Coran Savary/024

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Traduction par Claude-Étienne Savary Voir et modifier les données sur Wikidata.
G. Dufour (2p. 98-107).





LA LUMIÈRE.


donné à médine, composé de 64 versets
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Au nom de Dieu clément et miséricordieux.


Nous avons envoyé ce chapitre du ciel. Il contient la sanction de nos lois, et des signes dont l’évidence doit vous déssiller les yeux.

Les impudiques des deux sexes seront punis de cent coups de fouets. C’est le jugement de Dieu. Vous n’aurez pour eux aucune commisération, si vous croyez en lui, et au jour dernier. Que quelques fidèles soient témoins de leur châtiment.

Un homme débauché ne pourra épouser qu’une femme de son espèce, ou une idolâtre. Une fille débauchée ne se mariera qu’à un impudique, ou à un idolâtre. Ces alliances sont interdites aux fidèles.

Ceux qui accuseront d’adultère une femme vertueuse, sans pouvoir produire quatre témoins, seront punis de quatre-vingts coups de fouet. Déclarés infâmes, ils ne seront plus reçus en témoignage.

Ceux qui, touchés de repentir, retourneront à la vertu, auront lieu d’espérer la miséricorde divine.

Les maris qui, sur le seul témoignage, accuseront leurs femmes d’adultère, jureront quatre fois, par le nom de Dieu, qu’ils disent la vérité.

Le cinquième serment sera une imprécation sur eux-mêmes, s’ils sont parjures.

La femme se délivrera du châtiment, en jurant quatre fois, par le nom de Dieu, que le crime dont on l’accuse est faux.

Au cinquième serment, elle invoquera sur elle la vengeance céleste, si elle n’est pas innocente.

Si le Dieu clément et sage ne faisait éclater sa miséricorde pour vous, il punirait à l’instant le parjure.

Ne croyez pas que le crime du menteur retombe sur vous ; il ne vous en reviendra aucun préjudice. Personne ne sera puni que du mal qu’il aura fait. Le scélérat, chargé de forfaits, sera dévoué à l’horreur des supplices.

Lorsque vous avez entendu l’accusation[1], les fidèles des deux sexes n’ont-ils pas pensé intérieurement, ce qu’il était juste de croire ! N’ont-ils pas dit : Voilà un mensonge impudent !

Les accusateurs ont-ils produit quatre témoins ? Et s’ils n’ont pu les faire paraître, n’ont-ils pas proféré de faux sermens ?

Si la miséricorde et la bonté divine ne veillaient sur vous, ce mensonge eût attiré sur vos têtes un châtiment épouvantable. Il a passé de bouche en bouche. Vous avez répété ce que vous ignoriez, et vous avez regardé une calomnie comme une faute légère, et c’est un crime aux yeux de l’Éternel.

Avez-vous dit, lorsqu’on vous a fait ce rapport : il ne nous regarde point. Louange à Dieu ! C’est une fausseté évidente.

Dieu vous défend de retomber jamais dans une faute semblable, si vous êtes fidèles.

Il vous dévoile sa religion. Il est savant et sage.

Ceux qui prennent plaisir à publier les faiblesses des croyans, subiront un supplice affreux.

Ils seront punis dans ce monde et dans l’autre. Dieu sait et vous ne savez pas.

Rendez grâces à la bonté et à la miséricorde divine.

O croyans ! ne suivez pas les traces de Satan. Il commande à ceux qu’il a séduits, l’iniquité et l’infamie. Si la miséricorde divine ne veillait sur ses créatures, aucun de vous n’eût conservé son innocence. Dieu préserve du vice ses élus. Il sait et entend tout.

Que le riche et le puissant ne jurent jamais de ne faire aucune largesse à leurs parens, aux pauvres, et à ceux qui s’expatrient pour la défense de la foi. Qu’ils ressentent pour eux de la commisération. Qu’ils soient bienfaisans. Ne désirent-ils pas eux-mêmes, les faveurs du ciel ? Le Seigneur est clément et miséricordieux.

