et la tribu de Dan cherchait des terres pour y habiter : car jusqu’alors elle n’avait pu se mettre en possession de ce qui lui était échu comme aux autres tribus.

2 Les enfants de Dan ayant donc choisi de Saraa et d’Esthaol cinq hommes de leur race et de leur famille, qui étaient très-vaillants, ils les envoyèrent pour reconnaître le pays, et pour y remarquer tout avec grand soin, et ils leur dirent : Allez, et reconnaissez bien le pays. S’étant donc mis en chemin, ils vinrent à la montagne d’Ephraïm, et entrèrent chez Michas, où ils se reposèrent.

3 Ils reconnurent à la parole le jeune homme lévite, et demeurant avec lui, ils lui dirent : Qui vous a amené ici ? qu’y faites-vous ? et quel est le sujet qui vous a porté à y venir ?

4 Il leur répondit : Michas a fait pour moi telle et telle chose, et il m’a donné des gages, afin que je lui tienne lieu de prêtre.

5 Ils le prièrent donc de consulter le Seigneur, afin qu’ils pussent savoir si leur voyage serait heureux, et s’ils viendraient à bout de leur entreprise.

6 Il leur répondit : Allez en paix, le Seigneur favorise votre voyage.

7 Ces cinq hommes s’en étant donc allés, vinrent à Laïs, et ils trouvèrent le peuple de cette ville comme ont accoutumé d’être les Sidoniens, sans aucune crainte, en paix et en assurance, n’y ayant personne qui le troublât, extrêmement riche, fort éloigné de Sidon, et séparé de tous les autres hommes.

8 Ils revinrent ensuite trouver leurs frères à Saraa et à Esthaol : et lorsqu’ils leur demandèrent ce qu’ils avaient fait, ils leur répondirent :

9 Hâtons-nous d’aller trouver ces gens-là ; car le pays que nous avons vu est très-riche et très-fertile : ne négligez rien ; ne perdez point de temps : allons nous mettre en possession de cette terre ; nous le ferons sans peine.

10 Nous trouverons des gens en une pleine assurance, une contrée fort étendue ; et le Seigneur nous donnera ce pays, où il ne manque rien de tout ce qui croît sur la terre.

11 Il partit donc alors de la tribu de Dan, c’est-à-dire, de Saraa et d’Esthaol, un corps de six cents hommes en armes,

12 qui étant venus à Cariath-iarim de la tribu de Juda, y campèrent : et ce lieu depuis ce temps-ià s’appela le Camp de Dan, qui est derrière Cariath-iarim.

13 Ils passèrent de là en la montagne d’Ephraïm, et étant venus à la montagne de Michas,

14 ces cinq hommes qui avaient été envoyés auparavant pour reconnaître le pays de Laïs, dirent à leurs autres frères : Vous savez qu’en cette maison-là il y a un éphod, des théraphim une image de sculpture, et une jetée en fonte. Voyez sur cela ce qu’il vous plaît de faire.

15 S’étant donc un peu détournés, ils entrèrent dans le logis du jeune Lévite qui était dans la maison de Michas, et le saluèrent civilement.

16 Cependant les six cents hommes demeurèrent à la porte sous les armes,

17 et ceux qui étaient entrés où logeait ce jeune homme, tâchaient d’emporter l’image de sculpture, l’éphod, les théraphim, et l’image jetée en fonte ; et le prêtre se tenait à la porte pendant que les six cents hommes fort vaillants attendaient non loin de là les cinq autres.

18 Ceux donc qui étaient entrés emportèrent l’image de sculpture, l’éphod ; les idoles, et l’image jetée en fonte. Le prêtre leur dit : Que faites-vous ?

19 Ils lui répondirent : Taisez-vous, n’ouvrez pas seulement la bouche, venez avec nous, afin que vous nous teniez lieu de père et de prêtre. Lequel vous est le plus avantageux, ou d’être prêtre dans la maison d’un particulier, ou de l’être dans une tribu et dans toute une famille d’Israël ?

