Correspondance de Voltaire/1733/Lettre 365

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Correspondance de Voltaire/1733
Correspondance : année 1733GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 33 (p. 383).
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365. — Á M. DE CIDEVILLE.
Ce 26 septembre.

J’aime fort Linant pour vous et pour lui ; mais, à parler sérieusement, il n’est pas bien sûr encore qu’il ait un de ces talents marqués sans qui la poésie est un bien méchant métier ; il serait bien malheureux s’il n’avait qu’un peu de génie avec beaucoup de paresse. Exhortez-le à travailler et à s’instruire des choses qui pourront lui être utiles, quelque parti qu’il embrasse. Il voulait être précepteur, et à peine sait-il le latin. Si vous l’aimez, mon cher Cideville, prenez garde de gâter par trop de louanges et de caresses un jeune homme qui, parmi ses besoins, doit compter le besoin qu’il a de travailler beaucoup, et de mettre à profit un temps qu’il ne retrouvera plus. S’il avait du bien, je lui donnerais d’autres conseils, ou, plutôt, je ne lui en donnerais point du tout ; mais il y a une différence si immense entre celui qui a sa fortune toute faite et celui qui la doit faire que ce ne sont pas deux créatures de la même espèce. Vale, amice