Critique de la raison pure (trad. Barni)/Tome I/Théorie élémentaire/P2/PREM DIV./L2/Ch2/S3/4./Réfutation idéalisme

La bibliothèque libre.
Traduction par Jules Barni.
Édition Germer-Baillière (1p. 285-286).

Réfutation de l’idéalisme

L’idéalisme (j’entends l’idéalisme matériel) est la théorie qui déclare l’existence des objets extérieurs dans l’espace ou douteuse et indémontrable, ou fausse et impossible. La première doctrine est l’idéalisme problématique de Descartes, qui ne tient pour indubitable que cette affirmation empirique (assertio) : je suis ; la seconde est l’idéalisme dogmatique de Berkeley, qui regarde l’espace avec toutes les choses dont il est la condition inséparable comme quelque chose d’impossible en soi, et par conséquent aussi les choses dans l’espace comme de pures fictions. L’idéalisme dogmatique est inévitable quand on fait de l’espace une propriété appartenant aux choses en soi ; car alors il est, avec tout ce dont il est la condition, un non-être[ndt 1]. Mais nous avons renversé le principe de cet idéalisme dans l’esthétique transcendentale. L’idéalisme problématique, qui n’affirme rien à cet égard, mais qui seulement allègue notre impuissance à démontrer par l’expérience immédiate une existence en dehors de la nôtre, est rationnel et annonce une façon de penser solide et philosophique, qui ne permet aucun jugement décisif tant qu’une preuve suffisante n’a pas été trouvée. La preuve demandée doit donc établir que nous n’imaginons pas seulement les choses extérieures, mais que nous en avons aussi l’expérience ; et c’est ce que l’on ne peut faire qu’en démontrant que notre expérience intérieure, indubitable pour Descartes, n’est possible elle-même que sous la condition de l’expérience extérieure.



Notes de Kant[modifier]


Notes du traducteur[modifier]

  1. Ein Unding.