Ceux qui accusent faussement des femmes sages, humbles et fidèles, seront maudits dans ce monde et dans l’autre, et livrés à la rigueur des tourmens.

Un jour, leurs langues, leurs mains et leurs pieds témoigneront contre eux.

Dieu leur rendra, suivant leurs œuvres, et ils sauront qu’il est la vérité immuable.

Les femmes corrompues, et les hommes corrompus, les femmes vertueuses, et les hommes vertueux sont faits pour être unis ensemble. Ceux-ci doivent être à l’abri de la calomnie. C’est pour eux que Dieu est indulgent ; c’est pour eux qu’il fera éclater sa magnificence.

O croyans ! N’entrez pas dans une maison étrangère sans demander permission, et sans saluer ceux qui l’habitent. L’honnêteté l’exige, et vous ne devez pas l’oublier.

Quand même il n’y aurait personne, n’y entrez point qu’on ne vous l’ait permis, et si l’on vous refuse retournez-vous sur vos pas. L’équité le demande. Dieu connaît vos actions.

Mais vous pouvez entrer librement dans les édifices publics, qui vous sont de quelque utilité. Dieu sait ce que vous cachez et ce que vous produisez au grand jour.

Commande aux fidèles de contenir la licence de leurs regards et d’être chastes. Ils en seront plus purs. Dieu est le témoin des actions.

Ordonne aux femmes de baisser les yeux, de conserver leur pureté, et de ne montrer de leur corps que ce qui doit paraître. Qu’elles aient le sein couvert[2]. Qu’elles ne laissent voir leur visage qu’à leurs maris, leurs pères, leurs grands-pères, leurs enfans, aux enfans de leurs maris, à leurs frères, leurs neveux, leurs femmes, leurs esclaves, leurs serviteurs (excepté ceux qui ne leur sont pas d’une absolue nécessité), et aux enfans qui ne savent pas ce qu’on doit couvrir. Qu’elles n’agitent point les pieds de manière à laisser apercevoir des charmes qui doivent être voilés. O fidèles ! Tournez vos cœurs vers le Seigneur, afin que vous soyez heureux.

Épousez des filles fidèles. Mariez les plus sages de vos serviteurs et de vos esclaves. S’ils sont pauvres, Dieu les enrichira. Il est libéral et savant.

Que ceux que l’indigence éloigne du mariage, vivent dans la continence, jusqu’à ce que le ciel leur ait donné des richesses. Accordez à vos esclaves fidèles l’écrit qui assure leur liberté, lorsqu’ils vous le demanderont. Donnez-leur une partie de vos biens. Ne forcez point vos femmes esclaves à se prostituer pour un vil salaire, si elles veulent vivre dans la chasteté. Si vous les y contraignez, Dieu leur pardonnera à cause de la violence que vous leur aurez faite.

Nous avons envoyé du ciel des préceptes clairs, semblables à ceux que nous donnâmes aux anciens. Ils serviront d’instruction à ceux qui craignent le Seigneur.

Dieu est la lumière des cieux et de la terre. Il éclaire comme la lampe allumée dans le verre, et dont l’éclat ressemble à celui d’une étoile. Sa lumière vient de l’arbre béni, de cet olivier qui n’est ni de l’orient, ni de l’occident ; dont l’huile s’enflamme à la moindre approche du feu, et produit des rayons toujours renaissans. Par elle il conduit ceux qu’il lui plaît. Il offre des paraboles aux hommes pour les instruire. Sa science est infinie.

Dieu vous a permis d’exalter son nom dans les temples, d’y rappeler son souvenir, et de l’y louer, le matin et le soir.

Mortels, que le commerce et le soin de vos affaires, ne vous fassent point oublier le souvenir de Dieu. Faites la prière et l’aumône. Craignez le jour où les cœurs et les yeux seront dans la consternation.

