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Correspondance de Voltaire/1772/Lettre 8657

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Correspondance : année 1772GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 48 (p. 196-197).
8657. — À M. MARIN[1].
23 octobre.

Voici, mon cher ami, de nouvelles Probabilités[2] qui m’ont paru nécessaires. Il s’agit de bien distinguer ici la forme du fond, et l’arrêt qui dépend des juges, de l’honneur qui n’en dépend pas. Il est certain que la prévention est contre M. de Morangiés ; mais il me paraît, à moi, très-certain qu’il ne peut être coupable.

Ce qui frappe le plus les juges, c’est le mystère qu’il a voulu mettre à un emprunt considérable qui ne se peut jamais faire secrètement. Ses billets d’ailleurs parlent contre lui, et, si des témoins qu’il est difficile de convaincre persistent à déposer en faveur des Du Jonquay, je ne vois pas qu’il puisse gagner sa cause. Mais il ne faut pas qu’il la perde au tribunal du public.

Je crois donc qu’il est de la dernière importance de séparer bien nettement son honneur de ses cent mille écus. J’espère toujours qu’il ne sera pas condamné à payer ce qu’il ne doit point. Mais enfin ce malheur peut arriver, et il faut le prévenir. Je crois que c’est le tour le plus favorable qu’on pourrait prendre, et que cette manière d’envisager la chose peut servir même auprès des juges, comme auprès de tous ceux qui ne sont pas instruits.

Le plus grand avantage de ce mémoire, c’est qu’il est très-court. Les longs plaidoyers fatiguent tous les lecteurs. J’en enverrai autant d’exemplaires qu’on voudra, vous n’avez qu’à parler.

J’attends le Dépositaire. Je ne sais ce que c’est qu’Albert et Adeline[3]. Le doyen des clercs[4] et sa sœur vous font les plus tendres compliments. Je recommande les incluses à vos bontés.

  1. Éditeurs, Bavoux et François.
  2. Voyez tome V.
  3. Pièce en trois actes et en vers libres, de Leblanc.
  4. L’abbé Mignot.