Cours d’agriculture (Rozier)/BAIN (supplément)

La bibliothèque libre.


BAIN, (Hygiène et Médecine vétérinaire.) Nous distinguons les bains en bains naturels et artificiels, en bains froids et chauds, parmi lesquels nous comprenons les bains de vapeur et les bains de fumier. Le bain est d’ailleurs local, ou est général, selon que tous le corps des animaux y est plongé ou seulement une partie. Le bain général, froid ou naturel, se prend dans une rivière, un étang, un lac, ou dans la mer. On voit des chevaux, des chiens, et sur-tout des cochons, prendre un grand plaisir à se baigner, au point de se coucher, de se vautrer même dans une petite quantité d’eau. Ceux qui sont fatigués sont portés à se baigner avec encore plus d’empressement. La légèreté, la vivacité, la gaîté dont ils jouissent après le bain, prouvent qu’il leur a été très-salutaire : il est donc avantageux de leur permettre d’en user. Cependant le bain leur seroit dangereux, s’ils n’avoient soin de se sécher aussitôt après ; aussi les voit-on se secouer, se frotter, se rouler sur la litière, et, à son défaut, sur le sol poudreux. Il faut donc avoir l’attention de sécher le corps des animaux, et du cheval sur-tout, au sortir du bain, en abattant l’eau avec le couteau de chaleur, en les bouchonnant fortement et long-temps, en couvrant le corps de litière fraîche, par-dessus laquelle on étend une couverture de laine qu’on fixe avec un ou deux surfaix. Une autre attention très importante, c’est de renfermer l’animal dans une écurie bien sèche, ; et, si le temps est beau, il vaut encore mieux le promener au pas, jusqu’à ce que le poil et la peau soient parfaitement séchés. Après un vif exercice, quand les animaux sont couverts de sueur, le bain naturel a grande eau n’a de mauvais effets que par un séjour trop long-temps continué dans l’eau, ou parce qu’elle est très-froide, ou bien par défaut de soins après le bain.

L’animal ne doit rester au bain que quelques minutes, dans cette circonstance, et, de plus, on doit sans cesse l’y tenir en action.

Les bains de rivière, envisagés comme remèdes, s’emploient particulièrement pour prévenir la pléthore sanguine et les inflammations externes ; par exemple, dans, l’invasion de la fourbure, les entorses, les tiraillemens de tendons, la nerferrure, les foulures, etc. L’usage que les bergers en font, lorsque les moutons sont gonflés ou météorisés, ou atteints de la maladie rouge, est assez constamment mortel. (Voyez Indigestion, Maladie Rouge.)

Le volume peu considérable, du corps permet d’administrer facilement aux petits animaux des bains chauds généraux ou universels. Ils les prennent dans des terrines, des seaux, des baquets et des cuves. Mais la difficulté de se procurer des vases assez grands et assez solides est cause qu’on ne fait prendre communément aux grands animaux que le bain général naturel, ou froid.

Les bains d’eau tiède sont d’un usage très-étendu dans la médecine vétérinaire ; les maladies qui en demandent le plus fréquemment l’emploi sont la gale, le rouvieux et les dartres ; on les compose d’eau dans laquelle on a fait bouillir du son ; on y baigne les petits animaux tout entiers ; on en lave les parties affectées des grands animaux avec une éponge ; on les frotte avec des bouchons de paille, des brosses ; on presse fortement les plis de la peau pour en faire sortir l’humeur qui y séjourne ; on réitère ces actions lors de chaque bain, et on les continue les jours suivans, jusqu’à ce que la peau ait repris sa souplesse. (Voyez Gale, Dartres, Rouvieux.)

Les bains de vapeur remplacent pour les grands animaux le bain tiède général. Pour cela, on couvre l’animal d’une ou de deux grandes couvertures de laine, qui embrassent l’encolure et la croupe, et pendent jusqu’à terre. On place ensuite une chaudière pleine d’eau bouillante sous le ventre de l’animal, et, quand elle se refroidit, on la remplace par une autre chaudière chaude au même degré. Cette chaudière doit être assujettie, de crainte que l’animal ne la renverse, et couverte d’un grillage de fer ou de bois, de peur qu’il n’y plonge un de ses pieds ; ce qui est arrive quelquefois, et a donné lieu à des brûlures graves. Ce bain doit durer une heure environ. Les bains tièdes ouvrent les pores de la peau, l’assouplissent, diminuent la tension des flancs, favorisent la sécrétion et l’excrétion des urines et de la transpiration ; il diminuent l’irritation des parties génitales, et modèrent les fureurs utérines qui s’opposent à la fécondation des femelles. (Voy.Fureurs utérines.)

Lorsque la transpiration souffre depuis long-temps, par exemple, dans les maladies chroniques cutanées, principalement dans celles des membres, on a recours aux bains de fumier. Ils se composent d’un tas de fumier arrangé d’avance à la manière des couches que font les jardiniers ; on laisse fermenter cette couche, et, quand la chaleur y est développée, on l’ouvre, on y abat l’animal, on le recouvre avec le fumier chaud ; la tête seule, et sur-tout les naseaux restent à l’air. On seconde l’action, du bain par un breuvage sudorifique donné tous les quarts d’heure. On retire l’animal au bout d’une heure ou cinq quarts d’heure, suivant le cas et la force du sujet ; on le rentre à l’écurie, on le bouchonne fortement et long-temps ; on le couvre de paille et de couvertures, ou on le promène au pas étant couvert.

Les bains locaux ou particuliers sont d’un usage moins étendu ; ils consistent à laisser tremper la partie dans l’eau. Ces bains froids peuvent encore être rendus plus actifs, en les faisant prendre dans un vase, et en y ajoutant des sels. Ils conviennent dans les premiers momens qui suivent les efforts, les contusions : ils doivent cesser lorsque la douleur se développe ; alors la partie réclame des bains d’eau tiède et des cataplasmes émolliens ou anodins, dans les intervalles des bains. Si la sole se trouvoit trop dure, trop épaisse, il faudroit la raser jusqu’à ce qu’elle soit souple dans tous les points ; ce qui diminue la douleur et contribue aussi aux bons effets du bain. Pour faire prendre aux chevaux et aux bœufs des bains de pieds, nous avons des vases forts, carrés, étroits du bas et larges du haut, avec un fond très solide, que l’on emplit à la hauteur convenable, et dans lesquels on place le membre, après qu’on y a mis le liquide qui compose le bain. On peut remplacer ces vases par de grands seaux ou des barriques sciées à hauteur proportionnée. Mais il faut mettre sous le fond des planches qui portent contre terre, pour éviter que l’appui du pied, venant à porter tout le poids du corps, ne défonce le bain. On fait aussi entrer dans les bains des aromates, du vinaigre, etc. Voyez les maladies qui en exigent l’emploi. (Ch. et Fr.)