Il vous donnera le prix fortuné de vos mérites. Il vous comblera de ses bienfaits. Il les dispense à son gré, et sans compte.

Les œuvres de l’infidèle ressemblent à la vapeur qui s’élève dans le désert ; le voyageur altéré y court chercher de l’eau, et lorsqu’il s’en est approché, l’illusion a disparu. Dieu rendra aux pervers suivant leurs mérites. Il est exact dans ses comptes.

Les œuvres de l’infidèle sont encore semblables aux ténèbres qui reposent dans les abîmes de la mer, couvertes de flots entassés, et de l’obscurité des nuages, ténèbres si épaisses que l’homme qui y serait plongé, aurait peine à voir son bras étendu. Celui à qui Dieu refuse la lumière est aveugle.

Ne voyez-vous pas que les cieux et la terre s’unissent pour publier les louanges de l’Éternel ? Les oiseaux dans les bois les célèbrent à leur manière. Tous les êtres créés connaissent l’hommage qu’ils lui doivent, et il sait ce qu’ils font.

Le domaine des cieux et de la terre lui appartient. Il est le terme où tout se doit réunir.

N’avez-vous pas vu comme il agite légèrement les nuages, comme il les pousse dans les airs, les rassemble, les entasse ? Alors la pluie tombe de leur sein entr’ouvert ; alors des montagnes semblent descendre des cieux. La grêle frappe où il veut. Il la détourne à son gré, et l’éclat de la foudre éblouit les faibles yeux des mortels.

La succession du jour et de la nuit est son ouvrage. C’est un prodige pour ceux qui voient. Il a formé d’eau tous les animaux. Les uns rampent sur la terre, les uns marchent sur deux pieds, les autres sur quatre. Il crée ce qu’il veut, parce que rien ne limite sa puissance.

Nous dévoilons ces merveilles à vos yeux, et le Seigneur dirige ses élus au chemin du salut.

Ils assurent qu’ils croient en Dieu et en son apôtre. Vains sermens. La plupart retournent à leurs erreurs, et n’ont point la foi.

Après en avoir appelé au jugement de Dieu et du prophète, le plus grand nombre est retombé dans l’infidélité.

Si la vérité était leur guide, ils se hâteraient de venir à lui.

Leur cœur est-il corrompu ? Doutent-ils ? Craignent-ils que Dieu et le prophète ne les trompent ? Ne sont-ils pas injustes ?

Lorsque les fidèles en appellent au jugement de Dieu et de son ministre, ils disent : Nous avons entendu, et nous obéissons. Ils jouiront du bonheur suprême.

Quiconque est docile à la voix de Dieu et du prophète, quiconque nourrit dans son cœur la crainte et la piété, sera sauvé.

Ils ont juré par le nom de Dieu, le plus saint des sermens, que, si tu leur en avais donné l’ordre, ils auraient marché au combat. Dis-leur : Ne jurez point. Votre obéissance est juste. Le Tout-Puissant pèse vos actions.

Dis-leur : Soyez soumis à Dieu et au prophète. Si vous êtes rebelles, il ne répond que de ses œuvres. Vous répondrez des vôtres. La lumière sera le prix de votre soumission. Son ministère se borne à vous exhorter au bien.

Dieu a promis à ceux qui croiront, et qui exerceront la bienfaisance, de leur accorder un empire florissant, comme il l’a accordé à ceux qui les ont précédés, d’affermir la religion qu’ils chérissent, de dissiper leurs alarmes, et d’assurer leur tranquillité. Servez-moi. Ne me donnez point d’égal. Ceux qui, après ces avertissemens, persisteront dans l’incrédulité, seront prévaricateurs.

Faites la prière et l’aumône. Obéissez à votre apôtre, afin que vous jouissiez des faveurs du ciel.

L’infidèle n’aura point sur la terre d’abri contre notre vengeance, et les flammes seront son habitation. Malheur à ceux qui y seront précipités !

