Code civil des Français 1804/Livre III, Titre XIX

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Livre III, Titre XIX : De l’expropriation forcée et des ordres entre les créanciers.
(p. 541-544).

Décrété le 28 Ventôse an XII.
Promulgué le 8 Germinal suivant.

Titre XIX.
de l’expropriation forcée et des ordres entre les créanciers.


Chapitre premier.
de l’expropriation forcée.

2204.

Le créancier peut poursuivre l’expropriation, 1.o des biens immobiliers et de leurs accessoires réputés immeubles appartenant en propriété à son débiteur ; 2.o de l’usufruit appartenant au débiteur sur les biens de même nature.

2205.

Néanmoins la part indivise d’un cohéritier dans les immeubles d’une succession ne peut être mise en vente par ses créanciers personnels, avant le partage ou la licitation qu’ils peuvent provoquer s’ils le jugent convenable, ou dans lesquels ils ont le droit d’intervenir, conformément à l’article 882 au titre des Successions.

2206.
Les immeubles d’un mineur, même émancipé, ou d’un interdit, ne peuvent être mis en vente avant la discussion du mobilier.
2207.

La discussion du mobilier n’est pas requise avant l’expropriation des immeubles possédés par indivis entre un majeur et un mineur ou interdit, si la dette leur est commune, ni dans le cas où les poursuites ont été commencées contre un majeur, ou avant l’interdiction.

2208.

L’expropriation des immeubles qui font partie de la communauté, se poursuit contre le mari débiteur, seul, quoique la femme soit obligée à la dette.

Celle des immeubles de la femme qui ne sont point entrés en communauté, se poursuit contre le mari et la femme, laquelle au refus du mari de procéder avec elle, ou si le mari est mineur, peut être autorisée en justice.

En cas de minorité du mari et de la femme, ou de minorité de la femme seule, si son mari majeur refuse de procéder avec elle, il est nommé par le tribunal un tuteur à la femme, contre lequel la poursuite est exercée.

2209.

Le créancier ne peut poursuivre la vente des immeubles qui ne lui sont pas hypothéqués, que dans le cas d’insuffisance des biens qui lui sont hypothéqués.

2210.

La vente forcée des biens situés dans différens arrondissemens ne peut être provoquée que successivement, à moins qu’ils ne fassent partie d’une seule et même exploitation.

Elle est suivie dans le tribunal dans le ressort duquel se trouve le chef-lieu de l’exploitation, ou à défaut de chef-lieu, la partie de biens qui présente le plus grand revenu, d’après la matrice du rôle.

2211.

Si les biens hypothéqués au créancier, et les biens non hypothéqués, ou les biens situés dans divers arrondissemens, font partie d’une seule et même exploitation, la vente des uns et des autres est poursuivie ensemble, si le débiteur le requiert ; et ventilation se fait du prix de l’adjudication, s’il y a lieu.

2212.

Si le débiteur justifie, par baux authentiques, que le revenu net et libre de ses immeubles pendant une année, suffit pour le paiement de la dette en capital, intérêts et frais, et s’il en offre la délégation au créancier, la poursuite peut être suspendue par les juges, sauf à être reprise s’il survient quelque opposition ou obstacle au paiement.

2213.

La vente forcée des immeubles ne peut être poursuivie qu’en vertu d’un titre authentique et exécutoire, pour une dette certaine et liquide. Si la dette est en espèces non liquidées, la poursuite est valable ; mais l’adjudication ne pourra être faite qu’après la liquidation.

2214.
Le cessionnaire d’un titre exécutoire ne peut poursuivre l’expropriation qu’après que la signification du transport a été faite au débiteur.
2215.

La poursuite peut avoir lieu en vertu d’un jugement provisoire ou définitif, exécutoire par provision, nonobstant appel ; mais l’adjudication ne peut se faire qu’après un jugement définitif en dernier ressort, ou passé en force de chose jugée.

La poursuite ne peut s’exercer en vertu de jugemens rendus par défaut durant le délai de l’opposition.

2216.

La poursuite ne peut être annullée sous prétexte que le créancier l’aurait commencée pour une somme plus forte que celle qui lui est due.

2217.

Toute poursuite en expropriation d’immeubles doit être précédée d’un commandement de payer, fait, à la diligence et requête du créancier, à la personne du débiteur ou à son domicile, par le ministère d’un huissier.

Les formes du commandement et celles de la poursuite sur l’expropriation sont réglées par les lois sur la procédure.

Chapitre II.
de l’ordre et de la distribution du prix entre les créanciers
.

2218.

L’ordre est la distribution du prix des immeubles, et la manière d’y procéder, sont réglés par les lois sur la procédure.