Cent Ballades (Christine de Pisan)/Ballade VII

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Cent Ballades, Texte établi par Maurice RoyFirmin Didot (p. 8-9).


VII



Ha ! Fortune trés doloureuse,
Que tu m’as mis du hault au bas !
Ta pointure trés venimeuse
4A mis mon cuer en mains debas.
Ne me povoyes nuire en cas
Ou tu me fusses plus crueuse,[1]
Que de moy oster le soulas,[2]
8Qui ma vie tenoit joyeuse.

Je fus jadis si eüreuse ;[3]
Ce me sembloit qu’il n’estoit pas[4]
Ou monde plus beneüreuse ;
12Alors ne craignoie tes las,
Grever ne me pouoit plein pas
Ta trés fausse envie haïneuse,
Que de moy oster le soulas,
16Qui ma vie tenoit joyeuse.

Horrible, inconstant, tenebreuse,[5]
Trop m’as fait jus flatir a cas
Par ta grant malice envieuse
20Par qui me viennent maulx a tas.
Que ne vengoyes tu, helas !
Autrement t’yre mal piteuse,
Que de moy oster le solas,

24Qui ma vie tenoit joyeuse ?

Trés doulz Princes, ne fu ce pas
Cruaulté male et despiteuse,
Que de moy oster le solas,
28Qui ma vie tenoit joyeuse ?

  1. A cruese ; B Dont tu me f. si c.
  2. B1 ce de
  3. A Helas j. f. si e.
  4. A1 n’estois ; B n’avoit
  5. B Trés false h. et t.