20 Le Lévite les ayant entendus parler ainsi, se rendit à ce qu’ils disaient : et prenant l’éphod, les idoles, et l’image de sculpture, il s’en alla avec eux.

21 Lorsqu’ils étaient en chemin, ayant fait marcher devant eux les petits enfants, les bestiaux, et tout ce qu’ils avaient de plus précieux ;

22 et étant déjà loin de la maison de Michas, ceux qui demeuraient chez Michas les suivirent avec grand bruit,

23 et commencèrent à crier après eux. Ces gens s’étant retournés pour voir ce que c’était, ils dirent à Michas : Que demandez-vous ? Pourquoi criez-vous de la sorte ?

24 Il leur répondit : Vous m’emportez mes dieux que je me suis faits, et vous m’emmenez mon prêtre et tout ce que j’avais ; et après cela vous me dites : Qu’avez-vous à crier ?

25 Les enfants de Dan lui dirent : Prenez garde de ne nous parler pas davantage, de peur qu’il ne vienne des gens qui s’emportent de colère contre vous, et que vous ne périssiez avec toute votre maison.

26 Ils continuèrent ensuite leur chemin, et Michas voyant qu’ils étaient plus forts que lui, s’en retourna à sa maison.

27 Cependant les six cents hommes emmenèrent le prêtre avec ce que nous avons dit auparavant ; et étant venus à Laïs, ils trouvèrent un peuple qui se tenait en assurance et dans un plein repos. Ils firent passer au fil de l’épée tout ce qui se trouva dans la ville ; ils y mirent le feu et la brûlèrent,

28 sans qu’il se trouvât personne pour les secourir, parce qu’ils demeuraient loin de Sidon, et qu’ils n’avaient aucune société ni aucun commerce avec qui que ce soit. Or la ville était située au pays de Rohob, et l’ayant rebâtie, ils y demeurèrent.

29 Ils l’appelèrent Dan du nom de leur père, qui était fils d’Israël, au lieu qu’auparavant elle s’appelait Laïs.

30 Ils se dressèrent l’image de sculpture, et ils établirent Jonathan, fils de Gersam, qui était fils de Moïse, pour servir de prêtre, lui et ses fils, dans la tribu de Dan, jusqu’au jour qu’ils furent emmenés captifs chez les Philistins ;

31 et l’idole de Michas demeura parmi eux pendant tout le temps que la maison de Dieu fut à Silo. En ce temps-là il n’y avait point de roi dans Israël.



UN Lévite qui demeurait au côté de la montagne d’Ephraïm, ayant pris une femme de Bethléhem qui est en Juda,

2 sa femme le quitta ; et étant retournée à Bethléhem en la maison de son père, elle demeura chez lui pendant quatre mois.

3 Son mari voulant se réconcilier avec elle, vint la trouver pour lui témoigner de l’amitié et la ramener chez lui, étant suivi d’un serviteur avec deux ânes. Sa femme le reçut bien, et le fit entrer dans la maison de son père. Son beau-père l’ayant appris, et le voyant venir, alla au-devant de lui avec joie,

4 et l’embrassa. Il demeura dans la maison de son beau-père pendant trois jours, mangeant et buvant avec lui avec beaucoup de familiarité.

5 Le quatrième jour le Lévite se levant avant le jour, voulut s’en aller ; mais son beau-père le retint, et lui dit : Prenez un peu de pain auparavant pour vous fortifier, et après cela vous vous mettrez en chemin.

6 Ils s’assirent donc, et ils mangèrent et burent ensemble. Le beau-père dit ensuite à son gendre : Je vous prie de demeurer encore ici aujourd’hui, afin que nous le passions ensemble dans la joie.

7 Le Lévite se levant, voulut s’en aller ; mais son beau-père le conjura avec tant d’instance, qu’il le retint et le fit demeurer chez lui.

8 Le lendemain au matin le Lévite se préparait à s’en aller ; mais son beau-père lui dit de nouveau : Je vous prie de manger un peu auparavant, afin qu’ayant pris des forces, vous vous en alliez quand le jour sera plus avancé. Ils mangèrent donc ensemble :

9 et le jeune homme se levant, voulait s’en aller avec sa femme et son serviteur ; mais son beau-père lui dit encore : Considérez que le jour est fort avancé, et que le soir approche ; demeurez encore chez moi aujourd’hui, et réjouissons-nous : vous partirez demain pour retourner en votre maison.