O croyans ! vos serviteurs, vos esclaves et ceux qui ne sont pas parvenus à l’âge de puberté, vous demanderont la permission de paraître devant vous[3], avant la prière de l’aurore, à midi lorsque vous quittez vos habits, et après la prière du soir. Il leur sera permis de se présenter devant vous dans d’autres momens, si quelque service exige leur présence. Dieu vous déclare ses volontés. Il est savant et sage.

Vos enfans parvenus à l’âge viril, vous demanderont la même faveur, ainsi que vous le pratiquâtes envers vos pères. Le Seigneur vous dévoile ses préceptes. Il est savant et sage.

Les femmes âgées incapables de mariage, pourront quitter leurs voiles, pourvu qu’elles n’affectent pas de se montrer. Elles feront mieux de ne point user de cette permission. Dieu sait et entend tout.

Il est permis à l’aveugle, au malade, aux boiteux et à vous de manger dans la maison de vos enfans, dans celle de vos pères, de vos mères, de vos frères, de vos sœurs, de vos oncles, de vos tantes, de vos pupilles et de vos amis, ensemble ou séparément.

Saluez-vous mutuellement ; souhaitez-vous les bénédictions du ciel lorsque vous entrez dans une maison. Dieu vous explique sa doctrine afin que vous compreniez.

Les fidèles sont ceux qui croient en Dieu et à son ministre. Lorsque quelqu’affaire les rassemble dans ta maison, ils ne doivent point sortir de ta présence, sans t’en avoir demandé la permission. Ceux qui te font cette demande sont les vrais croyans. S’ils sollicitent quelque grâce, accorde-la à celui que tu en jugeras le plus digne. Implore pour eux l’indulgence du Seigneur. Il est clément et miséricordieux.

Ne parlez pas au prophète avec la familiarité dont vous usez entre vous. Dieu connaît ceux qui se retirent de l’assemblée en secret. Que ceux qui résistent à ses ordres tremblent. Les maux et les supplices sont prêts à fondre sur eux.

Dieu ne possède-t-il pas ce qui est dans les cieux et sur la terre ? Il connaît l’état où vous êtes. Un jour vous paraîtrez devant lui. Il vous montrera vos actions, parce que sa science est sans bornes.


  1. Cette accusation fut intentée contre Aïesha, épouse chérie de Mahomet, que quelques musulmans accusèrent d’avoir eu commerce avec Sawan. On peut voir ce que nous en avons dit dans la vie de Mahomet, sixième année de l’Hégire.
  2. Les femmes turques, comme nous l’avons dit, ne sortent point en public, sans être voilées. En Égypte elles s’enveloppent d’un long manteau de soie noire qui leur couvre tout le corps. Des babouges d’un cuir jaune et très-mince leur servent de chaussure. De longs caleçons et des habits traînant à terre empêchent qu’on ne leur voie la jambe ; mais comme elles ne portent point de bas, Mahomet leur défend d’agiter les pieds de manière à laisser apercevoir des charmes qui doivent être voilés. Elles paraissent toujours en public habillées avec la plus grande décence. Dans l’intérieur de leurs maisons, elles quittent tout cet attirail, et sont vêtues de la manière la plus légère.
  3. L’ancienne autorité des pères de famille, la première que les hommes ayent connue, s’est conservée dans l’Orient. Le Coran ne l’a point établie. Il n’a fait que la rendre plus sacrée. Le père de famille y jouit encore des droits que la nature lui a donnés. Il est juge et pontife. Ses serviteurs, ses enfans ne paraissent point devant lui sans sa permission. Ils doivent aller le matin, à midi et le soir lui offrir leurs services, et recevoir ses bénédictions. Il juge les différens qui naissent parmi eux, et immole les victimes du Beïram (fête des Turcs). C’est là que l’on voit des objets attendrissans. Le même toit renferme souvent quatre générations. L’extrême vieillesse, l’âge viril, la tendre enfance, y sont réunis par des liens sacrés et chéris.