Correspondance de Voltaire/1765/Lettre 6128

La bibliothèque libre.
Correspondance : année 1765GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 79).

6128. — À M. COLINI.
4 octobre.

Mon cher ami, je suppose toujours[1] que milord Abingdon, qui a eu le bonheur d’aller faire sa cour à Leurs Altesses électorales, leur a rendu compte du triste état où il m’a vu. Ce n’est pas seulement la vieillesse, qui m’accable, car il y a des vieillards qui ont encore de la force ; mais je languis sous une complication de maladies qui ne me laissent aucun repos ni jour ni nuit, et qui me mènent au tombeau par un chemin fort vilain : ma seule consolation est de dicter quelquefois des fadaises, et de m’armer d’une philosophie inaltérable contre les maux qui me persécutent.

Je ne sais si Son Altesse électorale a été informée qu’on fait à Paris une très-belle estampe de la famille des Calas. On a fait une espèce de souscription pour cette estampe : elle est prête. Je ne doute pas que monseigneur l’électeur n’ait à Paris un ministre qui pourra souscrire en son nom, et lui faire parvenir le nombre d’estampes qu’il commandera ; elle vaut un écu de six livres. Je n’ose prendre la liberté d’écrire à monseigneur. Je ne me sens pas, dans l’état où je suis, assez d’esprit pour l’amuser, et je suis trop respectueusement attaché à sa personne pour l’ennuyer. Je vous prie instamment de me dire s’il prendra de ces estampes, et surtout de lui présenter les hommages du plus dévoué et du plus fidèle serviteur qu’il aura jamais.

  1. Voyez la lettre 6078.