Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/APOCYN

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 409-410).

APOCYN. s. m. Apocynum. Genre de plante, qui comprend beaucoup d’espèces tirées la plupart de l’Amérique. Celle qui nous est la plus commune vient de Canada, où elle est appelée Herbe de la ouate, ou le cotonnier. Ses racines sont blanchâtres, grosses comme le doigt, tracent & s’étendent fort loin. Elles donnent aux pointes plusieurs tiges hautes de six à sept pieds, garnies de feuilles opposées deux à deux, longues de six pouces sur moitié moins de largeur, & d’un vert pâle. Ses fleurs naissent par bouquets à l’extrémité des tiges & d’entre les feuilles. Elles sont soutenues chacune par des pédicules grêles & longs de deux pouces & demi. Chaque fleur est une cloche purpurine, renversée, rabattue en dehors, & découpée en cinq parties ; de son milieu s’élève un chapiteau formé par cinq cornets disposés en rond. Le chapiteau reçoit dans son centre le pistil, qui devient une vessie pointue, longue de trois à quatre pouces, & large de deux, arrondie, dans laquelle sont renfermées des semences appliquées les unes sur les autres, & chargées d’une aigrette fine & argentée. C’est de cette aigrette qu’on fait en Canada une ouate. Ces fleurs sont remplies d’une liqueur mielleuse qui attire les mouches, & elles y sont souvent prises & arrêtées, comme les oiseaux à la glu. De cette liqueur mielleuse on fait en Canada une espèce de syrop, qu’on réduit même en consistance de sucre. L’apocyn donne un suc laiteux en quelque endroit qu’on y fasse une incision. On a cru qu’il étoit pernicieux aux chiens, & c’est d’où vient son nom, de ἀπό, & de ϰύων, ϰύνος, comme si on vouloit dire que cette herbe éloigne les chiens. Il y en a une autre espèce qui a ses fleurs comme le muguet, & ses feuilles semblables à celles de la toute-saine, l’apocyn s’appelle encore cynanchon, cynomeron, & cynocrambe, mort aux chiens. Il jette des branches, longues pliantes, & très-difficiles à rompre. Ses feuilles ressemblent à celles du lierre ; mais elles ont l’odeur plus forte, & sont remplies d’un suc qui approche du miel. Son fruit est couvert d’une cosse semblable à celle des féves ; il est de la longueur du doigt, a la forme d’une gaîne, & renferme une semence petite, dure & noire. Ses feuilles étant mêlées avec de la farine, & réduites en forme de pain, tuent les chiens, les loups, les renards & les panthères qui en mangent, & leur causent, selon Dioscoride, sur le champ une paralysie vers les lombes. Selon Pline, sa semence prise dans du vin, guérit la pleurésie & toutes les douleurs de côté, de quelque espèce qu’elles soient. Dict. de James.