Correspondance de Leibniz et d’Arnauld (Félix Alcan)/20

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Correspondance de Leibniz et d’Arnauld — Le Landgrave à Leibniz
Œuvres philosophiques de Leibniz, Texte établi par Paul JanetFélix Alcantome premier (p. 592-593).

Le Landgrave à Leibniz

Mon cher monsieur Leibniz.

Il a bien raison de dire cela, car si même il y avait des milliers entre les protestants, qui ne savent ce qu’est droit ou gauche, et qui ne peuvent être réputés en comparaison de savants que pour des bêtes, et qui n’adhèrent que matériellement à l’hérésie ; certes que cela on ne peut dire de vous, qui avez tant de lumière et auquel, s’il n’y avait jamais eu autre que moi seul, on a fait tout ce qu’on a pu pour vous faire sortir du schisme et vous représenter ce qu’il y a enfin à représenter. Croyez-vous bien (pour de mille ne vous dire qu’un seul article) que Christ ait ainsi constitué son Église, que ce qu’un croit blanc l’autre le croit noir, et que pour le ministère ecclésiastique il l’ait d’une telle et si faite façon contradictoire constitué, comme nous et les protestants sont en cela en débat et comme nous croyons et vous croyez. Par exemple, nous tenons tous vos ministres pour laïques et usurpateurs du ministère, et je ne sais ce que vous pouvez croire des nôtres, aux vôtres ainsi en cet article si opposés. Oh ! mon cher monsieur Leibniz, ne perdez pas ainsi le temps de grâce, « et hodie si vocem Domini audieritis, nolite obdurare corda vestra ». Christ et Belial ne conviennent ensemble non plus que les catholiques et les protestants, et je ne me saurais rien promettre de votre salut, si vous ne vous faites catholique.