10 Son gendre ne voulut point se rendre à ses prières ; mais il partit aussitôt, et vint proche de Jébus, qui s’appelle autrement Jérusalem, menant avec lui ses deux ânes chargés, et sa femme.

11 Et lorsqu’ils étaient déjà proche de Jébus, et que le jour finissant, la nuit commençait, le serviteur dit à son maître : Allons, je vous prie, à la ville des Jébuséens, et y demeurons.

12 Son maître lui répondit : Je n’entrerai point dans une ville d’un peuple étranger, qui n’est point des enfants d’Israël ; mais je passerai jusqu’à Gabaa :

13 et quand je serai arrivé là, nous y demeurerons, ou au moins en la ville de Rama.

14 Ils passèrent donc Jébus ; et continuant leur chemin, ils se trouvèrent au coucher du soleil près de Gabaa, qui est dans la tribu de Benjamin.

15 Ils y allèrent pour y demeurer ; et y étant entrés, ils s’assirent en la place de la ville, sans qu’il y eût personne qui voulût les retirer et les loger chez lui.

16 Mais sur le soir on vit venir un vieillard qui retournait des champs après son travail, qui était lui-même de la montagne d’Ephraïm, et qui demeurait comme étranger en la ville de Gabaa. Or les hommes de ce pays-là étaient enfants de Jémini.

17 Ce vieillard levant les yeux vit le Lévite assis dans la place de la ville avec son petit bagage : et s’adressant à lui, il lui dit : D’où venez-vous ? et où allez-vous ?

18 Le Lévite lui répondit : Nous sommes partis de Bethléhem qui est en Juda, et nous retournons en notre maison, qui est au côté de la montagne d’Ephraïm, d’où nous étions allés à Bethléhem : nous allons maintenant à la maison de Dieu, et personne ne veut nous recevoir chez lui,

19 quoique nous ayons de la paille et du foin pour les ânes, avec du pain et du vin pour moi et pour votre servante, et pour le serviteur qui est avec moi. Nous n’avons besoin de rien, sinon qu’on nous loge.

20 Le vieillard lui répondit : La paix soit avec vous : je vous donnerai tout ce qui vous sera necessaire ; je vous prie seulement de ne point demeurer dans cette place.

21 Il les fit donc entrer dans sa maison, il donna à manger aux ânes ; et pour eux, après qu’ils eurent lavé leurs pieds, il les fit mettre à table, et leur fit festin.

22 Pendant qu’ils étaient à table, et que fatigués du chemin ils mangeaient et buvaient pour reprendre leurs forces, il vint des hommes de cette ville, qui étaient des enfants de Bélial, c’est-à-dire, sans joug ; et environnant la maison du vieillard, ils commencèrent à frapper à la porte, en criant au maître de la maison, et lui disant : Faites sortir cet homme qui est entré chez vous, afin que nous en abusions.

23 Le vieillard sortit dehors pour leur parler, et leur dit : Gardez-vous, mes frères, gardez-vous bien de faire un si grand mal ; car j’ai reçu cet homme comme mon hôte : cessez de penser à cette folie.

24 J’ai une fille vierge, et cet homme a sa concubine ; je vous les amènerai, et vous les aurez pour satisfaire votre passion : je vous prie seulement de ne pas commettre à l’égard d’un homme ce crime détestable contre la nature.

25 Mais le Lévite voyant qu’ils ne voulaient point se rendre à ses paroles, leur amena sa femme, et l’abandonna à leurs outrages ; et ayant abusé d’elle toute la nuit, quand le matin fut venu, ils la laissèrent.

26 Lorsque les ténèbres de la nuit se dissipaient, cette femme vint à la porte de la maison où était son mari, et y tomba étendue par terre.

