Cours d’agriculture (Rozier)/ROMARIN

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Hôtel Serpente (Tome huitièmep. 617-618).


ROMARIN. Tournefort le place dans la troisième section de la quatrième classe des herbes à fleur d’une seule piéce en lèvres, dont la supérieure est retroussée, & il l’appelle Rosmarinus hortensis, angustiore folio. Von-Linné le classe dans la diandrie monogynie, 8€ le nomme Rosmarinus officianilis.

Fleur ; en lèvres ; la lèvre supérieure retroussée, échancrée, renversée ; l’inférieure découpée en trois parties, dont celle du milieu est creusée en cuiller. La fleur n’a que deux étamines recourbées, plus longues que la lèvre supérieure ; les autres fleurs en lèvres, en ont quatre.

Fruit, quatre semences jointes ensemble, ovales, renfermées dans le calice.

Feuilles, simples, très-entières, linéaires, repliées par les bords, adhérentes aux tiges. Les feuilles plus larges ou panachées ne sont que de simples variétés.

Racine, menue, fibreuse, ligneuse.

Port ; tige de trois ou quatre pieds au moins, & même dont on se sert pour couvrir des berceaux dans les provinces méridionales ; divisée en plusieurs rameaux longs, grêles, articulés. Les fleurs naissent des aisselles des feuilles, & les feuilles sont opposées.

Lieu ; l’Espagne, nos provinces méridionales, l’Italie. Il fleurit en mai & juin.

Propriétés ; les fleurs ont une odeur aromatique forte, & une saveur médiocrement âcre ; l’odeur des feuilles est moins forte, & leur saveur est âcre & amère. Les fleurs & les feuilles échauffent beaucoup, raniment les forces vitales & musculaires, constipent, altèrent ; rarement elles détruisent les tumeurs musculaires chez les enfans. L’eau distillée de romarin ne l’emporte dans aucune espèce de maladie sur la plus légère infusion des feuilles ; elle ranime à peine les forces vitales. La conserve de romarin fatigue souvent l’estomac, échauffe beaucoup plus que l’infusion. Le miel de romarin convient dans l’asthme pituiteux, & sur la fin de la toux catarrhale ; c’est en grande partie avec cette plante que l’on fait l’eau de la reine d’Hongrie.

Culture ; dans les provinces du midi, où la grande chaleur ne permet pas de cultiver la charmille, le troène, &c. à moins qu’on ne puisse les arroser souvent & abondamment ; on fait des hauteurs d’appui avec le romarin, on en tapisse les murailles, quoi que la verdure en soit un peu noire. Les abeilles recherchent avec avidité le miel contenu dans ses fleurs.

Dans les provinces du nord du royaume, il demande une exposition méridionale, & les romarins à feuilles panachées y deviennent les victimes des gelées lorsqu’elles sont un peu fortes. Ce fait prouve que la panachure des feuilles est une véritable altération de leur parenchyme, & une vraie maladie dans les plantes : cependant ces variétés, qui ne m’ont jamais plu, sont fort recherchées par les amateurs.

On fait d’assez jolies bordures en plantant à côté l’un de l’autre un pied de romarin & un pied de santoline ou garde-robe (voyez ce mot), & ainsi de suite. Le vert foncé du romarin contraste singulièrement avec le vert blanc de la santoline, & la totalité forme un ruban assez agréable à la vue : ce ruban demande souvent à être renouvelé, c’est-à-dire tous les trois ou quatre ans, parce que la végétation de ces deux arbrisseaux est très-inégale. Le pied de romarin dévore bientôt la subsistance de son voisin.

On multiplie le romarin par graines, ce qui est très-long ; par boutures tenues à l’ombre & souvent arrosées, & bien plus facilement par les rejets qu’il pousse du pied.