Correspondance de Voltaire/1766/Lettre 6572

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Correspondance : année 1766GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 496-497).

6572. — À M.  DAMILAVILLE.
12 novembre.

Vous devez déjà avoir reçu, mon très-cher ami, la lettre[1] par laquelle je vous mandais que le petit ballot était parvenu à M. Boursier, par la messagerie de Lyon à Genève. Tout arrive, n’en doutez pas ; et il n’y a point de pays où le public soit mieux servi qu’en France. Tout le mal venait, comme je vous l’ai dit, de ce qu’on avait mis l’adresse à Genève, au lieu de la mettre à Meyrin, et qu’on n’avait pas envoyé de lettre d’avis pour Genève : sans ces précautions, on court les risques d’un grand retardement.

Je vous ai mandé combien la lettre de M.  Tonpla[2] avait attendri M.  Boursier. Je vous répète qu’il est bon de s’assurer de la personne[3] dont on semble trop se défier. Je vous répète que cette personne donne tous les jours des paroles positives à M.  Boursier, et que ce Boursier, en cas de besoin, pourrait faire face à tout. Il a écrit à M.  de Lemberta[4], et il attend sa réponse ; il ne fera rien sans avoir le consentement de M.  de Lemberta. Voilà tout ce que je sais.

Je vous envoie, par une autre lettre, celle que j’écrivis à M.  Hume le 24 octobre. Je vous en ai déjà adressé plusieurs exemplaires, mais je crains que M.  Janel, qui a des ordres très-positifs et très-justes de ne laisser passer aucun imprimé de Genève, n’ait confondu celui-ci avec tous les autres ; il y a pourtant une très-grande différence. Ma lettre à M.  Hume n’est qu’une justification honnête et légitime, quoique plaisante, contre les accusations d’un petit séditieux nommé J.-J. Rousseau, qui a osé insulter le roi et tous ses ministres dans tous ses ouvrages, et qui mériterait au moins le pilori, s’il ne méritait pas les Petites-Maisons. Ma lettre à M.  Hume venge la patrie.

Voici une lettre tout ouverte que je vous envoie pour Mme  de Beaumont[5]. Je vous prie, mon cher ami, de la lui faire parvenir, soit en l’envoyant à sa maison à Paris avec certitude qu’elle lui sera rendue, soit en l’adressant à sa terre de Vieux-Fumé, d’où Mme  de Beaumont a daté. Je ne sais pas où est cette terre de Vieux-Fumé[6] ; je suppose qu’elle est près de Caen ; mais, dans cette incertitude, je ne puis qu’implorer votre secours.

L’affaire des Sirven devient pour moi plus importante que jamais ; il s’agit de sauver la vie à un père et à deux filles qui se désespèrent, et qui vont suivre une femme et une mère morte de douleur. M.  de Beaumont aurait bien mieux fait de suivre cette affaire que celle de M.  de La Luzerne : il y aurait eu peut-être autant de profit, et sûrement plus d’honneur.

Mon cher ami, ne nous lassons point de faire du bien aux hommes ; c’est notre unique récompense.

  1. C’est le n° 6565.
  2. Diderot. C’est la lettre 6441.
  3. Le roi de Prusse.
  4. Cette lettre à d’Alembert manque.
  5. Elle manque aussi.
  6. Limitrophe de Canon-les-Bonnes-Gens ; voyez lettre 6528.