Correspondance de Voltaire/1758/Lettre 3689

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Correspondance de Voltaire/1758
Correspondance : année 1758GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 39 (p. 525-526).

3689. — DE FRÉDÉRIC II, ROI DE PRUSSE[1].
Novembre 1758.

Je ne mérite pas toutes les louanges que vous me donnez. Nous nous sommes retirés d’affaire par des à-peu-près ; mais avec la multitude de monde auquel il faut nous opposer, il est presque impossible de faire davantage : nous avons été vaincus, et nous pouvons dire, comme François Ier : Tout a été perdu, hors l’honneur[2]. Vous avez grande raison de regretter le maréchal Keith ; c’est une perte pour l’armée et pour la société. Daun avait saisi l’avantage d’une nuit[3] qui laissait peu de place au courage ; mais malgré tout cela nous sommes encore debout, et nous nous préparons à de nouveaux avancements : peut-être que le Turc, plus chrétien que les puissances catholiques apostoliques, ne voudra pas que des brigands politiques se donnent les airs de conspirer contre un prince qu’ils ont offensé, et qui ne leur a rien fait. Vivez heureux, et priez Dieu pour les malheureux, apparemment damnés, parce qu’ils sont obligés de guerroyer toujours. Vale.


Fédéric.

  1. Cette lettre, que donne Beuchot, n’est pas dans l’édition de Preuss.
  2. Ce n’est pas tout à fait l’expression de François Ier ; voyez tome XII, page 259.
  3. Vovez la lettre 3684.