27 Le matin son mari s’étant levé, ouvrit la porte pour continuer son chemin, et il y trouva sa femme couchée par terre, ayant les mains étendues sur le seuil de la porte.

28 Il crut d’abord qu’elle était endormie, et lui dit : Levez-vous, et allons-nous-en. Mais elle ne répondant rien, il reconnut qu’elle était morte ; et l’ayant prise, il la remit sur son âne, et s’en retourna en sa maison.

29 Etant venu chez lui, il prit un couteau, et divisa le corps de sa femme avec ses os en douze parts, et en envoya une part en chacune des tribus d’Israël.

30 Ce que les enfants d’Israël ayant vu, ils crièrent tous d’une voix : Jamais rien de tel n’est arrivé dans Israël, depuis le jour que nos pères sortirent d’Egypte jusqu’aujourd’hui : prononcez là-dessus, et ordonnez tous ensemble ce qu’il faut faire en cette rencontre.



ALORS tous les enfants d’Israël se mirent en campagne, et s’étant assemblés comme un seul homme, depuis Dan jusqu’à Bersabée et de la terre même de Galaad, se rendirent à Maspha, pour consulter le Seigneur.

2 Tous les chefs du peuple et toutes les tribus d’Israël se trouvèrent dans l’assemblée du peuple de Dieu, au nombre de quatre cent mille hommes de pied, tous hommes de guerre.

3 Et les enfants de Benjamin surent bientôt que les enfants d’Israël étaient allés tous ensemble à Maspha. Le Lévite, mari de la femme qui avait été tuée, étant interrogé de quelle manière un si grand crime s’était commis,

4 répondit : Etant allé dans la ville de Gabaa, de la tribu de Benjamin, avec ma femme, pour y passer la nuit ;

5 les hommes de cette ville-là vinrent tout d’un coup la nuit environner la maison où j’étais, pour me tuer, et ils ont outragé ma femme avec une brutalité si furieuse et si incroyable, qu’enfin elle en est morte.

6 Ayant pris ensuite son corps, je l’ai coupé en morceaux, et j’en ai envoyé les parts dans tout le pays que vous possédez, parce qu’il ne s’est jamais commis un si grand crime, ni un excès si abominable dans tout Israël.

7 Vous voilà tous, ô enfants d’Israël ! voyez ce que vous devez faire.

8 Tout le peuple qui était là lui répondit comme s’ils n’eussent été qu’un seul homme : Nous ne retournerons point à nos tentes, et personne ne retournera en sa maison,

9 jusqu’à ce que nous ayons exécuté ceci tous ensemble contre Gabaa :

10 Qu’on choisisse d’entre toutes les tribus d’Israël dix hommes de cent, cent de mille, et mille de dix mille, afin qu’ils portent des vivres à l’armée, et que nous puissions combattre contre Gabaa de Benjamin, et rendre la punition que nous en ferons égale au crime qu’elle a commis.

11 Ainsi tout Israël se ligua contre cette ville, comme s’il n’eût été qu’un seul homme, n’ayant tous qu’un même esprit et une même résolution ;

12 et ils envoyèrent des ambassadeurs vers toute la tribu de Benjamin, pour leur dire : Pourquoi une action si detestable s’est-elle commise parmi vous ?

13 Donnez-nous les hommes de Gabaa qui sont coupables de ce crime infâme, afin qu’ils meurent, et que le mal soit banni d’Israël. Les Benjamites ne voulurent point se rendre à cette proposition des enfants d’Israël qui étaient leurs frères ;

14 mais étant sortis de toutes les villes de leur tribu, ils s’assemblèrent à Gabaa, pour secourir ceux de cette ville, et pour combattre contre tout le peuple d’Israël.

15 Il se trouva dans la tribu de Benjamin vingt-cinq mille hommes portant armes, outre les habitants de Gabaa,

16 qui étaient sept cents hommes très-vaillants combattant de la gauche comme de la droite, et si adroits à jeter des pierres avec la fronde, qu’ils auraient pu même frapper un cheveu, sans que la pierre qu’ils auraient jetée se fût tant soit peu détournée de part ou d’autre.

