Correspondance de Voltaire/1738/Lettre 986

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Correspondance de Voltaire/1738
Correspondance : année 1738GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 35 (p. 71).
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986. — À M. LE LIEUTENANT GÉNÉRAL DE POLICE[1].

C’est moi-même qui ai fait découvrir, comme vous le savez, l’édition qu’un nommé René Josse, libraire sur le pont Notre-Dame, faisait des Lettres philosophiques. Vous devez en être convaincu par les lettres qui vous sont tombées entre les mains.

Je vous ai fait remettre aussi toutes les instructions nécessaires pour les recherches de l’édition qu’on a débitée, et, de mon côté, j’ai fait promettre 500 livres de récompense à celui qui découvrirait l’éditeur. Il est certain que, depuis deux ans, je fais humainement ce qui est en moi pour supprimer ce livre.

Je suis bien malheureux qu’on ait pu m’accuser si cruellement auprès des ministres d’être moi-même l’auteur de l’édition que j’ai fait saisir. On a fait chez moi une visite qui n’a abouti qu’à ouvrir une armoire, la seule qui ait jamais été fermée chez moi, et dans laquelle on n’a trouvé que des papiers concernant mes affaires. Malheureusement, il s’en est trouvé de perdus, et cette cruelle affaire me coûtera peut-être une partie de mon bien.

Je me croirai trop heureux, et je croirai avoir beaucoup gagné, si vous daignez assurer monsieur le garde des sceaux de mon innocence, qui me paraît démontrée, au sujet de ces éditions. C’est une grâce que j’ose attendre de votre équité et de votre bonté, et dont je vous aurai toute ma vie une obligation bien sensible.

  1. Éditeur. Léouzon Leduc.