Antoine (rue Saint-).
Elle doit son nom à l’abbaye Saint-Antoine, à laquelle elle conduisait. Aux XIIIe et XIVe siècles, la partie qui s’étend de la rue des Barres à celle Culture-Sainte-Catherine se nommait rue de la Porte-Baudel parce qu’elle conduisait à cette porte d’enceinte, située en face de la rue Culture-Sainte-Catherine. On l’appelait aussi de l’Aigle, d’une maison située au coin de la rue de Jouy. Au milieu du XIVe siècle, de la porte Baudet à la porte Saint-Antoine, on la désignait sous le nom de rue du Pont-Perrin, dénomination qu’elle tirait d’un hôtel.
Une ordonnance royale du 4 août 1838 a fixé la moindre largeur de cette voie publique à 12 m. 50 c. Les maisons ci-après sont alignées : 51, 69, 85, 109, 113, 115, 133, 135, de 173 à 183 inclusivement, 203, 205, 209, 219 ; 22, 42, 56, 58, 132, 134, 136, 138, 170, 172 ; et de 180 à 208 inclusivement. — Égout depuis la place Baudoyer jusqu’à la rue Tiron, et depuis la rue Fourcy jusqu’à la place de la Bastille. — Conduite d’eau. — Éclairage au gaz (compe Parisienne).
Dans cette rue, près la première porte ou bastille Saint-Antoine, fut massacrés le fameux Étienne Marcel, prévôt des marchands. Le peuple, dont il avait été l’idole, finit par le détester, lorsque ce prévôt donna au roi de Navarre, Charles-le-Mauvais, le titre de gouverneur de Paris. Le Dauphin, depuis Charles V, sut profiter habilement de l’animosité des Parisiens, en leur faisant promettre une amnistie, s’ils lui livraient Marcel et douze de ses complices. Le prévôt, pénétrant ce dessein, se décide à livrer la ville au roi de Navarre et lui promet, en outre, de le faire couronner roi de France, s’il veut le protéger contre les fureurs de ce peuple détrompé. Il prend toutes les mesures nécessaires pour parvenir à son but, et fait avertir Charles-le-Mauvais, qui s’approcha secrètement de Paris, suivi d’un corps de ses meilleures troupes. Dans l’après-midi du dernier jour de juillet 1358, Marcel veut s’assurer des portes de Paris pour en confier la garde à des hommes dévoués. Il se dirige vers la porte ou bastille Saint-Denis, ordonne à ceux qui la gardent d’en remettre les clefs à Joceran de Mascon, trésorier du roi de Navarre. On refuse de lui obéir, une altercation s’élève, le bruit attire le commandant du quartier, c’était Jean Maillard. « Estienne, lui dit-il, que faites-vous ici à cette heure ? — Jean, répondit le prévôt, à vous qu’importe de le savoir ; je suis ici pour prendre garde à la ville dont j’ai le commandement. — Pardieu, reprit Maillard, il n’en va mie ainsi, ains n’êtes ici à cette heure pour nul bien et je vous montrerai, continua-t-il en s’adressant à ceux qui l’entouraient, comme il tient les clefs en ses mains pour trahir la ville. — Jean, vous mentés, s’écria le prévôt. — Mais vous, Estienne, mentés, s’écria Maillard. » Aussitôt ce dernier monte à cheval, fait flotter la bannière de France, et suivi des siens, parcourt les rues en s’écriant : « Montjoie ; Saint-Denis au Roi et au Duc !… » Il annonce sur son chemin que Marcel veut ouvrir les portes aux troupes anglaises et navarraises, et arrivé ainsi aux halles où un attroupement se forme. Cependant le prévôt des marchands n’ayant pu obtenir les clefs de la porte Saint-Denis, s’adresse aux autres gardes, il essuie partout les mêmes refus. Sans se décourager, il se rend alors à la porte Saint-Antoine pour renouveler ses instances. Dans le même moment, quelques partisans du Dauphin, profitant de cet événement, avaient pris les armes et marchaient vers l’hôtel de Joceran de Mascon, situé près de Saint-Eustache, dans le dessein de se défaire de ce trésorier ; ne l’y trouvant pas ils vont à l’hôtel Saint-Paul, prennent une bannière de France, et se dirigent ainsi vers la porte Saint-Antoine. Deux gentilhommes étaient à leur tête, Pépin des Essarts et Jean de Charny. Arrivés à cette bastille, ils y trouvent Maillard disposé à leur prêter main-forte. Marcel, tenant en main les clefs de cette porte et monté sur l’escalier, oppose quelque résistance. Bientôt on entend ces cris : « À mort ! à mort ! Tuez le prévôt des marchands et ses complices ! » Marcel effrayé veut fuir ; alors Jean de Charny s’avance lui porte un coup de hache d’armes, et le peuple l’achève ! Les compagnons du prévôt, tels que Philippe Guiffard, Jean de Lille, Jean Poiret, Simon le Péronier, éprouvent le même sort. Tous ceux qui, au nombre de cinquante-quatre, accompagnaient Marcel sont massacrés. Leurs corps furent trainés honteusement devant l’église Sainte-Catherine du Val-des-Écoliers et exposés aux mêmes insultes que Marcel et ses complices avaient prodiguées aux cadavres du comte de Clermont et de Jean de Conflans.
Ce fut encore dans la rue Saint-Antoine que le roi Henri II fut blessé à mort par le comte de Montgommery, dans un tournoi dont le spectacle fut offert aux Parisiens le 29 juin 1559. Ce monarque, porté sans connaissance au palais des Tournelles, vécut encore quelques jours, mais dans une léthargie complète ; il mourut enfin le 10 juillet 1559, et laissa son royaume livré à toutes les horreurs de la guerre civile.