17 Il se trouva aussi parmi les enfants d’Israël, sans compter ceux de Benjamin, quatre cent mille hommes portant armes et prêts à combattre.

18 S’étant donc mis en campagne, ils vinrent à la maison de Dieu, c’est-à-dire, à Silo, où ils consultèrent Dieu, et lui dirent : Qui sera le général de notre armée pour combattre les enfants de Benjamin ? Le Seigneur leur répondit : Que Juda soit votre général.

19 Aussitôt les enfants d’Israël marchant dès la pointe du jour, vinrent se camper près de Gabaa.

20 Et s’avançant de là pour combattre les enfants de Benjamin, ils commencèrent à assiéger la ville.

21 Mais les enfants de Benjamin étant sortis de Gabaa, tuèrent en ce jour vingt-deux mille hommes de l’armée des enfants d’Israël.

22 Les enfants d’Israël s’appuyant sur leurs forces et sur leur grand nombre, se remirent encore en bataille dans le même lieu où ils avaient combattu.

23 Auparavant néanmoins ils allèrent pleurer jusqu’à la nuit devant le Seigneur, et ils le consultèrent, en disant : Devons-nous combattre encore contre les enfants de Benjamin qui sont nos frères, ou en demeurer là. Le Seigneur leur répondit : Marchez contre eux, et donnez-leur bataille.

24 Le lendemain les enfants d’Israël s’étant présentés encore pour combattre les enfants de Benjamin,

25 ceux de Benjamin sortirent avec impétuosité des portes de Gabaa, et les ayant rencontrés, ils en firent un si grand carnage, qu’ils tuèrent sur la place dix-huit mille hommes de guerre.

26 C’est pourquoi tous les enfants d’Israël vinrent en la maison de Dieu, et étant assis, ils pleuraient devant le Seigneur. Ils jeûnerent ce jour-là jusqu’au soir, et ils offrirent au Seigneur des holocaustes et des hosties pacifiques,

27 et le consultèrent touchant l’état où ils se trouvaient. En ce temps-là l’arche de l’alliance du Seigneur était en ce lieu ;

28 et Phinéès, fils d’Eléazar, fils d’Aaron, tenait le premier rang dans la maison de Dieu. Ils consultèrent donc le Seigneur, et lui dirent : Devons-nous encore combattre les enfants de Benjamin qui sont nos frères, ou demeurer en paix ? Le Seigneur leur dit : Marchez contre eux : car demain je les livrerai entre vos mains.

29 Les enfants d’Israël dressèrent ensuite des embuscades autour de la ville de Gabaa,

30 et marchèrent en bataille pour la troisième fois contre Benjamin, comme ils avaient déjà fait la première et la seconde fois.

31 Les enfants de Benjamin sortirent aussi de la ville avec une grande audace ; et voyant fuir leurs ennemis, ils les poursuivirent bien loin, et ils en blessèrent quelques-uns, comme ils avaient fait le premier et le second jour, et taillèrent en pièces ceux qui fuyaient par deux chemins, dont l’un va à Béthel, et l’autre à Gabaa, et ils tuèrent environ trente hommes ;

32 car ils se flattaient de les tailler en pièces, comme les deux premières fois. Mais les enfants d’Israël feignaient adroitement de fuir, à dessein de les engager loin de la ville, et de les attirer en ces chemins dont nous venons de parler.

33 Tous les enfants d’Israël se levant donc du lieu où ils étaient, se mirent en bataille dans le lieu appelé Baal-thamar. Les gens des embuscades qu’on avait dressées autour de la ville, commencèrent aussi à paraître peu à peu,

34 et à marcher du côté de la ville qui regarde l’occident. Et les autres dix mille hommes de l’armée d’Israël qui avaient fui, attiraient au combat les habitants de la ville. Ainsi les enfants de Benjamin se trouvèrent accablés de gens de guerre ; et ils ne s’aperçurent point qu’une mort présente les environnait de toutes parts.

