Convention entre la France et les Iles Liou-tchou
Signée à Napa, en chinois et français, le 24 novembre 1855.
En attendant la conclusion d’un traité plus complet entre Sa Majesté l’Empereur des Français, et Sa Majesté le Roi des Iles Liou-tchou, la convention suivante a été passée et arrêtée entre les Représentants soussignés des deux Gouvernements à Nafa, le Vingt quatre Novembre Mil huit cent cinquante cinq
Savoir:
Pour Sa Majesté l’Empereur des Français, Mr le Contre-Amiral Guérin, Commandant en Chef la Station Navale de la Réunion, de l’Inde, de la Chine et du Japon d’une part;
et pour Sa Majesté le Roi des Iles Liou-tchou, leurs Excellences Chang-Kin-Pao, Régent du Royaume,
Ma-Léang-Tsay | Ministres de Finances; |
Woun Té-Yi |
lesquels sont convenus des articles suivants:
ARTICLE 1er.[modifier]
A l’avenir lorsque des français viendront aux Iles Liou-tchou, ils seront traités avec toute la courtoisie et les égards qui sont dûs aux sujets de Sa Majesté l’Empereur des Français. Toute denrée du pays qu’ils demanderont aux Chefs ou aux Gens du peuple leur sera vendue sans que les autorités du pays puissent établir aucun règlement prohibitif pour empêcher le peuple de leur vendre directement. Tous les objets de part et d’autre qu’ils voudraient acheter ou vendre seront échangés à des prix raisonnables.
ARTICLE 2.[modifier]
Le Gouvernement de Liou-tchou refusant avec persistance de consentir à l’achât et même à la location par des Français, de terrains, maisons et bateaux, il est arrêté par les soussignés que les terrains, maisons et bateaux nécessaires aux Français leur seront fournis par les autorités du pays pendant tout le temps qu’ils en auront besoin. Si les terrains, maisons ou bâteaux donnés aux français ne leur convenaient point, ils le feraient remarquer aux autorités locales qui devraient alors leur en fournir de plus convenables. Faute par elles de faire droit à leur réclamation, les Français seront autorisés alors à louer les terrains, maisons et bateaux à leur convenance. Un terrain spécial situé à proximité d’un débarcadère, sera concédé ou affermé à Toumaï au Gouvernement Français par celui de Liou-tchou, pour y établir un dépôt de charbon et les constructions nécessaires à la conservation et à l’administration de ce dépôt.
Les terrains, maisons ou bateaux occupés par des Français seront inviolables.
ARTICLE 3.[modifier]
Toutes les fois que des bâtiments français entreront dans une des rades de Liou-tchou il leur sera fourni le bois et l’eau dont ils auront besoin, aux prix courants; mais s’ils ont besoin d’autres objets ils ne pourront les acheter qu’à Nafa.
ARTICLE 4.[modifier]
Si des navires français viennent à naufrager sur l’une des Iles Liou-tchou, les autorités locales devront, dès qu’elles en seront informées, prêter assistance à l’Equipage, pourvoir à ses premiers besoins et prendre toutes les mesures nécessaires pour sauver le navire et préserver les marchandises. Elles devront en outre conserver en lieux sûrs tout ce qui pourra être mis à terre jusqu’à ce que des bâtiments de cette nation viennent prendre ce qui aura été sauvé. Les dépenses occasionnées par le sauvetage des naufragés seront remboursés par la nation à laquelle ils appartiennent.
ARTICLE 5.[modifier]
Les français auront, aux Iles Liou-Tchou, la liberté d’aller où il leur plaira, et de communiquer librement et sans obstacles avec les habitants. On ne les fera pas accompagner d’agents chargés de les suivre ou d’espionner ce qu’ils font, mais si ces personnes cherchent à acheter de force des objets ou commettent tout autre acte illégal, elles seront arrêtées, par les autorités locales, sans pour cela être maltraitées, et remises au Capitaine du 1er bâtiment français qui arriverait aux Iles Liou-tchou.
ARTICLE 6.[modifier]
À Tumaï est un cimetière pour les Français leurs tombes et tombeaux seront respectés.
ARTICLE 7.[modifier]
Le Gouvernement de Liou-tchou nommera des pilotes capables pour veiller les bâtiments français qui passeront au large de l’Ile, et si quelqu’un se dirige vers Nafa, les pilotes se rendront, dans de bons bateaux, au delà des brisants, pour les conduire à un mouillage sûr. Le Capitaine paiera au pilote cinq piastres pour ce service, et le même prix sera donné pour aller de la rade en dehors des brisants.
ARTICLE 8.[modifier]
Lorsque des bâtiments mouilleront à Nafa, les autorités locales leur fourniront du bois au prix de 3600 sapecs pour mille catties de bois, et de l’eau au prix de 600 sapecs pour mille catties ou six barriques.
ARTICLE 9.[modifier]
S’il arrive que des matelots ou autres individus désertent des bâtiments de Guerre ou s’évadent des navires de commerce français, les autorités locales, sur la réquisition du Capitaine, feront tous leurs efforts pour découvrir et restituer sur le champ, entre ses mains, les susdits déserteurs ou fugitifs.
Pareillement si des habitants de Iles, prévenus de quelque crime, venaient à se réfugier dans des maisons françaises ou à bord des navires, l’autorité locale s’adresserait au Capitaine ou au maître de la maison qui, sur la preuve de la culpabilité, prendrait toutes les mesures nécessaires pour que l’extradition soit effectuée.
ARTICLE 10.[modifier]
Si, malheureusement, il s’élevait quelque rixe ou quelque querelle entre les Français et les habitants des Iles Liou-tchou, comme aussi dans le cas où, dans le cours d’une semblable querelle, un ou plusieurs individus seraient tués ou blessés, les habitants punir, s’ill y avait lieu, conformément aux lois du pays; quant aux Français ils seront remis au Capitaine du 1er bâtiment français qui se présenterait aux Iles Liou-Tchou.
ARTICLE 11.[modifier]
Si des bâtiments en détresse ou en avarie arrivaient aux Iles Liou-tchou, les autorités locales s’empresseraient de leur porter secours, de rechercher les matériaux nécessaires pour les réparer, et de mettre à leur disposition un local pour y déposer les agrès du navire, les marchandises et les vêtements de l’Equipage.
Enfin il reste bien entendu que, quelque chose qu’il arrive, la France jouira toujours aux Iles Liou-Tchou des mêmes avantages que la nation la plus favorisée.
Le désir mutuel des deux Gouvernements est qu’il existe toujours une entente parfaite entre leurs sujets respectifs.
Et ont signé les jour, mois et an que dessus.
Le C. Admiral,
[L.S.] (Signé) GUÉRIN.