Cours d’agriculture (Rozier)/PITUITE

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Hôtel Serpente (Tome septièmep. 743-744).
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PITUITE. Médecine Rurale. Humeur épaisse, visqueuse & gluante, qui dérive de la partie lymphatique du sang, épaissie, qui s’amasse en abondance dans le corps, & que l’on rejette par la salive.

Différentes causes peuvent épaissir la lymphe, & donner naissance à la pituite, comme l’usage des acides trop forts, les mets salés, épicés & de haut goût ; l’ivrognerie, l’excès des boissons échauffantes, une vie trop molle & trop sédentaire, le trop long repos, les différentes passions de l’ame, sont très-propres à donner une consistance trop forte à la lymphe, & à la faire dégénérer en humeurs pituiteuses.

On sait que les vieillards, les gros mangeurs, & les gens d’un tempérament sec sont pour l’ordinaire pituiteux ; mais en général, les hommes se ressentent plus de la surabondance de cette humeur, que les personnes du sexe.

Les habitans voisins des étangs, des marais, ou des fleuves considérables, sont assez ordinairement pituiteux, & sont obligés de fumer du tabac, ou d’en mâcher tous les matins, afin de se délivrer des différentes incommodités que la pituite leur causeroit.

Ceux qui sont sujets à la pituite, doivent éviter toute espèce d’excès dans le boire & le manger ; ils changeront d’air, ils iront en respirer un plus sec, plus sain & plus frais.

Ils s’abstiendront de manger des substances mucilagineuses, telles que les différentes crêmes de riz, d’orge, de gruau, d’avoine, de sagou ; ils doivent aussi s’interdire toute boisson gélatineuse, acide, qui peut coaguler la lymphe, & augmenter l’humeur pituiteuse. Quand elle sera trop abondante chez eux, ils auront recours aux diaphorétiques & diurétiques légers, sans perdre néanmoins de vue les purgatifs qu’on doit combiner avec différens stomachiques, tels que l’énulla campana, la gentiane, & d’autres substances amères.

On prescrira les diurétiques sous la forme des bouillons, & si le relâchement des fibres de la constitution entretenoit cette dégénération de la lymphe, on y combineroit certaines préparations de fer, telles que le tartre calibé, le safran de mars apéritif, ou la teinture de mars tartarisée.

Le petit lait nitré, pris en abondance dans le jour, comme boisson ordinaire, seroit très-propre à délayer la lymphe, à en adoucir l’âcreté, & à lui redonner sa fluidité naturelle. Si c’est au défaut de transpiration insensible qu’on doive attribuer la cause de l’abondance de la pituite dans le corps, on rapellera cette excrétion si nécessaire à l’économie animale, en donnant aux malades une légère infusion de fleurs de coquelicot, ou de tiges d’angélique avec la fleur de sureau adoucie avec le miel de Narbonne. Il faut encore les exhorter à se brosser le corps deux fois par jour, matin & soir, devant le feu, si c’est en hiver ; je ne connois pas de moyen plus énergique pour rappeler l’humeur de la transpiration, du centre à la circonférence. M. AMI.