35 Ainsi le Seigneur les tailla en pièces aux yeux des enfants d’Israël, qui tuèrent en ce jour-là vingt-cinq mille cent hommes, tous gens de guerre et de combat,

36 Les enfants de Benjamin voyant qu’ils étaient trop faibles, commencèrent à fuir. Ce que les enfants d’Israël ayant aperçu, ils leur firent place, afin que s’enfuyant ils tombassent dans les embuscades qui étaient toutes prêtes, et qu’ils leur avaient dressées le long de la ville.

37 Ces gens étant donc sortis tout d’un coup de l’embuscade, taillèrent en pièces les Benjamites qui fuyaient devant eux, entrèrent ensuite dans la ville, et y passèrent tout au fil de l’épée.

38 Or les enfants d’Israël avaient donné pour signal à ceux qu’ils avaient mis en embuscade, qu’ils allumassent un grand feu après avoir pris la ville, afin que la fumée qui s’élèverait en haut, fût la marque de la prise de la ville.

39 C’est en effet de quoi s’aperçurent les Israélites pendant le combat. Car ceux de Benjamin s’étant imaginé d’abord que ceux d’Israël fuyaient, les avaient poursuivis vivement, après avoir tué trente hommes de leurs troupes.

40 Mais lorsqu’on vit comme une colonne de fumée qui s’élevait au-dessus des maisons, ceux de Benjamin regardant aussi derrière eux, s’aperçurent que la ville était prise, et que les flammes s’élevaient en haut.

41 Et alors les Israélites qui auparavant faisaient semblant de fuir, commencèrent à tourner visage contre eux, et à les charger vivement. Ce que les enfants de Benjamin ayant vu, ils se mirent à fuir,

42 et à gagner le chemin du désert : mais leurs ennemis les y poursuivirent. Et ceux qui avaient mis le feu à la ville, vinrent à leur rencontre.

43 Ainsi les Benjamites ayant leurs ennemis en tête et en queue, furent taillés en pièces devant et derrière, sans que rien arrêtât un si grand carnage. Ils tombèrent morts sur la place au côté de la ville de Gabaa qui regarde l’orient.

44 Dix-huit mille hommes furent tués en ce même endroit, tous hommes de guerre et très-vaillants.

45 Ceux qui étaient restés des Benjamites voyant la défaite de leurs gens, s’enfuirent dans le désert, pour gagner le rocher appelé Remmon. Mais comme ils étaient tous dispersés dans cette fuite, l’un d’un côté et l’autre d’un autre, il y en eut cinq mille de tués. Et ayant passé plus loin, ceux d’Israël les poursuivirent, et en tuèrent encore deux mille.

46 Ainsi il y eut en tout vingt-cinq mille hommes de la tribu de Benjamin qui furent tués en cette journée, en divers endroits, tous gens de guerre et très-vaillants ;

47 de sorte qu’il ne resta de toute la tribu de Benjamin, que six cents hommes qui ayant pu se sauver et s’enfuir dans le désert, demeurèrent au rocher de Remmon pendant quatre mois.

48 Les enfants d’Israël étant retournés du combat, firent passer au fil de l’épée tout ce qui se trouva de reste dans la ville depuis les hommes jusqu’aux bêtes ; et toutes les villes et les villages de Benjamin furent consumés par les flammes.



LES enfants d’Israël firent aussi un serment à Maspha, et ils dirent : Nul d’entre nous ne donnera sa fille en mariage aux enfants de Benjamin.

2 Et ils vinrent tous en la maison de Dieu, c’est-à-dire, à Silo, et se tenant assis en sa présence jusqu’au soir, ils élevèrent la voix, et commencèrent à pleurer en jetant de grands cris, et disant :

3 Seigneur, Dieu d’Israël ! pourquoi est-il arrivé un si grand malheur à votre peuple, qu’aujourd’hui une des tribus ait été retranchée d’entre nous ?

4 Le lendemain s’étant levés au point du jour, ils élevèrent un autel, y offrirent des holocaustes et des victimes pacifiques, et dirent :

5 Qui d’entre toutes les tribus d’Israël n’a point marché avec l’armée du Seigneur ? Car étant à Maspha, ils s’étaient engagés par un grand serment à tuer tous ceux qui auraient manqué de s’y trouver.

