Cours d’agriculture (Rozier)/AN, ANNÉE

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Hôtel Serpente (Tome premierp. 510).


AN, ANNÉE. Tems pendant lequel le soleil parcourt les douze signes du Zodiaque, qui correspondent à chacun des douze mois : annus fructificat, non terra, observe judicieusement M. l’abbé Toaldo, dans son excellent Essai de Météorologie appliquée à l’Agriculture. En effet, la terre la plus profondément labourée, la mieux préparée, la mieux fumée, offrira pendant quelques mois des blés superbes : des pluies trop abondantes & trop soutenues font pourrir les plantes ; les dégels & les gelées successives produisent le même effet ; & ce champ, si brillant avant l’hiver, ne présente plus, au retour du printems, que le triste spectacle d’une récolte perdue. Que la plante n’ait point été endommagée avant & pendant l’hiver, il ne faut qu’une sécheresse, lorsque le blé monte en épi, que des pluies fréquentes lorsqu’il fleurit, qu’un orage & des vents impétueux lorsque le grain approche de sa maturité, pour coucher les tiges ; & si des pluies succèdent au versement des blés, la récolte est presque perdue. Ceux qui mangent du pain dans le sein des grandes villes, au milieu de l’abondance, ne peuvent avoir aucune idée de l’inquiétude perpétuelle du cultivateur, & des dangers sans cesse renaissans auxquels les moissons sont exposées. Le mal n’est pas sous leurs yeux, dès-lors ils n’y pensent pas, ou s’ils en sont affectés, c’est d’une manière si vague, si légère, que leur apparente sensibilité ne les portera pas à soulager les malheureux. L’époque de la fleuraison ou fécondation du grain dans tous les végétaux quelconques, & l’état où ils se trouvent à cette époque, forment le moment critique, & c’est de lui, en général, que dépend l’abondance. Quant à la qualité, elle tient essentiellement à la maturité du grain & aux alternatives qu’il éprouve avant d’y parvenir. Ce que l’on dit des grains, s’applique à la vigne, à l’olivier, aux arbres fruitiers, &c. La constitution de l’air, & des météores, dans le cours des douze mois, concourt plus pour l’abondance, que le grain de terre & le travail qu’on lui a donné. Il ne faut pas conclure de cet axiome, qu’on doit peu cultiver ses champs, & que l’année fait tout ; cette logique seroit détestable & ruineuse.