Correspondance de Voltaire/1762/Lettre 5029

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5029. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
6 septembre.

Mes divins anges, je prends donc la liberté de faire mon compliment à M. le comte de Choiseul[1]. Ce compliment est court, mais il part du cœur ; et malheur aux compliments quand ils sont longs ! D’ailleurs ma fluxion ne me permet pas une éloquence bien prolixe. Je joins à mon paquet un Canning-Calas[2] qui me reste : on peut toujours le placer. J’attends avec bien de l’impatience le mémoire instructif de Mariette, et la philippique d’Élie. J’espère que cette philippique fera un très-grand effet, et qu’elle sera signée d’un grand nombre d’avocats. C’est un point important. Ces témoignages réunis tiennent lieu d’un arrêt, et dirigent celui des juges. Ah ! mes anges, que vos louanges seront chantées, quand vous aurez consommé votre bonne action !

Je vous prie de faire mes compliments à frère Berthier (quand vous le verrez) sur sa résurrection, et sur sa place de sous-précepteur[3]. Il faut espérer qu’il sera un jour un petit cardinal de Fleury.

Eh bien ! ce Henri IV[4], dont j’espérais tant, n’a pas même réussi à Bagnolet. Lekain m’en avait dit merveilles ; il m’a dit aussi miracle d’Èponine[5]. Je n’ai pas grande foi au goût de Lekain.

Les Délices sont aux pieds de mes anges.

  1. Voyez la lettre qui suit.
  2. Histoire d’Élisabeth Canning et de Jean Calas ; voyez tome XXIV, page 398.
  3. Le jésuite Berthier venait d’être nommé sous-précepteur ou adjoint à l’éducation des deux princes qui ont depuis régné sous les noms de Louis XVI et Louis XVIII.
  4. Voyez la note, page 93.
  5. Tragédie de Chabanon, qui lut jouée le 6 décembre 1762.