6 Et les enfants d’Israël touchés de repentir de ce qui était arrivé à leurs frères de Benjamin, commencèrent à dire : Une des tribus a été retranchée d’Israël ;

7 où prendront-ils des femmes ? Car nous avons juré tous ensemble, que nous ne leur donnerions point nos filles.

8 Ils s’entre-dirent donc : Qui sont ceux de toutes les tribus d’Israël qui ne sont point venus devant le Seigneur à Maspha ? Et il se trouva que les habitants de Jabès-Galaad ne s’étaient point trouvés dans l’armée.

9 En effet, en ce même temps auquel les enfants d’Israël étaient à Silo, il ne se trouva parmi eux aucun homme de Jabès.

10 Ils envoyèrent donc dix mille hommes très-vaillants avec cet ordre : Allez, et faites passer au fil de l’épée tous les habitants de Jabès-Galaad, sans épargner ni les femmes ni les petits enfants.

11 Et vous observerez ceci en même temps : Tuez tous les mâles et toutes les femmes qui ne sont plus au rang des filles ; mais réservez les vierges.

12 Il se trouva dans Jabès-Galaad quatre cents vierges qui étaient demeurées toujours pures ; et ils les emmenèrent au camp à Silo, au pays de Chanaan.

13 Ils envoyèrent ensuite des députés aux enfants de Benjamin qui étaient au rocher de Kemmon, avec ordre de leur dire qu’on voulait vivre en paix avec eux.

14 Alors les enfants de Benjamin revinrent chez eux, et on leur donna pour femmes ces filles de Jabès-Galaad : mais on n’en trouva point d’autres qu’on pût leur donner de la même manière.

15 Tout Israël fut touché alors d’une grande douleur, et ils eurent un extrême regret qu’une des tribus d’Israël fût périe de cette sorte.

16 Et les plus anciens du peuple dirent : Que ferons-nous aux autres à qui on n’a pas donné de femmes ? Car toutes les femmes de la tribu de Benjamin ont été tuées.

17 Et il n’y a rien que nous ne devions faire pour empêcher, autant qu’il est en notre pouvoir, qu’une des tribus d’Israël ne périsse.

18 Cependant nous ne pouvons leur donner nos filles, étant liés comme nous sommes par notre serment, et par les imprécations que nous avons faites, en disant : Maudit soit celui qui donnera sa fille en mariage aux enfants de Benjamin.

19 Voici donc la résolution qu’ils prirent entre eux ; ils dirent : Voici la fête solennelle du Seigneur qui se célèbre tous les ans à Silo, qui est située au septentrion de la ville de Béthel, et à l’orient du chemin qui va de Béthel à Sichem, et au midi de la ville de Lébona.

20 Puis ils donnèrent cet ordre aux enfants de Benjamin : Allez, leur dirent-ils, cachez-vous dans les vignes.

21 Et lorsque vous verrez les filles de Silo, qui viendront danser selon la coutume, sortez tout d’un coup des vignes, et que chacun de vous en prenne une pour sa femme, et retournez-vous-en au pays de Benjamin.

22 Et lorsque leurs pères et leur frères viendront se plaindre de vous, en vous accusant de cette violence, nous leur dirons : Ayez compassion d’eux : car ils ne les ont pas prises comme des victorieux prennent des captives par le droit de la guerre ; mais après qu’ils vous ont suppliés de leur donner vos filles, vous les leur avez refusées ; et ainsi la faute est venue de vous.

23 Les enfants de Benjamin firent ce qui leur avait été commandé ; et selon le nombre qu’ils étaient, chacun d’eux enleva une des filles qui dansaient, pour être sa femme. Etant ensuite retournés chez eux, ils bâtirent des villes, et y habitèrent.

24 Les enfants d’Israël retournèrent aussi dans leurs tentes, chacun dans sa tribu et dans sa famille. En ce temps-là il n’y avait point de roi dans Israël ; mais chacun faisait ce qu’il jugeait à propos.


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