Coran Savary/031

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Traduction par Claude-Étienne Savary Voir et modifier les données sur Wikidata.
G. Dufour (2p. 162-166).





LOCMAN.


donné à la mecque, composé de 34 versets
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Au nom de Dieu clément et miséricordieux.


A. L. M. Ces caractères désignent le livre du sage.

Il est le gage des faveurs divines, et la lumière des bienfaisans ;

De ceux qui, fidèles à la prière, font l’aumône, et croient à la vie future.

Ils marchent au flambeau de la foi. La félicité sera leur partage.

Il est des hommes qui, se jouant de la religion, achètent des histoires frivoles, propres à séduire leurs semblables et à les détourner du droit chemin. Une peine ignominieuse sera leur récompense.

Lis-leur un verset du Coran, ils détournent orgueilleusement la tête, comme s’ils n’entendaient pas, semblables à celui qui aurait un poids dans les oreilles ; mais annonce-leur un tourment douloureux.

Les croyans qui auront pratiqué la vertu, habiteront les jardins de délices.

Ils y demeureront éternellement. La promesse de Dieu est véritable. Il est puissant et sage.

Il a créé les cieux sans colonnes visibles. Il a posé sur la terre de hautes montagnes pour l’affermir. Il a répandu sur sa surface toutes les espèces d’animaux. Il fait descendre la pluie des cieux pour faire éclore les germes des plantes.

Voilà sa création. Montrez-moi ce que vos idoles ont tiré du néant. Les méchans sont plongés dans les ténèbres.

Nous donnâmes la sagesse à Locman, et nous lui dîmes : Rends grâces à Dieu. Celui qui chérit la reconnaissance en a le mérite pour lui. L’ingrat l’est en pure perte. Le Très-Haut est riche, et sa louange est en lui-même.

Locman[1] exhortant son fils, lui dit : O mon fils ! ne donne point d’égal à Dieu. L’idolâtrie est le plus grand des crimes.

Nous avons prescrit à l’homme des devoirs sacrés envers les auteurs de ses jours. Il a été porté avec des peines multipliées dans le sein d’une mère. Il a été allaité pendant deux ans. Mortels, soyez reconnaissans de nos bienfaits, soyez bienfaisans envers vos pères. Je suis le terme de toutes choses.

S’ils voulaient te forcer à me donner un égal, ne leur obéis pas. Sois leur compagnie dans ce monde. Rends-leur ce que tu dois à la nature, et suis le sentier de celui qui s’est converti à moi. Vous paraîtrez devant mon tribunal, et je vous montrerai vos œuvres.

O mon fils ! ce qui n’aurait que le poids d’un grain de moutarde, fût-il caché dans l’antre d’un rocher, au ciel ou sur la terre, sera produit par les mains de Dieu, parce que rien n’échappe à sa pénétration.

O mon fils ! fais la prière. Commande la justice. Empêche l’iniquité. Souffre patiemment les maux qui t’arrivent. Ils sont une suite des décrets éternels.

Ne détourne point orgueilleusement tes regards des hommes. Ne marche point avec faste sur la terre. Dieu hait le superbe et le glorieux.

Sois modeste dans ta conduite. Abaisse le son de ta voix ; la plus désagréable de toutes est celle de l’âne.

Ne voyez-vous pas que Dieu a soumis à votre usage tout ce qui est dans les cieux et sur la terre ? Il vous a comblés de dons multipliés ; cependant combien disputent de Dieu, sans être éclairés du flambeau de la science, et sans l’autorité d’aucun livre qui fasse loi.

Lorsqu’on les presse d’embrasser la religion que Dieu a envoyée du ciel, ils répondent : Nous suivons le culte de nos pères. Le suivraient-ils, si Satan les appelait au feu de l’enfer ?

Celui qui a livré son cœur à l’islamisme et à la vertu, a saisi une colonne inébranlable. Il est appuyé sur Dieu, le terme de toutes choses.

Que leur incrédulité ne t’afflige point. Ils reviendront à nous, et nous leur montrerons leurs œuvres. Dieu connaît le fond des cœurs.

Ils expieront, au milieu des supplices, quelques momens écoulés dans les plaisirs.

Demande-leur qui a créé le ciel et la terre ; ils répondent : C’est Dieu. Dis : louange à l’Éternel ! la plupart d’entre eux ne le connaissent pas.

Il possède le domaine des cieux et de la terre ; il est riche, et sa louange est en lui-même.

Quand tous les arbres seraient des plumes, quand sept océans réunis rouleraient des flots d’encre, ils ne suffiraient pas pour décrire les merveilles du Très-Haut, parce qu’il est puissant et sage.

Dieu a créé tout le genre humain[2] dans un seul homme. La résurrection universelle ne lui coûtera pas davantage. Il entend et observe tout.

Ne voyez-vous pas qu’il fait succéder la nuit au jour, et le jour à la nuit ? Il fait servir à votre usage le soleil et la lune. Tous les astres parcourent la route qu’il leur a tracée. Aucune de vos actions n’échappe à sa connaissance.

Ces merveilles s’opèrent, parce qu’il est la vérité. Les dieux que vous invoquez sont chimériques. Lui seul est le Dieu grand, le Dieu suprême.

Ne voyez-vous pas le vaisseau fendre les ondes ? Sa miséricorde le fait voguer, afin de vous donner des signes de sa puissance, signes frappans pour celui qui souffre et qui est reconnaissant.

Lorsque les flots couvrent le navire comme des montagnes ténébreuses, les mariniers invoquent le nom de Dieu ; ils lui montrent une foi sincère. À peine les avons-nous sauvés et conduits au port, que le plus grand nombre flotte dans le doute ; mais l’ingrat et l’impie nient seuls nos faveurs éclatantes.

Mortels, craignez le Seigneur, craignez le jour où le père ne satisfera point pour le fils, ni le fils pour le père.

Les promesses de Dieu sont véritables. Que les charmes de la vie mondaine ne vous séduisent pas ; que le tentateur ne vous détourne pas de la religion sainte.

Dieu s’est réservé la connaissance de l’heure. Il fait tomber la pluie. Il sait ce qui est caché dans le sein de la mère, et l’homme ignore ce qui lui arrivera demain, dans quelle terre il mourra. Mais rien n’échappe à la pénétration de Dieu.


  1. La plupart des auteurs arabes s’accordent à dire que Locman fut berger, qu’il était noir et avait de grosses lèvres. Le ciel lui avait donné l’éloquence en partage, et ses préceptes portaient avec eux la persuasion. Ils prêtent à Locman les réponses ingénieuses que l’on attribue à Ésope, et nous le peignent sous les mêmes traits. Si l’on ajoute à ces caractères de ressemblance, celle qui se trouve entre leurs ouvrages, on sera porté à croire que ces deux hommes sont le même. En effet les fables d’Ésope ne paraissent être qu’une copie de celles de Locman. De l’arabe elles ont été traduites en grec, puis en latin, et ensuite en français. Comme chaque traducteur a ajouté à l’original, des fables de son propre fonds, et conformes au génie de sa nation, c’est en rapprochant les quatre fabulistes que l’on voit la nuance du caractère des peuples où ils ont vécu. Dans l’arabe la vérité simple et nue parle aux hommes. Les Grecs lui ont ajouté quelques ornemens ; les Latins lui ont prêté la finesse, et les Français la gaîté.
      Dieu offrit à Locman la sagesse ou le don de prophétie. Il choisit la sagesse. Zamchascar.
  2. Dieu prononça le mot koun, sois fait, et le genre humain fut créé. Il le ressuscitera en prononçant le même mot. Gelaleddin.